W. H. VAN DE POL
docteur en théologie, professeur à l'université catholique de Nimègue
LA COMMUNION ANGLICANE ET L'ŒCUMENISME
D'APRÈS LES DOCUMENTS OFFICIELS
Préface par Mgr Willebrands
Traduction du néerlandais par Dom André Renard, O.S.B.
Les éditions du Cerf, 29, bd Latour-Maubourg, Paris 1967
CHAPITRE II- L'ANGLICANISME ET L'ÉGLISE ROMAINE
Introduction
Notre étude de l'anglicanisme contemporain s'attachera en premier lieu à son attitude envers Rome, telle que celle-ci s'exprime dans les rapports des Conférences de Lambeth.
Le choix de ce point de départ se justifie par le fait que l'anglicanisme n'a commencé à se développer en une forme particulière du christianisme, doué d'une physionomie propre, qu'à partir de la rupture entre Rome et Cantorbéry[1].
L'observateur impartial n'est guère en mesure de décider laquelle des deux parties a rompu avec l’autre : est-ce Cantorbéry ? est-ce Rome ? Il sera sans doute enclin à penser que les deux parties ont eu leur part de responsabilité dans la rupture. Il en va de même dans les autres ruptures : celle entre Rome et Constantinople, celle entre Rome et la Réforme, celle aussi entre Rome et la communauté vieille-catholique. Dans tous ces cas, les Églises séparées chargent Rome de tout le poids de la responsabilité pour avoir lancé l'excommunication, tandis que Rome, de son côté, est persuadée que l’excommunication avait été provoquée par les autres et qu'elle était pleinement justifiée.
On ne peut nier que la rupture entre Rome et Cantorbéry ait entraîné dans l'Église d'Angleterre des changements profonds et qu'à d'importants égards, elle ait constitué un véritable commencement. Avant cette rupture, l’Ecclesia anglicana, l'Église d'Angleterre, était dans la communion avec le Siège de Rome, en parfait accord avec l'Église d'Occident dans tous les domaines de la doctrine, de la liturgie, de la pratique ecclésiastique, de la spiritualité, de la vie religieuse, du droit canonique et de la langue d'Église.
En dépit de l'insistance mise par elle sur la continuité avec l'Église d'avant la Réforme, l'Église d'Angleterre s'est développée, à la suite de la rupture avec Rome, en cette forme nouvelle de christianisme que l'on nomme l'anglicanisme. C'est ce qui a permis à la Réforme de jouer dans l'anglicanisme un rôle plus important et d'y laisser des traces incomparablement plus profondes que ne le pensent et le reconnaissent certains groupes, tant au sein de l'anglicanisme qu'en dehors de lui.
Une chose nous frappe aussitôt, lorsque nous entreprenons l'analyse de l'attitude anglicane telle qu'elle s'exprime dans les rapports de Lambeth. En effet, l'Église de Rome n'y est jamais dénommée l'Église catholique. Ceci n'a pas de quoi nous surprendre. L'Église d'Angleterre et les autres Églises de la Communion anglicane se renieraient elles-mêmes, si elles identifiaient l'Église de Rome à l'Église catholique, se situant ainsi elles-mêmes en dehors de cette dernière. Elles s'accordent sur ce point avec toutes les autres Églises, tant d'Orient que d'Occident, qui ne sont pas en communion avec le Siège Apostolique, car elles ne pensent pas devoir accepter les prétentions particulières de celui-ci.
Dans les rapports de Lambeth, l'Église en communion avec Rome est désignée habituellement par les expressions «l'Église romaine» ou «l'Église de Rome». Les Rapports de 1897, de 1908 et de 1920 préfèrent le titre de «Communion latine» ; ceux de 1930, de 1948 et de 1958, l'appellation «Église catholique romaine».
Cette incertitude dans la terminologie révèle une recherche et un tâtonnement, en vue de trouver la place qui, selon la conception anglicane, peut être assignée sans inconvénient à l'Église de Rome parmi les autres Églises.
Il importe pour l'exacte compréhension de l'anglicanisme de noter que cette question de terminologie ne rencontre pas celle qui divise Constantinople et Rome, à savoir : laquelle des deux est l'authentique Église, c'est-à-dire laquelle est la seule Église catholique. Une pareille question ne peut se poser dans l'anglicanisme. En effet, selon l'ecclésiologie anglicane, aucune Église particulière n'a le droit de se considérer comme la seule authentique Église, car toutes les communautés de baptisés sont de vraies Églises, pourvu que la Parole de Dieu y soit annoncée et que les sacrements du baptême et de la Cène y soient administrés. En outre, aucune Église en ce monde ne peut être dite une «vraie» Église, à la fois au sens d'Église infaillible, dépourvue d'erreur, et d'Église parfaite, sans tache ni ride. Dans la terminologie anglicane, l'expression «vraie Église» désigne une Église «réelle» ou «authentique». A proprement parler, il n'y a qu'une seule «vraie» Église, à savoir l'Église qui est bâtie sur le fondement jeté par les Apôtres. Il suffit de savoir que l'Église à laquelle on appartient, in casu l'Église anglicane, appartient à cette vraie, authentique et réelle Église apostolique du Christ.
L'article 1°' du droit ecclésiastique anglican, dans sa révision de 1959, déclare que
l'Église d'Angleterre (...) appartient à la vraie Église apostolique du Christ et, conformément à ce qu'exige notre devoir envers cette Église d'Angleterre, nous statuons et ordonnons qu'aucun de ses membres n'aura la faculté de soutenir ou de prétendre le contraire[2].
Cette déclaration semble être un avertissement à l'adresse de certains anglo-catholiques romanisants qui, parfois, donnent l'impression de voir dans l'Église d'Angleterre à peine plus qu'une simple expression ou qu'une branche de l'Église catholique.
Dans le vocabulaire anglican, les expressions d'«Église catholique» ou d'«Église universelle» recouvrent l'ensemble de la communauté de tous les chrétiens croyants et baptisés. Bâtie sur le Christ, son seul fondement, elle est, à cause du péché et de l'inclination à l'erreur des hommes, by schisms rent asunder, by heresies distrest, comme le chante une hymne («déchirée par les schismes, désolée par les Hérésies»). C'est pourquoi elle a toujours besoin de réforme et de renouvellement, selon l'adage des réformateurs : ecclesia reformata semper reformanda, une Église réformée a toujours besoin d'une nouvelle réforme.
I. Les Conférences de 1867 et 1878
Un siècle se sera bientôt écoulé depuis la réunion de la première Conférence de Lambeth en 1867. Une centaine d'évêques anglicans y prirent part. Dès le début de cette Conférence se leva devant les yeux des évêques assemblés la vision de l'unité, enfin restaurée, de tous les chrétiens. Les forces de cohésion qui avaient uni les Églises de l'anglicanisme en une Communion anglicane, devaient à la longue se diffuser dans des cercles de plus en plus larges, jusqu'à ce qu'un jour toute la chrétienté reçût à nouveau le don de Dieu, «le don riche en bénédictions de l'Unité dans la Vérité». Ainsi s'exprimait la première lettre pastorale collective qui fut adressée par l'épiscopat de la Communion anglicane, assemblée en 1867, «aux croyants dans le Christ Jésus, aux prêtres, aux diacres et aux laïcs de l'Église du Christ en communion avec la branche anglicane de l'Église catholique».
Déjà dans cette première encyclique il fut question de l'attitude envers Rome, mais d'une façon purement négative :
Nous vous engageons instamment à vous garder, vous-mêmes et les vôtres, des superstitions grandissantes et des autres additions par lesquelles la vérité de Dieu a été obscurcie ces derniers temps. C'est le cas notamment de la prétention à la souveraineté universelle sur l'héritage de Dieu que réclame pour soi le Siège de Rome, ainsi que de l'élévation de fait de la Bienheureuse Vierge Marie au rang de médiateur à la place de son divin Fils, et l'adresse de prières à elle comme à quelqu'un qui intercède entre Dieu et les hommes. Préservez-vous de pareilles choses, nous vous en supplions, sachant bien que le Dieu jaloux ne donne son honneur à personne d'autre[3].
L'encyclique publiée par la seconde Conférence de Lambeth en 1878 s'exprime de façon analogue au sujet du Siège de Rome :
Le fait qu'en tant d'Églises et de communautés chrétiennes du monde entier s'élève une protestation solennelle contre les usurpations du Siège de Rome, ainsi que contre les doctrines nouvelles promulguées par son autorité, est un motif de reconnaissance envers le Dieu tout-puissant. La sympathie de l'Église anglicane va aux Églises et aux fidèles qui protestent contre ces erreurs et qui, parfois, endurent de particulières difficultés tant du fait des assauts de l'incroyance que des prétentions de Rome.
Nous ne reconnaissons qu'un unique Médiateur entre Dieu et les hommes, l'homme Jésus-Christ, qui est au-dessus de toutes choses, Dieu à jamais. Nous rejetons comme contraire aux Écritures et à la vérité catholique toute doctrine qui voudrait ravir à la Majesté divine quelque chose de la plénitude de la bonté qui réside en lui (le Christ) et qui a donné une valeur infinie au sacrifice sans tache qu'il a offert une fois pour toutes, sur la Croix, pour les péchés du monde entier.
C'est pourquoi il est de notre devoir de signaler aux fidèles que l'acte posé par l'évêque de Rome, au Concile du Vatican en l'année 1870 - acte par lequel, sur la base d'une prétendue infaillibilité, il s'est arrogé une suprématie sur tous les hommes en matière de foi et de morale - est un empiètement sur les prérogatives du Seigneur Jésus Christ[4].
Bien que la question de l'union avec des Églises non anglicanes ne fût pas encore débattue au cours de la seconde Conférence de Lambeth, l'idée y fut cependant émise de fixer chaque année un jour de prière pour l'unité des chrétiens. L'encyclique de 1878 se terminait en exprimant l'espoir que les chrétiens du monde entier voudraient bien prendre connaissance de son contenu et faire connaître leur opinion à son sujet :
Nous ne prétendons pas être les maîtres de l'héritage de Dieu. Nous recommandons cependant les résultats de cette Conférence à la considération de nos frères, éclairés par le Saint-Esprit de Dieu. Et nous demandons dans la prière que tous ceux qui, répandus dans le monde, invoquent le nom de notre Seigneur Jésus-Christ, puissent être un en esprit, puissent être unis dans une fellowship, puissent garder fermement la foi qui a été transmise aux saints, et qu'ils adorent leur seul Seigneur dans un esprit de pureté et d'amour[5].
II. La Conférence de 1888 et l'infaillibilité
L'attitude de la Communion anglicane envers l'Église de Rome prit pour la première fois une tournure plus œcuménique au cours de la troisième Conférence de Lambeth en 1888. Le cadre en fut le rapport sur la Home-reunion (on entend par là la réunion à l'intérieur du monde de langue anglaise). Ce rapport fut présenté par la première des trois commissions chargées au début de la Session de rendre compte des relations déjà existantes, ou éventuellement à nouer, avec les Églises chrétiennes les plus diverses du monde entier. Ce fut là le premier véritable effort œcuménique de grande envergure qui ait jamais été entrepris depuis la désunion des Église[6].
A son grand regret, la commission a été d'avis que, dans les circonstances présentes, il est sans utilité de traiter la question de l'union avec nos frères de l'Église romaine. Elle se rend compte, en effet, qu'aucune proposition en ce sens ne serait prise en considération par les autorités de cette Église sans une soumission totale de notre part aux prétentions à l'autorité absolue, et une acceptation des autres erreurs, doctrinales et disciplinaires, contre lesquelles nous avons été obligés de protester pendant trois siècles par fidélité à la Parole de Dieu et aux véritables principes de son Église[7].
