DÉNOUEMENT DE LA PERSÉCUTION
Computrescet jugum a facie olei.
Le joug sera brisé par l'oint de l'huile.
Isaïe, x, 27.
Depuis qu'une persécution pour ainsi dire universelle s'est déchaînée contre l'Eglise catholique, que de fois l'impatience et le découragement n'ont-ils pas envahi et même bouleversé certaines âmes. On trouve que Dieu tarde trop à intervenir, et volontiers on lui tracerait Sa ligne de conduite. Cette ligne de conduite ne serait rien moins qu'une nouvelle édition du formidable coup de force qui, dans l'Ancien Testament, anéantit Sennachérib et sa redoutable armée. Oui, une nouvelle édition et même quelque peu augmentée de ce terrible épisode biblique, voici ce que quelques-uns, pour ne pas dire beaucoup, souhaitent secrètement!
Eh bien ! jusqu'à présent, Dieu n'a pas eu l'air de Se rendre à cette invitation. Il a bien fait, chers lecteurs! Vous mêmes le proclamerez tout à l'heure.
A cette fin, transportons-nous, si vous le voulez bien, sous le règne d'Ezéchias, roi de Juda, en l'an 701 avant Jésus-Christ, au moment où Sennachérib, le terrible roi d'Assur, s'avance comme un torrent contre Jérusalem.
C'est Isaïe qui va relater l'événement, au chapitre Xe de ses prophéties, à partir du verset 8e. Dans l'oracle du grand prophète, rapproché de nos temps actuels, vous constaterez deux choses :
La première, c'est que Satan, inspirateur et conducteur de toute persécution, poursuit, toujours un même but. S'il y a variations chez lui, c'est uniquement par rapport aux moyens à mettre en œuvre. Autrefois, c'était la force brutale avec Sennachérib ; aujourd'hui, c'est la légalité patiente avec les sectes maçonniques !
La seconde chose que vous constaterez, c'est que Dieu protecteur, lui aussi, est toujours le même. Jamais Il ne manque d'intervenir. Seulement, de Sa part également, il y a eu modification dans l'emploi des moyens. Nous nous réservons de dire le pourquoi.
Et maintenant, afin de partager la prophétie d'Isaïe d'une manière qui la fasse mieux saisir, voici les deux divisions tirées de l'oracle lui-même et qui vont en éclairer l'interprétation :
1° Les projets de Sennachérib et ceux des sectes maçonniques.
2° L'intervention divine.
On sait ce qu'était Sennachérib, ce roi cruel d'Assyrie, que nous avons tous appris à considérer avec horreur dès notre enfance, dans les récits de l'histoire sainte. M. Oppert, le savant professeur d'assyriologie au Collège de France, raconte avec quelle émotion il vit à Ninive, au moment où on venait de la découvrir, sculptée sur un bas-relief, l'image de ce conquérant qui avait fait tant de mal à ses ancêtres. Ce qui donne à cette découverte un plus grand prix, s'il est possible, c'est qu'elle nous représente Sennachérib, non pas en Assyrie, mais en Palestine. Le roi d'Assur est assis sur un trône richement orné, et est coiffé de la tiare avec deux longs fanons. Sa main droite, levée, est armée d'une flèche. De sa gauche il tient l'arc, qu'il appuie sur le marchepied de son trône. Son visage a l'air sévère et dénote le guerrier sans merci et le conquérant implacable. (Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, t. IV, p. 184, 185. Paris, 1882)
Tel était le redoutable instrument que Dieu dans Sa colère S'était choisi, soit pour châtier, autour de la Judée, une foule de peuples monstrueusement idolâtres, soit pour ramener par de sanglants revers la Judée elle-même, en partie rebelle aux remontrances d'Isaïe, et aux réformes du pieux roi Ezéchias.
Mais voici que, sous le souffle de Satan, l'orgueil est monté au cœur du roi d'Assur.
Considérez-le ! Son regard s'est tourné du côté de Jérusalem : Jérusalem, la ville sainte, et alors l'Eglise du vrai Dieu ! Jérusalem, où il lui était interdit d'aller !
Sennachérib a cessé d'être mandataire, pour devenir persécuteur.
En effet, écoutons ses projets. Isaïe les avait, dans une vue prophétique, dévoilés trente-huit ans à l'avance (l'oracle d'Isaïe date de l'an 739 avant Jésus-Christ, sous la règne d'Achaz ; et, comme nous l'avons dit, Sennachérib marche sur Jérusalem en 701, sous le règne d'Ézéchias) :
Malheur à Assur, la verge de Ma colère, Le bâton auquel j'ai confié Ma vengeance.
Je l'ai envoyé contre une nation impie, Je l'ai expédié contre un peuple objet de Ma colère,
Pour enlever ses dépouilles et le livrer au pillage, Pour le fouler comme la boue des places publiques.
Mais lui, il n'a point cette pensée. Ce n'est pas cela que médite son cœur.
Non ! il songe à détruire, A exterminer des peuples sans nombre.
