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mercredi 3 octobre 2007
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Lorsque Madiran[1] manipule la Bible Sixto-Clémentine
pour mieux égarer ses lecteurs
Une tentative scandaleuse de l’adversaire de Mgr Lefebvre en 19881
pour justifier le Motu Proprio et le Novus Ordo
La nouvelle égérie des abbés de Suresnes[2], Jean Arfel dit Jean Madiran1, cet adversaire acharné de Mgr Lefebvre au moment des sacres de 1988 et de son œuvre de préservation du Sacerdoce et du Sacrifice catholiques sacramentellement valides, vient de diffuser de faux arguments appuyés sur des faits erronés.
Dans sa précipitation à défendre le Motu Proprio de l’abbé apostat Ratzinger, et à faire passer le Novus Ordo Missae de Bugnini\-DomBotte-MontiniPaul VI de 1969 pour un véritable acte pontifical légitimement critiquable, il exhume un soi-disant « précédent » de prétendue ‘errance pontificale’ : la promulgation par le Pape Sixte-Quint d’une Bible (appélée ensuite Sixto-Clémentine) retirée à la mort du Pontife.
Qu’a donc fait Jean Madiran ? Rien d’autre que de colporter des faits erronés, qu’il n’a même pas vérifiés et qu’il a puisé chez les adversaires du dogme de l’infaillibilité pontificale, lequel sera par la suite promulgué lors du concile Vatican I en 1870).
Et c’est donc cet amateur en histoire religieuse, un rallié à l’autorité usurpée de l’abbé apostat Ratzinger, peu soucieux de rigueur théologique et historique, que les abbés de Suresnes voudraient désormais nous présenter comme une lumière pour les fidèles de la FSSPX en 2007 ?
De qui se moquent donc les abbés Celier, Duverger et les autres modernistes infiltrés ?
Une Bible Sixto-Clémentine qui ne fut pas promulguée, contrairement à ce que prétend Madiran
Ces quelques citations montrent la contradiction entre les affirmations erronées de Jean Madiran et les faits établis par le jésuite Le Bachelet en 1911 :
« le 2 mai 1590, il publie sa propre version, précédée de la bulle Æternus ille qui la rend obligatoire à l’exclusion de toute autre » Jean Madiran, Présent, 8 septembre 2007
Et le Révérend Père Le Bachelet :
« Au mois de juin, Sixte-Quint est encore tout occupé à réviser non seulement sa Bible, mais encore la bulle qu'on nous donne comme définitivement promulguée le 10 avril précédent »
« A l'époque même où cette Bible fit sa première apparition, quelques-uns partirent de là, dans une argumentation publique, pour attaquer l'infaillibilité pontificale »
Nous publions dans ce message une étude très approfondie du R.P. Xavier-Marie le Bachalet (jésuite) en 1911 :
Études de theologie historique n° 3. Publiées sous la direction des professeurs de théologie a l'institut catholique de paris. Bellarmin et la bible sixto - clémentine. Étude et documents inédits. Par le R. P. Xavier-Marie Le Bachelet, s. j. Professeur de théologie a ore place hastings. Paris, Gabriel Beauchesne & Cie, éditeurs, ancienne librairie Delhomme & Briguet, rue de Rennes, 117, 1911
Tout d’abord citons le propos de Jean Madiran :
« Et, le 2 mai 1590, il publie sa propre version, précédée de la bulle Æternus ille qui la rend obligatoire à l’exclusion de toute autre.
Il est allé trop vite, trop «perso», d’une manière trop autoritaire. Il a rétabli des passages fautifs que la commission avait à bon droit rectifiés ou supprimés. Il a intégré au texte des notes marginales ajoutées par des copistes. C’est un scandale public. Le cardinal Carafa, qui proteste avec énergie, est menacé d‘être traduit devant l’Inquisition. Mais le cardinal Colonna, au nom justement de l’Inquisition, fait lui aussi de très graves critiques. Et d’autres, comme Bellarmin. Rien n’y fait, la nouvelle Bible est imposée et diffusée pendant trois mois, jusqu‘à la mort de Sixte-Quint qui survient le 27 août de la même année.
Aussitôt sa Bible obligatoire est interdite, les exemplaires déjà vendus sont recherchés, rachetés, détruits. Et la révision (en somme une révision de la révision) est à nouveau mise en chantier. » Jean Madiran, Présent, le 8 septembre 2007
Et voici ce que révèle l’étude du Père Le Bachelet :
p. 82
« Dès le 29 mai, le P. Général avait promis une réponse au P. Tanner : «De negocio Bibliorum scribet postea P. Assis-tens ad R. V»[3]. C'est donc au nom d'Aquaviva que le P. Alber écrivit, le 28 août : «En ce qui concerne la Bible de Sixte-Quint, voici la réponse qu'ont donnée, après une enquête et une discussion sérieuse, ceux qui furent mêlés à l'affaire ; réponse qui lève toute difficulté et satisfait à bon droit tout le monde : Il est certain que la bulle en question ne fut point promulguée. Une première preuve se tire de ce que cette publication n'est pas consignée dans les registres[4] (de la Chancellerie apostolique). En outre, l’Illme cardinal Bellarmin témoigne qu'à son retour de France, il entendit dire à plusieurs cardinaux, se donnant pour certains du fait, que la bulle n'avait pas été promulguée... Sachez encore, ajoutait le P. Assistant, que Notre Saint Père le pape (Paul V) a confirmé cette réponse, et que, par conséquent, l'on peut et l'on doit s'y tenir en toute sécurité».
Le 4 septembre, un nouveau détail était donné : «A l'époque même où cette Bible fit sa première apparition, quelques-uns partirent de là, dans une argumentation publique, pour attaquer l'infaillibilité pontificale : Le pape, disaient-ils, peut se tromper, puisque de fait il semble bien s'être trompé dans son édition de la Bible. Le P. Azor répondit que la bulle n'avait pas été promulguée, nonobstant la souscription imprimée des cursores : car ce fut par anticipation que les typographes l'insérèrent, sur l'ordre du pape qui voulait prévenir tout retard dans l'impression. Le fait est attesté par le P. André Eudémon-Joannès, présent à la séance».
Il y a dans ces deux lettres un ensemble de témoignages positifs qu'on n'explique réellement point par la théorie aisée, mais trop simple, des mystificateurs ou des mystifiés formant un cercle vicieux. Ces témoignages viennent de personnages graves et contemporains des événements.
P86
Dans ses lettres suivantes, l'ambassadeur montre le pape occupé à retoucher son œuvre.
Le 28 mai, il écrit : «J'allai hier voir Sa Sainteté ; Elle se mit à me parler du travail que lui avait coûté son édition, et qui est réellement considérable. Elle dit avoir corrigé les fautes qui s'y trouvaient». (Ibid., n. 4). Mais un mois plus tard, le 30 juin, il écrit de nouveau : «Le moine[5] qui m'avait apporté la Bible, revint bientôt pour me dire de lui laisser corriger certains passages. Lorsque je sus qu'il avait corrigé de même d'autres exemplaires, et que le docteur Tolet m'eut dit que c'était par ordre du pape, je le laissai faire. Bien qu'on doive imprimer l'errata pour le mettre en tête, j'envoie cependant à Votre Majesté la liste des fautes corrigées».
Cette liste a été conservée avec la lettre qui la contenait (ibid., n. 5). Les textes corrigés se rapportent aux livres des Rois, d'Esdras, de Judith et des Psaumes. On lit, en outre, cette note à la fin de la liste : «Dans le bref de Sa Sainteté, le mot ter a été remplacé par semper, et la référence marginale à Luc XXII a été supprimée».
Ce que fra Angelo appelle ici bref de Sa Sainteté n'est rien autre chose que la bulle Æternus ille ; cf. Cornely, Introd, gen., t. I, p. 467, lignes 21-23, où il est dit de saint Pierre : «pro quo Dominus.... non semel tantum, sed semper[6] rogavit...» Mgr Baumgarten, loc. cit., p. 341, s'appuyant sur l'original, rétablit la leçon ter, contre le texte du P. Cornely ; il confirme par le fait même la conclusion rigoureuse qui sort de la liste d'errata contenue dans la lettre d'Olivarès : Au mois de juin, Sixte-Quint est encore tout occupé à réviser non seulement sa Bible, mais encore la bulle qu'on nous donne comme définitivement promulguée le 10 avril précédent.
A ces considérations s'ajoute un fait singulier, dont l'importance a été justement signalée dans le procès de béatification[7] : l'absence, en dehors de l'original, de tout exemplaire séparé de la bulle.
Comment expliquer ce fait, si la bulle fut solennellement publiée le 10 avril ? Car, dans cette hypothèse, elle aurait été publiée à part, la Bible n'étant pas encore achevée ; et l'attente excitée par les longs travaux de la commission de la Vulgate, l'émotion causée par les procédés autoritaires de Sixte-Quint, ne permettent pas de supposer que le document fût passé inaperçu. Comment expliquer encore que, dans les mesures prises en 1592 pour faire rentrer tous les exemplaires répandus de la Bible sixtine, jamais il ne soit question de la bulle dont diverses copies auraient nécessairement existé, dans l'hypothèse d'une publication officielle, et n'auraient pas été moins compromettantes que les exemplaires de la Bible ?
Tout cet ensemble de circonstances ne nous force-t-il pas à tenir compte de l'affirmation, étonnante à première vue, du P. Azor ? Dans son impatience d'en finir, Sixte-Quint aura fait consigner d'office, par anticipation, le certificat d'affi
p. 88
chage, espérant bien, au commencement de mars, que, six semaines plus tard, tout serait achevé et que la publication officielle aurait lieu. Les choses n'allèrent pas aussi vite que l'ardent Pontife l'aurait désiré ; l'affichage n'eut pas lieu à l'époque projetée. Vint ensuite la préoccupation de faire disparaître les fautes d'impression, et d'autres encore, que Sixte-Quint découvrait ou qu'on lui signalait.
Puis la maladie s'abattit sur lui et la mort l'enleva, sans que la publication de l'œuvre entière, bulle et Bible, fût consommée. Le P. Cornély[8] a eu raison de ne rien voir que de très vraisemblable dans cette conclusion. Il me semble non seulement équitable, mais naturel de s'en tenir là, plutôt que d'opposer un démenti formel aux témoignages positifs et multiples de personnages graves et contemporains. »
Des erreurs dans la version de la Bible Sixto-Clementine qui ne mettent pas en cause l’infaillibilité du Pape
Jean Madiran assène doctement ses erreurs :
« A la mort de Sixte-Quint, qui survint la même année, son édition de la Bible fut retirée du commerce, tous les exemplaires détruits. L’Eglise entreprit ce que nous appelons aujourd’hui une « réforme de la réforme ». En 1592 le pape Clément VIII fit paraître une édition corrigée, que l’on nomme « sixto-clémentine » ; mais comme Sixte-Quint avait reconnu avant de mourir qu’il avait promulgué un travail raté, dangereux pour la foi, son nom seul figure sur la page de titre, ce qui était la manière la meilleure, et la plus radicale, de réparer et supprimer la mauvaise édition.
Comme quoi, même en une matière touchant directement à la foi et aux moeurs, tous les actes d’un souverain pontife ne sont pas forcément infaillibles. » Jean Madiran
Le Père Le Bachelet montre que les reproches faits à la Bible Sixto-Clémentine sont mineurs et ne concernent pas la Foi et les mœurs :
« Dans le procès qui eut lieu sous Benoît XIV, le P. Danzetta[9], S. J., justifia l'affirmation de Bellarmin en présentant, sous forme de tableau comparatif, les leçons divergentes des édi
p. 78
tions sixtine et clémentine. « Le travail, tout incomplet qu'il est, m'a paru digne d'être rapporté » (Document XXIII). Le défenseur constate d'abord l'existence de fautes d'impression dans la Bible de Sixte-Quint ; en effet, sans parler des particules et, tamen, autem, ego, etc., souvent superflues ou, au contraire, omises, il y a beaucoup d'interversions (n. 7, 14, 25, etc.) ; parfois des mots manquent (n. 18, 33) ou même un membre de phrases (n. 5) ; d'autres fois il y a redondance (n. 1, 2, 3, 4, 9, 10, 11, 21, 22) ; ailleurs, c'est un changement de cas, au détriment de la syntaxe ou du sens (n. 15, 1 7, 27, 31, 34, 35). Mais en dehors de ces fautes d'ordre typographique ou littéraire, il y en a d'autres plus importantes, qui modifient le sens (n. 16, 30, 32, 37) ou qui le faussent complètement (n. 18, 28).
Toutefois, ajoutait le P. Danzetta, il n'est pas un seul de ces changements qui constitue une erreur dans la foi ou les mœurs, et par conséquent les termes : permulta perperam mutata, dont Bellarmin s'est servi, visent des erreurs d'un genre différent. Conclusion aussi capitale dans le point qui nous occupe, qu'elle sera évidente pour quiconque aura lu les pièces précédemment analysées. L'erreur en matière de fait particulier, admise par le cardinal d'après le censeur anonyme, c. iii, § 4, p. 61, s'opposait directement, dans sa pensée, à l'erreur en matière de foi ou de mœurs. »
Vraiment Jean Madiran se discrédite par ses affirmations infondées.
Madiran tente fallacieusement de légitimer le Novus Ordo de Bugnini\-DomBotte-MontiniPaulVI de 1969 et de soutenir le Motu Proprio de l’abbé apostat Ratzinger
Et ce sont ces faits minimes sur cette affaire de Bible Sixto-Clémentine, qui n’affectent en rien l’infaillibilité pontificale sur la Foi et les moeurs, que Madiran vient mettre en balance avec le nouveau rite maçonnico-protestant de la Nouvelle Messe de Bugnini\-DomBotte-MontiniPaul VI de 1969, et à propos duquel, son architecte, le franc-maçon Bugnini\, déclara publiquement son intention contraire à celle de l’Eglise ?
« Nul ne sait encore si la contestation et le refus, licites et légitimes, de la messe de Paul VI, – qui déjà, n’étant plus obligatoire à l’exclusion de toute autre, est donc devenue facultative, – aboutira à une solution analogue à la Bible « sixto-clémentine », c’est-à-dire à une messe « paulobénédictine ». Il est évident que le Pape a le pouvoir de promulguer une messe « nouvelle », à la double condition qu’elle soit explicitement catholique en tous points, et qu’elle ne soit pas employée comme un moyen, une occasion (une arme par destination) pour supprimer les rites traditionnels. » Jean Madiran
Montini et Ratzinger équiparés avec Sixte-Quint ! Voila où Madiran, épaulé par son ami l’abbé Barthe, voudrait nous mener.
Madiran se trahit par son comportement, car en comparant deux situations qui ne supportent pas la comparaison et en se servant du fait mineur, pour légitimer l’inacceptable, l’acceptation de la promulgation du Novus Ordo Missae, néo-protestant et anticatholique de Bugnini\-DomBotte-MontiniPaul VI de 1969, il démontre qu’il est près à toutes les contorsions intellectuelles pour justifier le Novus Ordo anticatholique et la légitimité de l’évêque apostat Montini et de l’abbé apostat Ratzinger.
Il accomplit là un travail subtil d’ennemi de la Tradition catholique et de l’Eglise, en tablant sans doute sur l’ignorance présumée de ses lecteurs qui lui permettra d’autant mieux de faire accepter ses sophismes. Mais il commet là une erreur, car de plus en plus de fidèles et de clercs ne s’en laissent plus conter par ces fausses « autorités » de la Tradition.
Lorsqu’ils découvrent avec étonnement le véritable rôle de Mgr Williamson au service de la subversion de la FSSPX, les fidèles n’acceptent plus d’être des dupes.
Cette tentative de duperie des fidèles par un esprit rallié, Jean Madiran, relayé par les abbés de Suresnes, constitue aussi un symptôme de l’amateurisme et du dilettantisme des études dans les milieux de la Tradition catholique.
C’est bien ce qui a été mis en évidence par le CIRS sur un autre sujet, celui de la question de l’invalidité sacramentelle du nouveau rite de consécration épiscopale (1968).
Des prétendues « autorités » ont été installées dans la Tradition et occupent indûment des places dont leur incompétence et leur absence de désir réel de chercher la vérité auraient dû les écarter définitivement.
Aussi lorsque Jean Madiran écrit le 17 août 2007 :
« l’obscurantisme spirituel du monde moderne se situe à un niveau mental, philosophique et religieux fort inférieur à celui des citoyens romains dans l’empire du premier et du second siècle » Jean Madiran
celui-ci, en effet, a raison, car il vient nous apporter lui-même la démonstration de son propre obscurantisme par ses propres écrits sur la Bible Sixto-Clémentine.
Cette décadence religieuse et intellectuelle a été rendue possible par la prise de contrôle de l’œuvre de Mgr Lefebvre par un petit clan des infiltrés modernistes.
Il n’est que temps que celle-ci cesse et qu’un véritable combat de maintenance de la foi et de la Tradition s’instaure, car c’est ainsi que le règne de Notre Seigneur Jésus-Christ sur la Tradition catholique en France retrouvera ses droits.
Continuons le bon combat
Abbé Marchiset
ANNEXE 1 – Etude du Révérend Père Le Bachelet (1911)
Études de Théologie Historique N° 3.
publiées sous la direction des professeurs de théologie a l'institut catholique de paris
BELLARMIN et la Bible Sixto - Clémentine
ÉTUDE ET DOCUMENTS INÉDITS
Par le R. P. Xavier-Marie LE BACHELET, s. J.
professeur de théologie a ore place hastings
paris, gabriel beauchesne & cie, éditeurs, ancienne librairie delhomme & briguet, rue de rennes, 117, 1911
p. II
PUBLICATIONS DU MÊME AUTEUR sur BELLARMIN
- Bellarmin. Étude dans Vacant-Mangenot, Dictionnaire de Théologie Catholique. Paris, 1903 ss., t. II, col. 560-599.
- Le «Votum Bellarmini» sur l'Immaculée Conception. Art. dans Études, 5 décembre 1904, t. Cl, p. 656-674.
- Ven. servi Dei Roberti Cardinalis Bellarmini De Immaculata B. V. M. Conceptione Votum aliaque ejusmodi fragmenta inedita anno post definitum dogma quinquagesimo collegit, vulgavit, illustravit R. P. Xaverius Maria Le Bachelet. In-8°. Parisis, G. Beauchesne, 1905.
- Bellarmin à l'Index. Art. dans Études, 20 avril 1907, t. CXI, p. 227-246.
- Bellarmin avant son Cardinalat. (1542-1598.) Correspondance et Documents. In-8°, XXXIV-560 pp. Paris, G. Beauchesne, 1911.
EN PRÉPARATION :
- Auctarium Bellarminianum. Supplément aux Œuvres imprimées du cardinal Bellarmin.
- Bellarmin et les Exercices spirituels de saint Ignace de Loyola.
p. IV
Nihil obstat : die 18a Decembris 1910. A. BULOT.
IMPRIMATUR : Parisis, die 30a Januarii 1911. G. LEFEBVRE, Vic. gen.
p. V
AVANT-PROPOS
Le nom du cardinal Bellarmin est étroitement lié à la révision sixto-clémentine de la Vulgate. Un passage de son autobiographie, qui sera rappelé et discuté au cours de ce travail, constitue même le principal renseignement que nous possédions sur l'attitude prise par les cardinaux et les théologiens consulteurs à l'égard de la Bible de Sixte-Quint, après la mort de ce pape. Les recherches personnelles que j'ai eu l'occasion de faire sur l'activité littéraire et sur la correspondance du grand controversiste, m'ont appris que tout n'avait pas été dit sur le sujet. Des documents nouveaux sont venus à ma connaissance et m'ont paru dignes d'être présentés au public.
L'étude qui les précède n'est pas une histoire de la Bible sixto-clémentine ; c'est une contribution, assez sérieuse, me semble-t-il, à cette histoire. Il ne s'agit pas d'aborder toutes les questions, d'ordre doctrinal, exégétique ou historique, qui peuvent se rattacher au sujet ; il s'agit seulement d'utiliser des documents nouveaux et de les harmoniser avec d'autres déjà connus, dans l'intention de projeter un peu plus de lumière sur un problème grave et intéressant.
p. VII
BIBLIOGRAPHIE
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A. DANS LA COMPAGNIE DE JÉSUS.
Archiv. Postul. gener. Dossier Bellarmino.
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Epistolae V. C. Bellarmini (Fonds[11] Bellarmin, 2).
Epistolae latinae Card. Bellarmini (F. B. 5).
Lettere e Miscellance (F. B. 6).
Bellarm. Autog. diver. (F. B. 7).
Epistolae Roberti Card. Bellarmini e Societate Jesu (F. B. 9).
Varia ad Card. Bellarmiuum spectantia (F. B. H).
Commentaria in Summam S. Thom. Leçons de Louvain (F. B. 14-17).
Manuscripta Card. Bellarmini quae reperiuntur in Bibtiotheca Collegii Romani. (Catalogue du XVIIle siècle).
B. EN DEHORS DE LA COMPAGNIE.
ANVERS. Musée Plantin, Outvangen Briefen, Lxxxvi.
COLOGNE. Historisches Archiv. Ms. G. B., fol. 149.
LOUVAIN. Bibliothèque de l'Université. Arm. ii, rayon sup. I. Bible de Nuremberg, 1529, avec notes autographes de Bellarmin.
MILAN. Ambrosiana. Ms. H. 73 Pte inf. ; Ms. C. S. vi, 5.
MUNICH. Reischsarchiv. Jesuitica in genere, fasc. xix.
PISTOIE. Fabroniana. Ms. 13 (Censurae librorum) ; 15 (Opuscula varia Card. Bellarmini).
ROME. Archivio Vaticano. Brevi LII, t. xix. xx.
Biblioth. Vatic., Lat. 6177, 6192, 6326, 6613, 6879, 8314, 9509, 9513-9515.
Angelica. Fondo antico. Ms. 895.
Archivio di Stato. Gesuiti. Censurae opiniorum, t. i.
p. VIII
SIMANCAS. Archivo. Secretaria de Estado. Correspondencia de Roma. Legajo 357, 358, 359 (antiguo 955, 956 et 957, 959).
Negociacion di Roma. Leg. 737 (ant. 1870).
VENISE. Archivio di Stato. Dispacci. Roma, filza 23.
Miscellanea Gregolin. Appendice. Busta n. 55, fasc. 1.
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Azzolini, Card. Decio. Voto... nella causa... del Ven. Servo di Dio Roberto Cardinale Bellarmino... V. Voti.
Batiffol, Mgr Pierre. La Vaticane de Paul III à Paul V d'après des documents nouveaux. Paris, 1890.
Baumgarten, Mgr P.-M. Die Veröffentlichung der Bulle "Eternus ille celestium" vom I März 1590. (Biblische Zeitschrift, t. v, p. 189-191). Fribourg-en-Brisgau, 1907.
Id. Das Original der Konstitution "Eternus ille celestium", vom I. März 1590 (Ibid., p. 337-351).
Bellarmin, Card. Robert Disputationes... de controversiis christianae fidei, adversus hujus temporis haereticos... Ingolstadt, 1586, etc.
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Biblia sacra. Quid, in hac editione, à theologis Lovaniensibus, praestitum sit, paulo post indicatur. Antuerpiae, Ex officina Christophori Plantini... MDLXXIIII.
Biblia sacra... Antuerpiae, Ex officina Christophori Plantini... MDLXXXIII.
Bukentop, Henricus de. Lux de Luce libri tres.... In tertio agitur de Editione Sixti V facta anno 1590... Bruxelles, 1710.
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Turmel, Joseph. « Chronique d'historique ecclésiastique » (Revue du Clergé français, 1er déc. 1904, t. xli, p. 86-87 ; « La Bible de Sixte-Quint » (Ibid, 15 janv. 1905, t. xli, p. 431-435) ; « Chronique d'histoire ecclésiastique » (Ibid. 15 janv. 1907, t. xlix, p. 387 ss).
Ungarelli, Aloys. M. Praelectiones de Novo Testamento et Historia vulgatae Bibliorum editionis a Concilio Tridentino. Rome, 1847.
Vacant-Mangenot. Dictionnaire de théologie catholique. Paris, 1903 ss.
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Vercellone, Charles, Barnabite. Variae lectiones vulgatae latinae Bibliorum editionis. Rome, 1860. (Les Prolégomènes sont empruntés à Ungarelli).
Id. Dissertazioni accademiche di vario argomento. Rome, 1864.
Vezzosi, A. F. I scrittori de' chierici regolari detti Teatini. Rome, 1780.
Voti degl" infrascritti Eminentissimi Signori Cardinali, B. Gregorio Barbarigo, Gieronimo Casanate, Decio Azzolini, Domenico Passionei, nella causa della beatificazione del Venerabile Servo di Dio Cardinale Bellarmino. Seconda edizione incontratta e corretta, nella quale si è aggiunto la Vita del Bellarmino scritta da lui medesimo, ed un foglio presentato dall' Eminentissimo Cardinale Decio Azzolini alla Santità d'Innocenzo XI, dopo tenutasi la congregazione preparatoria per la causa del detto Bellarmino. In Ferrara, 1762.
Widenhofer, François-Xavier, S. J. Apographum ex Manuscripto autographo Venerabilis Servi Dei Roberti Bellarmini e Societ. Jesu, S. R. E. Cardinalis presbyteri, archiepiscopi Capuani, de editione latina Vulgata, quo sensu a Concilio Trid. definitum sit, ut ea pro authentica habeatur, nunc primo impressum. Wurtzbourg, 1749
Zaccaria, François-Antoine, S. J. Saggio critico della corente Letteratura straniera, dagli autori della Storia letteraria d'Italia. Modène, 1757.
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INTRODUCTION
LES ANTÉCÉDENTS DE BELLARMIN
professeur à Louvain et à Rome.
Le rôle de Bellarmin dans l'affaire de la Bible sixto-clémentine ne commence, à proprement parler, qu'à partir de l'époque où il fut associé, comme membre de la commission nommée par Grégoire XIII, aux travaux préparatoires à une nouvelle édition de la Vulgate. Toutefois il ne sera pas inutile de rappeler brièvement, du point de vue spécial qui convient à cette étude, les antécédents du futur consulteur.
Détail curieux, Bellarmin débuta dans l'enseignement par le traité de l'Ecriture sainte. Dans le manuscrit autographe des leçons de Louvain[13], le premier cahier porte pour titre extérieur : In pa pté D. Thom. Lectiones. Ce n'est d'abord qu'un commentaire très bref des articles de la première question de la Somme ; mais arrivé au huitième, où saint Thomas se demande si la théologie est une science de raisonnement, utrum haec doctrina sit argumentativa, le jeune professeur commence un petit traité des principes d'où la théologie tire ses arguments, en d'autres termes, des lieux théologiques : Ecriture, tradition, conciles, décrets pontificaux, autorité des docteurs et raison naturelle.
