Premier entretien de Mgr Bernard Fellay, supérieur général réélu de la Fraternité Saint Pie X,
et de MM. les abbés Niklaus Pfluger et Alain-Marc Nély, élus 1er  et 2nd  assistants.

Abbé Alain Lorans : Monseigneur Bernard Fellay, en ce mardi 11 juillet 2006, au séminaire d’Ecône, les quarante capitulants - qui étaient réunis et qui sont encore réunis car le chapitre se poursuit tout au long de cette semaine - viennent de vous réélire supérieur général. Vous aviez été élu il y a douze ans et vous êtes aujourd’hui élu pour douze ans. Personne, dans la Fraternité, n’est candidat, on ne postule pas et il n’y a pas de campagne. Mais est-ce que vous vous y attendiez ? Quelle impression cela vous fait-il ? Est-ce que vous y voyez une marque de confiance ? Est-ce que vous vous dites : « Encore des responsabilités ! » ?

Mgr Bernard Fellay : C’est certainement une marque de confiance ! Mais plus précisément tous les douze ans il y a une élection pour laquelle les membres du chapitre ont fait le même serment d’élire celui qu’ils estiment devoir régir la Fraternité devant le Bon Dieu ; c’est donc certainement une marque de confiance. Bien sûr, la question est un peu difficile, on ne peut pas trop parler de soi ou pour soi. Évidemment après douze ans on se dit que l’on va pouvoir se reposer un peu, car cette charge n’est pas légère. Eh bien, ma foi, on est reparti pour un tour… (rires)

A.L. : Mais vous avez de l’aide. Vous avez deux assistants…

Mgr F. : … et j’en suis très heureux.

A.L. : Justement, vos assistants, qu’est-ce que vous attendez d’eux statutairement ? et vous-même personnellement qu’attendez-vous d’eux ?

Mgr F. : Statutairement, les assistants assistent ! On leur demande de conseiller. Ils forment avec le supérieur général le conseil général. Ils ont le rôle d’aider à la conduite de la Fraternité. C’est vrai que l’Église insiste beaucoup sur la responsabilité personnelle. L’Église non seulement est hiérarchique, mais elle est monarchique. Il y a vraiment une responsabilité qui repose sur une personne. Cependant, l’Église est prudente et elle sait très bien qu’il faut flanquer cette autorité de protections, de secours, d’adjuvants… des aides pour ce gouvernement. On sait bien que quatre ou six yeux valent mieux que deux. Cela permet un regard sur les choses beaucoup plus riche que si l’on était tout seul. Et d’ailleurs pour les décisions importantes, là aussi, l’Église exige dans les sociétés comme les nôtres une décision du conseil. A ce moment-là, les assistants ont leurs voix qui comptent et qui pèsent pour la validité des actes. Quand on cherche dans le droit quelle est la fonction spécifique de l’assistant, du conseiller on ne trouve pas grand chose. On voit qu’il faut qu’ils assistent, et c’est donc très vaste. Je pense qu’on veut laisser une grande liberté d’action et d’interaction - entre le supérieur et ses assistants - pour la bonne marche de la société.

A.L. : Monsieur l’abbé Niklaus Pfluger, vous venez d’être élu premier assistant de la Fraternité Saint-Pie X. Vous êtes né en 1958, vous avez été ordonné en 1984, vous avez occupé plusieurs postes, vous avez été prieur à Bâle, vous avez été supérieur du district de Suisse en 1989, supérieur du séminaire de Zaitzkofen en 1991, vous êtes ensuite à nouveau supérieur du district de Suisse et, depuis 2004, vous êtes supérieur du district d’Allemagne. Aujourd’hui est-ce que vous vous dites : « Maintenant que je suis assistant général auprès du supérieur général, qu’est-ce que je peux faire ? »

Abbé Niklaus Pfluger : Tout d’abord c’est une surprise ! Mais je crois que toutes ces années de supériorat m’ont donné une certaine expérience vis-à-vis des prêtres, j’ai vu les besoins, les soucis des prêtres. Et si je peux conseiller maintenant à la Maison Généralice, en puisant dans cette expérience, je pense que cela peut être une aide pour la Fraternité.