Cette citation nous fournit un point de départ de grand intérêt. Elle a été rédigée en termes choisis intentionnellement et avec soin. Elle évoque clairement et sans voiles le principe et le critère qui déterminent l'attitude envers Rome. Sans doute, les rapports de Lambeth manifesteront la présence, chez les évêques de la Communion anglicane, d'une attention croissante à l'éventualité d'un rapprochement entre Cantorbéry et Rome. Il ne faudra cependant pas en conclure que les Église anglicanes sont, pour leur part, en train de modifier leurs positions de principe.
Tant au sein des Églises anglicanes qu'en dehors de celles-ci se rencontre une opinion selon laquelle il n'y aurait rien de commun entre les deux ruptures, celle qui a séparé Cantorbéry et Rome d'une part, et celle qui a divisé la Réforme et l'Église de Rome d'autre part. Ces deux ruptures seraient de nature toute différente et il ne faudrait par conséquent ne découvrir entre elles qu'une coïncidence plus ou moins accidentelle. Pareille façon de voir a le double défaut de contredire la réalité historique, et de rendre impossible la compréhension des motifs profonds et des intentions réelles qui inspirent les déclarations et les propositions anglicanes. Il est bien vrai qu'en vertu de leur respect plus grand envers la réalité historique, les Églises anglicanes présentent une ressemblance extérieure plus marquée avec l'Église de Rome que ne le font les autres Églises de la Réforme. Il ne s'ensuit aucunement, comme le prochain chapitre le fera voir, qu'elles doivent être rangées parmi les Églises de «type catholique».
On peut signaler la présence, dans les Églises anglicanes, de divers points extérieurs qui, faisant défaut dans les autres Églises de la Réforme, laissent paraître une ressemblance avec l'Église de Rome. Une enquête théologique plus attentive dévoile cependant que ces points de ressemblance reçoivent des autorités officielles de l'anglicanisme une interprétation qui s'appuie sur une conception de l'Écriture Sainte, de l'Évangile et de la foi chrétienne (consciemment ou non) en parfaite harmonie avec les principes fondamentaux de la Réforme.
Ceci ne se comprend pas bien sans une connaissance suffisante de la nature, de la mentalité, de l'attitude intérieure et de la spiritualité de la Réforme. Faute d'une certaine familiarité avec le protestantisme continental, les anglicans ne réalisent pas toujours à quel point ils sont «protestants».
L'interprétation évangélique et réformée des points de ressemblance avec les Églises «catholiques» s'impose surtout à qui néglige les opinions particulières pour se baser exclusivement sur les déclarations officielles.
Certains observateurs catholiques romains en concluent, à tort, que les anglicans manquent de principes, de logique et même de bonne foi. Pareil jugement repose sur une méprise, dont sont responsables les tenants de positions extrêmes tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'anglicanisme. En effet les anglo-catholiques les plus avancés, comme les protestants les plus radicaux, dénient aux Églises anglicanes leur parenté étroite avec la Réforme.
Revenons maintenant au passage du rapport de Lambeth de 1888 dans lequel il s'agissait de l'Église catholique. On y lit un double refus.
Le premier refus porte sur la «prétention romaine à l'autorité absolue». L'anglicanisme s'accorde dans cette attitude avec toutes les autres Églises non-romaines.
Ce qui n'apparaît peut-être pas au premier regard, c'est que ce refus s'adresse tout autant à n'importe quelle autre Église qui revendiquerait pour elle-même ou pour sa confession une autorité exclusive et absolue.
Ce refus anglican doit se comprendre à la lumière d'une tradition quatre fois séculaire. Celle-ci débute avec les deux apologies classiques de Jewel (1562) et de Hooker (1594)[8]. Viennent ensuite les innombrables ouvrages du XVIIè siècle, âge d'or de la théologie anglicane, où fleurirent les théologiens carolins (Caroline Divines). Enfin, de nos jours, de nombreuses publications défendent le point de vue anglican authentique contre les déviations possibles du côté protestant ou du côté catholique-romain.
Le recours à la tradition anglicane fait apparaître que le motif principal de rejet de toute prétention à l'autorité absolue réside dans la ferme conviction que l'autorité absolue n'appartient qu'à «la sainte Parole de Dieu» qui parle dans la Sainte Écriture.
L'anglicanisme ne nie pas qu'éclairée par l'Esprit-Saint, l'Église ait, en fait et quant à l'essentiel, joui d'une certaine «infaillibilité» dans la prédication de la Parole de Dieu et dans l'annonce du témoignage rendu au Christ par l'Écriture. Ce qu'il nie, c'est que cette infaillibilité existe toujours per se, que des autorités ecclésiastiques puissent revendiquer cette infaillibilité comme une qualité qui leur appartienne en propre. L'infaillibilité réside toujours dans la Parole de Dieu elle-même et doit toujours lui être référée.
La conception que se faisaient les réformateurs de la place et du rôle de la Parole de Dieu, vivante, créatrice et en toutes choses seule déterminante, était partagée par les théologiens anglicans classiques[9]. A cet égard, la théologie anglicane part, elle aussi, du principe de la sola Scriptura, compris dans son sens originel et positif.
En conséquence, l'anglicanisme ne reconnaît à aucune hiérarchie ecclésiastique, pas plus qu'à une déclaration officielle, le droit de prétendre à une autorité infaillible et absolue. Sur ce point d'importance capitale, l'anglicanisme ne se range décidément pas du côté des Églises de type «catholique» : ni du côté de celle de Constantinople, ni du côté de celle de Rome.
La position anglicane résulte plutôt de l'acceptation des principes fondamentaux de la Réforme. Cependant, ces principes ont été alliés consciemment à l'ouverture, typiquement anglicane, à tous les apports, anciens ou modernes, de l'humanisme et de l'étude scientifique des sources. Celles-ci comptent en premier lieu la Sainte Écriture, mais aussi les écrits des Pères de l'Église, les décrets des Conciles de l'Église indivise, les livres liturgiques et toutes les autres sources où peuvent s'apprendre «les vrais fondements de l'Église de Dieu».
Il en est résulte que l'Église anglicane ne s'est jamais donné la peine de bien préciser le contenu de la foi. Elle a toujours maintenu une distinction très nette entre le contenu central et essentiel de la foi apostolique et l'élaboration théologique poussée dans le détail, entre les données immuables et permanentes et l'interprétation théologique de sa valeur passagère, insuffisante et transitoire. Elle a toujours manifesté de la répugnance envers les spéculations abstraites éloignées des faits solidement établis.
L'anglicanisme a toujours gardé son ouverture aux correctifs et aux points de vue nouveaux. Il vit d'une série d'héritages accumulés : l'héritage de l'Église indivise, celui de l'humanisme, celui de la Réforme du XVIè siècle, et celui qui est constitué par tout ce que les siècles postérieurs ont transmis d'expériences inédites et de notions renouvelées.
L'appel à la tradition ne signifie pas que celle-ci soit, dans l'anglicanisme, une source distincte, égale ou supérieure à l'Écriture. Cependant, pour qui désire se former une opinion bien fondée sur ce que l'Écriture veut dire quand elle parle des formes dont la vie chrétienne s'est revêtue progressivement au cours des premiers siècles, seule la tradition permet de voir quel rôle la Parole de Dieu a joué dès les origines dans la discipline de l'Église.
Semblable respect pour l'antiquité et même appréciation des «vrais principes de l'Église de Dieu» se rencontrent également dans les écrits des Réformateurs du XVIè siècle et notamment chez Melanchton, Bucer et Calvin et, dans les siècles ultérieurs, chez Hugo de Groot (Grotius) par exemple, et chez tous les théologiens pourvus d'une vaste érudition théologique et d'une connaissance des sources de l'antiquité chrétienne.
Dès ses débuts, la Réforme a été aux prises avec une tension entre les dirigeants et le peuple. Des mouvements fanatiques et autres courants extrémistes surgirent du peuple qui se laissait entraîner par le dégoût de tout ce qui pouvait rappeler le papisme abhorré. Des instincts populaires de ce genre poursuivent leur action occulte et s'expriment à temps et à contretemps en Angleterre dans le slogan No popery. Face à de telles formes d'extrémisme, les réformateurs anglicans, tout comme ceux du continent, se réclamèrent toujours de la tradition de l'Église ancienne et du sentiment commun des Pères.
On entend souvent prétendre, de nos jours, que l'anglicanisme se distingue du christianisme issu de la Réforme par son recours à l'autorité normative de l'antiquité dans l'interprétation de l'Écriture en des matières concernant l'organisation ecclésiastique, les ministères et la liturgie. En réalité le recours à l'autorité normative de l'antiquité n'est aucunement caractéristique de l'anglicanisme. Il ne peut servir à le distinguer des Églises issues de la Réforme. Il ne permet pas de le ranger parmi les Églises qui, par leur conception de l'autorité et par leur attitude envers l'Écriture et la tradition, sont complètement étrangères à l'anglicanisme authentique des documents officiels.
Le texte de 1888, cité plus haut, exprimait également un second refus. Outre les prétentions à une autorité absolue, il rejetait encore d'«autres erreurs tant théoriques que pratiques». Ces erreurs ne sont pas citées nommément dans le texte. Il importe cependant que nous nous représentions clairement la nature et l'importance des erreurs ici visées.
Les évêques assemblés ont certainement eu en vue, en ordre principal, les erreurs romaines qui sont condamnées par les 39 Articles de l'Église d'Angleterre. Ces Articles of religion, parfois dénommés ironiquement articles of division, sont considérés par certains anglicans comme un document désuet, vestige d'une époque révolue. Il n'en reste pas moins que le droit ecclésiastique anglican, révisé en 1959, y voit une source autoritative de la doctrine professée par l'Église d'Angleterre :
Article A, 5 : La doctrine de l'Église d'Angleterre est basée sur les Saintes Écritures et sur les enseignements des Pères anciens et des Conciles de l'Église qui sont en accord avec les dites Écritures. Cette doctrine s'exprime en particulier dans les 39 Articles de religion, le Livre de la Prière Commune et l'Ordinal[10].
Demandons-nous quels sont les enseignements et les pratiques qui sont rejetées par les 39 Articles comme erreurs de l'Église romaine.
Les articles 9 à 21 inclusivement condamnent de façon indirecte divers enseignements touchant le péché originel, le libre arbitre, la justification, les bonnes œuvres, le péché commis après le baptême, l'élection et la prédestination, l'obtention du salut éternel, l'Église et l'autorité dans l'Église. Toutes ces doctrines sont considérées comme des erreurs romaines. Sur tous ces points, l'anglicanime s'est rangé, avec pleine conviction et parfaite conscience, du côté de la Réforme, contre l'Église de Rome. Sans doute, on a parfois cherché à montrer que ces articles fondamentaux peuvent s'interpréter d'une manière conforme aux déclarations et à l'enseignement du Concile de Trente. Mais si cette interprétation était fondée, il s'ensuivrait que la doctrine de la Réforme elle aussi s'accorderait sur ces points fondamentaux avec celle de l'Église de Rome. Il ne faudrait cependant pas en conclure que les Églises anglicanes se situent du côté de l'Église de Rome, car la doctrine des articles 9 à 21 est une doctrine purement réformée. Nous reviendrons sur ce point dans le chapitre suivant.
C'est à partir de l'article 22 que les erreurs romaines apparaissent nommément désignées. Cet article est intitulé «du Purgatoire». En voici la traduction :
La doctrine romaine concernant le purgatoire, les indulgences, le culte et l'adoration tant des images que des reliques, et aussi l'invocation des saints, est une chose frivole, une pensée chimérique et dépourvue de fondement dans l'Écriture et qui est plutôt contraire à la Parole de Dieu[11].
La dévotion au sacrement de l'Eucharistie qui s'est développée au moyen âge est rejetée à la fin de l'article 25 :
Les sacrements n'ont pas été institués par le Christ pour être contemplés et transportés, mais pour que nous en usions comme il convient[12].