La question De Scriptura[14] suit immédiatement. Elle com
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prend une vingtaine de pages et se divise en trois points : Qu'est-ce que la sainte Ecriture ; quels sont les livres sacrés ; quelle est l'autorité de la sainte Ecriture. Ce dernier point, plus longuement développé, revient à ce problème : Tout ce qui nous est communiqué dans les saintes lettres est-il rigoureusement vrai et certain ? Question dépendante de cette autre : Dieu, qui est l'auteur principal de ces livres, peut-il mentir ou tromper ? De là quatre conclusions : 1° L'auteur des Écritures canoniques est le Saint-Esprit. 2° Dieu ne peut en aucune façon mentir ni tromper, soit par Lui-même, soit par un autre. 3° Les saintes Ecritures ne renferment pas de mensonge, fût-ce le plus léger. 4° L'Ecriture tout entière a été écrite sous l'assistance du Saint-Esprit.
Bellarmin, on le voit, considère les livres sacrés en eux-mêmes, et non pas dans les versions ou les éditions qui en ont été données au cours des siècles ; rien, dans ce premier traité, qui se rapporte directement à la Vulgate. Dès lors cependant il fut amené à s'en occuper, et d'une façon qui le prépara de loin à son rôle futur. S'étant pris à réfléchir, nous apprend-il dans son autobiographie, sur la grande utilité de l'hébreu pour l'intelligence des saintes Ecritures, il se mit à travailler cette langue. La connaissance qu'il acquit ne resta pas stérile ; il en tira immédiatement parti. On conserve à la bibliothèque de l'Université de Louvain[15] une Bible latine[16] imprimée à Nuremberg en 1529 et provenant de l'ancien collège des jésuites. La page du titre porte, au bas, cette note manuscrite : Annotationes Mss. Latinae et Hebraicae l scriptae sunt propria manu l Cardinalis Bellarmini l Cum hic Lovanii docuit. I A. Crommius[17].
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Ces annotations sont de quatre sortes. Des versets, des membres de phrase, des mots en grand nombre sont soulignés. Çà et là, dans beaucoup de livres, des traits de plume courent le long de phrases ou de passages entiers. Des références patristiques se lisent en tête de certains livres ; par exemple, au début de Judith : «D. Augustinus, 1. 18 de Civitate Dei, cap. 26», et au début de Job : «Ubi et quando vixerit Job, vide D. Augustinum, l. 18 de Civitate Dei, c. 47». Il y a enfin les notes proprement dites, en latin ou en hébreu ; généralement très courtes et d'une écriture microscopique, elles se trouvent dans le sens soit de la largeur soit de la longueur, la plupart du temps dans les marges, parfois aussi entre les lignes ou sur le titre même des livres et des chapitres.
Le nombre de ces notes est très inégal pour les divers livres. Beaucoup n'en ont presque pas ou en ont peu ; tels, le Lévitique, les Nombres, le Deutéronome, Josué, Ruth, les Rois, les Paralipomènes, Esdras, Tobie, Judith, Esther, les Psaumes, l'Ecclésiaste, le Cantique des cantiques, Jérémie et Baruch, Ezéchiel, les Machabées et le Nouveau-Testament en général. Au contraire , les notes sont nombreuses dans les livres suivants : Genèse, Exode, les Juges, Job, Proverbes, Sagesse, Ecclésiastique, Daniel, les épîtres de saint Jacques et de saint Jean. Dans Isaïe et les petits prophètes, les notes surabondent, en marge et au cours du texte. La plupart n'ont rien à voir avec la critique textuelle ; dans un certain nombre cependant, la comparaison du texte de la Vulgate avec le texte hébraïque témoigne d'une préoccupation de ce genre, et plus tard Bellarmin, devenu consulteur dans la congrégation de la Vulgate, utilisera quelques-unes des remarques faites en Belgique.
A la direction imprimée aux études de Bellarmin par son goût pour la Bible s'ajoutait l'influence du milieu où il vivait. L'Université de Louvain avait eu une part glorieuse dans le travail de critique biblique qui allait se développant depuis le concile de Trente. La Biblia sacra de Jean Henten, O. P., ou révision de Louvain, publiée dans l'Athènes brabançonne en 1547, avait été rééditée souvent. Quand Bel
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larmin arriva dans cette ville, une nouvelle édition[18] se préparait, celle qui parut à Anvers en 1574, chez Christophe Plantin. Pour lui donner plus de prix, l'imprimeur avait fait recueillir dans les bibliothèques de Belgique et collationner par plus de trente érudits une soixantaine des principaux manuscrits de la Bible[19].
Circonstance qui touchait encore de plus près Bellarmin, il trouvait chez les jésuites de Louvain, d'abord une bibliothèque très riche en littérature biblique[20], puis, comme collègue dans l'enseignement, un homme mêlé activement à ce mouvement d'études scripturaires et particulièrement versé dans les langues orientales, le P. Jean Willems[21], appelé communément Harlemius, du nom de sa ville natale. A cette époque même cet érudit s'occupait de ses Variae Lectiones in Bibliis editionis vulgatae ex Mss. collectae, qui furent publiées en 1571[22].
Dans un milieu où de tels travaux se préparaient, comment l'attention et la discussion ne se seraient-elles pas portées sur les divers textes de la sainte Ecriture et leur valeur respective, sur l'autorité de la Vulgate en particulier. Tel est bien l'état des esprits qui se reflète vivement dans l'intéres
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sante lettre que Bellarmin adressa, le 1er avril 1575, au cardinal Sirlet. Après un exorde de circonstance, le jeune professeur expose le désir que lui ont exprimé des hommes instruits et grands admirateurs du cardinal, de le voir joindre à son écrit contre les annotations de Valla et d'Erasme sur le Nouveau-Testament, la réfutation des annotations de Jacques Le Fèvre et de Théodore de Bèze. Ce serait rendre un très grand service aux âmes et à l'Eglise que de relever les fautes et les erreurs de ces maîtres pernicieux.
Bellarmin profite de l'occasion pour proposer au cardinal ses doutes sur des questions d'Ecriture sainte qui le préoccupent beaucoup (Document I). La «première et la principale» question porte sur la Vulgate, non pas sur l'autorité même de cette version qui est supposée, mais sur le degré d'autorité qui lui convient, sur la portée précise du terme authentique, dont le concile de Trente l'a honorée. L'embarras du jeune professeur vient de la diversité des avis qu'il constate en un point de si grande importance. «Les uns soutiennent qu'en vertu de l'approbation conciliaire, il n'est plus du tout permis d'affirmer l'existence, dans l'édition latine Vulgate, d'une sentence fausse ou qui ne rendrait pas la pensée de l'écrivain primitif ; ils vont même jusqu'à sacrifier l'autorité des manuscrits hébreux et grecs, plutôt que d'attribuer une faute à l'ancien interprète ; enfin ils enseignent que dans cette édition Vulgate, nous n'avons pas moins le vrai et légitime sens de l'Ecriture que nous ne l'aurions dans le texte autographe des premiers écrivains. Les autres prétendent, au contraire, que le concile n'a rien décrété de semblable, mais seulement qu'on doit retenir dans l'Eglise cette vieille édition Vulgate comme la meilleure de toutes, et qu'il n'est permis à personne d'en prendre une autre comme thème d'exposition dans les écoles ou de prédication dans les offices sacrés et publics ; que, de plus, cette édition ne contient rien de contraire à la pureté de la foi et à l'honnêteté des mœurs. On ne peut nier, toutefois, que l'interprète latin auteur de cette édition, n'ait eu ses moments d'absence comme les autres hommes, et ne se soit plusieurs fois mépris sur le vrai sens de l'Ecriture».
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Les trois autres questions n'ont pas de rapport direct avec la Vulgate ; il suffira d'en indiquer sommairement l'objet. La seconde concerne les textes hébraïques que nous possédons maintenant : Faut-il les tenir pour purs et intègres, ou, au contraire, pour viciés et corrompus de parti pris par les docteurs juifs après la venue de Jésus-Christ, comme beaucoup l'estiment ?
La troisième question est relative à la version des Septante. Des savants très entendus en hébreu et en grec trouvent dans le texte grec de la sainte Ecriture une telle diversité, du point de vue littéraire, qu'il leur semble impossible d'admettre l'unité d'auteur ; ils soupçonnent que les soixante-dix interprètes n'auront pas traduit chacun tous les livres saints, mais quelques-uns le Pentateuque, d'autres le livre de Job ou celui des Psaumes, et ainsi du reste. L'hypothèse ne renverserait pas seulement les fameuses cellules, dont saint Epiphane prétend avoir vu les restes à Alexandrie, mais elle enlèverait encore à la version des Septante beaucoup de l'autorité souveraine dont elle jouit dans l'Eglise. Que penser de cette opinion ? Peut-être, aussi, n'y aurait-il rien d'improbable dans cette alternative : ou que nous n'avons plus la version des Septante, ou que du moins nous ne l'avons plus dans son intégrité et sa pureté primitive.
La quatrième question a pour objet les sept derniers chapitres du livre d'Esther : Doit-on les tenir pour sacrés et canoniques ? Sixte de Sienne l'a nié ; mais le concile de Trente n'a-t-il pas prescrit de tenir pour sacrés et canoniques, entièrement et dans toutes leurs parties, les livres qu'il énumère, tels qu'on a coutume de les lire dans l'Église catholique et qu'ils sont contenus dans la vieille édition latine Vulgate ?
Bellarmin terminait sa lettre en déclarant qu'il n'attendait pas du cardinal, occupé à tant d'affaires importantes, une longue et laborieuse dissertation ; une simple et courte réponse suffirait à son bonheur, brevi simplicique responsione contentus ero.
Ce minimum de désir fut-il satisfait ? Je ne saurais le dire ; nulle part je n'ai trouvé trace d'une réponse, ni dans les papiers du cardinal Bellarmin, ni dans les autres sources de
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renseignements que j'ai pu consulter. Les questions soulevées en 1575, Bellarmin les aborda dans son enseignement du Collège Romain ; mais rien n'indique s'il y eut influence de la part de Sirlet sur les positions prises alors. Les Annotations de ce cardinal, étudiées récemment[23], ne sont qu'une défense de la Vulgate contre Valla et Erasme.
S'il était permis d'en juger par son attitude à l'époque où le décret Insuper fut rédigé au concile de Trente, Sirlet ne devait pas être partisan de l'interprétation rigoureuse dans la question de l'autorité de la Vulgate. Voici, en effet, ce qu'il écrivait, le 17 avril 1546, au cardinal de Sainte-Croix Marcel Cervin, légat du pape au concile : «J'ai dit à Votre Eminence, dans une de mes lettres, qu'il aurait été bien de confier à des personnes instruites dans les trois langues le soin de revoir la Bible hébraïque, grecque, latine, de les collationner sur d'anciens exemplaires et de publier une édition qui fut conforme à notre mère la sainte Eglise et aux saints Pères. Ils y auraient ajouté tout ce qu'il y a en plus dans l'hébreu. Il aurait fallu leur procurer des exemplaires grecs bons et anciens, car il y a beaucoup de fautes et dans le grec et dans le latin. Il me semble que ces paroles d'Hermann Lethmathius[24], que j'ai citées à Votre Eminence dans une autre lettre méritent d'être remarquées : «Nemo hoc ita intelligat, ut putet hanc 70 versionem sufficere, et propterea hebraicam originem rejiciendam, sed, ut teste Tertulliano Ptolomeus fecit, potius utramque conjungi debere, quod illa huic nostrae translationi auctoritatem, haec vero hebraicae veritati multum addat lucis et perspicuitatis».
Venant ensuite à l'opposition que le décret Insuper rencontrait à Rome de la part de «cinq ou six personnes de peu d'autorité», Sirlet remarquait qu'après tout les Pères du concile n'avaient fait que déclarer authentique la version que notre sainte mère l'Eglise avait toujours tenue pratique
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ment pour telle ; et il concluait ainsi : «Cette parole, quae legi consueverunt, me paraît résoudre tout, en donnant à entendre qu'on n'a rien décidé de nouveau. Il reste toutefois que, dans la détermination d'un point de si grande importance, il eût été bien, je crois, de parler plus clairement, de mentionner la Bible hébraïque, grecque et latine, et de statuer qu'on ait à recevoir comme authentique celle qui, suivant les décrets du concile, sera proposée après révision, ad fidem veterum exemplarium»[25].
Il y a certainement dans cette lettre, quoi qu'il en soit de la question d'influence immédiate, tout un courant d'idées que nous allons retrouver dans les écrits de Bellarmin. Mais avant d'en venir à ce sujet, signalons un fait d'une réelle importance. Le 17 janvier 1576, la sacrée Congrégation du Concile déclara que, pour encourir les peines rappelées dans le décret Insuper, il suffisait de changer une période, une clausule, un membre de phrase, un mot, une syllabe, un iota même, en opposition à l'édition latine Vulgate. Véga méritait d'être repris pour la hardiesse de langage qu'il s'était permise en cette matière, De justificatione, l. IV, c. ix. Pour ce qui concerne les divergences entre les textes grec ou hébreu et la Vulgate, la Congrégation renvoyait à la troisième règle de l'Index de Pie IV. Il y est dit que les versions faites sur l'hébreu peuvent servir pour comprendre la sainte Écriture, à titre d'éclaircissement de la Vulgate, mais non comme texte sacré.
L'authenticité de ce décret, longtemps discutée[26], n'est plus
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contestable depuis que Mgr Batiffol[27] a publié le passage où, dans un commentaire sur le concile de Trente, à propos des termes : cum omnibus suis partibus, le cardinal Carafa, préfet de la Congrégation, rapporte la décision : «Propter hujusmodi verba S. Congregatio Concilii censuit incurri in poenas, vel si sola periodus, clausula, membrum, dictio, syllaba iotave unum quod repugnat Vulgatae editioni immutatur, etc.».
Ce décret n'aurait-il pas eu, historiquement parlant, quelque connexion avec la lettre de Bellarmin au cardinal Sirlet ? M. l'abbé Jacques Thomas a fait à ce propos le réflexions suivantes : «La lettre de Bellarmin est datée Lovanii, Kalend. aprilis 1575. Or, la décision alléguée serai du 17 janvier 1576, et elle se donne comme répondant à un doute élevé dans une académie «quae Societatis Jesu curae commissa est». Y a-t-il un rapport plus étroit qu'une simple coïncidence de date entre la décision et la lettre de Bellarmin ? Le cardinal Sirleto fit-il passer celle-ci à son ami le cardinal Carafa pour porter la question devant les théologiens de la Congrégation du Concile ? Le rapprochement de dates mérite d'être noté»[28].
La coïncidence est assurément curieuse et il n'est pas absolument impossible que les doutes soulevés dans la lettre, par exemple au sujet des sept derniers chapitres du livre d'Esther, aient été l'occasion du décret. L'hypothèse, cependant, me paraît difficile. La maison où Bellarmin se trouvait alors, ne pourrait s'appeler que très improprement une académie confiée aux soins de la Compagnie de Jésus ; c'était un théologat de l'ordre, ayant son autonomie et complètement séparé de l'Université même de Louvain, où Bellarmin, quoiqu'on en ait dit, ne fut jamais professeur. En outre dans sa teneur générale le décret ne répond pas aux questions soumises au cardinal Sirlet, car dans les deux opinions relatives à la Vulgate, il ne s'agit nullement de changer quoi que ce soit, mais seulement de déterminer le degré d'autorité qui convenait à cette version.
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Le document n'en est pas moins intéressant et, dans la mesure où il fut connu, il dut influer sur l'esprit des théologiens et des exégètes d'alors, soit pour les faire incliner vers l'interprétation rigoureuse, soit pour leur faire prendre une attitude de prudente réserve. C'est ce que nous constatons chez Bellarmin après que, rentré en Italie au mois d'octobre 1576, il fut devenu professeur de controverse au Collège Romain. Instruit par ses études précédentes et par l'expérience acquise, il aborde résolument les problèmes qu'il avait énoncés en écrivant au cardinal Sirlet. Dans sa première controverse[29], De verbo Dei, I. I, c. vii, il traite du livre d'Esther et, notamment, soutient la canonicité des sept derniers chapitres ; ce qui l'entraîne dans une discussion sérieuse sur plusieurs points connexes, en particulier sur l'époque où vécut Esther. Au second livre, c. i et ii, il parle de l'édition hébraïque. La position qu'il prend est modérée. Les livres sacrés des Juifs n'ont pas péri, comme certains le prétendent, durant la captivité de Babylone. Quant au texte hébraïque actuel, on ne peut pas le considérer comme une source absolument pure, qui doive servir de règle pour l'examen et la correction de tout autre texte ; mais ce serait exagérer dans un sens contraire que de le croire souvent corrompu de parti pris par les Juifs. Bellarmin prend la même attitude à l'égard de la version des Septante, considérée dans son texte actuel, c. vi.
La Vulgate apparaît enfin, c. x. La question annoncée porte sur l'autorité de cette version : «Tertia, eaque potissima restat quaestio, quantae videlicet auctoritatis sit Latina vulgata editio». Ou est étonné de ne trouver, comme réponse
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directe, que cette simple affirmation : La Vulgate doit être tenue pour authentique, suivant la détermination du concile de Trente. Nulle définition de ce terme : authentique, ni du degré d'autorité intrinsèque qu'il suppose dans la Vulgate. Le premier argument, que Bellarmin tire «du long usage que l'Église romaine a fait de la Vulgate tant de siècles durant», supplée en partie à cette lacune : «Dire que, pendant huit ou neuf siècles, l'Église a mal interprété l'Écriture, et que, dans les matières qui concernent la foi et la religion, elle a honoré les contresens de je ne sais quel traducteur comme la parole même de Dieu, ne serait-ce pas avancer une étrange absurdité ?»
Ainsi, au jugement de Bellarmin, l'authenticité de la Vulgate exclut l'erreur proprement dite dans les matières qui concernent la foi et la religion. Mais elle n'emporte nullement, en principe, la dépréciation des textes originaux ; Calvin, en attribuant cette pensée aux Pères du concile, a trahi la vérité. Rien de pareil dans leur décret ; ils n'y ont pas fait mention des sources primitives, mais se sont contentés de choisir la Vulgate parmi les nombreuses versions latines qui étaient alors répandues, et de lui donner ainsi la préférence. Du reste, la question n'est pas aussi simple, en pratique, que les adversaires le supposent. Si le texte original nous était parvenu dans sa pureté primitive, nul doute qu'il ne fallût le préférer aux versions qui en sont dérivées mais ce n'est pas le cas. Bellarmin renvoie là-dessus à ce qu'il a dit auparavant de l'édition hébraïque et de la version des Septante.
Conclusion, c. xi : on peut recourir aux sources, à l'hébreu ou au grec, en quatre circonstances : quand «on constate une erreur de copistes dans nos manuscrits de la Vulgate» ; quand les manuscrits latins sont si divergents qu'on ne peut arriver à établir sûrement la vraie leçon de la Vulgate ; quand il y a obscurité dans les mots ou le sens de l'édition latine enfin «pour mieux saisir l'énergie et la propriété des termes».
Les erreurs de copistes sont expressément admises dans la Vulgate. S'y trouve-t-il d'autres erreurs ? Bellarmin ne l'affirme ni le nie. Une seule phrase semble insinuer, rapide
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ment, une réserve : «Certos nos reddere voluit, in iis praesertim quae ad fidem et mores pertinent, nulla esse in hac versione interpreturn errata. L'Église a voulu nous assurer qu'il n'y a pas dans cette version, d'interprétations erronées, surtout en ce qui touche à la foi et aux mœurs». Apparemment, l'auteur des Controverses ne croyait pas pouvoir aller plus loin, dans un cours et un ouvrage destiné au public. Bientôt, les circonstances changeant, il se prononcera plus nettement.
Nous sommes, en effet, parvenus à l'époque où le projet d'une révision de la Vulgate commençait à prendre corps. En suggérant au pape Grégoire XIII l'idée d'instituer une commission d'hommes experts pour donner une nouvelle édition des Septante, le cardinal Montalto, bientôt Sixte-Quint, voyait là comme un préliminaire à la révision de la Vulgate. Aussi la collaboration de Bellarmin à cette œuvre[30] fut vraiment pour lui un acheminement en même temps qu'une préparation immédiate au rôle beaucoup plus important dont l'étude va suivre[31].
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CHAPITRE PREMIER - LA DISSERTATION SUR LA VULGATE, VERS 1586-1591
1. Publication de l'écrit. — 2. Son contenu. — 3. Controverse sur l'authenticité. — 4. Preuves de l'authenticité. — 5. Époque de la composition. — 6. Construction du texte.
1. — En 1749, le P. Widenhofer, professeur d'Écriture sainte et d'hébreu à l'Université de Wurtzbourg, publia une plaquette intitulée : Apographum ex Manuscripto autographo Venerabilis Servi Dei Roberti Bellarmini e Societ. Jesu, S. R. E. Cardinalis presbyteri, archiepiscopi Capuani, de editione latina vulgata, quo sensu a Concilio Trid. definitum sit, ut ea pro authentica habeatur, nunc primo impressum[32].
Les circonstances de cette publication furent racontées, l'année suivante, dans le Journal de Trévoux, ou Mémoires pour l'histoire des Sciences et des beaux Arts[33] : «Le P. Widenhofer, Jésuite allemand et Docteur en Théologie à Wirtzbourg, passant à Malines il y a environ deux ans, remarqua beaucoup de Mss. de Bellarmin dans la Bibliothèque des
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Jésuites de cette ville[34], et dans ce nombre il distingua la présente Dissertation sur la Vulgate ; son idée le porta même à en faire une espèce d'abrégé, mais étant de retour à Wirtzbourg, il jugea plus à propos de faire imprimer l'ouvrage entier. Il écrivit au Bibliothécaire de Malines, nommé le P. Jean-Baptiste Holvoët, pour obtenir de lui une copie collationnée avec un certificat de sa main ; ce qui lui ayant été accordé et envoyé, le même P. Widenhofer a fait l'édition que nous annonçons. On voit à la fin le certificat du P. Holvoët, daté du 7 de novembre 1748».
Dix ans plus tard , l'étude de Bellarmin fut traduite en français et insérée dans la Sainte Bible de Vence[35], où elle se trouve maintenant parmi les dissertations préliminaires[36].
2. — L'objet de cet écrit, annoncé dans le titre même, est très précis : En quel sens le Concile de Trente a-t-il défini qu'il faut tenir la Vulgate pour authentique ? La réponse suit immédiatement : «Tous ceux que j'ai pu lire jusqu'à présent semblent arriver à cette conclusion : La Vulgate doit être regardée comme exemple d'erreur, en ce qui concerne la foi catholique et les bonnes mœurs ; elle seule doit être maintenue dans l'usage public des églises et des écoles ; ce qui n'empêche pas qu'il puisse s'y trouver des fautes».
La dissertation n'est que le développement de cette thèse. Onze auteurs[37], dont plusieurs assistèrent au Concile de Trente, sont d'abord produits : Jean Driedo, André Vega, Guillaume van Linden (Lindanus), Melchior Cano, Sixte de
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Sienne, Josse Ravesteyn (Tiletanus), Melchior Zangerus, Diego Payva, François Foreiro, Jérôme Oleaster, Gilbert Génébrard. Viennent ensuite les preuves intrinsèques, au nombre de six.
La première se tire du fait invoqué par les Pères du concile, à savoir «le long usage de l'Église». De ce fait on peut bien conclure que la Vulgate doit être regardée comme exempte d'erreur en ce qui concerne la foi et les mœurs, mais non pas qu'elle doit être préférée aux textes primitifs, ni qu'elle doit être à l'abri de toute méprise de la part de l'interprète. C'est même le contraire qui s'impose ; car, nonobstant le long usage qu'elle a fait de cette version, l'Église y a constaté des fautes qu'elle a corrigées en recourant aux sources, ou tolérées, pour ne pas troubler les fidèles.
Dans la seconde preuve, l'auteur insiste sur l'objet des définitions conciliaires, ordinairement restreint à ce qu'exigent la conservation de la foi et la condamnation des erreurs, ou du moins la préservation contre tout danger. Pour atteindre ce but, il n'était nullement nécessaire de décréter dans la version déclarée authentique une conformité avec le texte original, qui s'étendît à toutes les phrases.
La troisième preuve est fondée sur l'existence d'éditions hébraïque et grecque, pour les livres primitivement écrits dans l'une ou l'autre de ces deux langues. Supposer qu'en vertu de l'approbation conciliaire, la Vulgate est authentique ou fait autorité absolument en tout, même en ce qui ne concerne pas la foi ou les mœurs, c'est lui donner toujours la préférence, lorsqu'elle est en désaccord avec les autres textes. Une telle conclusion dépasse la teneur du décret : la Vulgate n'y est privilégiée que par rapport aux autres éditions latines, sans qu'il soit fait mention de l'hébreu ou du grec. Cette conclusion est même contraire à la pensée des Pères du concile : d'après les Actes, ils ne voulurent rien enlever aux textes hébraïque et grec de l'autorité dont ils jouissaient auparavant. D'ailleurs, en agissant autrement, on irait contre le sentiment commun des Pères de l'Église, qui ont toujours préféré les sources aux versions qui en dérivent. On mono
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poliserait l'autorité des Écritures au profit des seuls Latins. Enfin ne porterait-on pas préjudice à la sainte Écriture même, ce premier trésor de l'Église, en soutenant qu'il ne nous en reste qu'une seule version recevable, et une version si peu ferme dans les détails, si l'on tient compte des divers exemplaires que nous en possédons
Les conséquences absurdes qu'entraînerait l'interprétation rigide fournissent une quatrième preuve. Notre Vulgate diffère notablement de la vieille édition latine, usitée dans l'Eglise avant saint Jérôme ; il n'y aurait donc pas eu auparavant de Bible vraiment authentique. Plusieurs des anciens textes ont été conservés dans les Missels et les Bréviaires ; l'Eglise se servirait donc de textes scripturaires qui n'appartiendraient pas à une édition authentique. Conséquence plus singulière encore : comme dans notre Vulgate certains livres viennent de la révision hiéronymienne, et d'autres non, il se trouverait qu'entre les livres de la vieille édition latine, les seuls qui auraient été très fidèlement traduits et qui seraient demeurés purs de toute altération, seraient ceux-là mêmes que saint Jérôme regardait comme apocryphes et dont il a négligé la recension, la Sagesse, l'Ecclésiastique, les Machabées, ou que l'Eglise a conservés, comme les Psaumes, pour des raisons d'ordre purement pratique. En outre, il faudrait dire que l'Eglise a rendu authentiques non seulement la version de saint Jérôme, mais encore ses explications et paraphrases ; souvent, en effet, surtout dans l'Ecclésiaste et les Proverbes, la traduction de ce docteur est moins une version qu'une explication et une paraphrase.
Une dernière preuve est empruntée à la considération de différents passages que l'auteur avait notés au cours de ses lectures, et dont il ne croyait pas pouvoir, sans parti pris, défendre l'exactitude. Il y en a dix-huit dans le texte publié par le P. Widenhofer. Nous aurons bientôt l'occasion de les indiquer et de les examiner.