Car il a dit : “Les satrapes qui me servent n'étaient-ils pas autant de rois ?
N'en a-t-il pas été de Calané comme de Carcamis ? De Emath comme d'Arphad ? De Samarie comme de Damas ?
De même que ma main s'est emparée des royaumes consacrés aux idoles,
Ainsi j'emporterai les simulacres qu'on adore dans Jérusalem comme à Samarie,
De même que j'ai traité Samarie et ses idoles, Ainsi je traiterai Jérusalem et ses simulacres…”
Il a dit : “C'est par la force de mon bras que j'ai réussi, Et c'est ma sagesse qui m'a éclairé !
J'ai déplacé les frontières des nations, J'ai pillé leurs trésors. Et, comme un héros, j'ai renversé les rois !
Ma main s'est emparée, comme d'un nid, des boulevards des peuples ;
Comme on ramasse des œufs abandonnés, Ainsi j'ai ramassé la terre ;
Nul n'a osé remuer l'aile, Ni ouvrir la bouche pour se plaindre ! ”
Quelle peinture ! Ne dirait-on pas que le cœur du monarque assyrien a été mis à découvert, tant le prophète en a fait apercevoir les palpitations d'orgueil, et en a dénoncé tous les projets. Eh bien ! ces projets du roi d'Assur, nous allons constater, en approfondissant davantage le texte biblique, nous allons constater, dis-je, que ces projets du roi d'Assur sont aujourd'hui identiquement repris par les sectes maçonniques.
En effet, quatre projets se trouvaient secrètement nourris par Sennachérib :
1er PROJET : Se substituer au Maître suprême
Il a dit : “C'est par la force de mon bras que j'ai réussi, Et c'est ma sagesse qui m'a éclairé !... ,
Ma main s'est emparée, comme d'un nid, des boulevards des peuples”.
Quel excès d'orgueil ! C'est à titre d'instrument que Dieu a choisi Sennachérib, et voici que Sennachérib prétend être le Maître ! La main qui l'emploie, il ne veut plus la voir, et il attribue tout à la sienne :
C'est par la force de mon bras... c'est ma sagesse... c'est ma main !
Mais n'est-ce point là le langage qui se parle, le projet qui s'inculque au sein des sectes maçonniques ? “Tu es maître !” y dit-on à l'homme. C'est ta sagesse seule qui t'éclaire, et ta main seule qui exécute ! Toi-même, tu es la Providence ! Et comme, dans ce siècle de découvertes, de merveilleux progrès, on ne saurait le méconnaître, ont été réalisés, il est arrivé que ce langage, a plus facilement trouvé créance. Et voici que, de toutes parts, l'homme, enivré de lui-même, se substitue à Dieu. Il ne veut plus admettre que lorsqu'il délibère, c'est Dieu qui préside à ses conseils ; que lorsqu'il surmonte les obstacles, c'est Dieu qui l'aide de Sa puissance. Non ! c'est par la force de mon bras...; c'est ma sagesse..., c'est ma main !
2° PROJET : Renverser Jérusalem.
Il songe à détruire, A exterminer des peuples sans nombre.
Car il dit : “ les satrapes qui me servent n'étaient-ils pas autant de rois ?
N'en a-t-il pas été de Calané comme de Carcamis ? De Emath comme d'Arphad ? De Samarie comme de Damas
De même que j'ai traité Samarie et ses idoles, Ainsi je traiterai Jérusalem et ses simulacres !
Nul doute possible ! C'est bien le renversement de Jérusalem que Sennachérib a projeté. Il la nomme entre ses dents :
Jérusalem, c'était le centre de l'Église juive, de même que Rome est devenue le centre de l'Eglise chrétienne. C'était le lieu prédestiné où le Seigneur avait accompli sur une même tête l'union du sacerdoce et de la royauté. Melchisédech, Pontife et Roi, n'y avait-il pas figuré, dans son auguste personne, ce que sont à Rome les Vicaires du Christ, à la fois Pontifes et Rois ?
Renverser Jérusalem, c'était donc frapper au cœur le judaïsme ! C'était bouleverser d'un seul coup toute l'économie du Mosaïsme ! Sennachérib le savait-il ? Était-il arrivé jusque-là dans ses calculs ? Il y a lieu d'en douter.
Mais si le doute subsiste sur cette partie des plans du roi d'Assur, il a cessé d'exister par rapport à ceux des sectes maçonniques. Oui, c'est bien le christianisme tout entier que, en mettant la main sur la Jérusalem du Tibre, les sectes maçonniques se sont proposé d'atteindre. Lorsqu'on est parvenu à s'emparer du cœur, n'est-on pas en droit de se flatter qu'on éteindra graduellement la vie à toutes les extrémités du corps ?... Au reste qu'on médite cet aveu, qui s'est échappé des loges :
“... Ce jour-là, notre œuvre aura véritablement accompli ses destinées. Dans les édifices élevés de toutes parts, depuis des siècles, aux superstitions religieuses et aux suprématies sacerdotales, nous serons appelés à notre tour à prêcher nos doctrines, et au lieu des psalmodies cléricales qui y résonnent encore, ce seront les maillets, les batteries et les acclamations de notre ordre qui en feront retentir les larges voûtes et les vastes piliers[1]”.