La doctrine de la transsubstantiation est rejetée à l'article 28 : «De la Cène du Seigneur» :
La transsubstantiation (ou le changement de la substance du pain et du vin) dans la Cène du Seigneur ne peut être prouvée par la Sainte Écriture. Elle est contraire aux claires expressions de l'Écriture, elle détruit l'essence du sacrement et elle a fait naître de nombreuses superstitions[13].
Le même article se termine en déclarant une fois de plus que «le sacrement de la Cène du Seigneur n'a pas été destiné, par l'institution du Christ, à être réservé, transporté, élevé ni adoré»[14].
Enfin l'article 31, en termes tranchés, prend nettement position avec la Réforme continentale contre la doctrine romaine du sacrifice de la messe :
L'offrande du Christ faite une seule fois est cette parfaite rédemption, propitiation et satisfaction pour tous les péchés du monde, originel et actuels. Et il n'y a d'autre satisfaction pour le péché que celle-là seule. C'est pourquoi les sacrifices des messes, dans lesquels on disait communément que le prêtre offrait le Christ pour les vivants et pour les morts, pour obtenir la rémission de la peine ou coulpe, étaient des fables blasphématoires et de dangereuses tromperies[15].
A l'instar de la Réforme continentale, l'anglicanisme a vu dans la célébration de «la Cène du Seigneur» un office de communion (the Holy Communion). La Cène est le mémorial de la mort sur la Croix du Fils unique de Dieu, Jésus-Christ, lui qui, comme le dit le Canon anglican,
par l'offrande de lui-même faite une seule fois, y (à la Croix) accomplit un sacrifice, une oblation et une satisfaction plénière, parfaits et suffisants, pour les péchés du monde entier, et qui institua, et qui recommanda dans son saint Évangile de continuer, un mémorial perpétuel de cette précieuse mort jusqu'à ce qu'il revienne[16].
On a fréquemment fait appel à ce texte liturgique pour prouver le caractère sacrificiel de l'office anglican de communion. Ceci nous oblige à bien voir que c'est la notion réformée du sacrifice qui domine ici. En effet, le sacrifice consiste, dans cette liturgie, principalement, dans la louange et l'action de grâces, et secondairement, dans une consécration générale de soi-même à Dieu. La prière anglicane après la communion demande, en effet, à Dieu «d'accepter ce sacrifice de louange et d'action de grâces», et plus loin : «Nous vous offrons et nous présentons, Seigneur, nous-mêmes, notre âme et notre corps, en un sacrifice raisonnable, saint et vivant»[17].
L'anglicanisme a opposé à la doctrine et à la pratique de l'Église romaine une nouvelle conception du caractère sacrificiel de la Cène. Cette conception nouvelle met l'accent sur la suffisance du sacrifice du Christ, en ce sens que la Messe ne peut en aucun cas avoir un caractère propitiatoire et qu'elle peut encore moins être considérée comme un sacrifice au sens vrai et propre du mot[18].
Le Dr Carpenter, actuellement évêque d'Oxford, a donné en 1955 une nouvelle édition revue de l'excellent commentaire de Bicknell sur les 39 Articles. D'après ce commentaire, l'article 31 ne rejetterait pas la doctrine du sacrifice eucharistique, mais condamnerait seulement les abus populaires courants en ce domaine[19]. Il en serait de même des abus condamnés dans les autres articles cités plus haut.
Le commentaire traite chacun des articles en faisant des efforts méritoires, d'une part pour acquitter l'Église catholique des erreurs qui lui furent imputées à tort, et d'autre part pour souligner que le sens original des 39 Articles est catholique. C'est ainsi qu'il fait précéder du titre «le sacrifice eucharistique» le sixième paragraphe du chapitre qui traite des Articles ayant trait à la sainte communion. Le caractère sacrificiel de la sainte Eucharistie est littéralement maintenu et il est conçu d'une façon plus «catholique» que ne l'auraient voulu les auteurs des 39 Articles. On peut voir là la marque d'une évolution progressive de la théologie anglicane dans la direction du catholicisme. Que l'on tienne compte par ailleurs du développement récent de la théologie sacramentaire au sein de l'Église catholique, et l'on sera en droit de parler d'un rapprochement.
Il n'en reste pas moins que le commentaire de Bicknell et Carpenter demeura adversaire des déclarations du Concile de Trente sur la messe, bien qu'il ne semble pas ignorer les divergences qui existent en ce domaine parmi les théologiens catholiques. Carpenter n'a pas d'objection à adresser à la conception qui voit dans la messe une représentation du sacrifice de la Croix jusqu'au retour du Christ. Il nie cependant de manière explicite que le sacrifice de la messe soit «vere propitiatorium», et un «verum et proprium sacrificium». L'auteur se rend compte également qu'il faut chercher dans la différence des interprétations du caractère sacrificiel de la messe, une des principales raisons qui ont motivé la déclaration de 1896 sur l'invalidité des ordinations anglicanes :
Le récent rejet par Rome de nos ordinations (orders) repose sur notre refus d'accepter une doctrine qui voit dans l'Eucharistie un sacrifice qui s'ajoute à celui du Calvaire. La protestation élevée par notre article gardera toute son actualité aussi longtemps que cette doctrine sera enseignée, quelque raffinée qu'en soit la forme[20].
Il sortirait du cadre de ce chapitre d'approfondir la différence qui, selon les articles cités, sépare Rome et Cantorbéry. Le but du présent chapitre se borne en effet à exposer l'attitude officielle de la Communion anglicane à l'égard de l'Église de Rome.
Touchant le rapport de 1888, il est utile d'indiquer pour terminer que l'encyclique d'introduction établit une comparaison entre l'Église d'Orient et l'Église latine :
Nous constatons avec reconnaissance que (du côté de l'Orient) ne se dresse aucun des obstacles qui barrent la route à la communion avec les Latins : ni la promulgation du dogme selon lequel l'infaillibilité de l'Église se concentre dans la personne du Souverain Pontife, ni la doctrine de l'Immaculée Conception, ni aucun autre des dogmes imposés par décret de conciles papaux. L'Église de Rome a toujours traité sa sœur d'Orient avec injustice. Elle envoie ses évêques comme des intrus dans les anciens diocèses, et elle continue à appliquer une méthode de prosélytisme actif[21].
III. La Conférence de 1897 et les ordinations anglicanes
La Conférence de Lambeth de 1897 ne confia plus la question de l'unité chrétienne à trois commissions distinctes comme précédemment. Dorénavant il n'y a plus qu'une seule commission, et cette manière de faire est devenue la coutume dans les Conférences ultérieures, bien qu'une majorité, semble-t-il, ait souhaité voir la commission œcuménique divisée en diverses sous-commissions.
La commission œcuménique de 1897 avait pour tâche «d'étudier et de faire rapport sur la question de l'unité chrétienne, touchant : a) les Églises d'Orient ; b) la Communion latine ; c) les autres groupes (Bodies) chrétiens»[22]. Un paragraphe à part fut donc consacré à l'Église catholique, comme c'est devenu l'habitude jusqu'à nos jours.
Ce paragraphe, en 1897, concernait exclusivement la question des ordinations anglicanes (ordinations). On sait que ces ordinations avaient été déclarées invalides par Léon XIII, l'année précédente, dans la Bulle Apostolicae curæ du 13 septembre 1896.
Se conformant à tous les décrets de ses prédécesseurs concernant la même cause, les confirmant pleinement et les renouvelant par son autorité, le pape déclara «de Notre propre mouvement et de science certaine, nous prononçons et déclarons que les ordinations conférées selon le rite anglican ont été et sont absolument vaines et entièrement nulles, irritas prorsus fuisse et esse omninoque nullas»[23].
La possibilité d'un rapprochement et d'une union entre Rome et Cantorbéry était envisagée pour la première fois. Ce début ne fut pas heureux et prometteur. Au point de vue œcuménique, il y a là un problème extrêmement délicat, et pour plusieurs raisons.
Il est clair, en particulier, que la question n'est pas de nature purement juridico-canonique. La déclaration pontificale n'avait pas simplement pour objet de rappeler que l'ordination reçue dans l'Église anglicane ne suffisait pas pour donner le pouvoir d'exercer le ministère dans l'Église catholique.
Une exclusive de ce genre existe aussi dans l'Église anglicane, comme on peut le voir dans l'Ordinal de 1549. La préface de l'Ordinal dit, en effet, que «personne ne peut être regardé comme légitime évêque, prêtre ou diacre dans l'Église d'Angleterre s'il n'en a reçu le pouvoir et n'y a été ordonné selon le rite de l'Ordinal et s'il n'a reçu antérieurement une ordination par un évêque»[24]. La pratique de l'Église d'Angleterre montre que cette règle n'a de valeur juridique qu'au sein de la dite Église et ne prétend porter aucun jugement sur la valeur des ministères et des ordinations des autres Églises[25].
Les mots «irritas prorsus fuisse et esse omninoque nullas» disent bien qu'il ne s'agit pas d'illicéité mais de nullité. Le mot irritas signifie invalide au sens de dépourvu d'effet, sans but et vain ; de même, les mots omninoque nullas répètent surabondamment que les ordinations sont en elles-mêmes totalement nulles et sans aucune valeur (en anglais: totally nul and void). La déclaration pontificale n'a donc pas un caractère historique ou canonique, mais ontologique. Le pape veut dire par là que les ordinations en question ne produisent à aucun égard, dans l'ordre surnaturel, les effets qu'elles prétendent produire.
Ce n'est pas peu de chose. Nous comprenons bien mieux ce que cela comporte, maintenant que nous avons dépassé le stade polémique et apologétique et que nous recherchons une approche œcuménique. Cela signifie ceci, qu'une Église a existé pendant plusieurs siècles, qu'elle possède des millions de membres, qu'en son sein, jour après jour, une foule de ministres ordonnés pensent accomplir la tâche que le Christ leur a confiée, mais qu'au jugement d'une autre Église elle n'est pas vraiment une Église, bien plus, qu'elle est dans l'illusion quand elle s'imagine que ses ministres parlent et agissent par l'autorité du Christ et que ses sacrements ont la signification et l'efficacité qu'elle leur attribue et que dans sa bonne foi elle en attend.
Le baptême administré par un ecclésiastique anglican ne constitue qu'une exception apparente. En effet, si l'Église de Rome en reconnaît la validité, ce n'est pas parce que le ministre de l'Église anglicane aurait reçu une ordination valide et administrerait le sacrement en sa qualité de ministre d'une véritable Église. C'est uniquement parce que, selon la doctrine de l'Église romaine, tout baptême est valide, quel qu'en soit le ministre, du moment qu'il est conféré avec de l'eau accompagnée de la formule sacramentelle, et que la personne qui baptise a l'intention de «faire ce que fait l'Église». La reconnaissance éventuelle d'un baptême «non catholique» ne prouve rien, par conséquent en faveur du ministère et des sacrements de l'Église en cause.
Que peut faire une Église qui se voit atteinte par une déclaration aussi destructrice que celle de l'invalidité de ses ordinations ? Sans aucun doute, passer outre à cette déclaration et n'en tenir aucun compte.
L'Église qui accepterait pareille déclaration, reconnaîtrait par le fait même qu'elle n'est pas une Église au vrai sens du mot et elle abaisserait son ministère sacramentel au rang des cérémonies dépourvues de contenu. Elle renoncerait par le fait même à sa propre existence. Dans leur réponse détaillée du 28 mars 1897, les archevêques de Cantorbéry et de York écrivirent de la déclaration de nullité de leurs ordinations qu'elle était «une lettre écrite dans l'intention de renverser notre statut ecclésiastique tout entier»[26].