3. — La dissertation qui vient d'être résumée ne pouvait pas manquer d'attirer l'attention. Dans l'article déjà
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cité[38], le journaliste de Trévoux l'avait présentée comme un écrit qui complétait et précisait la pensée de Bellarmin sur l'autorité de la Vulgate : «Il avait prouvé simplement dans ses Controverses (I. II de verbo Dei, c. x-xiv) que cette version est authentique ; il avait résolu les difficultés que proposent à ce sujet les hérétiques des derniers siècles ; mais en quel sens prenait-il le Décret de la IVè Session du concile de Trente, et quelle étendue donnait-il à cette définition ? C'est ce qu'on ne trouve que dans le petit ouvrage qui vient d'être imprimé à Wirtzbourg».
Trois ans plus tard, un ouvrage anonyme paraissait à Rouen (et non pas à Rome), sous ce titre : La Vulgate authentique dans tout son texte ; plus authentique que le texte hébreu, que le texte grec qui nous restent. Théologie de Bellarmin ; son Apologie contre l'écrit annoncé dans le Journal de Trévoux, Article LXXXV, Juillet 1750. A Rome, 1753. L'auteur de ce livre, le P. Charles-Joseph Frévier, jésuite de Rouen, hasardait d'abord, p. 2, quelques doutes sur l'authenticité de l'écrit publié par le P. Widenhofer : «Il nous dit qu'il est de la propre main du cardinal Bellarmin. Comme il n'en donne aucune preuve, nous pourrions en douter ; premièrement, sur ce que cet écrit n'a point de place dans l'édition que Bellarmin lui-même nous a donnée de tous les ouvrages qu'il voulait laisser au public après sa mort. Secondement, sur ce que dans ses ouvrages, il établit une doctrine et des principes tout opposés à ceux du manuscrit».
Le P. Frévier n'en restait pas à cette simple négation, facile, mais dangereuse aussi, comme toute négation arbitraire ; il se plaçait immédiatement, p. 3-5, sur un terrain indépendant de cette controverse préalable : «Mais qu'il soit de la propre main du cardinal, qu'il n'en soit pas, jamais du moins il ne s'est imprimé de son aveu. Plus on l'examine, et plus on est persuadé que l'écrit en question n'a jamais été qu'une espèce de mémoire, tel qu'au temps de ses premières études se fait un jeune théologien, pour se
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rendre compte à lui-même de ce qu'il a lu. Le cardinal en effet n'était point encore prêtre, dit Fuligati son historien, quand il fut envoyé prêcher en Flandre. Il est donc naturel de penser que rendu au terme de sa mission, prêt à paraître, décidé par conséquent alors sur la Vulgate, il aura été surpris de retrouver parmi ses papiers une pièce si inutile désormais à ses travaux, et que jetée au rebut dans quelque coin de son cabinet, quelque demi-savant l'aura recueillie avec d'autant plus d'empressement, qu'on s'imagine que tout ce qui part de la main d'un grand homme, est toujours grand».
En un style plus simple, le P. Frévier nie ensuite que l'écrit soit une vraie dissertation, qu'on puisse y trouver une thèse quelconque soutenue par Bellarmin. Finalement, il formule ainsi sa pensée, p. 212 : «Le cardinal, dans son prétendu Manuscrit, ne fait que rapporter ce qu'il a lu sur le Décret du concile de Trente, ne décide rien en son nom, n'explique son sentiment personnel que dans ses Controverses».
Il faut donc, à l'aide de ce dernier ouvrage, rétablir la vraie doctrine de Bellarmin sur la Vulgate. Le P. Frévier le fait en énonçant p. 20, par opposition au Journaliste de Trévoux, deux propositions qui forment le fond même de son livre. «Le Journaliste prétend que la Vulgate n'est point authentique en tout, mais seulement dans les choses qui regardent la foi et les mœurs, et moi je soutiens qu'il n'est pas un seul texte, dans toute la Vulgate, si court qu'il puisse être, qui ne soit authentique. Première Partie. Le Journaliste prétend que le texte hébraïque et le texte grec, aujourd'hui encore, ne sont pas moins authentiques que la Vulgate, qu'ils le sont même davantage ; et moi je soutiens qu'aujourd'hui ils le sont moins, s'ils le sont encore. Seconde Partie»[39].
Il serait inutile de suivre l'apologiste dans le développement de ces deux propositions. Quatre passages de Bellarmin
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sont invoqués. 1° Dans la controverse De conciliis, I. II, c. xii, il est question des Ecritures sacrées et canoniques : «L'Eglise n'a pu déclarer la Vulgate canonique, que conséquemment elle ne soit authentique», argue aussitôt le P. Frévier. 2° Les protestants, par haine de la Vulgate, exaltaient le texte hébraïque, déclaré source très pure et règle dont il faut se servir pour contrôler et rectifier les autres textes. Bellarmin De verbo Dei, I. II, c. ii, rejette cette opinion comme manifestement fausse. 3° Un peu plus loin, c. vii, l'auteur des Controverses applique la même doctrine à la version des Septante. Enfin, à cette objection des protestants, qu'il faut donner plus de foi aux sources qu'aux versions, il répond, c. xi : «Oui, quand il est clair que l'eau de la source n'a pas été troublée ; mais il en va tout autrement dans le cas présent». Et le P. Frévier de conclure triomphalement, p. 210 : «L'Apologie est donc finie. Bellarmin est pleinement justifié. Jamais il n'a pensé, comme le fait penser le Journal de Trévoux».
Mais le Journaliste ne se tint pas pour battu. Il répliqua dans les Mémoire[40] en rendant compte du livre de son censeur. Il ne lui fut pas difficile de montrer ce qu'il y avait d'arbitraire dans les négations, les suspicions et les hypothèses de ce dernier. La publication du P. Widenhofer était accompagnée d'un certificat, où le bibliothécaire du collège de Malines attestait la conformité de la copie avec l'autographe même de Bellarmin : «Concordat cum autographo, id quod facta collatione affirmo Mechliniae 7mo novembris 1748. Joan. Bapt. Holvoet, Soc. Jesu». De quel droit récusait-on ce témoignage formel ? II est vrai que, de son propre aveu, le P. Frévier était parti en guerre sans avoir eu la précaution de lire la publication de Wurtzbourg ; il s'était contenté du compte-rendu des Mémoires de Trévoux.
Bellarmin n'a point inséré cet écrit dans l'édition qu'il a donnée de ses ouvrages, c'est exact ; mais «qu'est-ce que cela prouve ? ripostait le P. Berthier, p. 235. Ne peut-il pas
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être arrivé ou que l'auteur ait perdu de vue ce Manuscrit, ou qu'il ne l'ait pas trouvé d'une étendue assez considérable ? Tels sont d'autres petits traités qui subsistent encore dans les Bibliothèques».
Aux hypothèses faites par son contradicteur sur la nature et la date de la dissertation, le Journaliste répondait à bon droit, p. 2357 : «Voilà un système. Nous ne dirons que des faits. Bellarmin, né en 1542, se fit jésuite en 1560, fut envoyé à Louvain en 1569, y professa la théologie et y prêcha jusqu'en 1576, étant alors âgé de 34 ans. Nous ne savons si c'est en Flandre, qu'il fit sa Dissertation sur la Vulgate ; mais nous assurons qu'il ne la composa point avant l'an 1570, et il paraît même qu'elle est d'un temps postérieur, puisqu'on voit par cet ouvrage que l'auteur savait bien l'hébreu. Outre les comparaisons qu'il fait, en quelques endroits, de ce texte avec la Vulgate, on apprend de lui, aux pages 15 et 16, qu'il avait lu en hébreu l'Ecclésiaste, le Cantique des cantiques, les Proverbes, etc. His diebus, ce sont les termes, diligenter perlegi Ecclesiasten, Cantica, Proverbia et alia quaedam hebraice, et contuli cum latina versione. Ce n'est pas, disons-nous, avant l'an 1570, qu'il a pu faire ces lectures et sa Dissertation ; car l'histoire de sa vie marque positivement qu'il ne se mit à étudier la langue sainte qu'en 1570. Les livres que nous venons de nommer ne sont pas les plus aisés de l'Écriture ; il faut avoir fait des progrès dans l'étude de l'hébreu pour les lire de suite, et pour les comparer en critique avec notre Vulgate, Bellarmin avait donc pour lors 29 ou 30 ans ; il était Professeur de Théologie et Prédicateur ; par conséquent on ne peut pas dire que ce fût un jeune théologien qui jette sur le papier une espèce de Mémoire pour se rendre compte à lui-même de ce qu'il a lu».
4. — Le Journaliste, en ramenant le spéculatif P. Frévier aux réalités de l'histoire, mettait la question sur son vrai terrain. Combien plus facile, toutefois, et plus décisive eût été sa réponse, s'il avait disposé d'autres documents que la seule publication du P. Widenhofer ! Que le bibliothécaire de Malines ait pu se tromper et prendre à tort pour un
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autographe de Bellarmin le texte qu'il avait entre les mains, la chose est absolument possible[41], et je pourrais donner plusieurs exemples de confusions semblables ; mais encore faudrait-il avoir des présomptions sérieuses pour affirmer qu'en réalité il y eut erreur. Actuellement, le problème est insoluble par cette voie, puisqu'on ne sait pas où le texte de Malines est passé, ni même s'il existe encore. Mais, à défaut de l'autographe, des copies nous suffiront pour trancher le débat. Copies multiples et qui se présentent avec un ensemble de circonstances qui ne laisse pas de place au doute.
1° A l'Ambrosiana de Milan, Ms. H. 73 Part. inf., trois dissertations sont réunies sous ce titre : Dubia ad editionem Bibl. vulgatae pertinentia post definitionem concilii Tridentini. Au bas de la page on lit cette note : Felicibus auspiciis Illmi Card. Federici Borrhomaei Olgiatus vidit anno 1603. Ces dubia comprennent trois écrits, dont le second et le troisième, on le verra bientôt, sont incontestablement de Bellarmin, et se rattachent aux travaux qu'il fit comme membre de la Congrégation de la Vulgate ; le premier est la dissertation dont nous nous occupons. Pourquoi l'adjoindre aux deux autres, si ce n'est pour la communauté d'origine et d'auteur ?
2° A la bibliothèque Fabroni, de Pistoie, Ms. 13 (Censurae librorum), on trouve une série de pièces anonymes, mais qui ne sont pas autre chose que des copies d'écrits du cardinal Bellarmin. Le groupement des pièces s'explique par la dernière révision des écrits du Vén. Serviteur de Dieu qui se fit sous le pape Clément XI, en 1715 et 1719, alors que le cardinal Charles-Auguste Fabroni, fondateur de la bibliothèque, était rapporteur de la cause. La dissertation sur la Vulgate est parmi ces pièces.
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3° Quatre ans après l'apparition du livre du P. Frévier, le P. Zaccaria[42] rendit compte de la controverse[43]. Aux raisons apportées par le Journaliste de Trévoux, il ajouta ce qu'il appelait «un altro argomento di sommo peso», un argument le souveraine valeur. Pendant qu'il étudiait la théologie à Rome, le P. Thomas Silotti, bibliothécaire du Collège Romain, lui avait communiqué une vieille copie de la dissertation sur la Vulgate, qui se conservait parmi d'autres manuscrits. Elle portait cette apostille, écrite de la main du très docte cardinal Tolomei[44] : Card. Bellarmini. Zaccaria réédita plus tard la dissertation dans ses prolégomènes aux commentaires[45] du P. Jacques Tirin sur la sainte Écriture.
La copie dont il est ici question paraît encore exister dans un recueil qui n'est plus à la bibliothèque du Collège Somain, mais qui lui a certainement appartenu. Il se compose de pièces manuscrites, la plupart originales, et a pour titre : Varia ad Card. Bellarm. spectantia. La dissertation sur la Vulgate s'y trouve, avec cette note, au verso de la dernière feuille : De editione Vulgata a Patre Roberto Bellarmino, et cette autre, un peu plus bas : P. Roberti Bellarii
4° Signalons enfin un catalogue intitulé : Manuscripta Card. Bellarmini quae reperiuntur in Bibliotheca Collegii Romani, et rédigé vers 1751 par le P. Lazzari[46], sur la demande du car
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dinal Cavalchini, rapporteur de la cause de béatification sous Benoît XIV. Le catalogue comprend vingt-six pièces dont celle-ci : Judicium de editione latina vulgata, quo sensu a Conc. Trid. definitum sit ut pro authentica habeatur.
En face de ces documents, il n'est pas possible de contester l'authenticité de la dissertation sur la Vulgate, et le P. Zaccaria pouvait à bon droit, dans les Prolegomena de son édition du P. Tirin, juger en ces termes la critique de l'Anonymus gallus, c'est-à-dire du P. Frévier : «Sed fallitur plus aequo vulgatae vindex, ac nimium levibus conjecturis utitur ad infirmandam egregii opusculi auctoritatem».
Mais alors, comment expliquer la divergence signalée entre la doctrine de la Dissertation et celle des Controverses sur l'autorité de la Vulgate ? La difficulté serait sérieuse, si dans son exposé de la position prise par Bellarmin dans les Controverses, le P. Frévier était un fidèle interprète. Qu'il en soit autrement, la chose est manifeste pour quiconque compare avec soin ce que Bellarmin dit réellement et ce qu'on lui fait dire. Le bonus vulgatae vindex parle la plupart du temps pour son compte ; dans sa thèse générale il est presque toujours en dehors de la question, en confondant deux acceptions distinctes du terme authentique.
L'authenticité de la Vulgate peut et doit même s'entendre tout d'abord du caractère de texte officiel que la déclaration des Pères de Trente a conféré à cette version ; mais elle peut et doit aussi s'entendre, ultérieurement et par voie de conséquence, de l'autorité intrinsèque que cette déclaration suppose dans la Vulgate, si l'on tient compte du but et de la portée du décret.
Entendue dans le premier sens, l'authenticité affirmée au concile de Trente s'étend évidemment à la seule Vulgate et à toutes ses parties, puisqu'en vertu du décret, cette version reste, elle seule et telle qu'elle est, le texte officiel de l'Église latine, sans qu'il soit permis à personne de modifier en quoi que ce soit le texte ou de lui en substituer un autre.
Entendue dans l'autre sens, l'authenticité de la Vulgate emporte assurément un certain degré d'autorité intrinsèque, et par conséquent de conformité avec le texte original des
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saints livres ; degré de conformité à tout le moins tel que cette version soit apte au but que se proposaient les Pères du concile. Quel est, d'une façon plus précise, ce degré de conformité ? Là commence la difficulté ; aussi diverses opinions n'ont cessé d'exister, sur ce point, parmi les théologiens et les exégètes. Les uns se sont contentés d'une conformité substantielle assez vague ; d'autres ont affirmé une conformité positive dans les passages qui se rapportent à la foi et aux mœurs ; d'autres enfin ont étendu cette conformité positive à tout le contenu de la Vulgate, n'admettant en fait d'erreurs proprement dites que celles des copistes.
Le P. Frévier est manifestement de cette dernière école ; il en est si bien qu'étant donnée la manière dont il pose la question, il ne semble même pas soupçonner qu'il puisse y avoir quelque différence entre l'autorité de la Vulgate entendue dans la première ou dans la seconde acception du terme authentique. De là ce titre d'ouvrage, un peu tapageur : La Vulgate authentique dans son texte ; plus authentique que le texte hébreu, que le texte grec qui nous restent ; c'est-à-dire, suivant l'auteur, plus conforme au texte original. De là encore cette conséquence pratique : Il faut toujours préférer la leçon de la Vulgate à celles du texte hébreu et du texte grec actuels.
Que cette interprétation dépasse la doctrine de Bellarmin dans les Controverses, il est facile de s'en convaincre, même à s'en tenir à ce qui a été rappelé dans l'Introduction. Les documents qui seront utilisés au chapitre suivant, renseigneront plus amplement encore le lecteur. Mais il est bon de donner dès maintenant une pièce qui aurait sans doute embarrassé le P. Frévier, s'il l'avait connue.
En 1591, quatre ans après que Bellarmin eut achevé son cours au Collège Romain, le P. Aquaviva lui demanda son avis[47] sur un catalogue de propositions qu'il s'agissait d'imposer aux professeurs comme obligatoires. Dans la série relative à la sainte Écriture, les trois suivantes touchaient de très près la question qui nous occupe : «5a Concilii Tri
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dentini decreto repugnat omnis sensus contrarius sensui, quem vulgata editio latina reddit evidenter. 7a Tridentinum Concilium non solum in quaestionibus fidei et morum, sed in omnibus plane rebus vulgatam editionem facit authenticam, ita ut nihil eorum, quae in ea continentur, falsum sit. 15a In iis, quae in hebraeis graecisque codicibus contraria sunt latinae vulgatae, decreto Concilii Tridentini derogata est omnis fides aliis linguis, cum de earum textibus corrupti sint, nec ne, jus habeat Ecclesia dubitandi».
Quel fut le jugement de Bellarmin ? Il déclara ces trois propositions contraires à tous les auteurs qui avaient jusqu'alors écrit sur la matière, et désapprouva surtout le projet de les imposer aux professeurs d'une façon absolue : «Prop. 5a, 7a et 15a de Scripturis videntur mihi contrariae omnnibus auctoribus, qui hactenus de hac re scripserunt. Quare oportuisset non absolute eas definire, quasi certissimae sint, sed injungere nostris ut non docerent hoc aut illud, si ita placebat».
Si l'on rapproche de ce jugement les premières lignes de la Dissertation sur la Vulgate, tout commentaire devient superflu. Une seule concession doit être faite. Sur la question particulière du degré d'autorité intrinsèque qui convient à la Vulgate, Bellarmin va plus loin dans la Dissertation que dans les Controverses ; il y complète le point qu'il avait auparavant laissé dans l'ombre, ou du moins il précise en se prononçant nettement là où il avait tout au plus insinué. Ce qui fait supposer ce que nous allons établir maintenant, à savoir que la Dissertation est postérieure aux Controverses.
5. — Dans sa réponse au P. Frévier, le Journaliste de Trévoux crut faire beaucoup en soutenant que Bellarmin avait composé sa petite étude à Louvain, alors qu'il était déjà prêtre et professeur depuis plusieurs années. Cette détermination du lieu et de l'époque ne manquait pas de vraisemblance. Bellarmin, on l'a vu, s'était occupé de la Vulgate à Louvain; et quelle meilleure manière d'expliquer la présence en Belgique de l'autographe même ? Ces considérations
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m'ont fait incliner jadis vers ce sentiment[48] ; plus tard je fus amené, par des études sur les écrits inédits du Cardinal, à soumettre le problème à un nouvel examen.
Une première conclusion se dégagea bientôt de la considération des auteurs cités au début de la Dissertation. Des onze témoignages rapportés, trois sont empruntés à des ouvrages dont la publication n'eut lieu qu'après le retour de Bellarmin à Rome, c'est-à-dire après 1576. Ce sont les Psaumes de Génébrard, la Defensio Tridentinae fidei de Diego Payva de Andrada, la Collatio catholica de Melchior Zangerus, publiés en 1577, 1578 et 1580 (Document II). Comme les onze témoignages se retrouvent, sans le moindre indice d'addition postérieure, dans tous les exemplaires, cette conclusion s'imposait : La Dissertation sur la Vulgate n'a pas été composée à Louvain, mais à Rome, après l'année 1580.
D'autre part, plusieurs versets de la sainte Ecriture sont cités, dans la seconde partie de l'étude, d'après le texte de la Vulgate tel qu'il se lisait avant la révision clémentine, faite en 1591-1592. L'écrit ne peut donc pas être postérieur.
Entre ces deux dates extrêmes, d'un côté 1580 et de l'autre 1592, est-il possible de préciser ? Le P Zaccaria émit[49] cette conjecture, que la Dissertation pourrait bien être un travail de Bellarmin dans la congrégation sixto-clémentine de la Vulgate. A quelle époque pourrait-on plus opportunément rapporter une étude de ce genre ? Plusieurs des erreurs relevées dans cet écrit ont été corrigées dans l'édition clémentine de la Vulgate ; ne serait-ce pas à la suite des observations présentées par Bellarmin ? Enfin le fait que la Dissertation n'ait pas été publiée, s'expliquerait fort bien dans cette hypothèse.
La conjecture de Zaccaria peut se transformer en certitude. Dans le manuscrit de l'Ambrosiana, la Dissertation est accompagnée de deux jugements émis par Bellarrnin dans la
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Congrégation de la Vulgate, l'un sur la manière de procéder en cette affaire (Document III), l'autre sur le genre d'approbation qu'il convient de donner à la Bible révisée (Document VI). Les trois pièces sont réunies sous ce titre commun : Dubia ad editionem Bibl. Vulgat. pertinentia, et Olgiati, alors bibliothécaire de l'Ambrosiana, témoigne les avoir reçue du cardinal Frédéric Borromée ; or ce cardinal avait précisément fait partie de la Congrégation nommée par Grégoire XIV pour la révision de la Vulgate.
La Dissertation elle-même, étudiée plus à fond, confirme ce premier indice. Dans la quatrième des preuves qu'il propose, n. xii, Bellarmin parle des différences que le texte hébreu et la version de saint Jérôme présentent en ce qui concerne les livres de l'Ecclésiastique et des Proverbes ; il ajoute, pour appuyer son affirmation : «Et hoc non temere dito, sed quia his diebus diligenter perlegi Ecclesiasten, Cantica, Proverbia, et alia quaedam hebraica, et contuli cum latina versione». La Dissertation étant postérieure à l'année 1580, il ne peut plus s'agir d'une lecture qui se rapporterait aux études bibliques de Louvain ; d'ailleurs la Bible annotée par Bellarmin, quand il était en cette ville, ne porte pas de traces d'un travail de ce genre. En revanche, on a vu que le Vén. Serviteur de Dieu fit partie de la Congrégation chargée de préparer urne nouvelle édition des Septante. Quel temps pourrait-on plus vraisemblablement assigner à la lecture comparative qu'il nous dit avoir fait de l'Ecclésiaste, du Cantique des Cantiques, des Proverbes et autres livres écrits en langue hébraïque ?
Mais le point d'appui le plus ferme repose sur l'examen des passages de la Vulgate dont Bellarmin signale l'inexactitude et des différences que présentent, sous ce rapport, les cinq exemplaires de la Dissertation qui sont venus à ma connaissance. Deux sont imprimés : celui que le P. Widenhofer publia en 1750 à Wurtzbourg et qu'il donne comme représentant l'autographe de Malines ; celui que le P. Zaccaria publia en 1760, et autres dates, à Venise. Trois sont manuscrits : celui de l'ancien Collège Romain, celui de l'Ambrosiana, celui de la Fabroniana.
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Du point de vue littéraire, ces cinq exemplaires se partagent en deux groupes, que j'appellerai A et B. Le groupe A comprendra les deux imprimés et la copie ms. de la bibliothèque Fabroni, absolument semblables, sauf les fautes d'impression ou de transcription. Le groupe B comprendra les copies ms. de l'Ambrosiana et de l'ancien Collège Romain, en tout semblables à l'exception de deux phrases. La caractéristique des deux groupes se trouve dans la seconde partie de la Dissertation, là où l'auteur énumère un certain nombre de passages contenus dans l'édition de la Vulgate dont il se sert, et qu'il juge fautifs. Quatorze de ces passages sont communs aux exemplaires des deux groupes ; en outre, ceux du groupe A ont quatre passages en propre, ceux du groupe B n'en ont qu'un seul.
Un autre facteur a son importance dans la solution du problème ; c'est l'attitude des membres de la Congrégation, chargée de réviser la Vulgate, à l'endroit des corrections proposées dans la Dissertation. Les Variae Lectiones de Vercellone sont ici d'un secours précieux ; elles donnent, pour presque tous les textes, les renseignements nécessaires. D'autres ouvrages suppléent aux Variae Lectiones pour les deux ou trois textes qu'elles ne contiennent pas.
Trois étapes sont à distinguer dans l'affaire de la Vulgate. Il y eut d'abord la révision grégoriano-sixtine, qui se fit sous la présidence du cardinal Antoine Carafa ; commencée sous le pontificat de Grégoire XIII, elle s'acheva sous celui de Sixte-Quint. Le travail eut pour base la Bible d'Anvers de 1583[50], sortie des presses de Christophe Plantin. Les résultats sont consignés dans des exemplaires de cette Bible[51] où se lisent les corrections admises par les membres de la Commission. Vint ensuite la révision que le pape Sixte-Quint, mécontent de ce qui avait été fait[52], entreprit lui-même en
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1589-1590. Elle est connue par la Bible même de Sixte-Quint[53] ; mais il faut tenir compte des corrections[54] ajoutées après coup par ce pape, soit à la plume, soit à l'aide de petits morceaux de papier, collés sur les endroits défectueux. Il y eut enfin la révision grégoriano-clémentine, qui commença sur l'ordre de Grégoire XIV et s'acheva sous Clément VIII. Aux Variae Lectiones de Vercellone s'ajoutent, pour ce qui la concerne, les annotations de Tolet[55] sur la Bible de Sixte-Quint.
A l'aide de toutes ces données on peut dresser un tableau portant sur trois points : les passages de la Vulgate censuré dans la Dissertation ; les corrections proposées ; l'acceptation, quand il y a lieu, de ces corrections dans les trois révisions susdites, désignées sous les abréviations de caraf , sixt. et clém.
En signalant, à titre d'exemples, les dix-neuf passage qu'on verra, Bellarmin n'improvisait pas de toutes pièces. Il utilisait d'abord les études faites à Louvain sur la Bible de Nuremberg. Ainsi, les mots in corde suo de Gen viii, 21, y sont soulignés. Gen. xvii 27, est souligné à parti des mots tam vernaculi, et le texte hébreu est mis en marge. Gen. xxx, 35, est tout entier souligné. De même Gen. xxxi 48, à partir du mot Galaad ; en outre, au-dessus des mots qui suivent : id est..., on lit : redundat ; enfin, le texte hébreu est mis en marge. Gen. l, 19, est souligné à partir des mots num Dei possumus. Dans Exod. xxi, 10, la traduction exacte d'après l'hébreu, se lit à la marge.