A.L. : Certainement… Vous-même de ces années de ministère et de responsabilités, quels souvenirs gardez-vous, quel a été le ministère le plus intéressant pour vous ?

N.P. : Je dois avouer que le temps le plus beau était d’être prieur, là on pouvait travailler avec la charge des fidèles. Mais ma première année a été la plus importante. J’étais en second avec le père Kocher, et là j’ai fait connaissance d’une maison très ordonnée, ponctualité…, vivre les statuts de la Fraternité…, je pense que cela m’a beaucoup marqué, l’importance du prieuré, de la vie de communauté. Et après il y a eu ces années de supériorat. J’étais très jeune, mais avec mes nombreuses mutations j’ai quand même vu un peu tous les côtés : l’importance des séminaires, les problèmes des prieurs, des fidèles, des jeunes prêtres qui sont un peu perdus dans le monde. Alors, cela me donne une certaine compréhension de ce qui est le plus important pour la Fraternité, à savoir de faire cette harmonie - comme disait Mgr Lefebvre - entre la perfection des prêtres, la sanctification des prêtres et l’apostolat. Je crois que c’est cela le plus important pour la Fraternité de trouver l’harmonie entre ces deux éléments qui sont le but de tous les instituts, de toutes les congrégations de prêtres.

A.L. : Un grand merci, et bonne chance !

N.P. : Merci, et priez pour nous !

A.L. : Je me tourne maintenant vers le deuxième assistant qui a été élu aujourd’hui, Monsieur l’abbé Alain-Marc Nély. Vous êtes né en 1950, vous avez été ordonné prêtre en 1985, vous avez été directeur-adjoint, professeur de philosophie à l’école St Joseph des Carmes, dans l’Aude. Puis de 1994 à 2004 prieur-doyen à Marseille. Et depuis 2004 vous êtes supérieur du district d’Italie. Je vous pose la même question qu’à M. l’abbé Pfluger : Qu’est-ce que vous retenez de ces années de sacerdoce, qu’est-ce qui vous a été le plus enrichissant ?

Abbé Alain-Marc Nély : L’expérience tout d’abord avec la jeunesse ! l’enseignement, transmettre ces valeurs que nous avons reçues au séminaire, à travers la matière que j’ai enseignée pendant ces dix années… surtout peut-être les cours annexes de doctrine qui, à mon avis, étaient - pour le prêtre que je suis - les plus importants. Ensuite le contact avec un autre mode d’apostolat, l’apostolat dans une ville de France, du sud de la France, très vivante, avec une très belle église, un prieuré assez important et un nombre de fidèles suffisamment important aussi pour donner à toutes les cérémonies le maximum d’éclat, avec des participants dans la liturgie, dans la chorale, dans les processions. Cela a été pour moi un grand réconfort. Et la dernière mutation, en Italie, a été l’occasion de me mettre au service de mes confrères plus particulièrement. Et, je pense, pour les prêtres de la Fraternité, puisque Mgr Lefebvre a voulu la Fraternité pour le prêtre… C’était déjà de la part des supérieurs une marque de confiance qui m’a été renouvelée par mes confrères par le choix qu’ils ont fait aujourd’hui. Je pense qu’effectivement c’est un peu un sommet de pouvoir consacrer sa vie sacerdotale au service de ses confrères.

A.L. : Vous même quand vous étiez à ces postes, vous vous disiez « Ah ! si les supérieurs savaient… », et maintenant vous êtes assistant du supérieur, vous pouvez. Qu’est-ce que vous allez faire ?

A-M.N. : On essaiera de faire au mieux (rire). Je pense que les supérieurs ont beaucoup à faire et que la Fraternité s’est beaucoup développée dans ces dernières années. Donc je pense qu’ils sont tout à fait excusables de ne pas avoir pu faire ce qu’ils auraient peut-être voulu faire, au moment où ils auraient dû le faire.

A.L. : A vous aussi, merci, Monsieur l’abbé. Nous prierons pour vous.

Le prochain numéro de Nouvelles de Chrétienté (n°100, juillet-août 2006) offrira, avec un entretien de Mgr Bernard Fellay, un reportage photographique exclusif du Chapitre général.

Source : http://www.dici.org/actualite_read.php?id=1288