Les deux écrits, la lettre du pape et la réponse des archevêques anglicans, montrent que la question peut être abordée de différents côtés. Le pape examine la question à partir de la pratique de l'Église et de la théologie morale sur la forme et l'intention qui sont exigées pour la validité des ordinations. Les archevêques adoptent un point de départ typiquement réformé ; ils partent, en effet, de l'Écriture Sainte et de la tradition de l'Église ancienne. Ils estiment en outre que le pape n'a tenu aucun compte de l'intention générale, exprimée dans l'introduction à l'Ordinal de 1549, à savoir que le but est de perpétuer les ministères des évêques, des prêtres et des diacres qui ont existé dans l'Église depuis l'âge apostolique. Le pape, de son côté, met tout l'accent sur l'intention personnelle des compilateurs de l'Ordinal et sur celle des évêques qui ont procédé à des ordinations sous les règnes d'Edouard VI et d'Elisabeth I.
Le pape appuie sa conclusion sur deux faits. Le premier est que l'Ordinal de 1549 a omis à dessein certains passages du rite romain, et le second, que l'office eucharistique n'a plus, dans le Book of Common Prayer, le caractère du sacrifice de la messe, mais s'y présente comme un office de communion. La combinaison de ces deux faits amena le pape à la conclusion que l'intention des compilateurs n'a pas porté sur ce qui est requis à la validité. La formule : «Recevez le Saint-Esprit», aurait acquis de la sorte un sens nouveau qui rendrait invalide la forme de l'ordination.
Le père Francis Clark, S.J., a essayé récemment de jeter quelque lumière dans la discussion menée par les deux parties depuis 1896, en s'attachant à une analyse minutieuse de la notion d'intention et des arguments qui sont basés sur cette notion dans la lettre apostolique[27]. Il donne en outre un aperçu complet des écrits publiés de part et d'autre sur la question[28].
Nous reviendrons dans notre dernier chapitre sur le problème de la validité des ordinations anglicanes, en tenant compte de la situation œcuménique actuelle. Nous nous bornerons ici à exposer l'attitude prise par la Conférence de Lambeth en 1897 face à la déclaration pontificale sur l'invalidité de ces ordinations.
La réponse conjointe des archevêques de Cantorbéry et de York est plus historique que dogmatique. Ils voyaient tout autrement les conséquences qui découlèrent de la Réforme pour l'Église d'Angleterre, et ils étaient d'avis que la lettre apostolique donnait une image inexacte des choses. D'ailleurs, pensent-ils, si les objections formulées contre la forme et l'intention de l'Ordinal de 1549 étaient justifiées, on pourrait aussi prouver historiquement que l'Église de Rome a connu des époques où ses ordinations ne satisfaisaient pas à la forme requise (Accipe Spiritum Sanctum) ni à la matière exigée (imposition des mains), ce qui devait entraîner l'invalidité de ses propres ordinations :
C'est ainsi que le pape anéantit ses propres ordres en enlevant toute validité aux nôtres ; c'est ainsi qu'il condamne sa propre Église. Ce grand péril de nullité a menacé l'Église romaine depuis le jour où le pape Eugène IV a introduit une nouvelle matière et une nouvelle forme de l'ordre sans dire un mot de celles qui sont la véritable matière et la véritable forme de ce sacrement. Personne, en effet, ne sait combien d'ordinations ont peut-être été faites, conformément à la doctrine de ce pape, sans l'imposition des mains, et sans la forme qui convient au sacrement. Le pape Léon XIII réclame l'emploi d'une forme inconnue aux évêques de Rome ses prédécesseurs, et l'intention qu'il réclame en même temps est défectueuse dans le catéchisme de l'Église orientale[29].
A regarder les choses d'un point de vue anglican, ce serait précisément l'Église de Rome qui, au cours du moyen âge, est tombée d'une innovation dans une autre, tandis que l'Église d'Angleterre, elle, a rétabli l'ordre ancien conformément aux exigences de la Parole de Dieu et des authentiques principes de l'Église de Dieu. Il est évident qu'en tout ceci, Rome et Cantorbéry sont partis de normes et de conceptions de l'autorité radicalement différentes. Il s'en est suivi qu'aucun des arguments mis en œuvre n'a atteint son but auprès du parti opposé. Le Père Clark le faisait remarquer déjà :
Les esprits peu préparés à admettre que le magistère officiel de l'Église catholique romaine et l'enseignement reconnu de ses théologiens fournissent un guide sûr en ces questions de théologie sacramentelle, n'accepteront pas la validité de mes prémisses (c'est-à-dire les prémisses catholiques)[30].
La discussion sur la validité des ordinations anglicanes n'aboutira à rien aussi longtemps qu'elle se restreindra strictement au thème des ordinations elles-mêmes. Elle aurait avantage à se situer à un niveau ecclésiologique aussi large que possible. Il sera inutile de rouvrir le débat sur la validité des ordinations anglicanes, tant qu'on n'aura pas obtenu un accord sur la manière de concevoir l'essence, la structure, l'exercice et l'autorité de l'Église, ainsi que sur la nature et la discipline des sacrements (en particulier de l'Eucharistie) et, en étroite connexion avec ceci, sur la nature du sacerdoce.
En réalité, il n'y a jamais eu de dialogue sur ces questions. A l'époque préœcuménique, les Églises se combattaient, elles ne dialoguaient pas. La lettre apostolique Apostolicæ curæ et la réponse anglicane furent toutes deux des monologues, dont la conclusion était fixée avant tout échange de vues avec l'autre partie.
Un dialogue œcuménique en cette matière demeure-t-il possible ? On peut se demander si Léon XIII ne l'a pas exclu d'avance par la conclusion de sa lettre. Il écrivait en effet :
Nous décrétons que cette lettre et tout ce qu'elle renferme ne pourra jamais être taxée ou accusée d'addition, de suppression, de défaut d'intention de notre part ou de tout autre défaut ; mais qu'elle sera toujours valide et dans toute sa force, qu'elle devra être inviolablement observée par tous, de quelque grade ou prééminence qu'on soit revêtu, soit en jugement soit hors jugement ; déclarant vain et nul tout ce qui pourrait y être ajouté de différent par n'importe qui, quelle que soit son autorité et sous n'importe quel prétexte,sciemment ou par ignorance, et rien de contraire ne devra y faire obstacle[31].
Toutes les possibilités imaginables sont ici nommément citées et exclues à l'avance et de façon définitive. Une échappée demeure, c'est que le texte est rédigé en un style curial auquel on n'attache peut-être pas à Rome l'importance qu'on imagine souvent ailleurs, et que cette forme de prétention à l'autorité perd son sens à notre époque.
Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas ici une définition dogmatique infaillible, mais une norme disciplinaire qui per se n'est pas infaillible. Cette déclaration exige, tant qu'elle reste en vigueur, d'être observée par tous ceux qui sont soumis à la juridiction du pape.
Il n'est pas impossible cependant, que les circonstances se modifiant, les relations entre les deux Églises puissent s'améliorer. Des faits et des points de vue nouveaux peuvent se présenter, qui rendraient souhaitable, ou même nécessaire, un nouvel examen des ordinations anglicanes. Il est vraisemblable que, vu la diffusion de l'esprit œcuménique, le pape ne se sente pas lié par les décisions prises par ses prédécesseurs touchant le permis et le défendu dans le domaine œcuménique.
Ceci ne veut pas dire que la question des ordinations anglicanes ne soit pas un des plus épineux problèmes de l’œcuménisme. Il me semble que la déclaration d'invalidité s'est appuyée sur des faits historiques vraiment défavorables. Le principal de ces faits est que les auteurs de l'Ordinal de 1549, et tout autant les évêques des règnes d'Edouard VI et d'Elisabeth I ont bien reconnu le fondement scripturaire et l'origine apostolique du triple ministère des évêques, des prêtres et des diacres, mais qu'en réalité ils ont eu une conception réformée du sacerdoce et des ordinations. Quelques publications récentes, basées sur une étude des sources, n'ont pu que confirmer la chose. Le luthérien américain Cari Mayer, spécialiste de l'histoire ecclésiastique, aboutit à la conclusion suivante :
Matthew Parker fut sacré archevêque (de Cantorbéry) le 17 décembre 1559 dans la chapelle de Lambeth. William Barlow, John Scory, qui fit le sermon d'installation, Myles Coverdale et John Hodgkins prirent part au rite solennel. Ni Matthew Parker, ni la reine, ni personne d'autre ne se sont souciés de le sacrer dans la succession apostolique ». Il fut sacré par des évêques en raison de la dignité de la fonction, non pour obéir à la nécessité de maintenir une continuité ininterrompue. La succession apostolique ne devint que plus tard le souci d'hommes d'Église[32].
Il serait possible d'établir avec de nombreuses preuves à l'appui qu'il subsistait quelques «romains» parmi les évêques du règne d'Elisabeth. Il n'empêche cependant que la grande majorité d'entre eux étaient, dans leurs conceptions comme en fait, zwingliens, calvinistes, puritains ou luthériens. Il me semble exclu que ces évêques aient pu avoir, personnellement, au cours des fonctions d'un sacre, l'intention «catholique» de sacrer des évêques ou d'ordonner des prêtres et des diacres qui est exigée par l'Église de Rome comme absolument nécessaire à la validité de ces ordinations. On est alors obligé de se demander si, et dans quelle mesure, l'interprétation personnelle de l'intention fixée par l'Église a un effet quelconque sur la validité de l'ordination.
Le Dr Norman Sykes, historien de l'Église à Cambridge, puis doyen de Winchester (décédé en 1961), a rassemblé d'innombrables matériaux extrêmement importants destinés à éclairer la conception anglicane des ministères. Il a publié cette documentation dans l'ouvrage intitulé Old Priest and New Presbyter[33]. Selon cet auteur, l'anglicanisme du XVIè siècle, tout en conservant l'usage du mot «prêtre», n'a pas vu en lui un sacerdos mais un presbyter au sens réformé de ce mot.
Demandons-nous maintenant quelle fut la réaction de la Conférence de Lambeth de 1897 à la lettre Apostolicæ curæ.
Le paragraphe qui y a trait dans le rapport présenté par la commission œcuménique débute en soulignant que le pape Léon XIII a manifesté dans une série de documents son désir de l'unité chrétienne. «Malheureusement il a déclaré que la seule base possible était la reconnaissance de sa suprématie papale comme étant de droit divin»[34]. La commission prend occasion de la lettre du pape sur les ordinations anglicanes et de la réponse des archevêques de Cantorbéry et de York pour faire remarquer ce qui suit :
Bien que la controverse soit une méthode qui rarement favorise l'unité, il y a cependant des raisons de se montrer reconnaissant : dans le ton courtois avec lequel cette discussion a été menée ; dans le fait que le pape a laissé tomber bien des choses qui étaient sans intérêt pour la question et de valeur douteuse mais qui précédemment rendait la discussion sans issue ; dans la délimitation de l'étendue de la controverse à quelques points bien définis ; dans la large documentation qui rassemble les résultats de bien des recherches ; dans le désir, enfin, manifesté de part et d'autre, de chercher à se comprendre et d'éviter consciemment les préjugés. Le développement de cet esprit donne de la valeur même à une controverse ; nous envisageons avec une entière confiance le résultat d'une controverse de ce genre[35].
Ce passage exprime bien la mentalité œcuménique qui caractérise l'anglicanisme jusqu'à nos jours. L'œcuménisme, chez l'anglican, tient plus en une attitude qu'en un système, plus dans une intuition que dans un plan préétabli. Il va son chemin en cherchant et en tâtonnant. Il n'attend peu ou prou de la polémique et de la théologie de la controverse. La tâche de l'Église anglicane est de découvrir de nouvelles possibilités, de nouer de nouvelles relations amicales dont on puisse attendre qu'elles apportent des résultats pratiques sans s'épuiser dans des considérations théoriques sans fin. Dès que se présentent des difficultés insurmontables, les Églises anglicanes s'efforcent de tirer le bien du mal ; elles ne ferment jamais la porte après elles, elles attendent avec patience qu'une occasion plus favorable se présente et regardent vers l'avenir avec espoir.