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passages censures |
correction proposés |
correction acceptée |
I. dans les deux groupes d'exemplaires Gen. xvii, 27 : Et omnes viri domus illius, tam vernaculi quam emptitii et alienigenae, pariter circumcisi sunt. Gen. xxiv, 32 : Dedit aquam ad lavandos pedes camelorum et virorum qui venerant cum ipso. Gen. xxx, 35 : Cunctum autem gregem unicolorem tradidit in manu filiorum suorum. Gen. xxxi, 48 : Idcirco appellatum est nomen ejus Galaad, id est, tumulus testis ; et adjecit Laban : Intueatur, et judicet Dominus. Gen. xxxviii, 12 : Mortua est Sua uxor Judae. Gen. l, 19 : Nolite timere, num Dei possumus resistere voluntati ? Exod. xxi, 10 : Quod si alteram ei acceperit uxorem, providebit puellae nuptias et vestimentum, et pretium pudicitiae non negabit ; si enim haec tria non fecerit, dimittet eam gratis sine pecunia. Num. xxxiii, 3 : Profecti de Ramesses, quinta decima die mensis primi, fecerunt altera die Phase. I Paralip. iv, 22 : Et qui stare fecil solem. Esth. vi, 4 : Intraverat autem Aman interius atrium. Ps. LXI, 5 : Cucurri in siti. Eccles. vii, 19 : Sustenta justum. Ecclis. li, 13 : Exaltasti super terram habitationem meam, et pro morte defluente deprecatus sum. Act. ix, 29 : Loquebatur quoque gentibus, et disputabat cum Graecis. II. dans les exemplaires du groupe a. Gen. viii, 21 : Et ait ad eum. I Reg. xiv, 14 : ln media parte jugeri, quam par boum in die arare consuevit. III Reg. vii, 9 : et intrinsecus usque ad atrium majus. Sap. viii, 17 : Immortalis est in cogitatione sapientiae. III. dans les exemplaires du groupe b. Jos. iii, 1 : Venerunt ad Jordanem, et morati sunt ibi per tres dies. |
ab alienigenis[56] ejus non unicolorem[57] Galaad et Maspha, quoniam dixit : Intueatur Dominus. filia Suae nam sub Deo sum ego[58] Qui servae puellae ductae in uxorem superduxerit aliam, non minuet priori victum, vestitum, et debitum conjugale non negabit : quod si haec non fecerit, dimittet liberam gratis[59]. Supprimer le mot : fecerunt. Joachim. exterius Cucurrerunt[60] istum[61] orationem meam, et pro liberatione a morte Supprimer le mot : gentibus[62] Supprimer : ad eum quod[63] extrinsecus Immortalitas, in cognatione ibi pernoctarunt, antequam transirent |
Caraf. Sixt. Clem[64]. Caraf. Sixt. Clem. (en partie seulement)[65]. Caraf. Clem[66]. Caraf. Clem[67]. Caraf. Sixt. Clem[68]. Caraf. Clem[69] Caraf. [Sixt[70]]. Clem. |
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Dans le texte même de la Bible de Nuremberg, Bellarmin avait trouvé plusieurs des corrections proposées dans sa Dissertation Gen. xxxviii, 12 ; Num. xxxiii, 3 ; Eccles. vii, 19 ; Sap. viii, 17. Enfin les Variae Lectiones du P. Harlemius, et surtout la Bible de Louvain de 1574, complétée par les Notationes de François Lucas, lui avaient fourni quelques-unes des mêmes corrections et d'autres encore : Gen. xxiv, 32 ; xxxi, 48 ; xxxviii, 12 ; Num. xxxiii, 3 ; III Reg. vii, 9 ; Ps. lxi, 5 ; Eccles. vii, 19 ; Sap. viii, 17.
Voici maintenant les réflexions que suggère le précédent tableau :
1° Les exemplaires du groupe A contiennent dix-huit textes ; or ce sont des textes sur lesquels se porta l'attention des réviseurs de la Vulgate, bien qu'en définitive ils n'aient accepté qu'un petit nombre des corrections proposées. On peut se convaincre du fait en prenant les passages correspondants soit dans un exemplaire annoté de la Bible d'Anvers, soit dans les Variae Lectiones de Vercellone.
2° Les exemplaires du groupe B ne présentent que quinze textes, dont un nouveau. Il y a suppression de quatre textes contenus dans les exemplaires du groupe A. Pour l'un d'eux, I Reg. xiv, 14, la correction proposée est sans importance ; Bellarmin l'aura négligée dans la seconde rédaction. Mais les trois autres, Gen. viii, 21 ; III Reg. vii, 9 ; Sap. viii, 17, sont précisément des textes corrigés dans la révision faite sous la présidence du cardinal Carafa et achevée en 1588. C'est donc que la seconde rédaction de la Dissertation est postérieure à cette époque.
3° Cette seconde rédaction reproduit, il est vrai, trois passages dont la correction avait été résolue par le cardinal Carafa et sa commission, à savoir : Gen. xxiv, 32 ; xxxviii, 12 ; Num. xxxiii, 3. Mais ce fait, surprenant à première vue, con-firme en réalité et complète les conclusions qui précèdent. Les détails donnés par Vercellone sur les vicissitudes que certains textes subirent dans les trois révisions successives, nous montrent qu'il s'agit de corrections admises d'abord par les premiers réviseurs, mais rejetées ou remises en question par leurs successeurs. Ainsi, les corrections relatives à
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Gen. xxxviii, 12 et Num. xxxiii, 13, furent biffées par Sixte-Quint dans la révision personnelle qu'il entreprit. La correction relative à Gen. xxiv, 32, avait été admise par ce pape, mais les nouveaux réviseurs la remirent momentanément en question sous Grégoire XIV : «Emendarunt sixtini, eorumque correctionem probavit Sixtus : quumque veterem latinorum lectionem rursum sufficere gregoriani cogitassent, sapienter Toletus illam abjecit»[71].
Il semblerait encore, à première vue, que Bellarmin aurait dû reprendre, dans sa seconde rédaction, Sap. viii, 14, dont la correction, agréée par la Congrégation du cardinal Carafa, ne fut pas maintenue par Sixte-Quint, si ce n'est pour le seul mot immortalitas et après coup, par collage d'un petit papier ; mais ce pape étant mort, les nouveaux réviseurs réapprouvèrent aussitôt la correction décidée par leurs prédécesseurs[72].
Nous arrivons ainsi à cette conclusion importante et définitive : La Dissertation sur la Vulgate, considérée dans sa seconde rédaction, fut composée en 1591, au début de la révision grégoriano-clémentine. Par là s'explique que dans le Ms. de l'Ambrosiana elle se trouve jointe à deux pièces qui sont du même temps. La première rédaction ne peut pas être de beaucoup antérieure, car on lit encore cette phrase dans l'ancien exemplaire du Collège Romain : «Quia his diebus diligenter perlegi Ecclesiasten, etc.» ; elle appartient vraisemblablement à l'époque de la révision grégoriano-sixtine. En tout cas, elle date d'avant le départ de Bellarmin pour la France, au mois d'octobre 1589.
Ce n'est pas une œuvre de jeunesse que son auteur aurait ensuite dédaignée ; par son caractère même, cet écrit échappait à la publicité, comme tant d'autres notes rédigées pour les Congrégations et dont les papiers du cardinal nous révèlent l'existence. Ce même caractère justifie le titre de Judicium que la Dissertation porte dans l'ancien catalogue du P. Lazzari ; jugement de consulteur, motivé sans doute par
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quelque question analogue à celles que nous rencontrerons dans le chapitre suivant, et dont la solution dépendait du degré d'autorité qu'on pouvait légitimement attribuer à la Vulgate.
Quelle fut l'histoire de l'exemplaire, donné pour autographe, qui se conservait jadis à la bibliothèque du collège de Malines ? Fut-il communiqué par l'auteur lui-même à Lessius, à François Lucas ou à quelque autre ami ? Fut-il emporté de Rome par Guillaume Allen qui, d'abord comme consulteur, puis comme cardinal, fit partie de la Congrégation de la Vulgate sous Grégoire XIII et Sixte-Quint, sous Grégoire XIV et Clément VIII ? N'entra-t-il que plus tard dans le Musée Bellarmin ? Autant de problèmes, d'ailleurs secondaires, que l'absence de documents ne permet pas de trancher.
6. — Il importe davantage de donner un bon texte de la Dissertation. Les exemplaires du groupe A sont, sous ce rapport, d'inégale valeur. Le texte imprimé du P. Widenhofer est très incorrect ; non seulement les fautes d'impression y sont nombreuses, mais on voit que le copiste a souvent mal déchiffré l'autographe. La copie de la bibliothèque Fabroni est également fort défectueuse. Au contraire, le texte de Zaccaria est exact ; il suffit pour représenter la première rédaction. Dans le groupe B, la copie de l'Ambrosienne, excellente d'abord, devient de plus en plus négligée à mesure qu'on avance ; celle de l'ancien Collège Romain est bonne dans l'ensemble ; et toujours la comparaison des deux copies entre elles ou avec le texte imprimé de Zaccaria permet de rectifier les incorrections de détail.
Comme les deux exemplaires du groupe B représentent la seconde rédaction de Bellarmin, il m'a semblé préférable de les prendre pour base de mon texte (Document II). Toutefois, pour rappeler la première rédaction, les passages qui sont propres aux exemplaires du groupe A seront intercalés en caractères moindres, et les variantes, celles du moins qui méritent d'être relevées, seront mises en note.
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CHAPITRE SECOND
BELLARMIN DANS LA CONGRÉGATION GRÉGORIANO-CLÉMENTINE 1591-1592
1. Documents anciens et documents nouveaux. — 2. Avis sur la manière de procéder. — 3. Critique de la Bible de Sixte-Quint. — 4. Ce qu'il faut en faire. — 5. Quelle approbation donner à la nouvelle édition. — 6. Conclusion : préface de la Bible sixto-clémentine.
1. — Mécontent du travail du cardinal Carafa et de sa congrégation, Sixte-Quint avait entrepris, on l'a vu, de faire lui-même une nouvelle révision de la Vulgate. Il était occupé à cette œuvre, quand, au commencement d'octobre 1589, Bellarmin quitta Rome avec le cardinal Henri Gaétani, envoyé à Paris comme légat a latere. Arrivés dans cette ville le 20 janvier suivant, ils y restèrent jusqu'au mois de septembre, époque où le légat, informé de la mort du pape, survenue le 27 août, reprit précipitamment la route de la Ville éternelle.
Dans l'intervalle, Sixte-Quint avait poursuivi son travail de révision personnelle avec l'ardeur extraordinaire dont témoigne un récit rapporté par M. le Baron de Hübner[73]. En se promenant un jour dans sa vigne avec l'ambassadeur de
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Venise, Badoer, le pape lui raconta que «malgré les dispositions du concile [de Trente], on ne s'était jarnais occupé sérieusement de cette affaire ; que par conséquent il l'avait confiée à quelques cardinaux et que, peu content de leur travail, il s'était vu obligé d'y mettre la main lui-même ; qu'il touchait à la fin de sa peine, étant déjà arrivé à l'Apocalypse, et que le livre de la Sagesse était en ce moment sous presse». Il ajouta que, lorsqu'on lui avait annoncé la visite de son interlocuteur, il était occupé de ce travail qu'il aimait infiniment et qu'il avait adopté la méthode suivante : il passait chaque feuille, dès qu'il l'avait terminée, au P. Tolédo [Tolet] et à quelques Pères augustins très forts en ces matières ; ceux-ci les revoyaient et les envoyaient ensuite à l'imprimerie.
M. de Hübner ajoute en note[74] : «Cette version mérite plus de créance que les détails donnés à Olivarès par son ami le cardinal Carafa, personnellement blessé par le pape». Il serait plus exact de distinguer entre les appréciations de l'ambassadeur espagnol, alors très irrité contre Sixte-Quint, et les détails positifs qu'il tenait de personnages intimement mêlés aux affaires dont il parle. De ce point de vue, la lettre à laquelle M. de Hübner fait allusion, est importante et propre à jeter beaucoup de lumière sur ce qui sera dit au cours de ce chapitre.
Olivarès[75] écrivit donc à Philippe II, le 7 mai 1590 : «Sa Sainteté vient de mettre au jour la Bible dont j'ai déjà entre-tenu Votre Majesté. Le pape a menacé le cardinal Carafa de le traduire devant l'Inquisition, parce que celui-ci lui con-testait le pouvoir d'ajouter, de retrancher ou de changer quoi que ce soit au texte de la Bible. Dès lors il lui en a ôté la révision et s'en est chargé personnellement, consultant sur les passages difficiles le docteur Tolet, mais sans lui dire s'il compte adopter son sentiment. Tolet sait, au contraire, que souvent il ne l'a pas suivi. Entre autres changements, il a
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supprimé quelque part cinq lignes entières. Aussi Tolet pense que cette édition profitera plus aux hérétiques qu'aux fidèles, et que, n'y aurait-il point d'autre raison, ce fait suffirait à motiver la convocation d'un concile général. Le Saint-Père en a fait distribuer un exemplaire à chaque cardinal, et je ne doute pas qu'il n'en envoie un à Votre Majesté ; mais je vous mettrai, Sire, à même de faire examiner préalablement ce travail, si Votre Majesté le juge à propos». Et l'ambassadeur de conclure : «En vérité, grande est l'extravagance de cet homme, et grande aussi l'imprévoyance avec laquelle il se jette tête baissée dans les nouveautés les plus périlleuses».
Même en faisant la part de l'exagération, il est facile de reconnaître dans cette lettre les causes et les symptômes de la réaction violente qui, à la mort du pape, éclata et s'étendit, en particulier, à sa Bible. C'est dans cet état de surexcitation que Bellarmin trouva Rome, quand il y rentra le 11 novembre 1590, alors que le successeur immédiat de Sixte-Quint, Urbain VII, avait déjà terminé son éphémère pontificat (15-26 septembre).
Élu pape le 5 décembre, Grégoire XIV s'occupa sans retard de la question brûlante de la Vulgate. Bellarmin rentre alors en scène. Quel fut son rôle à cette époque, l'une des plus brillantes et aussi des plus délicates de sa vie, il nous l'apprend dans son autobiographie : «En 1591, Grégoire XIV se demandait quel parti prendre au sujet de la Bible éditée par Sixte-Quint ; Bible où s'étaient faits beaucoup de changements regrettables (permulta perperam mutata). Des personnages importants tenaient pour une proscription publique ; mais N... démontra, en présence du pape, qu'une telle proscription ne convenait pas ; il fallait plutôt réviser cette Bible de telle façon qu'elle pût paraître et que l'honneur de Sixte-Quint restât sauf. Pour obtenir ce résultat, on n'avait qu'à faire disparaître au plus tôt les changements regrettables, et à réimprimer la Bible sous le nom du même pape ; une préface avertirait que, par suite d'une hâte excessive, quelques fautes dues soit aux imprimeurs, soit à d'autres personnes (errata vel typographorum. vel aliorum) s'étaient
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glissées dans la première édition... Le pape Grégoire agréa ce conseil ; il nomma une commission pour revoir rapidement la Bible sixtine, et la ramener au texte des Bibles ordinaires, surtout de celles de Louvain. Le travail se fit à Zagarolo, dans la maison de campagne du cardinal Marc-Antoine Colonna, en présence de ce cardinal, du cardinal Allen, anglais, du Maître du Sacré Palais, de N... lui-même et de trois ou quatre autres. Après la mort de Grégoire XIV et d'Innocent IX, Clément VIII publia la Bible ainsi révisée sous le nom de Sixte-Quint, avec une préface que le même N... composa».
Cette page de Bellarmin est restée pendant longtemps la principale, et presque l'unique source de renseignements sur son rôle pendant la congrégation grégoriano-clémentine. Peu à peu, depuis près d'un demi-siècle, de nouveaux documents ont surgi et enrichi le dossier.
Dans les prolégomènes de ses Variae Lectiones (Rome, 1860), Vercellone inséra, p. L, en note, une des pièces con-tenues dans le manuscrit déjà cité de la bibliothèque Ambrosienne : De ratione ineunda in Bibliis corrigendis. Il y voyait l'œuvre d'un consulteur de la congrégation grégorienne, sans toutefois hasarder de nom, et publiait le document comme propre à jeter beaucoup de lumière sur l'histoire de la Vulgate : «Cum autem non modicam huit historiae lucem afferat, operae pretium ducimus illud integrurn subnectere».
Cinq ans plus tard, Monsignor Attilio Giovannini, abbé de Saint-Laurent à Florence, remarqua que le document était joint à deux autres sous ce titre commun : Dubia ad editionem Bibi. vulgalam pertinentia, et que le premier des trois était précisément la dissertation De editione Latina vulgata, dont l'origine bellarminienne ne faisait de doute ni pour lui ni pour Vercellone. Il en vint ainsi à conjecturer que Bellarmin pouvait bien être l'auteur non seulement de la pièce éditée par le savant barnabite, mais encore du troisième document ; et il le publia[76], en l'annotant, sous ce titre : Utrum editio vulgata bibliorum ita probanda sit a Summo Pon
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tifice, ut prohibeantur editiones caeterae etiam vulgatae [editionis] ; vel ut earum auctoritati aliquid derogetur.
Ces conjectures étaient confirmées par l'unité du genre, du style et de la doctrine ou les caractères internes des trois documents, soit qu'on les compare entre eux, soit qu'on compare le troisième avec la préface de la Bible sixto-clémentine, dont Bellarmin s'est déclaré l'auteur. Il y a même entre ces deux dernières pièces un rapport de pensées si étroit que le choix de Bellarmin comme rédacteur de la préface semble n'avoir pas eu d'autre motif que la manière dont il avait parlé auparavant dans la congrégation. On verra bientôt que les conclusions de Mgor Giovannini, de conjecturales qu'elles étaient, sont devenues maintenant certaines et définitives. Mais complétons d'abord l'énoncé des documents nouveaux.
Dans de doctes articles sur «La Bible de Sixte-Quint »[77], le P. Ferdinand Prat, S. J., signalait en passant, au mois d'octobre 1890, parmi les papiers du cardinal Bellarmin, un cahier où le Vén. Serviteur de Dieu avait consigné des remarques sur la Bible sixtine. La pièce, contenant six pages et trois lignes d'un très petit format, à peu près comme un in-16 actuel, a pour titre : Loca praecipua in bibliis Sixti mutata.
Des recherches personnelles sur les opuscules inédits du grand cardinal m'apprirent ensuite que la série des documents relatifs à la congrégation grégoriano-clémentine n'était pas close encore. L'ancien catalogue, plusieurs fois signalé, du Collège Romain présentait, outre l'Instructio de ratione servanda, des manuscrits aux titres significatifs : Votum quod expediat ut edantur Biblia jussu SS. D. N, Gregorii XIV nuper recognita. — Item : Optimum esse si Biblia edantur nomine Pontificio, sed absque decreto quo editiones aliae supprimantur. — Item : Utrum Biblia recognita non sine variis lectionibus aliisque notis marginalibus imprimantur. Pièces importantes, de toutes les plus importantes peut-être, qu'un heureux concours de circonstances m'a fait retrouver.
Le Ms. 13 de la bibliothèque Fabroni, de Pistoie, contient, à la suite de la dissertation sur la Vulgate, le votum Expe
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dire avec ses annexes, puis l'instruction De ratione servanda. Copies anonymes qui se rattachent, on l'a déjà vu, à la révision des écrits de Bellarmin faite sous Clément Xl. Mais, circonstance décisive, le Ms. 15 de la même bibliothèque contient sous ce titre général : Opuscula varia Cardiis Bellarmini, etc., l'autographe même du votum Expedire et de l'instruction De ratione servanda.
Ainsi, de tous les documents énumérés ci-dessus, seul le document publié par Mgor Giovannini reste à l'état de copie anonyme ; mais la certitude acquise de l'authenticité des autres pièces rejaillit indirectement sur cette isolée ; car il n'y a pas seulement unité de genre, de style et de doctrine, souvent il y a identité matérielle d'expressions entre le texte de cet écrit et celui du jugement autographe Expedire. Pour s'en convaincre, le lecteur n'aura qu'à jeter un coup d'œil sur les documents publiés dans la seconde partie de cette étude, en particulier sur les concordances soulignées dans les notes qui accompagnent ces documents.
Cette conviction sera rendue plus facile encore par l'analyse que nous allons donner des diverses pièces, en les pré-sentant dans l'ordre où elles semblent s'être succédées.
2. — En premier lieu vient l'écrit De ratione servanda in bibliis corrigendis : avis de consulteur sur la manière de pro-céder dans la révision de la Vulgate (Document III). Il se rapporte manifestement à la congrégation nomrnée par Grégoire XIV, car il y est question des réviseurs qui ont précédé sous le cardinal Carafa et sous Sixte-Quint : «In multis dissentimus ab iis qui sub Illmo Card. Carafa primum, deinde sub sanctissirno Pontifice SixtoV idem opus peregerunt». Bellarmin soutient que, s'ils ne veulent pas s'exposer à travailler beaucoup et longtemps sans fruit, les membres de la commission doivent d'abord trancher un certain nombre de questions d'où dépend la formation de règles pratiques pour leur travail de révision.
Six questions sont énumérées. 1° Quand il y a concordance entre les exemplaires latins de la Vulgate, mais que leur texte diffère des manuscrits hébraïque, grec et chaldaïque,
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faut-il corriger le texte latin ? 2° Faut-il le corriger, quand il n'y a pas de divergence dans la Vulgate et que le texte s'accorde avec le grec, mais diffère de l'hébreu et du chaldéen ? 3° Quand il y a divergence entre les exemplaires latins de la Vulgate, faut-il corriger le texte imprimé d'après les manuscrits, s'ils diffèrent de l'hébreu, du chaldéen et du grec ? 4° Quand il y a divergence, faut-il corriger le texte imprimé d'après les manuscrits, si le texte diffère de l'hébreu et du chaldéen, mais concorde avec le grec ? 5° Dans le troisième et le quatrième cas, faut-il tenir compte d'un manuscrit unique mais très ancien ? 6° Dans la correction de la Vulgate d'après les manuscrits ou les sources, faut-il négliger les menues différences qui ne changent pas le sens de l'écrivain, et ne le rendent ni plus obscur ni plus difficile ?
Si, avant d'aller plus loin, les consulteurs ne tranchent pas ces questions qui les divisent, beaucoup d'inconvénients sont à craindre. Les corrections n'auront pas de base solide. Elles reposeront finalement sur l'autorité d'hommes peu nombreux et qui ne s'accordent même pas entre eux. Elles manqueront de suite et d'uniformité. L'affaire traînera inutilement en longueur ; ce qui ne se fera pas sans scandale ni péril. Les désapprobations suivront infailliblement. L'issue même de l'entreprise sera douteuse ; car le pape, n'ayant rien pour contrôler un travail fait sans règles fixes, sera forcé de le faire réviser par d'autres qui, à leur tour, différeront de nous sur beaucoup de points ; et s'il faut en référer aux Universités, l'affaire n'aura point de fin.
Il faudrait donc discuter les questions préalables et former ensuite des règles, en s'aidant des lumières de nombreux docteurs, séculiers et réguliers, appartenant aux diverses Universités, puis des cardinaux et autres prélats compétents. Etablies du consentement de la majeure partie de ces juges, les règles pourraient être prudemment approuvées par le Souverain Pontife, et ce ne serait pas chose indigne de sa majesté de présider une congrégation générale tenue à cet effet. Les règles ainsi fixées, on confierait le soin de la révision à un petit nombre d'hommes possédant à fond les trois langues ; ils pourraient s'acquitter de leur tâche rapidement,
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sûrement et avec grand fruit, sans qu'il fût besoin d'un nouveau contrôle de la part des Universités. Et si plus tard quelque correction devenait nécessaire, il serait facile de la faire à l'aide des règles posées.
Pour éclairer cet avis de Bellarmin, il suffit de le rapprocher d'un fragment historique, De sacra Bibliorum congregatione, qui fut publié[78] d'abord par Jean Bernardin Tafuri, de Nardi, puis reproduit par Vercellone[79]. La première réunion des consulteurs se tint le 7 février 1591 ; on y traita de la marche à suivre, mais sans rien conclure à cause de la diversité des vues. Dans les séances d'après on détermina cinq règles. Les quatre premières se rapportent à la révision personnelle de Sixte-Quint ; on devait rétablir ce qui avait été supprimé, enlever ce qui avait été ajouté, examiner ou corriger ce qui avait été changé, réviser la ponctuation : ut ablata restituantur, ut adjecta removeantur, ut immutata considerentur vel corrigantur, ut punctationes perpendantur. La cinquième règle était d'une portée plus générale : on ne devait rien changer sans vraie nécessité, nisi cogeret necessitas, et par conséquent négliger les variantes sans importance, par exemple ergo pour igitur ; mais quand elles modifient le sens, par exemple si on lit fortem pour fontem, il faut recourir soit aux manuscrits ou textes plus anciens, latins, grecs et hébreux, d'après les principes posés par saint Augustin et autres, soit aux saints Docteurs et aux Pères.
Cette dernière règle restait passablement indéterminée. Aussi, comme Bellarmin le remarquait, les consulteurs ne s'entendaient guère, dans l'application, sur les corrections à faire, «chacun s'en tenant à son sentiment ; or les uns voulaient que, dans les Bibles latines imprimées, on ne changeât presque rien ; les autres voulaient, au contraire, qu'on changeât tout ce qui n'était pas conforme aux anciens manuscrits ; d'autres enfin se prononçaient pour une voie moyen-ne»[80].
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Dans cet état d'indécision et de fluctuations, le travail marchait lentement. A la mi-mars, on n'avait encore examiné qu'un livre, la Genèse ; la lecture du suivant commença le 18 de ce mois[81].
C'est vraisemblablement vers cette époque et à cette occasion que Bellarmin exposa la nécessité de couper court aux lenteurs et suggéra le remède développé à la fin de son discours. La proposition fut agréée ; il fut décidé d'un commun accord que la conclusion de l'affaire serait remise à une élite très restreinte pour le nombre[82]. Telle fut l'origine de la commission spéciale, composée du cardinal Marc-Antoine Colonna, président, du cardinal Allen et de huit consulteurs, Bellarmin entre autres. Le travail se fit à Zagarolo, dans la maison de campagne du cardinal président, à dix-huit milles de Rome ; il ne dura que dix-neuf jours. Ce dernier détail est affirmé par l'un des consulteurs présents, Pierre Morin[83], et confirmé par une inscription primitivement gravée à Zagarolo dans la chambre où se tinrent les réunions (Document V).
Déterminer exactement l'époque est chose plus difficile. D'après Ghisleri[84], les membres de la commission seraient partis de Rome au printemps. L'assertion n'a rien que de vraisemblable. Dans une dépêche adressée à Philippe II, le 5 juillet, Olivarès écrivait[85] : «La révision de la Bible qu’on faisait à Zagarolo est terminée. Tout ce qu'avait ajouté Sixte a été retranché». Il faut conclure que le travail se fit avant le
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commencement de juillet, et même avant la mi-juin ; car la présence de Bellarmin à Rome pendant la troisième semaine de juin est un fait acquis ; il assista, pendant les derniers jours de sa maladie saint Louis de Gonzague[86], mort le 19 de ce mois. Le séjour à Zagarolo doit donc se placer entre la fin de mars et la mi-juin.
3. — Après l'écrit autographe De ratione servanda in bibliis corrigendis, vient la pièce, également autographe, qui porte ce titre : Loca praecipua in bibliis Sixti V mutata (Document IV). Elle a son importance, car elle nous montre ce que Bellarmin entendait par les changements regrettables (plurima perperam mutata) de Sixte-Quint.