3° PROJET : Effacer le nom du vrai Dieu
De même que ma main s'est emparée des royaumes consacrés aux idoles,
Ainsi j'emporterai les simulacres qu'on adore dans Jérusalem comme à Samarie.
Injure de lèse-majesté divine, dessein criminel, il y a tout cela dans ce troisième projet.
Injure de lèse-majesté divine ! puisque c'est à d'abjectes idoles adorées par le paganisme, à de schismatiques simulacres élevés à Samarie, que Sennachérib ose bien assimiler le vrai Dieu de Jérusalem ! Dessein criminel ! puisque ce vrai Dieu de Jérusalem, Sennachérib a projeté de L'arracher de son Temple, de L'emporter, de Le faire disparaître :
Ainsi j'emporterai les simulacres qu'on adore dans Jérusalem comme à Samarie.
Mais tout cela, est-ce seulement un récit du passé ? N'est-ce pas également de l'histoire contemporaine? Après avoir fait à Jésus-Christ l'injure de Le rabaisser jusqu'à l'assimiler à l'erreur et au schisme, jusqu'à traiter de superstitions les bienfaits de Sa Mère, n'est-on pas en train d'effacer même le nom du vrai Dieu? Et ce n'est pas seulement de Jérusalem, ainsi que le projetait Sennachérib, mais de partout, du monde entier, que les sectes maçonniques ont décrété d'en emporter, d'en faire disparaître les signes ! Tentative vaine, n'est-ce pas, chers lecteurs ? Tant qu'un chrétien restera en ce monde, ses deux bras, comme ceux de Moïse (Exode, XVII, 11), s'élèveront en croix sur la montagne, pour prouver que le signe du salut n'a pas disparu. Et tandis que ces deux bras de chrétien s'élèveront sur la montagne, au bas, dans la vallée, une petite fleur chantera : C'est Dieu qui nous donna nos formes et nos couleurs ; nous proclamons Son nom !
4° PROJET : Courber toutes les têtes sous le despotisme
Ma main s'est emparée, comme d'un nid, des boulevards des peuples ;
Nul n'a osé remuer l'aile, Ni ouvrir la bouche pour se plaindre !
Il faut en convenir : C'est superbe de poésie et aussi de despotisme ! Ne point permettre que même on remue l'aile, qu'on entrouvre les lèvres pour se plaindre !... Tel était cependant, à l'égard de ses sujets courbés, le régime politique qu'exerçait le roi d'Assur.
Mais, elles aussi, les sectes maçonniques n'ont-elles point projeté de s'emparer de tous les peuples de la terre ? et si malheureusement l'Église n'était point là, elles les ramasseraient aussi facilement qu'on ramasse des œufs abandonnés. Ce serait alors le retour à Sennachérib. Déjà la société en a goûté les premières douceurs : l'enfant enlevé à sa mère, le cadavre d'un époux disputé et soustrait à son épouse ! Toutefois ce ne sont là encore que des préludes... Dans une autre prophétie, relative également à Sennachérib, Isaïe parle d'un frein de l'erreur placé entre les mâchoires des peuples, frœnum erroris quod erat in maxillis populorum (Isaïe, xxx, 28) ! Oui, l'homme assimilé à une bête, l'homme conduit et traité comme une bête, tel est, dans le programme secret que le démon a fait élaborer dans les loges, le joug réservé au genre humain, si on parvenait par une instruction obligatoire et athée à le séparer de Dieu ; et dans ce programme, cette clause : Défense de remuer l'aile, défense de soupirer une plainte ! Et que la pesanteur, que l'ignominie d'un pareil joug ne surprennent personne. C'est au profit de la tyrannie que l'erreur travaille, et toujours elle a mené les peuples à la servitude[2] !
Et maintenant, n'étais-je pas en droit de dire, en commençant, que Satan est toujours le même, et que pour changer de tactique, substituant la légalité à la violence, il ne laisse point de poursuivre toujours un même but :
Amener l'homme à se substituer au Maître suprême,
Renverser Jérusalem,
Effacer le nom du vrai Dieu,
Courber toutes les têtes sous le despotisme.
En deux mots : destruction de la Synagogue, dans le passé ; destruction de l'Eglise, dans le présent !
Deux questions se posent infailliblement, en temps de persécution religieuse par rapport à l'intervention divine :
Quand se fera-t-elle ?
Comment se fera-t-elle ?
La suite de l'épisode biblique de Sennachérib va répondre à ces deux questions.
1° QUAND SE FERA L'INTERVENTION DIVINE ?
Il arrivera que Moi, le Seigneur, Quand j'aurai accompli Mon œuvre
Sur la montagne de Sion et dans Jérusalem,
Je visiterai l'orgueil insolent du roi d'Assur, Et la fierté de ses yeux altiers.....