L'attitude œcuménique adoptée par la Conférence de Lambeth en 1897 à l'égard de l'Église catholique ne l'a pas empêchée de témoigner sa sympathie envers les minorités protestantes qui doivent lutter pour leur liberté dans les pays catholiques, ni non plus envers certains groupes au sein de l'Église de Rome, groupes qui «font des efforts pour se soustraire à l'autorité usurpée du Siège de Rome, tout comme nous qui, il y a trois siècles, avons reconquis notre liberté»[36]. La Conférence de Lambeth exprime sa particulière sympathie envers les efforts déployés alors, au Mexique et ailleurs, en vue d'établir une hiérarchie nationale et autonome, «et aussi aux hommes sérieux et courageux de France, d'Italie, d'Espagne et du Portugal qui ont été amenés à se libérer du fardeau des conditions illégales exigées par l'Église de Rome pour la réception des sacrements»[37]. Ces paroles de l'encyclique d'introduction sont empruntées à une des résolutions prises par la Conférence. La même résolution se termine par ces mots :
Nous continuons à observer ces mouvements avec un intérêt profond et inquiet, et nous prions pour qu'ils soient bénis et guidés par le Dieu tout-puissant[38].
Le principe fondamental de l'attitude envers l'Église de Rome est établi dans le paragraphe concernant la communauté latine par une reprise quasi textuelle du passage de 1888 déjà cité plus haut[39].
Nous arrivons ainsi aux plus récentes des Conférences de Lambeth. Il apparaîtra que l'attitude de la Communion anglicane envers l'Église de Rome suit une amélioration lente et continue. Il faut remarquer, cependant, que les évêques anglicans attribuent cette amélioration en ordre principal à des changements encourageants que, à leur joie, ils croient pouvoir constater dans l'Église de Rome. A leur avis, la source de la mésentente ne se trouve pas de leur côté.
Les Églises anglicanes, d'accord en cela avec toutes les autres Églises, voient dans l'Église de Rome la seule qui mérite de graves critiques d'un point de vue chrétien commun. Toutes les Églises attribuent les divisions à Rome seule. L'espoir qu'elles ont du rétablissement de l'unité se nourrit principalement de l'attente de voir l'Église de Rome comprendre enfin qu'elle a besoin, sur bien des points, d'une révision et d'un renouvellement, afin que, pour ce qui dépend d'elle, elle rende possible la réconciliation, le rapprochement et la réunion longtemps souhaitée par les autres Églises. Aux yeux de l'anglicanisme comme de toutes les Églises nées de la Réforme, la réunion avec l'Église de Rome est subordonnée à la volonté de cette dernière de se soumettre à la Parole de Dieu non falsifiée. Chaque fois qu'ils se consultent sur l'état de la question, les évêques anglicans observent dans le ciel œcuménique les signes annonciateurs d'un jour nouveau. Ils les attendent «plus qu'un veilleur n'attend l'aurore» (Ps 130,6).
IV. La Conférence de Lambeth de 1908
Le rapport de la commission œcuménique de la Conférence de 1908 fut introduit par une considération générale. On y rappelait la 34è résolution de la Conférence précédente (1897) : «Toute occasion doit être saisie de mettre en vedette que le dessein divin de l'unité visible entre chrétiens fait partie de la révélation»[40].
Partant de ce donné révélé, la commission estimait devoir en tirer une conséquence pratique touchant une condition importante que devrait respecter à l'avenir tout projet de réunion. Dans tous les essais d'union entre Églises particulières, ces dernières courent en effet le danger de restreindre leur horizon œcuménique à leur problème limité et de négliger la perspective de l'ensemble. C'est pourquoi la commission propose à la Conférence d'adopter la résolution suivante :
La Conférence confirme à nouveau la résolution de la Conférence de 1897 (suit le texte de la résolution 34). Elle veut affirmer en outre que dans tous les projets d'union et d'intercommunion, l'accomplissement final du dessein de Dieu doit demeurer devant nos yeux comme le but que nous poursuivons, et qu'il faut veiller à exécuter ce qui peut avancer la réunion de l'ensemble de la chrétienté et à s'abstenir de faire quoi que ce soit qui puisse la retarder ou l'empêcher[41].
Cette résolution est de nature concrète et pratique, non de nature abstraite et théorique ; elle est destinée à guider l'action. On peut la considérer par conséquent comme la directive essentielle et le principe propre qui guident les Églises anglicanes dans leur pensée et leur action au plan œcuménique. Ce principe fondamental et d'importance première pour tout travail œcuménique valable était déjà clairement perçu par les évêques de la Communion anglicane bien avant que ne commence l'actuel mouvement œcuménique.
Les anglicans sont demeurés fidèles à ce principe. Sans une notion exacte de ce principe, il est souvent difficile de comprendre la manière dont les anglicans abordent la problématique œcuménique, ainsi que leur attitude envers les autres Églises. C'est dans la ligne de ce principe qu'il faut lire les considérations exprimées dans le rapport de la commission touchant «la Communion latine».
La commission de 1908 pensait pouvoir constater trois changements importants dans les rapports de l'Église latine avec l'ensemble du monde chrétien :
1. l'entrée plus libre des théologiens romains dans le champ de la science moderne... ;
2. la tendance d'un grand nombre de chrétiens, qui ne sont pas de la Communion catholique romaine, ni même souvent membres des Églises épiscopales, à considérer avec une espérance sympathique cette grande Communion, comme donnant un corps à cet idéal qui manque en grande partie à beaucoup de sectes chrétiennes d'aujourd'hui ; cela d'autant plus qu'un esprit nouveau de liberté intellectuelle, de réforme ecclésiastique et sociale, agite l'Église romaine... ;
3. en même temps un intérêt croissant se manifeste dans la littérature courante de l'Église romaine pour les pratiques des autres Églises, de la nôtre en particulier, intérêt qui s'accompagne parfois du sentiment des déficits de l'Église latine elle-même, pour lesquels on doit chercher un remède au dehors[42].
Ces changements et d'autres de ce genre continuent à se développer encore aujourd'hui ; ils sont devenus chose évidente pour tout observateur bien disposé et impartial. Dès 1908, les évêques anglicans les avaient discernés, et dès cette date ils en concluaient que «ces symptômes donnaient bon espoir pour l'avenir»[43]. Cependant ils maintenaient l'opinion déjà exprimée dans les Conférences précédentes, à savoir que
dans les circonstances présentes, il est inutile de considérer la question d'une intercommunion possible avec nos frères de la Communion romaine ; toute proposition de ce genre ne serait reçue qu'à des conditions inacceptables pour nous[44].
Ceci n'empêche que les évêques anglicans désirent insister sur leur conviction
qu'aucun projet d'union ne pourra jamais être regardé comme satisfaisant s'il laisse délibérément en dehors les Églises de la Communion latine. En conséquence, ils (les dirigeants de la commission) désirent, nulle part plus qu'ici, insister auprès de nos représentants à l'étranger, sur l'importance qu'il y a, tout en maintenant fermement notre position propre, à témoigner une entière courtoisie chrétienne aux Églises de ces pays et à leurs autorités ecclésiastiques ; ils veulent dire aussi combien il est souhaitable que tous les chapelains choisis pour exercer un ministère en Europe ou ailleurs reçoivent la consigne de manifester cette courtoisie[45].
Enfin les membres de la commission consacrèrent un exposé détaillé à la délicate question des mariages mixtes contractés à l'étranger. Les évêques mettent en garde contre les conséquences qui découlent des mariages avec les catholiques romains, vu qu'au nombre des garanties exigées en pareil cas par l'Église catholique romaine se trouve la promesse que les enfants à naître de cette union seront élevés «dans une religion que la partie anglicane ne peut en conscience accepter»[46].
L'encyclique de la Conférence de 1908 ne nomme nulle part l'Église de Rome. Celle-ci a certainement dû être présente à l'esprit des évêques au cours de la rédaction, comme en témoignent les déclarations qui semblent formulées à son adresse, par exemple lorsque les évêques jugent nécessaire de préciser : «Nous appartenons à une Église qui (..). est l'Église des hommes libres et qui les éduque à la connaissance de la liberté de laquelle le Christ nous a rendus libres»[47]. Ou encore : «Nous ne pouvons penser à aliéner, au nom de la paix, les biens dont nous avons été faits les intendants. Encore moins pouvons-nous souhaiter que les autres soient infidèles aux obligations qu'ils considèrent comme non moins sacrées»[48].
La position de la Conférence de 1908 touchant les mariages avec des catholiques romains a entraîné l'adoption d'une résolution particulière :
Nous voulons donner aux membres de notre Communion un sévère avertissement contre les mariages contractés avec des catholiques romains dans les conditions imposées par le droit canon actuel de Rome, surtout parce qu'au nombre de ces conditions se trouve la célébration du mariage sans aucune prière ou invocation des bénédictions divines, et la promesse que les enfants de la partie anglicane seront élevés dans une religion qu'elle-même ne peut accepter[49].
Il y a du côté anglican deux griefs majeurs contre l'Église de Rome. Le premier concerne les dispositions paralysantes que les minorités protestantes doivent subir dans certains pays catholiques. L'autre grief porte sur la pratique des mariages mixtes. L'idée que l'Église de Rome se fait d'elle-même, comme possédant la vérité pure et entière, et des autres Églises, comme étant dans l'erreur, n'est pas aux yeux des anglicans un motif suffisamment fondé pour imposer à quelqu'un une condition qu'en conscience il ne peut accepter.
L'Église de Rome devrait être la première à condamner une promesse contraire à la conviction religieuse personnelle. Il ne peut en résulter qu'un manque de sincérité. Les anglicans sont d'avis qu'en exigeant une telle promesse de la partie non catholique, l'Église de Rome manifeste qu'elle ne juge pas nécessaire de tenir compte d'une autre conviction religieuse, celle-ci n'ayant à ses yeux aucune valeur réelle et positive.
V. La Conférence de 1920 et l'Appel de Lambeth
La première guerre mondiale a retardé la convocation de la sixième Conférence de Lambeth. Cette conférence se réunit en 1920, au début d'une époque marquée par des conditions sociales et religieuses toutes nouvelles. Un vent nouveau soufflait tant dans les Églises chrétiennes que dans la vie des peuples et des États. Un grand effort fut fait, aussitôt après la première guerre mondiale, pour promouvoir la fraternité entre les peuples et pour établir une paix durable, fondée sur le droit international. Cet effort fut soutenu par les Églises grâce à l’«Alliance universelle pour l'amitié internationale par les Églises». (Cette Alliance entra, à Amsterdam en 1948, dans le Conseil œcuménique des Églises, comme le fera le Conseil international des missions en 1961).
L'année 1920 vit mettre en œuvre les premiers préparatifs qui devaient inaugurer la naissance définitive du mouvement œcuménique par la convocation de conférences internationales, celle de Life and Work à Stockholm en 1925 et celle de Faith and Order à Lausanne en 1927. Le mouvement œcuménique était ainsi vraiment mis en branle.
Jetons-nous un regard en arrière sur la période entre les deux guerres mondiales, nous avons l'impression de n'y apercevoir qu'un tout premier début, qu'un premier essai d'orientation, qu'un prélude provisoire à la transformation profonde à laquelle nous participons aujourd'hui dans tous les domaines, et notamment dans celui de la vie religieuse et ecclésiastique. Dans l'histoire du mouvement œcuménique, l'année 1920 ne représente qu'un début, mais un début qui devait avoir des conséquences d'une grande portée.