Trois séries de textes sont à distinguer. La principale comprend quarante-sept observations qui se rapportent aux livres de l'Ancien ou du Nouveau Testament. Elles se présentent sous forme de tableau à deux colonnes : à gauche, le texte omis, ajouté ou modifié ; à droite, la censure d'après l'hébreu, le chaldéen, le grec et le latin, Exemple d'omission : Gen. v, 22, omissa sunt illa verba, Et ambulavit Henoch cum Deo. Censure : Habentur in H. C. G. L. Exemple de modification : Gen. xvii, 22, ascendit Deus AB Abraham, mutavit in, AD Abraham. Censure : Contra omnes codices. Exemple d'addition : IV Reg. vi, 15, additum est, portam. Censure : Non habetur in H. G. C. En somme : 25 omissions, 6 additions, 17 autres changements.
La seconde série comprend huit textes, tirés de l'Ecclésiaste et de l'Ecclésiastique. Le critique signale 5 additions, 2 omissions et 1 changement, mais sans exprimer de référence aux autres textes. Exemple : Ecclis. iii, 34, additur, ejus.
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Vient enfin une troisième série de vingt-deux textes, seize du Nouveau Testament et six de l'Ancien, où sont signalées 13 additions, 3 omissions et 6 modifications. Ils se présentent comme ceux de la série précédente ; par exemple, Matth. xxi, 37, additur, forte, post, verebuntur. Mais un trait de plume a été tiré sur toute la série.
La pièce se termine par cette remarque générale : «On trouve dans l'Ancien et dans le Nouveau Testament beaucoup d'autres changements, mais qui n'affectent pas le sens». Ceci donne à entendre qu'il n’en allait pas de même partout, au jugement de Bellarmin. Pour comprendre la portée de cette critique, sans l'exagérer, il suffit d'étudier la pièce qui vient d'être analysée ; on constatera que, parmi les textes relevés, il n'en est pas un seul où il s'agisse d'altération de la Bible en matière de foi ou de mœurs.
On constatera également qu'il y a un rapport sensible entre les règles posées au mois de février par la congrégation grégorienne de la Vulgate et les trois points touchés par Bellarmin dans sa censure : omissions, additions et autres changements de quelque importance. C'est ce qui me fait croire que la pièce est postérieure à la fixation de ces règles et qu'elle pourrait bien dater du séjour à Zagarolo[87].
4. — La recension de Zagarolo terminée, les membres de la commission revinrent à Rome. Alors se posa la question pratique : Faut-il publier la Bible et comment ? Bellarmin donna son avis, ad petitionem Gregorii XIV. C'est le Votum désigné dans le catalogue du P. Lazzari par les premiers mots : Expedire ut edanlur Biblia jussu S. D. N. Gregorii XIV nuper recognita, etc. (Document VI). En réalité, c'est un jugement sur l'opportunité de publier la Bible révisée et sur le genre d'approbation qu'il convient de lui donner. Il
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répond si parfaitement à ce que, dans son autobiographie, Bellarmin raconte avoir dit en présence de Grégoire XIV, qu'il est impossible de ne pas conclure à l'identité du sujet et des circonstances.
La Bible qui vient d'être révisée sur l'ordre du pape donne lieu à trois questions : Faut-il l'imprimer maintenant, au nom de qui, et de quelle manière ? L'orateur répond successivement à ces trois questions.
1° Le seul moyen de sauvegarder actuellement l'honneur du Siège apostolique et les intérêts de l'Église, c'est de faire imprimer sans retard la Bible qui vient d'être révisée. L'édition de Sixte-Quint est, à n'en pas douter, parvenue aux mains des hérétiques ; il est grandement à craindre que l'un d'entre eux ne fasse un livre pour soutenir que la Bible a été corrompue par le Souverain Pontife ; il pourrait appuyer son dire en relevant les passages omis, ajoutés ou changés sans fondement ni raison, contre l'autorité des anciens textes latins, grecs et hébraïques. Quoi de plus propre à troubler les catholiques, et à confirmer les hérétiques dans la fausse persuasion que le Souverain Pontife se met au-dessus de tout, même de la parole de Dieu ! A un si grand inconvénient il faut remédier le plus tôt et le mieux possible.
Le moyen, on peut du moins l'espérer, c'est de faire imprimer la Bible qui vient d'être révisée sur l'ordre de Sa Sainteté, avec une préface où l'on dirait ce qui suit : «Le pape Sixte avait fait paraître l'an dernier une Bible révisée sur son ordre ; mais il remarqua que, par suite d'une trop grande hâte, il s'y était glissé, pour divers motifs, beaucoup d'incorrections, ce qui arrive ordinairement dans les premières éditions ; aussi se décida-t-il à remettre son œuvre sur le métier. Ce que la mort l'a empêché de faire, son successeur le réalise maintenant». En procédant ainsi le Saint Siège évitera deux écueils, qui consisteraient à paraître, soit condamner la mémoire et les actes du pape Sixte, soit approuver les erreurs qu'on a relevées dans sa Bible.
2° Le mieux serait de publier la Bible au nom de Sixte-Quirit et de Grégoire XIV, mais sans décret particulièrement approbatif ou exclusif, qui préférât cette édition aux autres,
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ou qui les supprimât toutes à son avantage[88]. Une publication faite d'autorité privée n'apporterait aucun remède au scandale déjà causé ni au danger qui menace. Au décret particulièrement approbatif ou exclusif s'opposent beuacoup de raisons, cinq entr'autres :
1. La prudence ne semble pas permettre au Souverain Pontife d'approuver, surtout par un décret public, une révision de la Bible qu'il n'a pas suivie personnellement dont il n'a pas prescrit les règles et dont il ne pourrait apprécier l'exactitude sans se condamner à un examen détaillé et rendu impossible par ses occupations si nombreuses et si graves.
2. Nous qui avons fait cette révision, nous reconnaissons que notre travail ne mérite pas de la part du Saint Siège une pareille approbation. Le Souverain Pontife n'a pas pu nous communiquer l'assistance du Saint-Esprit, qui lui est personnelle, et nous nous rendons parfaitement compte que non seulement il nous a été facile de nous tromper mais que nous sommes allés bien vite, qu'il y a eu souvent désaccord entre nous, et surtout que nous avons jugé dignes de correction beaucoup de choses que nous n'avons pas voulu corriger, soit par manque d'anciens textes latins, soit par crainte d'offenser le peuple catholique en faisant trop de changements, soit par répugnance à vouloir paraître plus sages que nos pères.
3. Ce serait faire une grave injure aux docteurs de Paris et de Louvain, qui se sont donné tant de peine pour corriger et expliquer la Vulgate, que de supprimer si facilement leurs éditions, d'ailleurs si peu différentes de la nôtre, même en ce qui ne touche pas à la foi et aux mœurs.
4. Etant données les grandes depenses qu'entraînerait l’achat de la nouvelle Bible et la perte si onéreuse de tant de livres imprimés auparavant, il serait à craindre que beaucoup n'obéissent pas au décret pontifical.
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5. Enfin, s'il a suffi de la prohibition portée par le pape Paul IV contre les livres imprimés dans des endroits suspects, pour que les hérétiques répandissent parmi leurs adeptes le bruit que la Bible avait été interdite par le Pontife romain, que feraient-ils, s'ils entendaient dire qu'en vertu d'un décret pontifical il y aurait prohibition de Bibles éditées par des catholiques et révisées par des académies catholiques ?
3° Il semble nécessaire de ne pas imprimer la nouvelle Bible sans les diverses leçons ni sans notes marginales. Une Bible dénuée complètement de notes se vendrait difficilement. Saint Jérôme et saint Augustin sont favorables à l'indication des variantes. L'expérience montre que le succès de la Bible de Plantin est dû au grand nombre de variantes dont elle a été enrichie par les théologiens de Louvain. Ces notes peuvent tenir lieu d'une bibliothèque bien montée, où l'on trouverait nombre de manuscrits très anciens. Enfin les variantes servent beaucoup non seulement pour expliquer, mais encore pour défendre la Vulgate ; en effet, comme il s'agit toujours de leçons appartenant à cette édition, qu'elles soient dans le corps du texte ou qu'elles soient à la marge, s'il arrive que les unes soient moins faciles à défendre contre les calomnies des hérétiques, on n'a qu'à recourir aux autres.
La fin du Votum manque dans les manuscrits, l'autographe et la copie ; mais il est facile de suppléer en se servant de l'exposé de la question et de la conclusion énoncée au début du troisième point. Bellarmin traitait du genre de notes qu'il serait bon de mettre à la marge de la nouvelle Bible ; il ne se contentait pas de celles qui ornaient l'édition de Plantin, il en demandait d'autres encore, qui seraient empruntées à l'édition préparée par le cardinal Carafa.
Les conclusions formulées dans les trois points du Votum n'eurent pas une fortune égale. Le conseil, donné dans le premier, de publier sans retard la Bible révisée, et de la publier sous le nom de Sixte-Quint, fut suivi. Au contraire, l'avis, exprimé dans le troisième, de mettre les variantes à la marge du texte et d'ajouter des notes ne fut point agréé des autres consulteurs ; Bellarmin le rappellera douze ans plus tard, dans une
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lettre adressée le 6 décembre 1603 à François Lucas. Sur le second point, où Bellarmin proposait un genre d'approbation diamétralement opposé aux vues de Sixte-Quint, la discussion dut être vive, et c'est vraisemblablement à cette circonstance qu'il faut attribuer la pièce dont nous allons parler maintenant.
5. — Cette pièce porte, en effet, directement sur l'inopportunité d'une mesure prohibitive ou restrictive à l'endroit des autres éditions. Le titre indique une reprise de la thèse déjà soutenue : Non videtur a Summo Ponliflce ita probandam esse editionem vulgatam biblioruni nuper recognitam, ut prohibeantur editiones caeterae etiam vulgatae, vel ut earum auctoritati aliquid derogetur. La pièce ne peut qu'être postérieure à la complète révision de la Bible sixtine, alors qu'on était sur le point de procéder à la réimpression[89], par conséquent sous le pontificat de Clément VIII. Les arguments y sont multipliés, si bien qu'au lieu de trois, comme dans l'avis précédent, on en compte ici dix-sept (Document VII).
1° Le concile de Trente, en approuvant l'édition Vulgate comme authentique, n'a ni rejeté ni prohibé les autres éditions latines. Bien plus, dans la troisième règle de l'Index de Pie IV, les versions publiées par des auteurs condamnés sont permiser, pourvu qu'elles ne contiennent rien contre la saine doctrine.
2° Dans la même règle, il est dit que les catholiques pourront se servir de ces éditions ou versions pour élucider la Vulgate ; à plus forte raison pourront-ils se servir de la Vulgate elle-même.
3° Pourquoi n'y aurait-il pas un dessein providentiel dans la diversité que présentent parfois les éditions de la Vulgate, a cause des sens multiples que le Saint-Esprit avait en vue et qu'une seule édition ne peut pas rendre
4° Parfois le vrai sens original, grec ou hébreu, n'apparaît pas, même là où la Vulgate ne présente ni erreur ni variantes, en sorte qu'il y aurait péril à incliner d'un côté au préjudice
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de l'autre ; exemple, Gen. iii, 15 : Ipsa ou Ipsum conteret caput tuum.
5° On ferait une perte très grave en rejetant ces variantes qui contribuent à l'intelligence du texte sacré.
6° En ordonnant que la Vulgate fût imprimée le plus exactement possible, le concile de Trente avait en vue les éditeurs ou imprimeurs ; il ne prétendait nullement défendre de la corriger en recourant aux sources ou en réparant les fautes dues à la négligence des imprimeurs.
7° Les autres éditions de la Vulgate qu'il faudrait rejeter et qui sont l'œuvre des docteurs de Paris et de Louvain ou d'autres Universités, sont très correctes ; elles ne diffèrent de la nôtre qu'en très peu d'endroits et en des points secondaires, où leur infériorité pourrait même ne pas paraître à tous chose avérée.
8° Dans ces circonstances, un décret prohibitif pourrait occasionner de grands scandales. De la part des hérétiques, que de clameurs s'élèveraient aussitôt ! Nous changeons tout, diraient-ils, jusqu'au texte de la sainte Bible. En cela nous agissons frauduleusement, afin que nos descendants ne puissent pas voir les saintes lettres dans leur teneur antique et vraie, ni en posséder le sens légitime. Nous autres, catholiques, nous n'avions donc pas jusqu'ici de bon texte, et par conséquent nous comprenions mal les livres sacrés.
L'insulte et la détraction s'étendront naturellement aux commentateurs des Ecritures. La tempête se déchaînera surtout contre l'objet spécial de leur haine, le Pontife romain, qui ne craint pas de réprouver les saintes Ecritures mêmes ou leurs textes anciens. Là où il ne s'agirait que d'une simple déclaration de la vraie leçon, ils verraient une pure création et s'écrieraient qu'on fabrique un nouvel Evangile. Ils diraient encore que le Pape est guidé par des motifs d'intérêt, qu'il veut gagner sur la nouvelle édition.
Ajoutons à cela la perte considérable, non seulement de tant de variantes, mais de tant de livres imprimés à si grands frais et au prix d'immenses labeurs ; enfin, comme conséquence à craindre, la désobéissance et peut-être la résistance à un décret de ce genre.
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9° La mesure semblerait injurieuse et méprisante à l'endroit des saints Pères, qui ont connu ces variantes sans les désapprouver, qui les ont même acceptées et expliqués.
10° L'admission de ces diverses leçons, quand elles ne diffèrent réellement point ou diffèrent peu et dans des détails tout à fait secondaires, est sans inconvénient pour la foi et les mœurs ; elle peut même servir beaucoup pour la con-naissance des Ecritures et aider ceux qui les étudient.
11° Ce serait une mesure très difficile à exécuter, à cause du nombre si considérable d'exemplaires, d'où ce texte est passé dans les œuvres de tant de commentateurs, saints ou jouissant d'une très grande autorité, dans tant de bréviaires, missels et autres livres. Comment faire tout disparaitre ?
12° La difficulté grandit encore et devient insurmontable, quand on considère que ce texte est dans la mémoire des prédicateurs et de ceux qui l'ont appris comme il était jusqu'ici ; d'autres pourront continuer à l'apprendre dans les traités ou commentaires de la sainte Ecriture et dans les sermonnaires.
13° Une telle mesure est contre l'usage de l'Eglise. Elle s'est servie pendant quelque temps de l'édition des Septante, puis elle l'a laissée pour prendre la version de saint Jérôme ou peut-être quelque autre après les éditions dites cinquième, etc[90] ; mais tout ceci s'est fait par l'usage et l'acceptation pratique, non par voie de décret ou de loi qui approuvât spécialement la nouvelle édition. L'Eglise n'a d'ailleurs jamais prohibé les autres versions, malgré les divergences qu'elles présentaient ; divergences beaucoup plus grandes que celles qui existent entre les éditions de la Vulgate.
14° Le pape pourrait-il, en toute sûreté de conscience, approuver cette unique édition et rejeter les autres, quand il ne sait pas et ne peut pas savoir si elle a été bien révisée et bien corrigée ? En une matière de si grande importance, où il s'agit du fondement et de la première règle de notre
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foi, il ne peut ni ne doit s'en rapporter à quelques hommes, qui n'ont pas pu jouir, par délégation, du privilège personnel de l'assistance du Saint-Esprit.
15° Les correcteurs eux-mêmes n'ont reçu du pape et ne se sont prescrit d'avance aucune règle fixe pour leur travail de révision ; ils ont suivi tantôt tels exemplaires, et tantôt d'autres, prenant ici une phrase, là un mot ou une expression, s'en tenant parfois à l'autorité d'un petit nombre.
16° On ne peut pas former de jugement certain sur la parfaite exactitude de cette révision, car ceux qui l'ont faite avouent sans ambages qu'il y aurait eu beaucoup d'autres choses à corriger, mais qu'ils les ont tolérées et laissées intactes pour éviter le scandale que tant de changements et de nouveautés auraient pu produire. Si cette édition était approuvée par décret pontifical, il y aurait donc à craindre que le pape ne semblât approuver et authentiquer les erreurs qui ont pu se glisser dans la Bible par la faute des imprimeurs, des anciens éditeurs ou peut-être des demi-savants.
17° Enfin comme cette édition ne l'emporte en rien sur les autres vulgates pour ce qui regarde l'établissement de la foi et des mœurs et la réfutation des hérésies, on ne voit pas pourquoi l'on approuverait plutôt celle-ci que celles-là, si ce n'est comme mieux révisée et plus correcte. Et Dieu veuille que, sous le rapport de la correction, de l'impression et autres détails de ce genre, elle soit à la hauteur de ce qui s'est fait en d'autres pays !
6. — Quand on compare attentivement les deux pièces qui précèdent, il est impossible de ne pas les attribuer au même auteur. Les raisons exprimées dans la première se retrouvent dans la seconde, non seulement quant à la substance, mais parfois aussi quant à l'expression verbale. Or la paternité de Bellarmin par rapport au premier document est attestée par son texte autographe. Du reste la seconde pièce contient quelques passages qui trahissent manifestement l'auteur des Controverses et des lettres écrites plus tard à François Lucas. On trouvera ces passages soulignés dans les notes qui accompagneront les documents eux-mêmes.
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La préface de la Bible sixto-clérnentine confirme ce résultat. Entre les idées qu'elle exprime et celles que nous avons rencontrées dans les pièces précédentes, il y a une telle concordance que Mgr Giovannini[91] a pu légitimement expliquer le choix de Bellarmin, comme rédacteur de la préface, par la faveur dont jouirent auprès de la congrégation et du pape les conclusions proposées dans son dernier avis. Sous cet aspect, la préface de la Bible sixto-clémentine forme comme l'épilogue du rôle joué par Bellarmin dans la congrégation de la Vulgate. Aussi m'a-t-il paru bon d'en reproduire (Document VIII) les passages qui sont plus intimement liés avec les pièces analysées dans ce chapitre, en les accompagnant de notes où les principaux points de concordance seront signalés.
La Bible sixto-clémentine parut en 1592, après un dernier contrôle dont furent chargés officiellement les cardinaux Valier et Borromée et le P. François Tolet, mais, dont le dernier seul porta effectivement le poids et la responsabilité. Ce n'est pas le lieu d'étudier plus en détail cette édition, et notamment ses points de contact ou d'opposition avec la Bible de Sixte-Quinte[92].
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CHAPITRE TROISIÈME
APRÈS LA PUBLICATION DE LA BIBLE SIXTO-CLÉMENTINE 1592-1621
1. Le rachat des Bibles de Sixte-Quint. — 2. Un propos attribué à Bellarmin au sujet de ces Bibles et de l'infaillibilité pontificale. — 3. La bulle Æternus ille ; difficultés du P. Gretser. — 4. Réponse de Bellarmin. — 5. La préface de la Bible sixto-clémentine ; son auteur et son autorité. — 6. Valeur de l'édition clémentine d'après Bellarmin.
1. — Le rôle de Bellarmin dans l'affaire de la Vulgate ne cessa pas avec la publication de la Bible sixto-clémentine. Nous l'avons entendu exprimer la crainte que les protestants ne prissent occasion des changements faits par Sixte-Quint pour crier partout que le Pontife Romain s'arroge une autorité supérieure à celle de la parole de Dieu. Sous l'empire des mêmes préoccupations, il écrivit à Clément VIII, en février 1592, pour conseiller à ce pape de faire recouvrer tous les exemplaires distribués de la Bible de Sixte-Quint. Le Journal des Audiences du cardinal de Sainte-Séverine nous apprend quel fut le résultat de cette suggestion (Document IX).
Le 15 février, le pape enjoignit à ce cardinal d'écrire au nonce et à l'inquisiteur de Venise de retirer toutes les Bibles qu'ils pourraient ; de plus il devait charger le Général des Jésuites d'écrire en Germanie et partout ailleurs, pour en faire recouvrer tout ce qui serait possible ; les frais seraient remboursés. Une lettre du P. Jacques Sirmond montre que
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l'ordre fut exécuté sans retard ; il écrivit, en effet, de Rome le 16 février, à M. de Maillane, gouverneur de Toul : «Nostre S. Père a donné charge, cette semaine, à nostre Père général, de faire racheter, partout où il en aura le moyen, les Bibles de Sixte-Quint, désirant les supprimer ou faire corriger, et pour cette fin nostre Père en a écrit par toutes les provinces tramontaines»[93]. L'archevêque d'Otrante, Marcel Aquaviva, revenant de Venise, où il avait été nonce, en rapporta plusieurs exemplaires. Le lundi 24 août, le cardinal de Sainte-Séverine demanda ce qu'il fallait en faire ; Clément VIII lui répondit de les tenir en sa garde.
Le 11 février 1593, le cardinal parla d'un mémorial envoyé par les Jésuites au sujet des Bibles déjà recouvrées et de celles que l'on pourrait encore recouvrer, et des dépenses faites à cette occasion. Le pape ordonna de remettre les Bibles aux nonces et de charger le trésorier général de donner aux Pères cent écus d'or. On trouve l'écho de cette décision dans une lettre adressée, le 20 février, par le P. Général au P. George Duras, recteur du collège d'Anvers. Celui-ci avait retiré trois exemplaires. Le P. Aquaviva lui annonce que le Procureur de la Compagnie a reçu en retour vingt couronnes d'or (aureos coronatos). Les Bibles devront être remises aux nonces. Si les Pères découvraient de nouveaux exemplaires de la première édition, ils devraient offrir aux possesseurs des exemplaires de la nouvelle, plus correcte, qu'on enverrait de Rome (Document X).
Les recherches se poursuivirent en 1594. Des exemplaires furent signalés dans le catalogue des livres mis en vente à la foire de Francfort pour le premier semestre de l'année ; et le cardinal de Sainte-Séverine de s'adresser aussitôt au P. Ximenez, secrétaire de la Compagnie de Jésus et, par son intermédiaire, au P. Général pour qu'on fit racheter ces Bibles; la dépense serait bien payée. Démarches que Clément VIII approuva dans l'audience du 6 janvier. Enfin, le 15 avril, le cardinal parle au pape de quelques Bibles recouvrées par les
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jésuites et remises aux nonces, et des frais qu'il reste à rembourser. Clément VIII fait enjoindre aux nonces de détruire ces exemplaires, et au trésorier général de rembourser les dépenses faites.
Combien de Bibles furent ainsi reprises ? Il est impossible de le déterminer. Dans le dernier passage, le cardinal de Sainte-Séverine emploie l'expression d'alcune, quelques exemplaires. Mais puisque les Pères d'Anvers purent en recueillir trois, qu'on parle auparavant d'autres exemplaires rapportés de Venise par le nonce, puis de Bibles mises en vente à la foire de Francfort, et qu'enfin d'autres sont supposées acquises par d'autres jésuites, il semble qu'à tout le moins une dizaine d'exemplaires furent ressaisis. Mais les recherches qui viennent d'être rapportées, ne furent pas les seules ; ainsi, dans une dépêche adressée, le 22 décembre 1592, à Philippe II par le duc de Sessa, son ambassadeur à Rome, on lit ce passage : «Le pape m'a donné une nouvelle Bible pour que je l'envoie à Votre Majesté ; elle partira par la première occasion : je la confie au prince Doria. Sa Sainteté m'a ordonné de supplier de sa part Votre Majesté de faire remettre au nonce les exemplaires que Votre Majesté posséderait de la Bible de Sixte»[94].
2. — Le retrait des Bibles, opéré sur le conseil de Bellarmin, ne tranchait pas toute difficulté. Nous verrons plus loin, c. iv, n. 3, qu'à Rome certains essayèrent de retourner la conduite de Sixte-Quint contre la doctrine de l'infaillibilité pontificale. A cette occasion, la question s'agita de savoir si le Pontife romain, agissant comme tel, pouvait se tromper. C’est ce qui résulte clairement de plusieurs lettres écrites en 1594. Le 2 avril, le P. Aquaviva chargea le P. Ferdinand Alber, provincial de la Germanie supérieure, de faire des représentations au P. George Feder, alors attaché à l'Université d'Ingolstadt ; on lui attribuait d'avoir dit que, d'après plusieurs Pères de Rome, le pape pouvait se tromper. Le
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provincial devait avertir l'inculpé et lui recommander plus de circonspection dans ses paroles (Document XI, n. 1).
Averti, le P. Feder écrivit, le 2 mai, au Général pour lui exposer nettement toute l'affaire. Il avait rapporté au seul recteur d'Ingolstadt ce qu'il avait entendu dire à Rome, savoir que le P. Bellarmin affirmait, à cause de la Bible de Sixte-Quint, que le Pontife romain, agissant comme tel, pouvait se tromper : Pontificem, quatenus Pontifex est, posse errare. Il avait longtemps refusé de croire que l'auteur de Controverses tînt réellement cette opinion, dont les inconvénients lui paraissaient graves, mais on lui avait répété souvent et sérieusement qu'il en était bien ainsi. Malgré tout, il doutait encore et se proposait d'interroger personnellement Bellarmin ; mais il avait oublié de réaliser son projet avant de quitter Rome. Depuis lors, il avait offert à son recteur de réparer l'oubli et d'écrire au Père pour lui demander ce qu'il pensait réellement; le recteur avait préféré prendre lui même des informations. Ce qu'il avait écrit et à quelle adresse, le P. Feder l'ignorait. Il concluait seulement des lettres du P. Provincial et du P. Général que l'affaire n'avait pas été présentée sous son vrai jour. Pourquoi lui reprocher d'avoir parlé, comme il l'avait fait, en toute vérité ? On lui écrit comme s'il avait affirmé le fait absolument, et comme s'il l'avait affirmé faussement, et comme s'il l'avait affirmé à plusieurs ; autant de suppositions inexactes (Document XI, n. 2).
Le P. Aquaviva répondit au P. Feder le 2 juillet. Il le calme et lui reproche paternellement d'avoir pris les choses au tragique, mais il n'a pas un mot sur le fond même de l'affaire. (Ibid., n, 3). Il reste donc qu'avant 1594 le P. Feder avait entendu dire à Rome ce qu'il redit au recteur d'Ingolstadt, le P. Haller, qu'il n'avait pas contrôlé personnellement le bruit courant, et qu'Aquaviva traita d'absurde l'opinion attribuée aux Pères de Rome, à Bellarmin en particulier. Est-ce à dire que les propos tenus fussent dénués de tout fondement ? Pour répondre à cette question, il nous faut d'abord exposer une autre série de faits.