La hache se glorifie-t-elle contre celui qui la manie ? La scie s'élève-t-elle contre celui qui la meut ?
Comme si la verge prétendait donner l'impulsion à celui qui la lève, Et le bâton gouverner, lui qui n'est que du bois ! C'est pourquoi le Seigneur, Jéhova des armées, Enverra la maigreur dans ses flancs engraissés.
Il résulte de cette annonce que, en temps de persécution religieuse, l'intervention divine attend ordinairement deux choses avant de se produire :
d'abord que la purification des bons soit suffisamment accomplie ;
ensuite, que le triomphe des méchants soit sur le point de s'achever.
Oui, avant que l'intervention divine se produise, il faut qu'une purification nécessaire soit suffisamment accomplie au milieu de Jérusalem, au sein de l'Église :
Jérusalem était sainte. L'Eglise catholique est sainte. Mais les juifs qui vivaient à Jérusalem, les chrétiens qui vivent dans l'Église, oubliaient parfois le Décalogue, oublient parfois l’Évangile.
Or, quand l'erreur menace d'envahir, ou que la corruption gagne, Dieu, qui avant tout veut sauver les âmes, Dieu permet que souffle une persécution.
C'est alors comme un vent de tempête qui passe sur la montagne de Sion et dans Jérusalem. Dans la pensée des méchants qui l'ont soulevé, ce vent de tempête doit tout bouleverser, tout détruire ; mais sous le pouvoir de Dieu, qui sait convertir le désordre en ordre, la perturbation en harmonie, le mal en bien, il ne se borne qu'à purifier ! Les fronts s'inclinent, les lèvres s'entrouvrent pour prier, les consciences se déchargent, des mains depuis longtemps séparées se rapprochent pour se soutenir. Il y a de grandes souffrances ; mais ces souffrances généreusement acceptées sont devenues expiatoires. L'œuvre de Dieu s'accomplit : Jérusalem et l'Église se purifient !
Il faut ensuite que les succès des méchants soient parvenus à un degré voisin du triomphe. Il faut que la hache se glorifie, et que la scie s'élève ; il faut que la verge prétende donner l'impulsion et le bâton gouverner.
Si l'intervention divine se produisait aussitôt que les méchants font mine de s'attaquer à l'Église, mais ne voyez-vous pas qu'elle courrait risque de rester sans résultat ? Déjà à moitié aveuglés par la haine, les méchants s'obstineraient à méconnaître la main qui les aurait frappés. Pour eux, l'intervention divine serait plutôt un accident survenu à leurs plans, et le triomphe de l'Église, uniquement l'œuvre du hasard.
Les bons eux-mêmes seraient moins frappés, et partant, se trouveraient ralentis dans la défiance de leurs propres forces, dans la confiance en Dieu, et aussi dans le grand devoir de la reconnaissance. Laissez donc Sennachérib s'engraisser ! Il y est : ses flancs s'engraissent, tout lui réussit ! La maigreur, dont par intervalles le menacent la voix des Prophètes ou celle de l'Église, il s'en moque ! Moi maigrir, mais c'est impossible ! Voyez donc ! je manie tout, je meus tout, je donne l'impulsion à tout, je gouverne tout ! Allons ! monte, monte encore, Sennachérib ! plus qu'un pas, et tu vas toucher à la splendeur…
C'est fait : l'heure a sonné, Dieu Se décide.
Je visiterai l'orgueil insolent du roi d'Assur Et la fierté de ses yeux altiers.
2° COMMENT SE FERA L'INTERVENTION DIVINE ?
Avant de répondre à cette question, en relatant le dernier passage biblique de l'épisode de Sennachérib, laissez-moi vous prévenir, chers lecteurs, que ce passage est l'un des plus merveilleux de l'Ecriture, non seulement au point de vue de la beauté littéraire, mais encore au point de vue des précisions prophétiques. Trente-huit ans à l'avance, la marche de l'armée de Sennachérib est décrite en détail. Isaïe a non seulement dénoncé les projets du roi d'Assur, alors même qu'ils n'étaient point conçus, il a encore dévoilé le plan de campagne, nommé une à une les principales étapes militaires :
N'aie pas peur, ô Mon peuple qui habites Sion, De cet Assyrien qui te frappe de la verge,
Et qui lève sur toi son bâton, comme autrefois en Égypte,
Un tout petit délai encore, Et Ma colère sera passée, Et Mon courroux s'apprête à les détruire.
Le Seigneur lèvera sur eux Son fléau, Comme il frappa Madian au rocher d'Horeb
Sa verge frappera la mer, Elle s'appesantira comme jadis sur l'Égypte.
En ce jour tes épaules seront déchargées de leur fardeau, Et ton cou de leur joug,
Le joug sera brisé par l'oint de l'huile.
Il arrive à Aïath, Il passe à Magron? Il dépose ses bagages à Machmas.
Ils en passent le défilé, Ils bivouaquent à Gaba.