Une seconde guerre mondiale fut nécessaire, semble-t-il, pour secouer les Églises et les peuples et leur faire comprendre qu'un retour à l'époque d'avant la guerre était exclu, que l'édification d'un avenir, à maints égards entièrement nouveau, était une nécessité. La troisième assemblée du Conseil œcuménique des Églises à New Delhi a prouvé à l'évidence que la conception œcuménique a gagné presque toutes les Églises. Ce développement de l'œcuménisme suscite notre estime et notre admiration pour l'initiative qui fut prise en 1920 par la Communion anglicane lorsqu'elle lança l'Appel de Lambeth à tous les chrétiens sans distinction. (Cet appel fera l'objet d'un chapitre distinct.)
L'Église de Rome ne fut pas une seule fois mentionnée nommément ni dans l'encyclique ni dans les 80 résolutions adoptées par la Conférence de 1920. Par contre, dans le rapport de la commission œcuménique, la troisième partie, traitant de l'attitude à propos de l'union avec les Églises épiscopales, s'ouvre par un exposé sur la «Communion latine» :
Votre commission est d'avis qu'il est impossible d'établir un rapport traitant, de l'union entre les Églises épiscopales sans faire mention de l'Église de Rome, même si aucune résolution ne doit être proposée à son sujet. Nous ne pouvons mieux faire que de reprendre à notre compte les termes du rapport de 1908, qui nous rappelle qu'«aucun projet d'union ne pourra jamais accomplir le dessein divin s'il ne comprend pas finalement la grande Église latine d'Occident, à laquelle notre histoire a été mêlée si intimement dans le passé, et à laquelle elle est encore unie par de nombreux points de foi et de tradition». Mais nous nous rendons compte que «toute avance de ce côté, nous est, pour le moment, interdite par les difficultés que nous n'avons pas nous-mêmes créées, et que, nous ne pouvons pas de nous-mêmes faire disparaître». Si jamais l'Église de Rome manifeste le désir de discuter les conditions d'une réunion, nous serons prêts à accueillir favorablement de telles discussions. Nous voulons en outre attirer l'attention brièvement sur les mouvements qui se produisent dans l'Église de Rome et qui peuvent porter leur fruit dans l'avenir[50].
Le rapport mentionne un certain nombre de faits au plan des relations humaines dont il ressort qu'un heureux changement se produit chez beaucoup de catholiques romains dans leur attitude, leur appréciation et leur estime à l'égard des chrétiens non romains. Les contacts datant des années de guerre semblent avoir contribué largement à «une meilleure connaissance et une meilleure compréhension des positions réciproques». L'exposé aboutit à la conclusion suivante :
Il est clair qu'aucun pas en avant ne peut être fait actuellement ; mais les faits signalés plus haut peuvent contribuer à créer dans l'avenir une situation toute différente[51].
Cette citation est parlante par elle-même. La Communion anglicane inclut l'Église de Rome dans sa réflexion et son effort œcuménique. Elle maintient intentionnellement la porte ouverte de ce côté. Elle suit avec intérêt ce qui se passe au sein de l'Église de Rome. Elle espère pouvoir bientôt apercevoir des signes qui rendront possible l'ouverture de relations officieuses, voire officielles. Elle se tient constamment à l'affût de tout signe favorable venant de Rome, prête à le saluer aussitôt avec joie.
VI. La Conférence de 1930 et les Conversations de Malines
La commission œcuménique de la septième Conférence de Lambeth reprit une fois de plus, en l'appuyant, la déclaration faite déjà en 1908 et en 1920 : aucun projet d'union ne peut finalement réaliser le dessein de Dieu qui, consciemment ou non, négligerait la grande Communion latine. Dès les origines du mouvement œcuménique, les Églises de la Communion anglicane ont bien vu qu'aucune unité chrétienne ne peut être achevée si l'Église de Rome n'y est pas incluse ou ne s'y laisse pas inclure.
Aussi la commission ajoute-t-elle, en 1930, à la déclaration des deux Conférences antérieures la précision complémentaire suivante :
Si faibles que puissent paraître à présent les chances d'atteindre un pareil idéal, le sentiment de la commission est que, dans toute tentative de réunion, il faut avoir en vue l'unité de l'Église tout entière ; et elle n'abandonne pas l'espoir que l'attitude de l'Église de Rome, au moins en certaines parties du monde, puisse changer dans un avenir assez prochain[52].
Au reste, le paragraphe consacré à l'Église de Rome (dénommée cette fois : l'Église catholique romaine, et non plus : la Communion latine) se situe entièrement sous le signe des Conversations de Malines, qui se tinrent de 1921 à 1925 entre quelques catholiques romains et quelques anglicans[53]. En un sens, il est permis de considérer ces Conversations comme un résultat de l'Appel de Lambeth, en dépit de leur caractère strictement privé. Les termes qui introduisirent le paragraphe sur l'Église catholique semblent suggérer qu'un exemplaire de l'Appel de Lambeth avait été transmis au pape en 1920 et «qu'une réponse polie avait été reçue». Après cette courte allusion, le rapport traite aussitôt des Conversations de Malines : «La chose la plus importante que nous ayons à communiquer consiste dans les Conversations qui ont eu lieu à Malines, de 1921 à 1925, sous la présidence du cardinal Mercier». Le rapport insiste fortement sur le fait que tant l'archevêque de Cantorbéry que le cardinal Mercier ont explicitement déclaré que les participants à ces Conversations n'avaient reçu aucun mandat de leurs Églises respectives et ne pouvaient pas, par conséquent, être considérés comme leurs représentants officiels. Le but de ces conversations était simplement un «rapprochement des cœurs».
On connaît l'amitié intime qui unissait le cardinal Mercier et Lord Halifax. Mais ce n'est pas à eux qu'il faut imputer l'échec final des Conversations, leur cessation ni surtout la déception profonde qui fut ressentie par quelques-uns des participants anglicans (notamment par Walter Frere, célèbre liturgiste anglo-catholique, évêque de Truro 1923-1938). Après la mort du cardinal Mercier en 1926, Rome interdit la poursuite des Conversations. Peu après, le 6 janvier 1928, parut l'encyclique Mortalium animos, dont on ne peut dire qu'elle salua avec joie la naissance du mouvement œcuménique ni qu'elle manifesta un véritable intérêt pour son développement à venir. A cet égard, il y a lieu de constater que Rome lui témoigna dans la suite une compréhension croissante et un intérêt plus positif.
La commission œcuménique de la Conférence de 1930 ne se laissa cependant pas décourager par les revers subis. Elle garda fermement sa conviction que des conversations et des conférences œcuméniques gardent leur valeur, lorsqu'elles sont menées dans la loyauté et «elle regretta vivement que, par décision du pape, toutes rencontres de ce genre soient interdites et qu'il ne soit pas permis aux catholiques romains de prendre part aux conférences sur l'unité. Diverses raisons nous autorisent à croire que la même déception est ressentie par plus d'un membre de l'Église de Rome»[54].
VII. La Conférence de Lambeth de 1948
Telle était la situation au moment où éclata la seconde guerre mondiale. En raison des événements, il ne fut pas possible de réunir une nouvelle Conférence à Lambeth avant 1948, année où fut fondé le Conseil œcuménique des Églises. Pour la première fois nous découvrons un ton quelque peu amer dans le paragraphe consacré à l'Église catholique romaine. Sans doute ce texte s'ouvrait une fois encore par la déclaration : aucun projet de réunion ne peut prétendre réaliser le désir d'unité voulu par Dieu s'il ne comprend l'Église de Rome. Cependant la commission ajoutait ce qui suit :
Mais la lettre encyclique sur les moyens de promouvoir l'unité (Mortalium animos) publiée par le pape Pie XI en 1928, a montré une fois de plus, avec toute la clarté désirable, que la seule méthode de réunion que Rome veuille admettre est celle de la soumission à la papauté. Durant les vingt années écoulées, il n'y a pas eu le moindre indice permettant de croire à une diminution quelconque de cette exigence. D'autre part, il est impossible aux Églises de la Communion anglicane de l'accepter. Il faut se rappeler qu'en plus de la question de la position de la papauté, il existe encore des divergences très graves de foi et de discipline entre nous et l'Église catholique romaine, qui font que pour le moment des démarches en vue de l'intercommunion n'auraient guère de chances d'aboutir[55].
La commission rappelle ensuite les Conversations de Malines, puis le monitum du 5 juin 1948, qui interdisait aux catholiques de tenir avec d'autres chrétiens des réunions œcuméniques, mais aussi la fructueuse collaboration qui s'était établie entre catholiques et protestants au cours de la guerre mondiale, tant en Angleterre que sur le continent, et encore les appels répétés du pape à la coopération de tous les chrétiens sur le plan social et international. La commission ajoute alors :
Mais, à parler franchement, nous sommes embarrassés par la contradiction apparente entre ces invitations générales à la coopération adressées à plusieurs reprises par le pape lui-même, et l'attitude de beaucoup de catholiques romains dans divers pays, quand il s'agit d'établir des programmes concrets. On a été déçu également de ce que certains rapports, certaines formes de coopération nés dans plusieurs pays pendant la guerre, et qui semblaient pleins d'avenir, n'aient pas été continués. Bien que la cessation de ces rapports dans tel ou tel pays puisse avoir été purement accidentelle, nous en demeurons sincèrement perplexes. En effet, il peut se présenter des difficultés concernant l'interprétation et l'application de la liberté de religion, et d'autres difficultés de toutes sortes[56].
La commission terminait sa critique de l'attitude catholique en relevant des exceptions notoires à ce refus de coopérer: des amitiés personnelles, des contacts à l'occasion d'activités sociales et philanthropiques. Elle se réjouissait aussi qu'il fût permis aux catholiques de s'unir, en certaines occasions, aux autres chrétiens dans la récitation de l'oraison dominicale.
Le texte de la commission s'achevait sur cette conclusion :
Nous avons conscience de l'urgente nécessité d'une coopération entre catholiques romains et autres chrétiens sur une base commune qui ne touche pas aux questions fondamentales de constitution ecclésiastique ou de doctrine qui nous divisent. Nous croyons qu'il reste un domaine très large en dehors de la foi et de la constitution ecclésiastique. C'est pourquoi nous attacherions une grande importance à tout éclaircissement ultérieur du côté catholique romain sur la manière de réaliser une telle coopération et nous serions reconnaissants si l'on pouvait trouver un moyen de la rendre pleinement efficace. Nous pensons que du côté anglican, aucun effort ne sera négligé[57].
Les Églises anglicanes se sont montrées, pendant un quart de siècle, les défenseurs infatigables de la priorité de Faith and Order sur Life and Work. Elles sont persuadées, en effet, que la question œcuménique concerne en définitive la restauration de l'unité de foi et de communion ecclésiastique. Il est dès lors regrettable que, précisément dans leurs rapports avec Rome, elles se soient constamment vues refoulées au plan de la coopération purement pratique.
Bien que la porte soit restée ouverte de ce côté, on peut dire que la Conférence de Lambeth de 1948 a marqué le point le plus bas dans les rapports entre Cantorbéry et Rome.
VIII. Amélioration des relations depuis 1949
La Conférence de 1958
La situation a commencé à s'améliorer à partir du mois de décembre 1949, grâce à la publication à Rome d'une instruction enjoignant à tous les évêques «non pas seulement de veiller diligemment et efficacement sur tout ce mouvement (en vue de l'unité chrétienne), mais encore de le promouvoir et de le diriger avec prudence»[58].
Cette instruction marque un tournant décisif dans l'attitude du Vatican à l'égard du mouvement œcuménique. Elle est à l'origine de l'amélioration lente mais continue qui, depuis 1950 et notamment sous le pontificat de Jean XXIII, se réalise dans les relations entre l'Église de Rome et les autres Églises chrétiennes.
L'amélioration ainsi inaugurée fut enregistrée avec satisfaction par le rapport présenté par la commission œcuménique à la Conférence de Lambeth de 1958 :
Bien que l'Église catholique romaine maintienne sa conviction que l'unique fin de la réunion soit la soumission à la papauté, certains signes, qui sont les bienvenus, montrent que les autorités romaines reconnaissent davantage l'importance du mouvement œcuménique[59].