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3. — Tout se passe encore à l'Université d'Ingolstadt. Ce sont d'abord les attaques des protestants, prévues et redoutées par Bellarmin, qui embarrassent son grand défenseur en Allemagne, le P. Jacques Gretser[95]. Dans une lettre adressée au cardinal, le 23 juin 1608, le célèbre polémiste parle d'abord longuement du second volume, prêt pour l'impression, de sa Defensio Bellarrmini[96] qui a pour objet : Le Christ et son vicaire, le Pontife romain. A cette occasion, il expose la difficulté créée par la bulle de Sixte-Quint sur la Bible contre la doctrine qui attribue au Souverain Pontife le pouvoir de définir les choses de la foi sans un concile général. Un calviniste anglais, Thomas James, a dernièrement fait réimprimer cette bulle dans un livre intitulé bellum papale[97], où il relève malicieusement les divergences entre la Bible de Sixte-Quint et celle de Clément VIII. Il n'a pas su, il est vrai, tirer de cette arme tout le parti qu'il aurait pu, mais un autre hérétique peut revenir à la charge. Gretser ne doute pas qu'il n'y ait quelque défaut en cette bulle, mais il ne parvient pas à le découvrir. Pour permettre au cardinal de venir plus efficacement à son aide, il lui énumérera ses difficultés sur une feuille séparée (Document XII, n. i).
Doellinger[98] a publié la lettre de Gretser, mais sans l'annexe, morceau le plus intéressant et le plus important (Document XII, n. 2). Dix manières d'obvier à la difficulté que la bulle de Sixte-Quint crée contre l'infaillibilité pontificale, sont successivement passées en revue et déclarées insuffisantes.
1° Le décret est de Sixte, comme docteur privé, et non comme Pontife. - Le contexte de toute la bulle s'oppose à cette échappatoire, et notamment ces paroles : «Ad laudem igitur et gloriam omnipotentis Dei et ex certa nostra scientia, deque
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Apostolicae potestatis plenitudine, statuimus et declaramus».
2° Sixte n'a pas voulu obliger l'Église universelle. - Ce n'est pas moins contraire au texte même de la bulle.
3° Le pape n'a pas agi en cette affaire avec la diligence requise. - S'il en était ainsi, Sixte aurait péché, mais le document n'en serait pas moins infaillible. D'ailleurs, le pape témoigne en termes superbes du soin qu'il a mis à faire cette édition.
4° Le pape n'a pas strictement défini que son édition est de tout point celle-là même qui a reçu l'approbation du concile de Trente. - Le pape dit, au contraire, qu'il faut la tenir indubitablement et sans contredit «pro vera, legitima, authentica et indubitata, quamque Concilium Tridentinum comprobaverit».
5° La bulle n'a pas été promulguée. - Mais elle a été imprimée, vendue et répandue avec la Bible de Sixte, et l'on ne peut douter que les autres formalités relatives à la promulgation solennelle n'aient été remplies à Rome, surtout quand on considère que la bulle est datée du 1er mars 1589 et que Sixte survécut un an et demi, puisqu'il est mort le 29 août 1590.
6° Sixte a changé d'avis. - Cela revient à dire qu'il a corrigé une erreur commise dans une définition de foi ; ce qui est contraire à l'infaillibilité et à l'irréformabilité dont jouissent les définitions ex cathedra .
7° La Bible sixtine a été supprimée, comme on l'insinue dans la préface de l'édition clémentine, à cause des fautes d'impression. - Réponse inadmissible ; car ces fautes étaient peu nombreuses, et Sixte les avait presque toutes corrigées après coup de sa main, comme Thomas James le montre. En outre, s'il ne s'agissait que d'erreurs typographiques, pourquoi ne s'est-on pas contenté de les faire disparaître ? pourquoi tant d'autres changements, qu'il est facile de constater en comparant les deux éditions, à l'exemple du même auteur dans son bellum papale ?
8° L'Eglise n'a pas reçu cette bulle. - Peu importe, s'il s'agit d'une définition ex cathedra, car l'Église est tenue d'écouter la voix de son pasteur.
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9° Ce n'est pas une définition qui porte sur une matière de foi. - Pourquoi pas ? La définition du concile de Trente sur la Vulgate est une définition de ce genre ; de même la définition de Sixte qui n'a pas un objet différent. De plus, il est de foi que la parole de Dieu reste pure et intègre ; donc, quand le Pontife définit que dans cette édition déterminée la parole de Dieu se trouve entièrement pure, il faut de toute nécessité adhérer à cette vérité. On admet bien très communément, (Bellarmin, I. IV de Pontif., c. ii, et I. II de sanctis, c. xiv) que le pape peut se tromper, même avec un concile général, quand il s'agit de faits particuliers ; mais il est évident que le décret de Sixte ne porte pas sur des faits de ce genre.
10° La définition repose sur une information inexacte en matière de fait particulier ; c'est ainsi qu'au même endroit, le cardinal Bellarmin explique la condamnation du second concile de Nicée par les Pères du concile de Francfort. - L'explication ne vaut pas ici, car la définition du pape Sixte ne concerne pas un fait particulier, mais roule sur cette question de droit : L'édition qu'il a publiée, est-elle vraiment celle que le concile de Trente a déclarée authentique ? Sixte l'affirme, et il l'affirme en définissant, «ex certa sua scientia, deque Apostolicae potestatis plenitudine».
Et Gretser de conclure : En somme, cette bulle de Sixte-Quint est une source de difficultés pour ceux qui soutiennent que le pape, parlant même en dehors d'un concile, ne peut pas se tromper, quand il définit ex cathedra et propose une vérité à l'Église universelle. Restreindre l'infaillibilité aux cas où le pape n'agit pas inconsidérément, «si Pontifex non agat temere», me parait un subterfuge inadmissible et qui permettrait d'éluder toutes les définitions pontificales.
4. — Telles étaient les difficultés éprouvées en Allemagne, notamment à l'Université d'Ingolstadt, et dont le P. Gretser se faisait l'écho. Bellarmin répondit-il ? S'il le fit, sa réponse n'a pas été conservée, à ma connaissance du moins. Dans une lettre du 5 juillet 1610, le P. Gretser fait allusion à des renseignements reçus du cardinal sur la pré
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face de la Bible clémentine, mais il ne dit pas un mot de la bulle. Dans le tome II de la Defensio Bellarrmini, qui parut l'année d'après, il garde un silence absolu sur le même sujet.
Il reste cependant une voie indirecte pour savoir ce que Bellarmin pensait. A la pièce qui vient d'être analysée s'en rattache une autre, le jugement d'un censeur anonyme sur les difficultés proposées contre la bulle Æternus ille et si les réponses données. Elle débute ainsi : «J'ai vu ce que le P. Grester a écrit sur la constitution de Sixte-Quint relatif à son édition de la Bible et sur la révision de la Bible faite par le même pape. A vrai dire, aucune des réponses énumérées n'entraîne mon adhésion ; je trouve que les difficultés opposées par le P. Gretser ont beaucoup de force, et crains également que la réponse donnée par mon Illustrissime Seigneur ne soit pas pleinement satisfaisante». (Document XIII).
Cette expression «ab Illmo Domino meo», dont se sert ici le censeur anonyme, donne à entendre qu'il s'adressait directement au cardinal. Il semble donc que celui-ci fit examiner tout à la fois les difficultés qui lui avaient été proposées et la réponse qu'il comptait donner ; réponse dont voici la substance : Sixte-Quint, en corrigeant la Bible, a voulu la purger de ce qu'il jugeait s'y être introduit par l'erreur ou la faute des hommes ; ce faisant, il n'a pas erré dans la foi, car les changements opérés n'atteignent pas le dogme ; il s'est seulement trompé, par témérité et par ignorance, dans une question de fait particulier, c'est-à-dire relative au choix ou à la correction de telles ou telles leçons de la Vulgate. L'analyse succincte de toute la pièce fera mieux comprendre cette solution.
Le censeur traite d'abord de la correction de la Bible par Sixte-Quint. Il reconnaît qu'il y a directement dans les changements opérés une question de fait, et que l'intention du pape n'était pas de changer ou de supprimer la parole de Dieu : «fateor mutationem esse in facto, et voluisse Xistum non mutare aut tollere verbum Dei, sed tollere quae putabat humano errore aut vitio in Sacram Scripluram irrepsisse, in quo
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admitto errorem fuisse temeritatis et inscitiae». Mais une autre question se pose : N'y aurait-il pas eu, matériellement parlant, erreur dans la foi, par soustraction de ce qui était vraiment parole de Dieu ou par substitution d'autre chose à ce qui était vraiment parole de Dieu ? Sixte ne s'est pas contenté de corriger la Vulgate suivant l'esprit du concile de Trente ; il a enlevé, ajouté, changé à sa guise, ce qui n'est pas corriger, mais corrompre. En conséquence, des pensées humaines ont été imposées à l'Église comme parole de Dieu ; car il ressort manifestement de la bulle, que le pape a réellement voulu faire une définition ex cathedra. Il semble donc qu'un pape définissant a erré dans la foi.
La suite de la pièce va moins directement à la question. Le censeur y propose sa propre solution, celle-là même que le P. Gretser rejetait brièvement, à la fin de sa note. L'infaillibilité ne convient aux définitions pontificales que si le pape n'agit pas inconsidérément, «si Pontifes non agat temere» ; il doit se conformer aux règles, inspirées par le Saint-Esprit, qui doivent présider aux définitions de foi. Cette assertion : Le pape est infaillible, soit qu'il apporte la diligence voulue, soit qu'il s'en dispense, ne doit s'entendre que dans le cas où l'Église, suivant son chef, partagerait par le fait même son erreur. Si elle ne suit pas, c'est signe que le Saint-Esprit n'a pas dirigé le pape dans sa décision, mais l'a laissé à ses lumières personnelles et à sa faillibilité native.
L'application de ces principes au cas de Sixte-Quint donne lieu, de la part du censeur anonyme, à des réflexions piquantes, parfois surprenantes et dont la justesse n'est pas toujours indiscutable. La conclusion est que ce pape, tout en prétendant définir ex cathedra, n'a réellement pas agi comme Pontife, mais à son compte personnel ; il a donc pu se tromper, et de fait il s'est trompé. Conclusion manifestement en dehors de la pensée de Bellarmin, puisque l'auteur de cette pièce l'oppose précisément à la solution du cardinal, tenue pour insuffisante.
La réponse attribuée à l'auteur des Controverses n'a d'ailleurs rien que de conforme à ce que nous avons vu précédemment ; et là se trouve sans doute l'explication du
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propos entendu à Rome et rapporté à Ingolstadt par le P. George Feder : «Pontificem, quatenus Pontifex est, posse errare». Répété d'une façon absolue et sans les réserves exigées, le propos pouvait nuire à la réputation de Bellarmin et à la vérité ; bien entendue et bien délimitée, l'assertion n'était qu'une application particulière de la doctrine générale contenue dans les Controverses, aux endroits rappelés par le P. Gretser, De Summo Pontifice, l. IV, c. ii[99] ; De Sanctis, 1. Ill, c. xiv[100].
Prise en elle-même, la solution de Bellarmin est soutenable, si l'on s'en tient à la véritable portée de la bulle Æternus ille. L'intention de Sixte-Quint était bien de corriger de son mieux la Vulgate et d'imposer à tous son édition, mais nullement de définir dogmatiquement la perfection absolue de toutes les corrections qu'il avait faites ou de toutes les leçons qu'il avait préférées[101]. Quand le censeur anonyme affirme qu'il y avait eu, matériellement parlant, erreur dans la foi par suppression de la parole divine ou substitution d'une parole humaine, il suppose une interprétation exagérée et trop matérielle de l'autorité attribuée à la Vulgate par les Pères du concile de Trente et par Sixte-Quint qui prétendait réaliser de son mieux le vœu de ces Pères[102].
Cependant la réponse de Bellarmin ne tranchait pas nettement cette question : Quel degré d'autorité faut-il recon
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naîfre à la bulle de Sixte-Quint ? Aussi la controverse continua, en 1609 et 1610, parmi les professeurs d'Ingolstadt. L'un d'entre eux, le P. Adam Tanner, eut enfin recours au P. Ferdinand Alber, assistant d'Allemagne. Ce dernier communiqua, le 28 août 1610, une réponse qui sera rapportée intégralement plus loin, c. iv, n. 3, et dont la substance se réduit à cette assertion, appuyée partiellement sur le témoignage du cardinal Bellarmin et donnée pour certaine : La bulle Æternus ille n'a pas été publiée. Ce qui revenait à dire que l'erreur de Sixte-Quint, quelle qu'en fût du reste la nature, n'affectait pas un document pontifical jouissant d'une valeur juridique.
Nous reviendrons sur cette réponse dans le quatrième et dernier chapitre de cette étude, où les diverses attaques portées contre Bellarmin à l'occasion de la Vulgate seront examinées. Pour le moment, il suffit de conclure qu'en face des difficultés soulevées par la Bible et la bulle de Sixte-Quint, le cardinal donne deux solutions. Quand il s'agit du pape considéré comme réviseur de la Bible, il juge que Sixte s'est trompé, en matière non pas de foi, mais de fait particulier, c'est-à-dire dans le jugement non dogmatique, mais critique, qu'il avait porté sur telles ou telles leçons de la Vulgate comme certaines ou préférables. Quand il s'agit de la bulle Æternus Ille, il affirme, non de science personnelle, mais sur l'autorité de plusieurs cardinaux, qu'il n'y a pas eu de promulgation officielle.
5. — Les discussions auxquelles Bellarmin fut mêlé ne se bornèrent pas à la Bible ni à la bulle de Sixte-Quint ; elles portèrent aussi sur l'édition clémentine, et d'abord sur la préface, son autorité et son auteur. Une controverse s'engagea sur ce sujet, avant l'année 1607, entre le P. Gretser et le P. Nicolas Serarius, professeur de théologie à l'Université de Mayence. Ce ne fut toutefois que d'une façon incidente, à propos du prologue de l'Ecclésiastique et du petit préambule des Lamentations. Le P. Gretser soutenait la canonicité de l'un et de l'autre. Comme il le dit dans sa lettre au cardinal et comme il est facile de s'en rendre compte en lisant le
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passage de ses œuvres auquel il renvoie[103], son grand argument s'appuyait sur la présence de ces prologues dans la Bible clémentine et en même temps sur l'affirmation, contenue dans la préface, qu'on avait éliminé de cette Bible tout ce qui n'est pas canonique : «Fateor, tenuiorem esse meam frontem, quam ut praefationem Pontificis Maximi approbatione evulgatam, falsitatis arguam».
Le P. Serarius, qui ne partageait pas l'opinion du P. Gretser sur la canonicité des deux prologues, fut ainsi amené à discuter l'autorité de la préface. On retrouve les grandes lignes de sa doctrine dans ses Prologemena biblica[104], publiés seulement en 1612, mais composés dès 1608, comme on le voit par cette phrase incidente : «hoc ipso anno 1608», qui se lit c. VIII, q. xiii, p. 72. En cet endroit il ne fait qu'énoncer ses raisons contre la canonicité du petit préambule des Lamentations, et signaler l'opinion contraire du Défenseur de Bellarmin. C'est au chapitre XIX, q. xvi, p. 176 ss., que Serarius aborde directement la question. Des trois documents qui sont au début de la Bible clémentine, la Préface au lecteur, le décret du concile de Trente sur les Ecritures canoniques et l'approbation du pape Clément VIII, il se demande : Ont-ils tous les trois la même autorité ? Non, répond-il. Dans le troisième cas, l'autorité est pontificale ; dans le second, elle est conciliaire ; dans le premier, elle n'est ni l'une ni l'autre, mais beaucoup moindre. Car cette préface n'a pas reçu l'approbation d'un concile ; elle n'est pas l'œuvre d'une assemblée ou d'un collège de cardinaux ou de docteurs, au nom desquels elle ait été publiée ; bien plus, elle est anonyme. De la part du Souverain Pontife, aucun ordre ni aucune approbation ne s'y rattache, mais un simple consentement, «annutum solummodo».
Serarius confirme sa conclusion par deux témoignages de théologiens romains. L'un avait écrit : «Cette préface ne
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contient rien qui ait force de décret ou d'injonction, c'est une lettre de recommandation en faveur d'une édition corrigée ; elle a le degré d'autorité qui s'attache d'ordinaire aux paroles d'un auteur de préface docte et pieux». Et l'autre : «Seule la seconde préface [le décret du concile] jouit d'une autorité canonique ; la troisième ne contient qu'une mesure disciplinaire à l'égard des imprimeurs ; la première n'est qu'une recommandation en faveur de l'édition corrigée». Ce premier point acquis, il était facile au P. Serarius de conclure, q, xx, p. 181, que l'affirmation : «Nihil non canonicum, etc.», contenue dans la préface, ne suffisait pas par elle seule pour démontrer la canonicité d'absolument tout ce qui se trouve dans la Bible clémentine : «quia ea praefatio non habet eam auctoritatem, ut declarare, seu quoad nos facere possit quidpiam canonicurn , prout declaratum supra, q. xvi».
Toute cette controverse s'était poursuivie en dehors de Bellarmin. Il la connut seulement quand le manuscrit des Prolegomena biblica fut envoyé à Rome pour la révision, et dans une lettre qu'il écrivit au P. Gretser, il le renseigna sur l'origine et le vrai caractère de la préface. A défaut de cette lettre, non conservée ou du moins non retrouvée, nous avons la réponse du P. Gretser, adressée au cardinal le 5 juillet 1610 ; elle supplée en partie à la lacune (Document XIV).
«Cette controverse avec le P. Serarius, que j'ai vénéré de son vivant[105] et dont la mémoire me reste particulièrement chère, a été tout amicale et s'est bornée d'abord à un échange de lettres ; plus tard seulement, j'ai exprimé publiquement dans le tome premier de votre Défense ce que je pensais du prologue de l'Ecclésiastique (rangé aussi parmi les apocryphes par le P. Serarius, du moins au début, car il se rendit ensuite) et du petit préambule des Lamentations. Je m'appuyais surtout, je l'avoue, sur la préface de la Bible clémentine ; non que je la crusse revêtue de l'autorité pontificale, mais je me disais qu'elle avait été mise en tête de la Bible au
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su et du consentement du pape. Partant de là je raisonnais ainsi : Quand cette préface affirme qu'il n'y a dans la Bible rien que de canonique, rien d'adventice ni d'étranger, ou elle dit vrai, ou elle dit faux. Je ne puis me résoudre à croire cette seconde hypothèse. La première admise, j'ai tout ce que je veux. Mais Votre Seigneurie Révérendissime et Illme m'a fait connaître la vérité, ce dont je me réjouis. Je ne désire nullement que dans les Prolegomena biblica du P. Serarius (dont j'ai pris lecture avant qu'ils ne fussent envoyés à Rome) on supprime ce qu'il y a mis contre le Défenseur de Bellarmin et le P. Delrio[106]. Velle suum cuique est, nec sensu vivitur uno».
D'après cette lettre, le cardinal dut se révéler au P. Gretser comme l'auteur de la préface, et ne dut pas admettre la valeur de l'argument tiré du susdit passage en faveur de la canonicité des parties controversées ; car, après comme avant la publication de cette Bible, il a douté lui-même de la canonicité du petit prélude qui se trouve en tête des Lamentations[107]. Mais il aurait été intéressant de savoir en quels termes il avait exposé à son correspondant l'autorité qu'il jugeait convenir à la préface de la Bible clémentine.
6. — Si de la préface nous passons au texte même de la Bible sixto-clémentine, diverses pièces nous permettront d'établir l'attitude, théorique et pratique, de Bellarmin.
Les plus importantes consistent dans quelques lettres échangées entre le cardinal et François Lucas[108], alors doyen du chapitre de Saint-Omer. Né à Bruges vers la fin de 1548 ou le commencement de 1549, Lucas étudiait à l'Université de Louvain à l'époque où Bellarmin enseignait en cette
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ville. Par l'entremise du P. Harlemius, il entra en relation avec le jeune professeur de théologie, dont l'estime et la faveur devaient lui être d'un si grand prix. Plus tard il se complaira grandement à rappeler ces souvenirs, d'abord en 1605, dans la dédicace faite au cardinal de Notarum ad varias lectiones in quatuor Evangeliis occurrentes libellus duplex (Document XVI), puis en 1615, dans la dédicace[109] adressée au R. P. Mutius Vitelleschi, général de la Compagnie de Jésus, de son quatrième volume In sacrosancta quatuor Jesu Christi Evangelia.
Au mois d'août 1603, le critique brugeois fit présenter au cardinal un exemplaire de son étude sur les principales corrections de la Bible latine dans l'édition sixto-clémentine[110]. A cette occasion, il signalait beaucoup d'autres passages qu'on aurait pu avantageusement retoucher. L'écrit, accompagné d'une lettre, ne parvint à Bellarmin, alors archevêque de Capoue, que le 6 décembre. Le jour même il répondit à François Lucas (Document XV). Après quelques mots d'affectueux souvenir, le cardinal entrait en matière : «Je vous remercie pour l'envoi de votre opuscule, mais sachez que nous n'avons pas prétendu donner de la Vulgate une édition aussi parfaite que possible ; nous avons, à dessein et pour de justes raisons, laissé passer beaucoup de choses qui auraient eu besoin d'être corrigées. Pour moi, j'étais tout à fait d'avis d'ajouter les diverses leçons qui se trouvent dans les Bibles de Louvain[111] et sur lesquelles vous avez écrit un livre très utile[112] ; mais les autres consulteurs n'ont pas jugé à propos de les insérer dans une première édition».
Le reste de la lettre se rapporte au Bréviaire réformé, qui
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venait de paraître. Là encore, François Lucas avait signalé des points qu'il aurait été bon de toucher ; Bellarmin en convient, mais il explique la conduite réservée des réviseurs du Bréviaire à peu près comme celle des réviseurs de la Vulgate : «Notre dessein s'est borné à ceci : faire disparaître les erreurs intolérables, celles surtout qui s'étaient glissées dans les histoires des leçons du second nocturne».
Réponse qui fit concevoir au critique brugeois l'espérance d'une correction ultérieure de la Vulgate, comme on le voit par ce passage d'une lettre à Barthélemi Peeters (Petrus Lintrensis), professeur de théologie à l'Université de Douai : «Posse autem eo perveniri ut Romani Patres exactiorem etiam Bibliorum castigationem tandem emittant, ut confidam faciunt literae ab Illmo Card. Bellarmino Capuae ad me datae 6 Decembris 1603, quarum haec sunt verba : De libello ad me misso gratias ago, sed scias velim, Biblia vulgata... Ita Bellarminus : prima, inquit, hac editione, quasi sperari possit alia absolutior»[113].
Deux ans plus tard, Lucas composa deux séries de notes sur les diverses leçons qui se rencontrent dans les quatre Évangiles, en grec et en latin. Il les fit précéder d'une épître dédicatoire au cardinal Bellarmin, datée du 4 septembre 16o5. La seconde partie de cette épître (Document XVI) est particulièrement intéressante par les souvenirs de Louvain que l'auteur rappelle à l'archevêque de Capoue et par la demande qu'il lui adresse de daigner soumettre au Souverain Pontife les corrections qui lui sembleraient propres à perfectionner l'édition clémentine de la Vulgate. Le 23 février de l'année suivante, une lettre (Document XVII) annonçait au cardinal l'envoi de cet écrit, imprimé avec les Commentaires de Luc de Bruges, à la fin du tome second.
Bellarmin ne reçut l'envoi que huit mois plus tard. Rentré à Rome après la mort de Clément VIII, il était alors fort occupé par le conflit survenu entre le pape Paul V et la république de Venise. Il se contenta de remercier chaleureusement le doyen de Saint-Omer, par une lettre datée du 1er no
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vembre 1606 (Document XVIII), et lui promit de lire son travail aussitôt qu'il en aurait le loisir. «S'il me paraît certain, ajoutait-il, que le texte sacré puisse être avantageusement modifié quelque part, j'en parlerai au Souverain Pontife et aux cardinaux intéressés dans la question. Mais vous vous rendez bien compte vous-même qu'il n'est pas facile de faire dans un texte sacré des changements de cette sorte ; il n'en est pas moins fort utile que les gens doctes soient informés des diverses leçons et de l'avis d'hommes experts comme vous et vos semblables».
Dans deux autres occasions, le 16 juillet 1612 et le 8 octobre 1616, Bellarmin écrivit encore à François Lucas, qui lui avait fait hommage des tomes III et IV de ses Commentaires ; mais ces lettres ne contiennent rien sur la Vulgate. La question en resta là. Elle en était au même point, quand Lucas publia, en 1618, la seconde édition de ses Loca insigniora[114], augmentés d'un autre opuscule où il avait réuni une nouvelle collection de variantes, tirées de vieilles Bibles manuscrites. Dans l'épître dédicatoire de ce dernier écrit, adressée à Jacques Blasaeus, évêque de Saint-Omer, l'auteur ne fait que reprendre ce que Bellarmin, dans ses diverses lettres, lui avait écrit sur le sujet (Document XIX).
Il semble qu'à un moment donné il y eut cessation du mouvement qui portait à perfectionner la révision de la Vulgate. Peut-être pourrait-on interpréter dans ce sens l'échec d'un projet dont le P. Eudémon-Joannès parle dans sa déposition sur le Vén. Serviteur de Dieu : «Fece con autorità del Papa molte Congregationi per face un' editione autentica del Testamento novo greco». C'est manifestement à cette affaire que se rapportent deux feuilles écrites de la main du cardinal et portant ce titre : Emendatio textus graeci bibliorum Regiorum, novi Testamenti (Document XX). La pièce a son intérêt, surtout à cause des six règles que Bellarmin y formule :
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1° Quand plusieurs manuscrits anciens concordent avec la Vulgate latine, qu'on change la Regia. 2° Quand tous les manuscrits sont d'accord contre la Vulgate et contre la Regia qu'on change celle-ci, mais en indiquant en note la raison du changement. 3° Même solution, quand la Vulgate ne s'oppose pas, et que la plus grande partie des manuscrits est contraire à la Regia. 4° Quand il y a accord d'un seul manuscrit ou de plusieurs avec la Vulgate, ce détail doit être noté pour les diverses leçons. 5° Mettre des notes à la fin des chapitres. 6° Quand il y a manifestement addition de paroles tirées d'un autre évangéliste, on n'en doit pas tenir compte : par exemple, dans Marc viii, 8 : saturati sunt omnes, le mot omnes vient de Matth. xv, 37, dans le grec.
Bellarmin avait consacré beaucoup de temps à ce travail et tenu à ce sujet beaucoup de congrégations. Quand il se rendit auprès du Souverain Pontife pour lui présenter le résultat et obtenir la permission d'imprimer, raconte le P. Eudémon-Joannès, une difficulté surgit et fit abandonner l'entreprise[115].