Rama est dans l'épouvante, Gabaath de Saül est en fuite.
Pousse des cris de détresse, fille de Gallim Entends ceux de Laïs, pauvre Anathothî !
Madména a émigré, Les habitants de Gabim ont pris la fuite.
Encore un jour de halte à Nobé.
Il étend la main contre la montagne de la fille de Sion, Contre la colline de Jérusalem...
Mais voilà que le Seigneur Yéhova des armées Brise violemment les rameaux de la forêt ;
Les hauts cèdres sont coupés, Les superbes abaissés.
Les fourrés épais sont éclaircis par le fer, Et le Liban tombe sous un bras formidable !
Au moment de transcrire ce passage, nous avons parlé d'étapes militaires : nous nous trompions. Ce que nous venons de suivre, ce sont les étapes de l'orgueil, en révolte contre Dieu ! Eh bien ! comment va-t-il se défendre, ce Dieu des armées ainsi provoqué ? De quelle manière parviendra-t-il à sauver Jérusalem, à sauver l'Église ?
Par deux plans bien différents : l'un plus spécial à l'Ancien Testament ; l'autre, plus particulièrement suivi dans le Nouveau.
Sennachérib est donc en marche sur Jérusalem. Tout tremble, tout plie devant son innombrable armée. Déjà, elle a franchi le Jourdain et pénétré dans les tribus du nord. Par un mouvement rapide, elle s'est même portée du côté de l'ouest et du sud-ouest de la Palestine, pour empêcher tout secours du côté de l'Égypte. La voici maintenant qui remonte ; elle se dirige vers Jérusalem enserrée comme dans un filet. L'épouvante est dans la ville sainte. C'est en vain qu'Isaïe a fait retentir cette annonce au nom du Seigneur :
N'aie pas peur, ô Mon peuple qui habite Sion, De cet Assyrien qui te frappe de la verge,
Et qui lève sur toi son bâton, comme autrefois en Égypte.
Un tout petit délai encore, Et Ma colère sera passée, Et Mon courroux s'apprête à les détruire...
Rien n'y fait, l'effroi ne se calme pas ; Ezéchias, le saint roi, lui-même est atterré !
Et Sennachérib poursuit sa marche. L'inondation monte, monte ; elle a atteint les frontières de Benjamin. Sennachérib est à Aïath, plus qu'à six heures de Jérusalem ! Il passe à Magron, il dépose ses bagages à Machmas. Ils en passent le défilé ; ils bivouaquent à Gaba. Rama est dans l'épouvante. Gabaath, patrie de Saül, est en fuite. Pousse des cris de détresse, fille de Gallim ! Ceux de Laïs sont entendus à Anathoth. Madmêna a émigré, les habitants de Gabim ont pris la fuite. Plus qu'un jour pour faire halte à Nobé ! Il est signalé. Le voici qui apparaît. Il est en vue de la ville sainte. Regardez-le !
Il étend la main contre la montagne de la fille de Sion, Contre la colline de Jérusalem...
Tout est perdu ! Tout est perdu !
Mais la nuit est descendue. A travers ses ombres passe l'Ange exterminateur dont l'épée avait frappé les premiers-nés de l'Égypte :
Elle brise violemment les rameaux de la forêt... Les fourrés épais sont éclaircis par le fer,
Et le Liban[3] tombe sous un bras formidable
Qu'on s'imagine ce que dut être le lendemain, à l'aube blanchissante, l'effroi du roi d'Assur, lorsque, aux pâles rayons d'une lune qui fuyait, il aperçut le sol jonché des cadavres de cent quatre-vingt-cinq mille de ses soldats [4]. Fou de terreur, lui-même il prend la fuite : le souvenir de Pharaon englouti s'est dressé devant lui ! Mais dans sa course précipitée, il trébuche à chaque instant sur des monceaux de cadavres ! Laissons le fuyard regagner honteusement Ninive, où l'attendent, du reste, les glaives parricides de deux de ses fils[5]. Nous, de Jérusalem miraculeusement délivrée et qui va s'éveiller dans la joie, portons maintenant nos regards vers l'Eglise de Jésus-Christ.
L'Eglise de Jésus-Christ ! Ah ! elle aussi, la vieille cité du Christ, semble vouée à la ruine. Déjà ses ennemis se sont engraissés de ses dépouilles et abreuvés de ses larmes. Plus gigantesque même qu'au temps de Sennachérib est devenu le théâtre de la bataille. Car ce n'est plus seulement entre les limites de la Palestine ; c'est sur les continents d'une mer à l'autre, sur les mers d'un continent à l'autre, dans le monde d'un pôle à l'autre pôle. Prêtez l'oreille : clameurs d'impiété et chants de triomphe ; d'étape en étape, les sectes maçonniques semblent marcher à la splendeur !
Sera-ce aussi l'épée d'un Ange qui viendra au secours de l'Eglise ? Écoutez !
Dans le dernier passage d'Isaïe qui vient d'être mis sous vos yeux, il est un verset étrange que vous aurez certainement remarqué :
Que peut-il bien signifier ?