Le rapport accorda en conséquence un bref examen à l'instruction du Saint-Office sur le dialogue œcuménique et souligna la participation croissante des fidèles de toutes les Églises à la Semaine universelle de prière pour l'unité chrétienne, du 18 au 25 janvier, «avec une large approbation des autorités catholiques romaines»[60].
La commission marqua son accord à la formule de l'intention de prière proposée par l'abbé Couturier pour la Semaine de l'unité. Cette formule exclut tout a priori concernant la voie de l'unité, puisque la prière demande que l'unité des chrétiens se réalise «telle que le Christ la veut et par les moyens qu'il voudra». La commission est d'avis que «l'observance simultanée de cette Semaine par les catholiques romains et par les membres d'autres Églises est une contribution de valeur à la recherche de l'unité»[61].
Tel était donc, en 1958, l'état des relations entre la Communion anglicane et l'Église de Rome, après plus d'un demi-siècle de prière, d'attente, de réflexion et d'action.
Les années écoulées depuis ont vu s'opérer de profonds changements dans la situation œcuménique, grâce à l'intérêt, à la compréhension et à la charité du pape Jean XXIII envers le mouvement œcuménique. Le Concile Vatican II, qui devait s'ouvrir le 11 octobre 1962, visait au premier chef au renouveau intérieur de l'Église de Rome. Mais on sait que le pape y voyait aussi une contribution essentielle à la promotion de l'unité chrétienne.
Les signes ne manquent pas qui témoignent que l'amélioration des relations n'est pas due à la seule célébration du Concile lui-même. Que l'on songe aussi à tout le travail mis en branle par les commissions pré-conciliaires, et qui est destiné à se poursuivre ultérieurement. Que l'on songe aussi au Secrétariat pour l'unité, présidé par le cardinal Bea et qui a pour tâche d'entretenir des relations avec les représentants des autres Églises. Un secrétariat semblable a d'ailleurs été institué en Angleterre même. Que l'on songe enfin à la présence d'observateurs anglicans au deuxième Concile du Vatican comme à un signe manifeste du rapprochement en cours. L'histoire nous dira la part prise par les observateurs anglicans dans le travail conciliaire.
C'est avec une impatience pleine d'espoir que nous attendons la prochaine réunion de la Conférence de Lambeth. Celle-ci est prévue pour l'été de 1968, soit donc moins de trois ans après la clôture du Concile du Vatican. L'œuvre accomplie par le Concile en faveur de l'unité, et en particulier le décret sur l'œcuménisme, avec sa mention spéciale de la Communion anglicane[62], ne pourra manquer de susciter parmi les évêques assemblés à Lambeth une réflexion nouvelle sur le problème des rapports entre l'anglicanisme et l'Église romaine[63].
[1] Voir plus haut p. 35.
[2] «The Church of England ... belongs to the true and apostolic Church of Christ ; and, as our duty to the said Chureh of England requires, we do constitute and ordain that no member thereof shall he at liberty to maintain or hold the contrary». (Canon Law Revision 1959, Londres, 1960, p. 2.)
[3] «Furthermore, we entreat you to guard yourselves and yours against the growing superstitions and additions with which in these latter days the truth of God hath been overlaid ; as otherwise, so especially by the pretention to universal sovereignty over God's heritage asserted for the See of Rome, and by the practical exaltation of the Blessed Virgin Mary as mediator in the place of her Divine Son, and by the addressing of prayers to her as intercessor between God and man. Of such beware, we beseech you, knowing that the jealous God giveth not His honour to another” (The Six Lambeth Conferences, Londres, 1920, p. 50).
[4] «The fact that a solemn protest is raised in so many Churches and Christian communities throughout the world against the usurpations of the See of Rome, and against the novel doctrines promulgated by its authority, is subject for thankfulness to Almighty God. All sympathy is due from the Anglican Church to the Churches and individuals protesting against these errors, and labouring, it may be, under special difficulties from the assaults of unbelief as well as from the pretensions of Rome.
«We acknowledge but one Mediator between God and man - the Man Christ Jesus, Who is over ail, God blessed for ever. We reject, as contrary to the Scriptures and to Catholic truth, any doctrine which would set up other mediators in His place, or which would take away from the Divine Majesty of the fulness of the Godhead which dwelleth in Him, and which gave an infinite value to the spotless Sacrifice which He offered, once for all, on the Cross for the sins of the whole world.
«It is therefore our duty to warn the faithful that the act clone by the Bishop of Rome, in the Vatican Council, in the year 1870 - whereby he asserted a supremacy over all men in matters both of faith and morals, on the ground of an assumed infallibility - was an invasion of the attributes of the Lord Jesus Christ » (Ibid., p. 94).
[5] «We do not claim to be lords over God's heritage, but we commend the results of this our Conference to the reason and conscience of our brethren as enlightened by the Holy Spirit of God, praying that all throughout the world who call upon the name of our Lord Jesus Christ may he of one mind, may be united in one fellowship, may hold fast the Faith once delivered to the saints, and worship their one Lord in the spirit of purity and love». (Ibid., p. 98).
[6] Le rapport de la commission porte le titre : «Report of the Committee appointed to consider what steps (if any) can be rightly taken on Behalf of the Anglican Communion towards the Reunion of the Various Bodies into which the Christianity of the English-speaking races is divided» (Cf. ibid., pp. 156 et ss).
[7] «The Committee with deep regret felt that, under present circumstances, it was useless to consider the question of Reunion with our brethren of the Roman Church, being painfully aware that any proposal for reunion would be entertained by the authorities of that Church only on condition of a complete submission on our part to those claims of absolute authority, and the acceptance of those other errors, both in doctrine and in discipline, against which in faithfulness to God's Holy Word, and to the true principles of His Church, we have been for three centuries bound to protest » (Ibid., p. 159).
[8] J. Jewel, An Apology of the Church of England, 1562 ; The Works of John Jewel, ed. by the Parker Society, Cambridge, 1848, vol. I, pp. 81-552. R. Hooker, Treatise on the Laws of Ecclesiastical Polity, livres I-IV, 1594 ; livre V, 1597 ; livres VI-VIII, posthumes 1648, 1662 et 1648 (édition moderne en 2 vol., Everyman's Library, Dent and Sons, Londres, 1907). Sur Jewel, voir aussi J.E. Booty, John Jewel as Apologist of the Church of England, Londres, 1903
[9] Sur la nature et le contenu de ce témoignage fondamental, trésor commun à toutes les Églises de la Réforme, voir : W.H. VAN DE POL, Het Getuigenis van de Reformatie, Roermond, 1960 (trad. allemande : Das Zeugnis der Reformation, Essen, 1963).
[10] «The doctrine of the Church of England is grounded in the Holy Scriptures and in such teachings of the ancient Fathers and Councils of the Church as are agreeable to the laid Scriptures. In particular sueh doctrine is to be found in the Thirty-nine Articles of Religion, the Book of Common Prayer, and the Ordinal» (Canon Law Revision 1959, p. 10).
[11] «The Romish Doctrine concerning Purgatory, Pardons, Worshipping and Adoration, as well of Images as of Reliques, and also invocation of Saints, is a fond thing vainly invented, and grounded upon no warranty of Scripture, but rather repugnant to the Word of God». Les Articles of Religion sont imprimés dans les éditions courantes du Prayer Book de l'Église d'Angleterre. Traduction française partielle par G. Coolen, Histoire de l'Église d'Angleterre, Paris, 1932, pp. 182-191. L'art. 22 est à la page 186 et ss.
[12] «The Sacraments were not ordained of Christ to be gazed upon, or to be carried about, but that we should duly use them», art. 25 (Coolen, p. 187).
[13] «Transsubstantiation (or the change of the substance of Bread and Wine) in the Supper of the Lord, cannot be proved by holy Writ ; but it is repugnant to the plain words of Scripture, overthroweth the nature of a Sacrament, and hath given occasion to many superstitions», art. 28 (Coolen, p. 188).
[14] «The Sacrament of the Lord's Supper was not by Christ's ordinance reserved, carried about, lifted up, or worshipped» ; art. 28 (Coolen, p. 188).
[15] «The Offering of Christ once made is that perfect redemption, propitiation, and satisfaction, for all the sins of the whole world, both original and actual ; and there is none other satisfaction for sin, but that alone. Wherefore the sacrifices of Masses, in the which it was commonly said, that the Priest did offer Christ for the quick and the dead, to have remission of pain or guilt, were blasphemous fables, and dangerous deceits» ; art. 31 (Coolen, p. 189).
[16] «(Jesus Christ) who made there (on his Cross) by his one oblation of himself once offered, a full, perfect and sufficient sacrifice, oblation and satisfaction, for the sins of the whole world ; and did institute, and in his holy Gospel command us to continue a perpetual memory of that his precious death until his coming again» (Book of Common Prayer, The Order for the Administration of the Lord's Supper or the Holy Communion)
[17] «...mercifully to accept this our sacrifice of praise and thanksgiving... And here we offer and present unto thee, O Lord, ourselves, our souls and bodies, to be a reasonable, holy and lively sacrifice unto Thee » (ibid.).
[18] Le Concile de Trente, session XXII (17 sept. 1562), traite de la doctrine du Saint Sacrifice de la Messe (Denzinger 937a - 956). Cap. 2 «Sacrificium visibile esse propitiatorium pro vivis et defunctis». Can. I «Si quis dixerit in Missa non offerri Deo verum et proprium sacrificium, aut quod off erri non sit aliud quam nobis Christum ad manducandum dari A.S.» (anathema sit).
[19] E.J. BICKNELL-H.J. CARPENTER, The Thirty-nine Articles of the Church of England, Londres, 3è éd., 1953, p. 417 : «So this Article has its eye throughout on mediaeval abuses and on the attempt of the Council of Trent to shelter them as far as possible».
[20] «As we saw, the latest Roman denial of our orders is based on our rejection of any such view winch makes the sacrifice of the Eucharist additional to that of Calvary. As long as it is taught, in however refined a form, the protest of our Article will not be out of date» (Ibid., p. 418)
[21] «We reflect with thankfulness that there exist no bars, such as are presented to communion with the Latins by the formulated sanction of the Infallibility of the Church residing in the person of the supreme pontiff, by the doctrine of the Immaculate Conception, and other dogmas imposed by the decrees of Papal Councils. The Church of Rome has always treated her Eastern sister wrongfully. She intrudes her Bishops into the ancient Dioceses, and keeps up a system of active proselytism». (The Six Lambeth Conferences, p. 115).
[22] «Report of the Committee appointed to consider and report upon the subject of Church Unity in its relation : (a) to the Churches of the East ; (b) to the Latin Communion ; (e) to other Christian bodie” (Ibid., p. 243 et ss).
[23] «Itaque omnibus Pontificum decessorum in hac ipsa causa decretis usquequaque assentientes, eaque plenissime confirmantes ac veluti renovantes auctoritate Nostra, motu proprio, certa scientia pronuntiamus et declaramus, ordinationes ritu Anglicano actas, irritas prorsus fuisse et esse omninoque nullas... » (Dz, 1966 ; trad. française : Lettres apostoliques de Léon XIII, Éd. Bonne Presse, tome V, p. 75).
[24] «And therefore to the extent these orders should bec continued, and reuerentlye used, and estemed in this Church of England, it is requysite, that no man (not beynge at thys presente Bisshop, Priest, nor Deacon) shall execute anye of them, excepte he be called, tryed, examined, and admitted, accordynge to the forme here after folowing” (The First and Second Prayer-Books of King Edward the Sixth, Ed. Everyman's Library, Londres, réimp. 1927, p. 292).