Quoi qu'il en soit de la conjecture, il faut distinguer chez Bellarmin l'attitude spéculative du critique, qui avoue les imperfections relatives de la Vulgate, et l'attitude pratique de l'homme public, qui réclame pour elle le respect enjoint par le concile de Trente. Rien de plus significatif, sous ce rapport qu'une note autographe du Vén. Serviteur de Dieu, conservée à la bibliothèque Ambrosienne parmi les papiers de Dom Hilarion Rancati, abbé cistercien de Sainte-Croix de Jérusalem. à Rome (Document XXI). Elle se présente sous forme de réponse à plusieurs questions dont le texte n'existe plus ; mais deux des solutions données, la cinquième et la septième, ont une signification suffisamment nette et d'une valeur générale. On lit, dans le premier cas : «Il n'est pas permis de toucher au texte de l'édition vulgate latine, ce texte ayant été approuvé par l'Église durant plusieurs centaines d'années, et dernièrement par le concile de Trente ; mais il
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est loisible aux commentateurs de noter les différentes significations». Dans le second cas : «Je fais la même réponse, écrit le cardinal, il faut conserver le texte, tel que l'Église nous l'a donné, puis l'expliquer d'une façon convenable ; c'est d'autant plus nécessaire (dans l'occurrence), que les paroles grecques sont susceptibles de plusieurs sens, et que les hérétiques, qui changent effrontément le texte, ne s'accordent pas entre eux».
On peut se demander si parfois, dans l'usage pratique qu'il a fait de la Vulgate, Bellarmin ne serait pas allé plus loin que ses propres principes, pris à la rigueur, ne l'auraient exigé. N'aurait-il pas tranché par l'autorité de la Vulgate des cas où l'autorité de cette version, dans les limites où elle a été sanctionnée par le concile de Trente, ne semblerait pas en jeu ? Soit un exemple. Un prêtre, Jean-Baptiste Cominello, écrivit de Venise au cardinal, le 28 décembre 1619, pour lui présenter une étude sur «l'authenticité et l'interprétation des caractères inscrits sur le manche du couteau de saint Pierre», conservé comme relique à Venise. En même temps il faisait valoir les services qu'il avait rendus à l'Église, et sollicitait quelque récompense, en accommodant à sa façon un texte bien connu de la sainte Écriture, Jo. xiv, 2 : «In domo ROMANA mansiones multae sunt».
Le cardinal répondit (Document XXII). Il félicite d'abord l'auteur sur son érudition et sa connaissance des langues ; puis il propose ses difficultés. Il ne voit pas pourquoi l'on suppose un couteau, là où la sainte Écriture parle de glaive, Matt. xxvi, 51-52[116]. Détail plus significatif, il ajoute : «Et bien que les mots grecs pris en eux-mêmes, puissent avoir le sens de couteau, néanmoins le concile de Trente a déclaré authentique notre édition latine de la Vulgate, et par là même éclairci l'édition grecque». Ce raisonnement, entendu d'une façon absolue, n'étendrait-il pas l'autorité de la Vulgate au delà de ce que Bellarmin admettait en principe ? Reste à
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savoir s'il faut prendre à la lettre une argumentation de circonstance, qui pourrait bien n'être qu'une manière honnête et plaisante d'écarter une demande importune.
Il n'en est pas moins vrai que, dans ses écrits d'ordre exégétique, Bellarmin ne se contente pas de respecter le texte de la Vulgate ; il le défend autant qu'il est en son pouvoir. Doellinger[117] a signalé chez lui, en donnant plusieurs exemple tirés du commentaire sur les Psaumes, la tendance à justifier partout la traduction de la Vulgate, ou à en soutenir du moins la probabilité. Cet auteur ajoute, du reste, que la tendance n'est pas propre au cardinal, mais qu'elle est plutôt commune aux exégètes jésuites.
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CHAPITRE QUATRIÈME
ATTAQUES PORTÉES CONTRE BELLARMIN A L'OCCASION DE LA BIBLE SIXTO-CLÉMENTINE
1. Les trois principales attaques. — 2. Quel genre d'erreurs Bellarmin préte-t-il à Sixte-Quint ? — 3. La bulle Æternus ille a-t-elle été promulguée ? — 4. Sixte-Quint conçut-il le dessein de remettre sa Bible sur le métier ?
1. — Ce chapitre pourrait sembler un hors-d'œuvre dans une étude où l'on se propose uniquement de publier et d'expliquer des documents. Aussi n'ai-je pas l'intention d'examiner toutes les attaques portées contre le Vén. Serviteur de Dieu à l'occasion de la Bible sixto-clémentine ; celles, par exemple, où, partant des révélations contenues dans son autobiographie, ses adversaires l'ont accusé d'avoir manqué de respect et de charité à l'égard de Sixte-Quint, d'avoir trahi le secret qui l'obligeait comme consulteur, et d'avoir, par cette conduite indiscrète, causé un tort grave au Siège apostolique. Longuement traitées dans le procès de béatification[118], et victorieusement réfutées au jugement de Benoît XIV, qui s'occupa deux fois de la cause, d'abord comme promoteur de la foi, puis comme pape[119], ces objections ne vont qu'à infirmer la sainteté du Vén. Serviteur de Dieu, dont il n'est pas question dans ce travail.
Il est d'autres attaques qui vont plus loin ; celles qui s'en
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prennent à la véracité ou à la sincérité du témoin et de l'écrivain, en nous représentant Bellarmin comme un conciliateur sans scrupule qui, pour sauver les apparences, ne craint pas de donner une entorse à la vérité, ou comme un conseiller mal avisé qui, sous l'influence, inconsciente peut-être, d'un mouvement de rancune, charge injustement la mémoire de Sixte-Quint. Ce second genre d'attaques est d'une telle nature, il est dans un rapport si étroit avec plusieurs des questions précédentes, qu'il paraît impossible d'en faire complètement abstraction.
Quand on lit la préface de l'édition clémentine, composée par Bellarmin, on comprend que Sixte-Quint, étant sur le point de publier sa Bible déjà imprimée, y reconnut des fautes d'impression, et que là-dessus il se résolut à remettre tout l'ouvrage sur le métier. Qu'on aille ensuite à l'autobiographie : on y verra d'abord que la Bible de Sixte-Quint était déjà éditée, quand on décida de son sort ; ensuite, on entend parler d'un grand nombre de changements regrettables, et ce qui dans la préface était appelé fautes d'impression devient fautes des typographes ou d'autres personnages ; enfin il n'est pas question, de la part de Sixte-Quint, d'une volonté quelconque de remettre son œuvre sur le métier. D'où il faut conclure, que le dessein prêté à ce pape dans la préface est une pure fiction, un expédient proposé par Bellarmin à Grégoire XIV, et accepté de confiance par ce pape , puis par son successeur Clément VIII, pour sauver à tout prix l'honneur du Saint-Siège, qu'on croyait en péril.
C'est sous cette forme que l'objection a fait son chemin. Le cardinal Decio Azzolini la présenta vivement dans le vote qu'il émit en 1671, sous Innocent XI, et plus vivement encore dans le supplément, où, pour rendre plus sensible la diversité des deux textes, il les mit en face l'un de l'autre. Le cardinal Passionei reprit le même thème en 1753, sous Benoît XIV[120]. On trouve l'écho renforcé de ses observations
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dans l'opuscule anonyme, déjà cité, qui parut à Louvain l'année suivante, sous ce titre : Lettera apologetica intorno all' edizione fatta in Roma per comando di Sisto V della Vulgata latina l'anno MDXC. Doellinger[121] n'a pas manqué de s'associer à ces attaques, en les répétant complaisamment et sans apporter rien de nouveau. M. l'abbé Turmel considérait évidemment l'imputation comme indéniable, quand il a écrit[122] : «Pour dégager la responsabilité du pape qui, pourtant, avait mis ses Controverses à l'Index, Bellarmin imagina un pieux mensonge qu'il a payé plus tard bien cher, puisqu'il y a perdu son procès de canonisation».
Il s'en faut de beaucoup que le cardinal Azzolini[123], dont dépendent, directement ou indirectement, tous les autres, ait droit au privilège de l'invention. Dès 1628, un demi-siècle avant que le promoteur de la foi, Prosper Bottini, exigeât l'insertion de l'autobiographie dans les actes du procès de béatification[124], un auteur luthérien, Sixtinus Amama[125] écrivait ces lignes, après avoir parlé des divergences entre l'édition sixtine et l'édition clémentine de la Bible :
«Cum animadverterent Romani Patres hinc accepturos haereticos oppugnandae pontificiae vel infallibitatis vel sanctitatis argumenta, de velamento quo hoc Ecclesiae Romanae pudendum tegeretur, cogitarunt. Conversus ergo ad dolos et fraudes Papa Clemens, Bullae Sixti V in perpetuum exilium actae (in nullis enim editionibus ea amplius comparet) suam ipsius sanctionem substituit, et tamen haec nova Clementis VIII recognitio et editio in Sixti V nomen data est. Idem mansit titulus : Biblia sacra vulgatae editionis Sixti V Pont. M. jussu recognita et edita. Et quomodo Sixti ? Annon ille 1590 suam editionem a Clementina immensum discrepantem publicaverat ? Audi figmentum : Sixtus V, inquit Prefatio in clementinam, hoc opus tandem confectum typis
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mandari jussit, etc.... Videtis praetextum clementinae correctionis. Vitia illa, si illis credimus, quae Clemens sustulit, fuerunt typographica et praeli vitio in sixtinam editionem irrepserant, ac proinde ea suppressa fuit Quin et unde constabit de hac Sixti mente et intentione ? An reliquit ullas hac de re lucubrationes ?... Fefellit catholicos Clemens, et pia fraude hic usus est. Adeo ut hic periclitetur in Sixto pontificum infallibilitas, et in Clemente eorumdem sanctitas».
Ainsi parlait ce luthérien, sans ménagement et en dirigeant le trait droit contre les Pontifes romains ; mais en réalité, les arguments dont il se sert et les difficultés qu'il soulève diffèrent-ils des arguments et des difficultés que nous avons rencontrés chez le cardinal Azzolini et ses continuateurs ?
En somme, l'attaque se concentre sur trois affirmations importantes de Bellarmin, que les chapitres précédents nous ont fait connaître : 1° Sixte-Quint avait introduit dans la Vulgate des changements regrettables. 2° La bulle Æternus ille n'a pas été promulguée. 3° Avant de mourir, Sixte-Quint avait conçu le dessein de remettre sa Bible sur le métier. Ce sont ces trois affirmations qu'il nous faut examiner, sous la lumière des documents publiés dans cette étude,
2. — La première question est facile à résoudre, et à résoudre pleinement. Ce que Bellarmin entendait par les changements malencontreux, les perperam mutata de Sixte-Quint, il nous l'a dit en propres termes c. ii, § 4, p. 46 ; il entendait «ce qui avait été supprimé, ajouté ou changé sans fondement ni raison, et contre l'autorité des anciens textes, latins, grecs et hébreux». Et pour savoir pratiquement jusqu'où cela s'étendait, il suffit de se rapporter à la pièce intitulée : Loca praecipua in bibliis Sixti V mutata.
Dans le procès qui eut lieu sous Benoît XIV, le P. Danzetta[126], S. J., justifia l'affirmation de Bellarmin en présentant, sous forme de tableau comparatif, les leçons divergentes des édi
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tions sixtine et clémentine. Le travail, tout incomplet qu'il est, m'a paru digne d'être rapporté (Document XXIII). Le défenseur constate d'abord l'existence de fautes d'impression dans la Bible de Sixte-Quint ; en effet, sans parler des particules et, tamen, autem, ego, etc., souvent superflues ou, au contraire, omises, il y a beaucoup d'interversions (n. 7, 14, 25, etc.) ; parfois des mots manquent (n. 18, 33) ou même un membre de phrases (n. 5) ; d'autres fois il y a redondance (n. 1, 2, 3, 4, 9, 10, 11, 21, 22) ; ailleurs, c'est un changement de cas, au détriment de la syntaxe ou du sens (n. 15, 1 7, 27, 31, 34, 35). Mais en dehors de ces fautes d'ordre typographique ou littéraire, il y en a d'autres plus importantes, qui modifient le sens (n. 16, 30, 32, 37) ou qui le faussent complètement (n. 18, 28).
Toutefois, ajoutait le P. Danzetta, il n'est pas un seul de ces changements qui constitue une erreur dans la foi ou les mœurs, et par conséquent les termes : permulta perperam mutata, dont Bellarmin s'est servi, visent des erreurs d'un genre différent. Conclusion aussi capitale dans le point qui nous occupe, qu'elle sera évidente pour quiconque aura lu les pièces précédemment analysées. L'erreur en matière de fait particulier, admise par le cardinal d'après le censeur anonyme, c. iii, § 4, p. 61, s'opposait directement, dans sa pensée, à l'erreur en matière de foi ou de mœurs.
Mais n'y aurait-il pas davantage dans la fameuse lettre que Bellarmin écrivit à Clément VIII, en 1602, pour le dissuader d'entreprendre par lui-même l'étude et la solution du problème de auxiliis divinae gratiae ? Voici le passage dont il s'agit : «Votre Sainteté sait encore dans quel danger Sixte-Quint, de sainte mémoire, se mit lui-même et mit toute l'Eglise, en voulant corriger la Bible d'après son propre jugement, et pour moi je ne sais vraiment pas s'il y eut jamais plus grand danger»[127]. A moins qu'on ne veuille
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donner à ce texte un sens fantastique, quelle que soit d'ailleurs la force des termes dont le conseiller de Clément VIII se sert ici, et quoi qu'on puisse penser de son appréciation personnelle, il est évident qu'il ne parle pas d'erreur commise, mais seulement de danger encouru. Sa pensée plus explicite est à chercher dans le jugement, émis en présence du pape Grégoire XIV, sur la conduite à tenir à l'égard de la Bible de Sixte-Quint, c. II, § 4, p. 46.
3. — La question relative à la publication de la bulle Æternus ille nous place sur un terrain plus délicat. Ici Bellarmin n'a pas parlé de science personnelle, il a répété ce qu'à son retour de France il avait entendu dire à plusieurs cardinaux. La question qui se pose est celle-ci : A-t-il pu croire sur l'affirmation de ces cardinaux et redire sérieusement que la bulle n'avait pas été promulguée ? M. l'abbé Turmel répond[128] : «Bellarmin aimait à dire que la bulle de Sixte ne fut pas promulguée. Cette assertion ne peut pas être prise au sérieux. La susdite pièce fut affichée aux portes de la basilique de Latran, puis insérée au bullaire. Bellarmin était alors en France et ne rentra à Rome que quelque temps plus tard ; mais il fut certainement mis au courant de tout et il n'était pas dupe de la légende qu'il cherchait à acclimater».
Beaucoup de raisons semblent, à première vue, justifier cette manière de voir. Déjà, comme on l'a vu, c. iii, !. 3, p. 59, le P. Gretser rejetait l'hypothèse d'une non-promulgation, en insistant sur cette circonstance que la bulle est datée du 1er mars 1589 et que Sixte survécut un an et demi : «Comment croire que, dans l'intervalle, il ne l'aura pas fait afficher, suivant l'usage, aux portes de la basilique de Latran, de Saint-Pierre et de la Chancellerie Apostolique ?»
Olivarès signale à Philippe II, le 7 mai 1590, l'apparition de la Bible sixtine et la distribution d'exemplaires aux cardinaux : «Sa Sainteté vient de faire paraître la Bible à propos de laquelle, comme je l'écrivais à Votre Majesté ces jours derniers, Elle avait eu une altercation avec le
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Cardinal Carafa.... Le Pape a fait remettre une Bible à chaque cardinal, et je suis certain qu'il en enverra bientôt une à Votre Majesté...» (Document XXV, n. 1). En effet, les 14 et 28 du même mois, l'ambassadeur expédiait à son maître, d'abord de sa propre initiative, puis au nom de Sixte-Quint, la nouvelle Bible (Ibid. n. 2 et 4). Enfin, le 30 juin, il faisait partir le bref, daté du 29 mai, qui donnait à l’envoi de la Bible sa signification (Ibid. n. 5). On y lisait, entr'autres, ces paroles : «Ac demum volumen jam restitutum et emendatum in typographia nostra Vaticana imprimi fecimus, eumque impressum jam ab omnibus recipi constitutione desuper effila decrevimus»[129].
Ces derniers mots sont pleinement confirmés par l'original de la Bulle Æternus ille. Longtemps inconnu, il a été retrouvé[130] par Mgor Baumgarten et publié en 1907 dans la Biblische Zeitschrift, t. V, p. 189 s., 337 ss. Deux données importantes ressortent du document. D'abord, la constitution est datée : anno Incarnationis dominice millesimo quingentesimo octogesimo nono, Kal. Martii, pontificatus nostri anno quinto. .La date de 1589 répond à l'année ecclésiastique, qui commençait alors à Rome au 25 mars ; dans notre style, elle se rapporte, en réalité, à l'année 1590, car Sixte-Quint ayant été élu pape le 24 avril 1585, le 1er mars de sa cinquième année de pontificat ne peut appartenir qu'à cette année 1590, suivant la juste observation de Mgor Baumgarten.
A la suite de la pièce on lit une attestation autographe du maître des cursores, relative à la publication de la bulle la date du 10 avril : «Anno a Nativitate Domini millesimo quingentesimo nonagesimo, indictione tertia, die vero decimo mensis aprilis, pontificatus sanctissimi in Christo patris et domini nostri, domini Sixti divina providentia papae quinti anno quinto, retroscripte litere affixe et publicate fuerunt ad valvas Basilice Principis Apostolorum de Urbe, Sancti Joannis Lateranensis, cancellarie apostolice
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et aciei Campi Flore et in aliis locis publicis, ut moris est, per nos Nicolaum Drouyn et C. Taghettum sanctissimi domini nostri pape cursores. — Pompeus Guerra, magister cursorum».
II semble qu'après ces documents, tout doute doive cesser, et que de Bellarmin niant la promulgation de la bulle Æternus ille, il faut dire qu'il fut de deux choses l'une : ou mystificateur, ce que suppose M. l'abbé Turmel avec Doellinger et ses devanciers, ou mystifié, ce qui peut arriver à tout homme, mais parait fort difficile à admettre dans l'occurrence.
On doit cependant tenir compte d'une autre série de témoignages. En deux endroits qui seront rapportés plus loin, § 4, p. 96 s., Ange Rocca, qui fut collaborateur de Sixte-Quint et secrétaire de la congrégation grégoriano-clémentine, suppose manifestement qu'il n'y eut pas promulgation. De même un autre contemporain, le théatin Michel Ghisleri, dans le récit que nous a conservé Vezzosi[131] : «Ceterum ipse Sixtus P. M. cum per eam emendationem sibi, ut homini in scholastica theologia magisque in linguarum peritia versato, haud satisfactum plerisque in Bibliorum locis censuisset, ex proprio marte, humiliter illi refragante Cardinali Carafa, correctam Vulgatam in lucem vaticana emisit impressione ; tametsi et in hoc divina providentia mirum in modum eluxit, cum ob repentinum dicti summi Pontificis obitum impedita fuerit eorum promulgatio Bibliorum».
Ces auteurs ne distinguent pas entre la bulle et la Bible de Sixte-Quint. Pourquoi distingueraient-ils, puisque la bulle n'avait pas d'autre but que d'imposer officiellement la Bible ? Si donc l'une avait été publiée, l'autre l'aurait été aussi. Cependant il nous reste, touchant la bulle Æternus ille, plusieurs témoignages spéciaux, groupés dans deux lettres adressées au P. Tanner, les 28 août et 4 septembre 1610, par le P. Ferdinand Alber, assistant d'Allemagne (Document XXIV). Lettres déjà signalées, c. III, § 4, p. 64, mais dont il importe de donner maintenant la traduction intégrale.
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Dès le 29 mai, le P. Général avait promis une réponse au P. Tanner : «De negocio Bibliorum scribet postea P. Assis-tens ad R. V»[132]. C'est donc au nom d'Aquaviva que le P. Alber écrivit, le 28 août : «En ce qui concerne la Bible de Sixte-Quint, voici la réponse qu'ont donnée, après une enquête et une discussion sérieuse, ceux qui furent mêlés à l'affaire ; réponse qui lève toute difficulté et satisfait à bon droit tout le monde : Il est certain que la bulle en question ne fut point promulguée. Une première preuve se tire de ce que cette publication n'est pas consignée dans les registres[133] (de la Chancellerie apostolique). En outre, l’Illme cardinal Bellarmin témoigne qu'à son retour de France, il entendit dire à plusieurs cardinaux, se donnant pour certains du fait, que la bulle n'avait pas été promulguée... Sachez encore, ajoutait le P. Assistant, que Notre Saint Père le pape (Paul V) a confirmé cette réponse, et que, par conséquent, l'on peut et l'on doit s'y tenir en toute sécurité».
Le 4 septembre, un nouveau détail était donné : «A l'époque même où cette Bible fit sa première apparition, quelques-uns partirent de là, dans une argumentation publique, pour attaquer l'infaillibilité pontificale : Le pape, disaient-ils, peut se tromper, puisque de fait il semble bien s'être trompé dans son édition de la Bible. Le P. Azor répondit que la bulle n'avait pas été promulguée, nonobstant la souscription imprimée des cursores : car ce fut par anticipation que les typographes l'insérèrent, sur l'ordre du pape qui voulait prévenir tout retard dans l'impression. Le fait est attesté par le P. André Eudémon-Joannès, présent à la séance».
Il y a dans ces deux lettres un ensemble de témoignages positifs qu'on n'explique réellement point par la théorie aisée, mais trop simple, des mystificateurs ou des mystifiés formant un cercle vicieux. Ces témoignages viennent de personnages graves et contemporains des événements. Plusieurs
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sont manifestement distincts ; ainsi, le témoignage du P. Azor est antérieur à celui du cardinal Bellarmin et porte sur une circonstance toute spéciale ; le témoigne confirmatif de Paul V est indépendant et d'autant plus notable qu'en 1590, Camille Borghèse fut nominé auditeur de la Chambre apostolique[134] par le pape Grégoire XIV.
Nous nous trouvons donc en face d'une double série de documents, qui semblent contradictoires. Pour résoudre l'antinomie, Ghisleri nous fournit une distinction, trop facilement négligée par certains, quand il oppose l'impression ou édition de la Bible sixtine, entendue matériellement, et sa promulgation, entendue dans le sens formel et canonique du mot : «correctam Vulgatam in lucem vaticana emisit impressione, tametsi... impedita fuerit eorum promulgalio Bibliorum». La distinction est capitale, lorsqu'il s'agit non pas d'un écrit quelconque, par exemple d'une œuvre littéraire, mais d'un écrit destiné à jouir d'une valeur juridique.
Dans le dernier cas, le simple fait que l'écrit soit imprimé, distribué aux cardinaux, envoyé à quelques princes, vendu même à des individus, ne constitue pas une promulgation proprement dite. L'avocat de la cause de béatification, sous Clément XI, le rappelait fort à propos[135] : «Licet daremus permissum fuisse a Sixto, ut sua editio publice prostaret ac venderetur, non ex hoc sequitur quod Bulla Sixti praefixa solemniter sit publicata, quia solemnitas, quae de more adhibetur in publicatione Bullarum, non consistit in solo permissu superiorum, ut illae jam impressae vendantur, vel seorsim, vel simul cum opere ad quod referuntur et cum quo conjunctae sunt». De ce chef, plusieurs des raisons invoquées ci-dessus par les tenants de la promulgation, sont en réalité de nulle valeur ; telles, par exemple, les raisons tirées des renseignements fournis à Philippe II par Olivarès, sur la distribution de la Bible aux cardinaux et sur la décision, prise après la mort de Sixte-Quint, «de ne laisser
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vendre aucun exemplaire de la nouvelle Bible avec la bulle du pape»[136].
En prenant la question sous cet aspect de la valeur juridique que la publication seule confère définitivement à un décret, on peut tirer de la date même de la bulle Æternus ille une considération qui a son importance. Dans l'espèce, il ne s'agissait pas d'une vérité dogmatique, proposée à la foi les fidèles et acquise irrévocablement dès qu'elle est définie ex cathedra ; il s'agissait directement d'une mesure d'ordre pratique, consistant dans l'acceptation et l'usage désormais exclusif de la nouvelle Bible. Mais la mesure n'est pas édictée comme immédiatement obligatoire ; un délai était prévu, de quatre mois pour les Cisalpins, de huit pour les Ultramontains, à partir du jour de la publication, «a die publicalionis hujusmodi numerandos». Jusqu'à l'expiration du délai fixé par le législateur, l'obligation n'avait pour l'Eglise universelle rien d'effectif, ni surtout de définitif. A supposer donc que la bulle eût été réellement publiée le 10 avril 1590, Sixte-Quint serait mort avant l'expiration du délai fixé ; et comme la reprise de l'affaire par ses successeurs aurait aboli son ordonnance, il s'ensuivrait que l'obligation n'aurait jamais existé pour l'Eglise d'une façon rigoureuse et absolue. Il n'y aurait donc pas eu, à tout le moins, promulgation sortissant juridiquement son effet. Ainsi serait-il vrai de dire d'une loi dictée comme devant entrer en vigueur à telle époque, et rapportée auparavant, qu'elle n'aurait jamais eu force de loi. Cette solution hypothétique ne tranche cependant pas le fond du débat ; car ce n'est évidemment pas en ce sens-là, que le cardinal Bellarmin, le P. Azor et les autres témoins ont parlé, quand ils ont dit que la bulle n'a pas été promulguée. Ils entendaient bien nier le fait matériel de la promulgation ou l'affichage public et normal de la bulle. Dès lors une seule question demeure : L'attestation des cursores, qui
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fait suite à la bulle dans l'exemplaire original, n'infirme-t-elle pas la dénégation de ces personnages intéressés dans l'affaire ?
Il n'est que juste de rendre hommage à Mgr Baumgarten pour son heureuse trouvaille ; elle lui a permis de fixer quelques détails importants. Par exemple, la date du 1er mars 1590, définitivement acquise, dispensera désormais de répondre à ceux qui, à l'exemple du P. Gretser, demandaient comment Sixte-Quint avait pu rester un an et demi sans publier une bulle composée dès le mois de mars 1589.
Mais sur le point précis du débat, la découverte ne change, en réalité, rien à l'état de la question. Il ne suffit pas de montrer que l'original contient l'attestation des cursores, le fait était connu dès le principe par des imprimés ; il s'agit de prouver que cette attestation représente une promulgation réellement faite, et non pas, comme le P. Azor l'affirma publiquement au Collège Romain l'année même où la Bible de Sixte-Quint parut, une pure anticipation en vue de l'impression. Ce n'est pas chose rare dans les fastes de la secrétairerie pontificale, que la communication officieuse d'un document avant la promulgation officielle, différée à une date ultérieure pour une raison quelconque.
Je me demande même si l'affirmation du P. Azor ne serait pas plutôt confirmée qu'infirmée par l'original de la bulle Æternus ille. La susdite attestation des cursores nous y apparaît à la suite de la bulle[137] ; elle peut donc former un tout avec ce qui précède, et, de ce chef, rien ne s'oppose, pas même la différence d'écriture, à ce que tout se soit fait par anticipation. La bulle est datée du 1er mars, et la publication aurait eu lieu le 10 avril ; or, ni l'une ni à l'autre de ces dates, la Bible de Sixte-Quint n'était achevée d'imprimer. Elle ne le fut qu'au commencement de mai ; c'est le 7 de ce mois qu'Olivarès en fit connaître à Philippe II l'apparition, c'est-à-dire la distribution aux cardinaux, sans avoir, aupara
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vant., fait mention de la promulgation de la bulle (Document XXV, n. i). L'auditeur de Rote, Pegna, parle en sa consultation (Ibid., n. 3) comme un homme qui n'a nullement conscience de se trouver en face d'un acte définitif.