Vous vous le rappelez, Dieu faisait annoncer par Son prophète qu'il allait frapper contre les soldats d'Assur un coup, dont les oreilles de l'humanité tinteraient durant des siècles ; un coup qui n'aurait d'égal que celui de la mer Rouge ou du rocher d'Horeb. Dieu fait annoncer qu'Il lèvera Son fléau, que Sa verge s'appesantira, qu'elle détruira…, et tout à coup, sans que l'esprit y soit amené, voici que la formidable annonce se termine par cet accent de douceur.
Le joug sera brisé par l'onction de l'huile.
En vérité, qu'est-ce que l'huile si onctueuse peut voir de commun avec une verge appesantie ? Et comment une éclaircie de suave avenir se trouve-t-elle ainsi enchâssée au milieu des tonnerres ?
L'explication n'est point difficile.
Ce joug brisé par l'onction de l'huile, c'était la communication anticipée, mais à mots couverts, de la manière dont Dieu interviendrait dans le Nouveau Testament.
Durant les siècles du premier Testament, signé au Sinaï, c'est en personne, à la façon d'un guerrier, que, maintes fois, le Seigneur intervient. Il se fâche, Il se courrouce, Il s'arme, Il fait tomber une pluie de pierres, Il lance la foudre, Il dépêche un Ange armé d'un glaive, Il donne l'ordre d'exterminer jusqu'au dernier captif. Aussi s'arroge-t-Il alors les noms de Jéhova des armées, de Seigneur redoutable, de Héros invincible ; et parmi les livres du temps de Moïse, malheureusement perdus, y en avait-il pas un qui portait pour titre : Le Livre des batailles de Dieu ! (Nombres, xxi, 14 ; Isaïe, xlii, 13 ; xlix, 17, 18)
Mais à partir du Nouveau Testament, signé au Calvaire, une modification se produit dans l'intervention divine. Dorénavant, ce ne sera plus l'épée, mais l'onction de l'huile qui dénouera. Point de changement dans les attentions vigilantes de la Providence, Dieu continue à intervenir comme par le passé : Un seul cheveux de votre tête ne tombe pas sans la permission de votre Père qui est aux cieux (Math. x, 30-32). Mais c'est le mode d'intervention qui change : la main de Dieu a écarté Ses armes ; désormais, elle se cachera sous le voile des causes secondes ; elle se dissimulera sous un manteau de douceur. Plus de casque, plus de baudrier, plus de glaive ; mais une direction à la fois suave et forte, qui saura tirer le bien du mal, et des actes mêmes des persécuteurs faire jaillir les gages de la victoire !
C'est là ce qu'annonçait Isaïe. Plus tard, Jésus-Christ lui-même promulguera d'une façon sublime la nouvelle manière d'intervenir adoptée par Dieu. Ce sera quand, interpellé par Jacques et Jean qui Lui proposeront de faire descendre le feu du ciel sur une coupable de Samarie, Il répondra : Vous ne savez pas de quel esprit vous êtes. Le Fils de l'homme n'est pas venu pour perdre les âmes, mais pour les sauver (Luc, ix, 52, 56).
Mais en attendant que le Fils de l'homme fasse ainsi connaître Lui-même ce que sera la manière d'intervenir de Dieu à travers les siècles chrétiens, voici que déjà le prophète de l'Ancienne Loi, Isaïe, la laisse entrevoir, lorsque, ayant prophétisé contre les soldats d'Assur, selon que nous l'avons déjà entendu :
Le Seigneur lèvera sur eux Son fléau, Comme il frappe Madian au rocher d'Horeb ;
Sa verge frappera la mer, Elle s'appesantira comme jadis sur l'Égypte…
il termine par ces mots extraordinaires :
En ce jour tes épaules seront déchargées de leur fardeau, Et ton cou de leur joug ;
Le joug sera brisé par l'onction de l'huile.
Ce jour de l'onction de l'huile, c'étaient donc les temps évangéliques, les temps du Messie venu ! et cela est si vrai que, dans les paraphrases chaldaïques, interprétations de la Bible lues à l'ancienne Synagogue, plusieurs années avant Jésus-Christ, à la suite du fameux verset
Le joug sera brisé par l'onction de l'huile,
il y a ce commentaire singulièrement remarquable : les nations seront brisées devant la face du Messie[6].
Et cela est arrivé ! N'est-ce pas, en effet, par l'huile, l'onction de l'huile, que les grands empires persécuteurs se sont vus brisés devant la face du Christ ? N'est-ce point par l'onction de l'huile que Néron, Domitien, Dioclétien, Maxence, Julien l'Apostat, ont été vaincus ?... L'épée d'un Ange n'a pas eu besoin d'intervenir ; il a suffi de leurs propres actes que Jésus-Christ avait retournés contre eux !