[25] Voir par ex. N. Sykes, Old Priest and New Presbyter, Cambridge, 1956, chap. II : «A parity of ministers asserted», p. 30 et ss, et chap. III : «An imparity of ministers defende”, p. 58 et ss. Cf. C. Meyer, Elisabeth I and the religious Settlement of 1559, St. Louis, U.S.A., 1960, pp. 75 et ss.
[26] «Which aimed at overthrowing our whole position as a Church » (Anglican Orders, réimpression 1957, p. 23). Dans l'édition latine, p. 21 : «Quae totumt nostrum statum ecclesiasticum subvertere conarentur». Le texte de l'édition française (1897) a été utilisé ici (paragraphe I, p. 7).
[27] F. Clark, Anglican Orders and Defect of Intention, Longmans, Londres. 1956.
[28] F. Clark. ouvr. cité, pp. 203 et ss.
[29] «Thus in overthrowing our orders, he (the Pope) overthrows all his own, and pronounces sentence on his own Church. Eugenius IVth indeed brought his Church into great peril of nullity when he tought a new matter and a new form of Order and Ieft the real without a word. For no one knows how many ordinations may have been made, according to his teaching, without any laying on of hands or appropriate form. Pope Leo demands a form unknown to previous Bishops of Rome and an intention which is defective in the catechisms of the Oriental Churc” (Anglican Orders, p. 60 ; édition française 1897 : pp. 43-44).
[30] «Those who are unprepared to admit that the official magisterium of the Roman Catholic Church and the approved teaching of her theologians provide sure guidance in these matters of sacramental theology, will not accept the validity of my premises» (Clark, ouvr. Cité. p. 202).
[31] «Praesentes vero litteras et quaecumque in ipsis habentur nullo tempore de subreptionis aut obreptionis sive intentionis Nostrae vitio aliove quovis defectu notari vel impugnari posse ; sed semper validas et in suo robore fore et esse, atque ab omnibus cuiusvis gradus et praeeminentiae inviolabiliter in judicio et extra observari dehere decernimus : irritum quoque et inane si secus super his a quoquam, quavis auctoritate vel praetextu, scienter vel ignoranter contigerit attentari declarantes, contrarüs non obstantibus quibuscumque » (ASS, 29, 1896-1897, p. 203, et Anglican
Orders, p. 31 ; trad. française : Lettres Apostoliques de Léon Xlll, Éd. Bonne Presse, tome V, pp. 75 et 77).
[32] «On the 17th of Decernber, Matthew Parker was consecrated in Lambeth Chapel. William Barlow, John Scory, who also preached the installation sermon, Myles Coverdale, and John Hodgkins participated in the solemn rite. Neither Matthew Parker nor the queen nor others were concerned that he be consecrated in «Apostolic Succession». He was consecrated by bishops because of the dignity of the office, not because of the necessity of keeping a direct continuity. Apostolic succession became the concern of churchmen of a Iater generation» (Carl MEYER, Elisabeth I and the Religious Settlement of 1559, St. Louis, U.S.A., 1960, p. 82).
[33] N. Sykes, Old Priest and New Presbyter, Cambridge, University Press, 1956, 2è édition 1957.
[34] «...but unfortunately asserting as its only basis the recognition of the papal supremacy as of divine right» (The Six Lambeth Conferences, p. 246).
[35] «Though controversy is rarely a method of promoting unity, there are grounds for thankfulness in the corteous tone in which much of this controversy has been conducted ; in the abandonment by the Pope of much irrelevant and spurious matter which previously rendered discussion hopeless ; in the limitation of the sphere of controversy to definite points ; in a large amount of subsidiary literature embodying the results of much research ; and in the desire shown on both sides to understand and not consciously to misrepresent one another. If this spirit increases, even controversy will not have been in vain ; and we await the issue of such controversy with entire confidenc” (Ibid., p. 246).
[36] «We recognise with warm sympathy the endeavours that are being made to escape from the usurped authority of the See of Rome as we ourselves regained our freedom three centuries ago» (Ibid., p. 194).
[37]«With the brave and earnest men of France, Italy, Spain, and Portugal who have been driven to free themselves from the burden of unlawful terms of Communion imposed by the Church of Rome» (Ibid., p. 194).
[38] «We continue to watch these movements with deep and anxious interest, praying that they may be blessed and guided by Almighty God».
[39] Voir p. 52.
[40] «That every opportunity be taken to emphasize the Divine purpose of visible unity among Christians, as a fact of revelation» (The Six Lambeth Conferences, p. 205).
[41] «This Conference reaffirms the resolution of the Conference of 1897 that (follows res. 34, 1897). It desires further to affirm that in all partial projects of reunion and intercommunion the final attainment of the divine purpose should be kept in view as our object ; and that tare should be taken to do what will advance the reunion of the whole of Christendom and to abstain from doing anything that will retard or prevent it » (Ibid., p. 331, résolution 58).
[42] «(1) They notice the freer entrance of Roman Catholic theologians into the general field of modern scholarship... ; (2) they notice the tendency of many who are not of the Roman Catholic Communion, or, indeed, in many cases, membres of any episcopal Church, to look with sympathetic hope towards that great Communion as embodying ideals which they find to be largely lacking in much of the sectional Christianity of to day, and this all the more when they see a new spirit of intellectual liberty and ecclesiastical and social reform stirring within its Borders ; (3) at the same time they perceive in the current literature of the Roman Catholic Church a growing interest in the practical concerns of other Churches, and not least of our own, which is sometimes accompanied with a senne of deficiencies in the Latin Church itself for which a remedy will have to be sought outside » (Ibid., p. 426 ; trad. française par J. de la SERVIÈRE dans Études, tome 117, 5 oct. 1908, p. 24).
[43] «These indications brighten the outlook for the future» (Ibid., p. 426).
[44] «...that under present circumstances it is useless to consider the question of possible intercommunion with our brethren of that Communion in view of the fact that no such proposal would be entertained but on conditions which it would be impossible for us to accept” (Ibid. p. 426 ; trad. Cite note 43, p. 26)
[45] « Nevertheless they desire to place upon record their conviction that no projects of union can ever be regarded as satisfactory which deliberately leave out the Churches of the Latin Communion ; and nowhere more than here would they urge the importance of the cultivation of relations of friendly courtesy on the part of our representatives abroad towards the ecclesiastical authorities in the countries where they live, and the desirability that all chaplains chosen for service on the continent of Europe and elsewhere should be instructed to show this courtesy» (Ibid., p. 426).
[46] «in a religious system which, the Anglican parent cannot conscientiously accept» (Ibid., p. 427).
[47] «We belong to a Church which, in the words of one of our number who has entered into rest, is the Church of free men, educating them into a knowledge of the liberty wherewith Christ has made us free » (Ibid., p. 295).
[48] «We dare not, in the name of peace, barter away those precious things of which we have been made stewards». Cf. texte II p. 23. (Ibid., p. 315).
[49] «We desire earnestly to warn members of our Communion against contracting marriages with Roman Catholics under the conditions imposed by modern Roman canon law, especially as these conditions involve the performance of the marriage ceremony without any prayer or invocation of the divine blessing, and also a promise to have their children brought up in a religious system which they cannot themselves accept» (Ibid., p. 333, résolution 67 ; trad. citée, p. 26).
[50] «Your Committee feels that it is impossible to make any Report on Reunion with Episcopal Churches without some reference to the Church of Rome, even though it has no resolution to propose upon the subject. We cannot do better than make our own the words of the Report of 1908, which reminds us of «the fact that there can be no fulfilment of the Divine purpose in any scheme of reunion which does not ultimately include the great Latin Church of the West, with which our history has been so closely associated in the past, and to which we are still hound by many ties of common faith and tradition». But we realize that - to continue the quotation - «any advance in this direction is at present barred by difficulties which we have not ourselves created, and which we cannot of ourselves remove». Should, however, the Church of Rome at any lime desire to discuss conditions of reunion we shah he ready to welcome such discussions. We desire, moreover, very briefly to indicate that there are movements going on in the Church of Rome which may be fruitful in the future...» (The Lambeth Conference 1920, p. 144).
[51] «It is obvious that no forward step can be taken yet ; but the facts thus referred to may help to create in the future a very different position» (Ibid., p. 144).
[52] «However little prospect there may be at present of the attainment of any such ideal, the Committee feels that in any attempt at Reunion the unity of the whole Church must be in their minds, and they are not without hope that the attitude of the Church of Rome may in some parts of the world at any rate change in the not very distant future» (The Lambeth Conference 1930, p. 131).
[53] Voir : The conversations at Malines 1921-1925 (Report presented to the Archbishop of Canterbury by the Anglican Members), Milford, Londres, 1926 (le texte anglais et la version française se trouvent en regard l'un de l'autre) ; The Conversations at Malines 1921-1925 (original documents published by Lord HALIFAX), Allan, Londres. 1930 (les textes sont publiés dans la langue où ils furent présentés au cours des Conversations) ; W.H. FRERE, Recollections of Malines, Centenary Press, Londres, 1930 ; J. DE BIVORT DE LA SAUDÉE, Anglicans et Catholiques. Le problème de l'union auglo-romaine (1833-1933), Plon, Paris, 1948.
[54] «...it much regrets that by the action of the Pope all such meetings have been forbidden, and Roman Catholics have been prohibited from taking part in conferences on Reunion. This regret, they have reason to believe, is shared by many members of the Church of Rome» (The Lambeth Conference 1930, p. 131).
[55] «But the Encyclical Letter on fostering union (Mortalium Animos) issued by Pope Pins XI in 1928 made it at once again abundantly plain that the only method of reunion which Rome will accept is that of submission to the Papacy. There are no signs whatever of any abatement of this demand in the last twenty years. Nor is there any possibility of its acceptance by the Churches of the Anglican Communion. It should be remembered that in addition to the question of the position of the Papacy, there are still most serious divergences in faith and practice between ourselves and the Roman Catholic Church, which make the prospect of hopeful approaches towards intercommunion unpromising for the present» (The Lambeth Conference 1948, II, p. 66).
[56] «But we are frankly puzzled by the apparent contradiction between these repeated general invitations to co-operation which the Pope himself has issued and the attitude of many Roman Catholics in particular countries when it comes to definite programs. It has also been a disappointment that certain co-operative relationships which seemed to promise well in some countries during the war have not been maintained. The fact of their not being maintained in particular countries may be purely accidental, but we are genuinely perplexed. Difficulties occur over the meaning and application of religions freedom ; and there are other difficulties of various kinds» (ibid., p. 67).
[57] «We are conscious of the urgent need of co-operation between Roman Catholics and other Christians on a common ground where ultimate questions of Church-order and doctrine which divide us are not raised. We believe that the area, outside the field of faith and order, is very large. We would therefore greatly value further elucidation from the Roman Catholic side on the manner of such co-operation, and would be thankful if the way could be found to make it fully effective. We feel that no effort will be wanting on the side of members of the Anglican Communion» (ibid., p. 68).
[58] Texte latin : AAS. 42 (1950), pp. 142-147 (la citation est à la page 143). Trad. française : Irénikon 23 (1950), pp. 221-228, DC, 47 (1950), col. 329-335. (La phrase citée est au début du n° I : Irénikon, p. 223 et DC, col. 331.)
[59] «Although the Roman Catholic Church retains its conviction that the only goal of re-union must be submission to the Papacy, there are some welcome signs of an increasing recognition by the Roman authorities of the importance of the Ecumenical Movement» (The Lambeth Conference 1958, II, p. 48).
[60] «With much official Roman Catholic approval» (ibid., p. 49).
[61] «The simultaneous observances of this Week by Roman Catholics and by members of other Cherches are a valuable contribution to the efforts towards unity» (ibid., p. 49).
[62] Concile Vatican II, Décret Unitatis Redintegratio, § 13 (début du chapitre III). (Note du traducteur.)
[63] Les cinq dernières phrases de ce chapitre ont été adaptées à la situation postconciliaire. (Note du traducteur.)