En sera-t-il toujours ainsi ? Et le Seigneur sollicité par des fils de tonnerre, ne pourrait-Il pas donner quelque jour, un échantillon de Son ancienne manière d'intervenir dans l'Ancien Testament ? Assurément, la puissance divine n'est point liée ; et nous tenons de l'Ecriture que, en tout cas, cette manière d'intervenir se reproduira au temps de l'Antéchrist. Contre le grand ennemi, Dieu Se souviendra qu'Il est un héros !
Mais, en attendant ce terrassement suprême, l'ordinaire et pacifique intervention de Jésus-Christ, uniquement par l'onction de l'huile, dénoterait-elle chez Dieu un abaissement de puissance ?
On serait presque tenté de le croire, à entendre les sarcasmes insolents de l'impie, et parfois hélas ! les plaintes amères et impatientes du juste. Ah ! loin de nous semblable supposition. Assurément, lorsqu'on a le spectacle du mal triomphant, et celui d'une agonie prolongée de la justice, on éprouve parfois comme des bonds de révolte, et volontiers on souhaiterait comme un écho de cette voix qui, un jour, éclata dans l'Ancien Testament : Peuples, ameutez-vous, et vous serez vaincus (Isaïe, VIII, 9) ! De même qu'un lion et un lionceau rugissants sur leur proie, ne se laissent pas effrayer par le nombre des bergers qui se présentent, ni arrêter par leurs clameurs, ainsi Moi, le Seigneur des armées, Je vais descendre sur la montagne de Sion et sur Ma colline (Isaïe, XXXII, 4).
Si le Seigneur, qui s'irritait de la sorte dans l'Ancien Testament, a remplacé ces rugissements de lion par les vagissements imperceptibles du berceau de Bethléem, et par les sons non moins imperceptibles de la goutte d'huile, ah ! croyez bien que ce n'est point par abaissement de puissance. Non, ce n'est point par abaissement de puissance ! Est-ce que la goutte d'huile, pour être la douceur même, ne recèle point la force? Si elle ne sait que s'insinuer, n'aboutit-elle point cependant à faire céder les plus obstinés ressorts ? Et parce qu'aujourd'hui c'est à un joug, qu'elle s'est attaquée, le joug sera brisé par l'onction de l'huile !
Mais avant que le joug se trouve ainsi brisé, du temps, et c'est là une des grandes raisons de la modification apportée dans l'intervention divine, du temps se sera écoulé. Les persécuteurs auront eu non seulement des mois, mais des années pour réfléchir. Les bons, de leur côté, se seront purifiés. Et le Dieu de l'Évangile n'aura point dévié d'une ligne de ce plan de miséricorde, qui doit se dérouler durant toute la Loi de grâce, selon l'annonce qu'en ont faite le Docteur des Gentils et le Prince des Apôtres :
“Dieu notre Sauveur, a dit saint Paul, veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité”(I Timoth, ii, 3 4).
Et saint Pierre a ajouté : “Dieu n'est pas en retard dans l'accomplissement de Ses promesses, ainsi que quelques-uns se l'imaginent. Mais s'il agit avec patience, c'est à cause de vous, ne voulant point qu'aucun périsse, mais que tous reviennent à Lui par la pénitence (II Petr., iii, 9)”.
Les promesses de Dieu s'accompliront donc. Des jours de paix seront rendus à l'Eglise. Déjà, nonobstant les apparences, le joug se trouve entamé ; l'huile le pénètre lentement, mais elle le pénètre !
Le 3 octobre 1885, aux premières vêpres du Saint Rosaire, ce rescrit pontifical partait du Vatican :
Du Vatican, aux premières vêpres du Saint Rosaire, le 3 octobre 1885,
Sa Sainteté le Pape Léon XIII, voulant pourvoir à ces temps exceptionnels par des secours exceptionnels de religieuse piété, a décidé d'accorder pour l'année prochaine au monde catholique un jubilé extraordinaire.
Sa Sainteté voulant placer sous le patronage de la Reine des Cieux le succès d'une si grande grâce, en donne la première nouvelle à l'heure même où l'Église commence à l'honorer sous le glorieux titre de la Vierge du Rosaire.
Tous les fidèles de l'univers, spécialement les prédicateurs, les associés de la confrérie du Rosaire, ainsi que les divers ordres du Séraphique Patriarche (la fête du Rosaire coïncidant cette année avec celle de saint François), salueront avec joie cette nouvelle et se prépareront dès à présent à en profiter effectivement à l'époque fixée.
“L. M., Cardinal-vicaire”.
Ne sommes-nous pas autorisés à espérer, qu'à l'issue de ce jubilé aujourd'hui fixé par le Saint Père, l'huile sera bien près d'avoir terminé son œuvre ? De ce rosaire si souvent formé de grains d'oliviers se déroulant selon le nombre des mystères d'une fille de Jérusalem devenue Mère et Protectrice de l'Eglise, de ce rosaire, dis-je, plus nombreuses et plus pénétrantes les gouttes d'huile ne seront-elles point tombées ? Et lorsque éclatera le jour de délivrance, où nos épaules seront déchargées et notre cou allégé, à travers les cris de reconnaissance, y aura-t-il quelqu'un pour se plaindre de ce que le Dieu de l'Évangile, à l'épée de justice qui terrassa le roi d'Assur, aura substitué l'huile de la miséricorde !
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Ce texte a plus de cent ans et la crise est allé bien au delà de ce que l'on pouvait prévoir à cette époque. On attendait une fin prochaine, les maux vécus semblant trop graves pour ne pas souhaiter une intervention divine proche. Et pourtant ! Même en 2001, on n'est pas au bout de la crise et des malheurs.
L'intérêt de cette brochure est dans l'analyse des quatre points de destruction de l'Eglise et de la société. Ils sont toujours d'actualité. De même la purification des bons et le triomphe des méchants sont obligatoires.
Par contre, l'abbé Lemann aurait du garder sa première traduction de Isaïe x, 27 citée au début : Le joug sera brisé par l'oint de l'huile. Sous l'Ancien Testament l'oint qui brise le joug est Notre-Seigneur Jésus-Christ. Pour notre époque ce sera le Grand Monarque, LieuTenant du vrai roi de France qu'est Notre-Seigneur Jésus-Christ.
Il est à remarquer que retenir ce seul court passage scripturaire, pris dans Isaïe, pour expliquer le dénouement de la crise, est étonnant, prophétique et sûrement inspiré.
Prions pour notre futur Grand Monarque, par exemple en disant à chaque Bénédicité :
Domine da nobis
panem, pacem, regem, sanctum papam,
per Christum Dominum nostrum. Amen.
[1] Discours de clôture de session prononcé au convent de 1883 du Grand-Orient de France, par la F\ Blatin, professeur à l'école de médecine de Clermont-Ferrand, imprimé par le F\ Louis Hugonis et distribué depuis peu à tous les francs-maçons de France.
[2] Un éminent publiciste, qui a eu, comme le comte de Maistre, des vues d'avenir, a écrit ceci : “Le paganisme moderne a commencé par s'adorer lui-même dans la personne d'une prostituée, et il a fini par se prosterner aux pieds de Marat, le tyran cynique et sanguinaire, aux pieds de Robespierre, l'incarnation suprême de la vanité humaine et de tous ses instincts féroces et inexorables. Voici venir maintenant un nouveau paganisme ; il tombera dans un abîme encore plus profond et plus obscur ; déjà peut-être, dans les cloaques où gît la fange sociale, se forme le monstre qui courbera son front ; il lui mettra un joug dont rien dans le passé n'égale la pesanteur et l'ignominie”. (Œuvres de Donoso Cortès, t. III, p. 95, 97. Paris, 1862.)
[3] L'armée assyrienne est comparée au Liban, à cause de sa force et de sa multitude.
[4] “L'Ange du Seigneur sortit et frappa cent quatre-vingt-cinq mille hommes dans le camp assyrien. Et quand on se leva le matin, ce n'était partout que des cadavres sans vie”.(Isaïe, xxxvii, 36)
[5]"Et Sennachérib, roi des Assyriens, partit de là, et habita Ninive. Et pendant qu'il adorait dans le temple de Nesroch, son dieu, Adrarnélech et Sarasar, ses fils, le frappèrent de leurs glaives, et s'enfuirent dans la terre d'Ararat". (Ibid., 37-38)
[6] Et confringentur gentes ante faciem Messiæ. (Parap. Chald.) La paraphrase chaldaïque sur les prophètes est I'œuvre de Jonathan ben Uzziel. Plusieurs explications en sont très remarquables, parce qu'elles attestent l'interprétation messianique donnée de son temps aux prophéties. Bien que Jonathan n'ait rédigé sa paraphrase qu'au dernier siècle de l'histoire juive, néanmoins sa doctrine touchant le Messie doit être regardée comme l'expression traditionnelle de l'ancienne Synagogue, surtout depuis la retour de la captivité de Babylone. - Il est incontestable cependant que, dans un premier objet, ce verset se rapporte également au temps d'Ezéchias. C'est alors l'annonce de l'action miséricordieuse de Dieu en faveur du saint roi et de son peuple, à l'encontre des projets de Sennachérib. “Ce joug, dit S. Jérôme, c'est la puissance de l'Assyrie qui sera rompue par l'huile, c'est-à-dire par la miséricorde divine”. (S. Hieron., in Is.. lib. IV, cap. x.) Mais l'interprétation chaldaïque relative à un second objet est également pleine de justesse. C'est donc là un verset prophétique à double objet. "Haec etiamsi intelligi optimè possunt de ea libertate qua a Domino asserti sunt Judæi sub Ezechia, deleto per angelum Domini exercitu Assyriorum, ut præcedentia et ordo historiæ postulant, non minius congruenter ad mysterium referri possunt cujus historia typus fuit. Illud autem à facie olei, id est, propter unctum Ezechiam, vel propter Christum Dominum". (Foreiro, Commentar. in Is., in S. Scripturæ cursu. Migne, t. XVIII, p. 986.)