Dans ses lettres suivantes, l'ambassadeur montre le pape occupé à retoucher son œuvre. Le 28 mai, il écrit : «J'allai hier voir Sa Sainteté ; Elle se mit à me parler du travail que lui avait coûté son édition, et qui est réellement considérable. Elle dit avoir corrigé les fautes qui s'y trouvaient». (Ibid., n. 4). Mais un mois plus tard, le 30 juin, il écrit de nouveau : «Le moine[138] qui m'avait apporté la Bible, revint bientôt pour me dire de lui laisser corriger certains passages. Lorsque je sus qu'il avait corrigé de même d'autres exemplaires, et que le docteur Tolet m'eut dit que c'était par ordre du pape, je le laissai faire. Bien qu'on doive imprimer l'errata pour le mettre en tête, j'envoie cependant à Votre Majesté la liste des fautes corrigées».
Cette liste a été conservée avec la lettre qui la contenait (ibid., n. 5). Les textes corrigés se rapportent aux livres des Rois, d'Esdras, de Judith et des Psaumes. On lit, en outre, cette note à la fin de la liste : «Dans le bref de Sa Sainteté, le mot ter a été remplacé par semper, et la référence marginale à Luc XXII a été supprimée». Ce que fra Angelo appelle ici bref de Sa Sainteté n'est rien autre chose que la bulle Æternus ille ; cf. Cornely, Introd, gen., t. I, p. 467, lignes 21-23, où il est dit de saint Pierre : «pro quo Dominus.... non semel tantum, sed semper[139] rogavit...» Mgr Baumgarten, loc. cit., p. 341, s'appuyant sur l'original, rétablit la leçon ter, contre le texte du P. Cornely ; il confirme par le fait même la conclusion rigoureuse qui sort de la liste d'errata contenue dans la lettre d'Olivarès : Au mois de juin, Sixte-Quint est encore tout occupé à réviser non seulement sa Bible, mais encore la bulle qu'on nous donne comme définitivement promulguée le 10 avril précédent.
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Dira-t-on que les corrections dont il s'agit ne concernent que des fautes d'impression, possibles dans une bulle pontificale comme dans tout autre document ? Quoi qu'il en soit de la réponse pour la correction des passages bibliques, elle ne vaut pas pour la correction relative à la bulle ; la substitution de semper à ter, avec suppression de la référence à Luc XXII, ne peut vraiment pas se rapporter à une simple faute d'impression : «Prima lectio fuit "ter", remarque le P. Cornely, quae quum sensum aptum non praeberet (ubi enim Christus ter pro Petro orasse narratur ?) postea mutata est in "semper"».
A ces considérations s'ajoute un fait singulier, dont l'importance a été justement signalée dans le procès de béatification[140] : l'absence, en dehors de l'original, de tout exemplaire séparé de la bulle. Comment expliquer ce fait, si la bulle fut solennellement publiée le 10 avril ? Car, dans cette hypothèse, elle aurait été publiée à part, la Bible n'étant pas encore achevée ; et l'attente excitée par les longs travaux de la commission de la Vulgate, l'émotion causée par les procédés autoritaires de Sixte-Quint, ne permettent pas de supposer que le document fût passé inaperçu. Comment expliquer encore que, dans les mesures prises en 1592 pour faire rentrer tous les exemplaires répandus de la Bible sixtine, jamais il ne soit question de la bulle dont diverses copies auraient nécessairement existé, dans l'hypothèse d'une publication officielle, et n'auraient pas été moins compromettantes que les exemplaires de la Bible ?
Tout cet ensemble de circonstances ne nous force-t-il pas à tenir compte de l'affirmation, étonnante à première vue, du P. Azor ? Dans son impatience d'en finir, Sixte-Quint aura fait consigner d'office, par anticipation, le certificat d'affi
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chage, espérant bien, au commencement de mars, que, six semaines plus tard, tout serait achevé et que la publication officielle aurait lieu. Les choses n'allèrent pas aussi vite que l'ardent Pontife l'aurait désiré ; l'affichage n'eut pas lieu à l'époque projetée. Vint ensuite la préoccupation de faire disparaître les fautes d'impression, et d'autres encore, que Sixte-Quint découvrait ou qu'on lui signalait. Puis la maladie s'abattit sur lui et la mort l'enleva, sans que la publication de l'œuvre entière, bulle et Bible, fût consommée. Le P. Cornély[141] a eu raison de ne rien voir que de très vraisemblable dans cette conclusion. Il me semble non seulement équitable, mais naturel de s'en tenir là, plutôt que d'opposer un démenti formel aux témoignages positifs et multiples de personnages graves et contemporains.
4. — Il reste pourtant à examiner si ce démenti ne s'impose pas rigoureusement à la loyauté du critique, quand de l'affirmation qui vient d'être discutée, il rapproche la troisième affirmation de Bellarmin, celle qui consiste à prêter à Sixte-Quint le dessein de remettre sa Bible sur le métier. Comme la difficulté repose sur une prétendue contradiction entre ce qui se lit dans la préface de la Bible sixto-clémentine et ce qui se lit dans l'autobiographie, une question préalable s'impose : En réalité, comment Bellarmin a-t-il parlé, quand le sort de la Bible sixtine s'est décidé ? A-t-il parlé comme dans la préface, ou comme dans l'autobiographie ?
La question fut soulevée au procès de béatification qui eut lieu sous Benoît XIV. Le défenseur de la cause fit observer[142], entre autres choses, qu'on n'avait pas le droit de présenter les deux textes comme rapportant au même titre la pensée de Bellarmin, et qu'avant de faire fond sur telle ou telle expression de détail, par exemple celle de praeli vitio, il fallait
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d'abord établir qu'elle venait réellement du Vénérable Serviteur de Dieu. Qu'il soit l'auteur de la préface, c'est chose acquise par son propre témoignage ; mais que chaque mot de cette pièce doive lui être attribué, purement et simplement, c'est là une assertion moins solide. Tolet eut quelque part à la préparation du document, suivant le témoignage de Ghisleri[143], dans son récit sur la révision de la Vulgate : «Hujus correctae vulgatae praefationem exarasse certum est P. Robertum Bellarminum, una tamen cum eodem Cardinale Toleto». En outre, ni l'un ni l'autre n'agissait en son propre nom ; tous deux tenaient leur mandat de Clément VIII, et devaient rédiger la préface conformément aux vues de ce pape et de la congrégation pontificale dont ils faisaient partie. Qu'y a-t-il d'invraisemblable à ce que telles ou telles expressions, plus calculées, plus politiques, vinssent du pape ou de ceux qui, sous son inspiration, auraient donné le dernier coup de plume au texte des premiers rédacteurs ? N'est-ce pas chose fréquente, qu'un document important, soumis à l'œil et à l'approbation du maître, subisse des légères retouches ?
Telles furent les réflexions de l'avocat[144]. Abstraction faite de leur valeur objective, il faut du moins reconnaître qu'elles légitiment ce que nous avons appelé la question préalable. Or, sur ce point, nous n'en sommes plus aux conjectures. Le lecteur a vu passer sous ses yeux, c. ii, § 4, p. 46 s., l'analyse du jugement proféré par Bellarmin en présence de Grégoire XIV. Et, puisque, dans son Vote, le cardinal Azzolini a présenté, sous forme de contraste, ce que Bellarmin a dit dans la préface de la Bible clémentine et ce qu'il a dit dans l'autobiographie, reprenons ce tableau comparatif, mais en le complétant à l'aide du jugement de 1591.
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jugement de 1591. |
preface de la bible clémentine, 1592. |
autobiographie 1613. |
Cum editio Sixti V Pont. Max. ad manus haereticorum sine dubitatione pervenerit, non leve periculum imminet ne forte haereticorum aliquis librum scribat, in quo doceat ab ipso Rom. Pontifice biblia esse corrupta,et notatis locis quae sine ullo fundamento aut ratione, et contra fidem omnium codicum latinorum, graecorum et hebraeorum sublata, addita vel mutata sunt, fidem orationi suae faciat... Quare danda est opera ut tanto malo quam citissime et quam optime fieri possit occurratur. Quod speramus futurum, si biblia nuper in congregatione Illmorum Cardinalium de mandato Smi D. N. recognita typis mandentur, et in praefatione narretur Sixtum quidem Pontificem biblia suo jussu castigata superiore anno emisisse ; sed cum advertisset prae festinatione, ut fieri solet in primis editionibus, multa emendatione digna variis de causis in iis bibliis irrepsisse, ipsum eumdem suum illud opus sub incudem revocare voluisse ; sed quod ille morte praeventus praestare non potuit, nunc demum a successore esse perfectum... |
Opus tandem confectum typis mandari jussit [Sixtus V]. Quod cum jam esset excusum, et ut in lucem emitteretur idem Pontifex operam daret, animadvertens non pauca in sacra Biblia praeli vitio irrepsisse, quae iterata diligentia indigere viderentur, totum opus sub incudem revocandum censuit atque decrevit. Id vero cum morte praeventus praestare non potuisset, Gregorius XIV, qui post Urbani VII duodecim dierum pontificatum Sixto successerat, ejus animi intentionem executus, perficere aggressus est, amplissimis aliquot Cardinalibus aliisque doctissimis viris ad hoc iterum deputatis. Sed eo quoque, et qui illi successit, Innocentio IX, brevissimo tempore de hac luce subtractis tandem sub initium Pontificatus Clementis VIII, qui nunc Ecclesiae universae gubernacula tenet, opus, in quod Sixtus V intenderat, Deo bene juvante, perfectum est... |
Anno 1591, cum Gregorius XIV cogitaret quid agendum esset de Bibliis a Sixto V editis, in quibus erant permulta perperam mutata, non deerant viri graves qui censerent ea biblia esse publice prohibenda. Sed N. coram Pontifice demonstravit non esse biblia illa prohibenda, sed esse ita corrigenda, ut salvo honore Sixti Pontificis, biblia illa emendata prodirent. Quod fieret, si quam celerrime tollerentur quae male mutata erant, et biblia recuderentur sub nomine ejusdem Sixti, et addita praefatione qua significaretur in prima editione Sixti prae festinatione irrepsisse aliqua errata vel typographorum vel aliorum... Placuit consilium N. Gregorio Pontifici, et jussit, ut congregatio fieret ad recognoscendam celeriter Bibliam Sixtinam et revocandam ad ordinariam Bibliam, praesèrtim Lovaniensem. Id factum est Zagarolae... et post obitum Gregorii et Innocentii Clemens VIII edidit Bibliam recognitam sub nomine Sixti cum praefatione, quam idem N. composuit. |
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La première de ces pièces répond directement à la question préalable ; elle nous donne en propres termes ce que Bellarmin dit, en 1591, dans la congrégation grégorienne où le sort de la Bible sixtine fut décidé. Sur le point qui nous occupe actuellement, la position est on ne peut plus nette : Bellarmin conseille de corriger cette Bible le plus tôt possible et de la publier ensuite, mais en avertissant dans la préface que le pape Sixte avait résolu de remettre son œuvre sur le métier, ayant remarqué que, par suite d'une trop grande hâte, il s'y était glissé, pour différentes causes, beaucoup de choses à corriger. L'avertissement se retrouve dans la préface, avec cette différence que les termes : multa emendatione digna, sont remplacés par ces autres, moins généraux et moins forts : non pauca... praeli vitio...
La question préalable ainsi résolue, est-il vrai qu'il suffit de comparer la préface et l'autobiographie, pour comprendre qu'en attribuant à Sixte-Quint la volonté de faire réimprimer sa Bible, Bellarmin «imagina un pieux mensonge» ? Les deux pièces présentent-elles, en réalité, des contradictions ou des invraisemblances, qui justifient cette grave imputation ?
On voit une première contradiction dans la manière différente dont l'auteur parle de la Bible sixtine. Dans la préface, Sixte-Quint nous est présenté comme se préparant à la faire paraître : «ut in lucem emitteretur idem Pontifex operam daret» ; dans l'autobiographie, elle est déjà parue, il ne s'agit plus que de savoir ce qu'on en fera : «cum Gregorius XIV cogitaret quid agendum esset de Bibliis a Sixto V editis». - La contradiction est-elle réelle ? Oui, mais pour ceux-là seulement qui font la confusion, déjà signalée, entre deux notions qui, dans l'occurrence, ne sont pas synonymes : d'un côté, l'impression typographique ou la simple publication ; de l'autre, la promulgation officielle ou canonique. D'un livre imprimé il est vrai de dire : excusum, editum ; mais si ce livre doit avoir force de loi, il n'est pas par le fait même promulgué au sens juridique du mot. Dans l'autobiographie, Bellarmin se sert d'une expression générale : editis, editione ; dans la préface, il emploie deux termes dont le rapprochement
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détermine le sens respectif : «quod cum jam esset excusum, ET ut in lucem emitteretur» ; le premier terme se rapporte manifestement à l'impression typographique, et l'autre à la mise au grand jour ou publication. Si, dans le jugement de 1591, le terme emisisse se trouve appliqué à la Bible sixtine, on remarquera que Bellarmin n'y oppose pas ce terme à celui d'excusum, et même qu'il n'ajoute pas, comme dans la préface, le qualificatif : in lucem. Ces nuances ne sont pas négligeables pour qui veut saisir la pensée même d'un auteur[145].
On voit une autre contradiction dans le genre d'erreurs attribuées à la Bible sixtine. Dans l'autobiographie, ce sont des erreurs multiples : «permulta perperam mutata, quae male mutata erant, aliqua errata vel typographorum vel aliorum» ; dans la préface, ce sont de pures fautes d'impression : «non pauca praeli vitio irrepsisse». — La différence est certainement notable, elle l'est d'autant plus qu'en donnant son avis, en 1591, devant Grégoire XIV, Bellarmin a réellement parlé comme dans l'autobiographie il dit l'avoir fait ; on ne peut donc pas raisonnablement nier que la différence d'expression ait été intentionnelle, quel qu'en soit l'auteur principal. Mais, en dehors même de toute autre explication, que peut-on conclure de cette différence ? Une seule chose : dans le document public qu'était la préface, Bellarmin s'est contenté de dire le strict nécessaire, par respect pour la mémoire de Sixte-Quint et par égard pour l'honneur du Saint Siège : «Caeterum, fut-il répondu dans le procès de 1712[146], quod Bellar
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minus ex duabus mendarurn speciebus, quibus sixtina editio scatebat, eas dumtaxat quae ab operariorum incuria profluxerunt, in praefatione publica et omnium oculis exposita nominavit, ea fuit prudentissima cautela, ut sic melius tum Sixti, tum ipsius Apostolicae Sedis honori consuleretur».
Ajoutons une considération dont les adversaires de Bellarmin auraient dû tenir compte. Quand on prétend trouver chez un auteur des assertions contradictoires, il serait bon d'examiner de très près si, aux endroits allégués, il y a vraiment identité de personnages ou de circonstances. Dans l'autobiographie, ce n'est pas Sixte-Quint qui parle ou qui juge ; c'est Bellarmin qui affirme d'abord les incorrections de la Bible sixtine, «in quibus erant permulta perperam mutata» et qui, ensuite, rappelle le conseil jadis donné par lui de l'imprimer après révision, en avertissant dans la nouvelle préface qu'il s'était glissé dans l'œuvre du pape défunt des erreurs dues soit aux imprimeurs soit à d'autres, «errata vel typographorum vel aliorum». Bellarmin pouvait parler ainsi dans un écrit privé, car il parlait confidentiellement et il savait pertinemment ce qu'il disait. Au contraire, dans la préface de la Bible clémentine, destinée à la plus grande publicité, c'est Sixte-Quint qui entre en scène, qui est censé parler ou raisonner : «animadvertens non pauca in sacra Biblia praeli vitio irrepsisse», etc.
Il est vrai que les termes dont Bellarmin se sert dans le jugement de 1591 semblent aller plus loin, car il dit en parlant du même pape : «Cum advertisset prae festinatione... multa emendatione digna variis de causis in iis bibliis irrepsisse». L'assertion prise en elle-même est exacte. Au cours de sa dernière révision, Sixte-Quint eut conscience, non pas seulement de fautes d'impression, mais d'autres encore. Nous l'avons vu
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rectifier le sens d'un passage dans la bulle Æternus ille ; les corrections qu'il fit sur sa Bible imprimée pourraient nous fournir plusieurs cas où il ne s'agit pas précisément de fautes d'impression. Soit, par exemple, Sap. viii, 17. Dans la congrégation du cardinal Carafa, on avait admis cette correction : Immortalitas est in cognatione sapientiae ; Sixte-Quint rétablit d'abord l'ancien texte : Immortalis est in cogitatione sapientiae, puis il se ravisa en partie et remplaça le mot immortalis par celui d'immortalitas.
Mais le fait que ce pape ait reconnu dans sa Bible d'autres erreurs que des erreurs d'ordre typographique, n'empêche nullement qu'il ait été d'abord et tout particulièrement préoccupé par ces dernières. «Dans la Bible récente, ce qui frappait surtout Bellarmin comme tous les autres, c'étaient les changements défectueux, l'orthographe insolite, la nouvelle division en versets, la suppression des titres des psaumes et le reste. Au contraire, les fautes d'impression, celles qu'on avait déguisées, tant bien que mal, sous les fameux carrés de papier, et celles qui subsistaient encore et dont quelques-unes, par exemple, les omissions involontaires, étaient irrémédiables, pesaient davantage sur l'esprit de Sixte-Quint et lui inspiraient des doutes sur la perfection de son œuvre favorite». Par là s'explique le récit de la préface où, sous des paroles «discrètes et respectueuses», Bellarmin laisse voir «l'état d'esprit du pontife, préoccupé tout d'abord des seules erreurs typographiques, puis inclinant peu à peu vers une révision complète»[147].
Ceci nous ramène au point capital du débat : le projet de réimpression attribué à Sixte-Quint dans la préface et complètement passé sous silence dans l'autobiographie. Nouvelle contradiction, ou du moins nouvel et manifeste indice de la fiction créée par Bellarmin. Et l'on ajoute que pour un lecteur intelligent de l'autobiographie, il est clair qu'au moment où l'expédient fut proposé, personne ne songeait à faire paraître la seconde Bible sous le nom de Sixte-Quint ni à la présenter comme une simple correction de fautes d'im
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pression : solution imposée pourtant par la loyauté la plus élémentaire, dans l'hypothèse où ce pape aurait voulu vraiment refondre son œuvre ; hypothèse d'ailleurs inconciliable avec le caractère de Sixte-Quint et son attitude à l'égard de sa Bible dans les derniers mois de sa vie.
De ce que Bellarmin ne répète pas dans l'autobiographie tout ce qu'il avait dit dans la préface, s'ensuit-il qu'il le rétracte ou qu'il le contredise ? L'affirmer est chose d'autant plus arbitraire, qu'au même endroit il se déclare auteur de la préface[148] et raconte l'affaire de telle façon qu'il est facile de saisir les points d'attache entre les deux documents. Dans un petit mémoire où Bellarmin raconte les grandes lignes de sa vie, d'après un questionnaire qui lui avait été soumis[149], quelle nécessité y avait-il d'expliquer l'attitude prise finalement par Sixte-Quint à l'égard de sa Bible ?
Si personne ne songeait à publier la nouvelle édition sous le nom de Sixte-Quint, quand Bellarmin conseilla cette mesure, s'ensuit-il qu'on ne savait rien de ses projets de réimpression ou que, si l'on en savait quelque chose, tous devaient se croire tenus de mettre la nouvelle Bible sous son nom ? C'est là raisonner dans l'abstrait, en dehors des circonstances historiques que les chapitres précédents nous ont fait connaître. En réalité, il y avait désaccord profond, sur la conduite à tenir, entre les membres de la congrégation de la Vulgate. Ceux qui voulaient proscrire publiquement la Bible de Sixte-Quint, ne songeaient évidemment pas à mettre sous son nom la nouvelle édition ; leur proscription allait à la Bible sixtine, telle que le pape l'avait laissée en mourant, avec les changements regrettables qu'il avait introduits. Que pensaient les autres ? Faute de documents, nous n'en savons à peu près rien, directement du moins ; mais il n'est pas difficile de comprendre que, même en connaissant l'intention
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du pape défunt, ils aient pu ne pas se croire tenus de mettre la nouvelle Bible sous son nom, et cela pour différentes causes : ils pouvaient, par exemple, préférer la mettre sous le nom du pontife régnant, ou ne la mettre sous aucun nom, car c'est là une hypothèse envisagée par Bellarmin dans son jugement de 1591. Ils pouvaient encore être plus impressionnés par les défauts de la Bible sixtine que par ses qualités, et, pour cela, ne pas vouloir y rattacher la nouvelle édition.
Ce que nous savons sûrement, c'est que Bellarmin émit son conseil en présence de Grégoire XIV et des membres de la congrégation, cardinaux et consulteurs, et que la solution fut agréée par eux et maintenue par Clément VIII. Dès lors, nier le projet de réimpression attribué à Sixte-Quint, c'est supposer qu'un homme, loué par ses contemporains pour son intégrité et sa franchise[150], a proposé sciemment un système de mystification, basé sur un pur mensonge, et qu'il l'a fait accepter par deux papes, loués également pour leur intégrité, par les cardinaux et les consulteurs de la congrégation grégorienne et clémentine de la Vulgate, dont les membres étaient animés de dispositions très diverses à l'égard de Sixte-Quint.
Parmi les consulteurs se trouvaient François Tolet et Ange Rocca, qui avaient été les principaux collaborateurs de ce pape dans son travail de révision personnelle de la Vulgate. Tolet eut, en outre, quelque part dans la rédaction définitive de la préface de la Bible clémentine, comme on l'a vu plus haut, c. iv, § 4, p. 89. Ange Rocca fut secrétaire de la congrégation grégoriano-clémentine. Dans son Index theologicus et scripturalis[151], il a repris presque verbalement le passage de
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la préface relatif à Sixte-Quint : «Opus jam confectum typis mandari jussit, sed praeli vitio illud ipsum iterata diligentia dignum censuit, et sub incudem revocandum decrevit». Il est encore l'auteur d'un billet autographe qui se conserve à Rome, dans la Bibliolheca Angelica, collé sur le frontispice de la Bible sixtine qui contient les corrections décrétées par Clément VIII et qui servit de type aux imprimeurs de l'édition clémentine[152].
«Particula praefationi sacrorum Bibliorum inserenda pro dignitate sedis apostolicae servanda. Sixtus V fel. rec. sacri oecumenici Concilii tridentini decretum de Bibliis quam emendatissime edendis executioni mandare volens, Congregationem ad id a Pio IV et V Pontt. Maxx. ex Concilii praescripto coeptam, variisque casibus intermissam renovavit : cumque Congregatio opus exegisset, biblicos ipse libros quasi privatim excudendos curavit, ut ex universo orbe christiano, quid docti hommes hac de re sentirent, scrutari posset. Interim dum errores ex typographia ortos, et mutationes omnes, atque varias hominum opiniones recognoscere coepit, ut postea maturius de toto negotio deliberare, atque Vulgatam editionem, prout debebat, publicare posset, morte praeventus, quod coeperat, perficere non potuit».
Quelle est la nature exacte de cette pièce ? Faut-il y voir un projet de préface, auquel la rédaction de Bellarmin fut préférée, ou bien une note de secrétaire résumant à sa façon ce qu'il avait entendu ? L'absence de données positives, en particulier de date, ne permet pas de le décider. Mais il reste que Rocca, témoin distinct ou simple écho, rend le même son que la préface de la Bible clémentine. Et il reste que nier catégoriquement dans Sixte-Quint toute idée de réimpression, c'est par le fait même accuser de collusion manifeste tous les personnages dont il vient d'être question.
Le cardinal Passionei, qui voulait absolument empêcher la béatification du cardinal jésuite[153], n'a pas reculé devant la
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conséquence[154]. Ungarelli et Vercellone se sont montrés plus équitables et plus réservés, quand ils ont écrit : «Verumtamen cum non constet apertissime de hujusmodi simulatione, absolvendus est Bellarminus tantae integritatis vir, saltem non antea damnandus quam demonstretur non potuisse revera Sixtum paulo ante obitum mutatae sententiae circa suam editionem signum aliquod praebere, significando ad minus majoris illam perfectionis correctionisque quoad typos indigere»[155].
A-t-on le droit d'invoquer, comme écartant à priori l'hypothèse d'un changement chez Sixte-Quint, l'inflexibilité de son caractère et son attitude à l'égard de sa Bible pendant les derniers mois de sa vie ? Sixte était énergique dans ses volontés, mais il n'était pas incapable de revirement, surtout quand la désapprobation s'attachait à ses actes. La légende de son inflexibilité, créée par Leti, a été battue en brèche[156]. Elle est particulièrement étonnante dans l'affaire de la Vulgate, où nous voyons ce pape changer de sentiments, tergiverser et se remettre plusieurs fois au travail. C'est d'abord la Bible du cardinal Carafa dont une cinquantaine d'exemplaires avaient été déjà tirés, nous raconte Tempesti[157] ; Sixte les fait retirer et reprend la révision en sous-œuvre. C'est ensuite sa propre Bible qu'il a fait imprimer ; il ne la publie pas encore, mais entreprend une nouvelle revue.
La correspondance d'Olivarès nous montre seulernent qu'aux mois de mai et de juin 1590, le pape était toujours
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résolu à marcher de l'avant[158] ; ce qui n'empêche pas qu'en même temps nous le voyons préoccupé de faire disparaître de sa Bible les fautes qu'il y découvre ou qu'on lui signale. A la fin de juin, il est question d'un errata[159] qu'on devait imprimer pour mettre en tête ; projet dont rien n'atteste la réalisation. Rocca insinue en outre, dans la note citée, qu'un écho des bruits fâcheux qui couraient sur sa Bible serait parvenu jusqu'aux oreilles de Sixte-Quint. Il voulait faire grand et bien, dans cette affaire comme en d'autres, et même plus particulièrement dans cette affaire qu'il avait eue tant à cœur. Dans ces conjonctures, qu'y a-t-il d'invraisemblable à ce que, se voyant défaillir sans avoir terminé sa dernière revue et atteint son idéal, il ait manifesté l'intention d'un nouveau tirage et enjoint de ne publier la Bible qu'après parfaite révision ? Et que faut-il de plus pour justifier l'expression dont Bellarmin s'est servi : «totum opus sub incudem revocandum censuit atque decrevit» ? Ce serait prendre l'expression trop rigoureusement que de demander un décret rédigé en forme et destiné à la publicité.
Quand l'auteur de la préface ajoute que Grégoire XIV réalisa l'intention de Sixte-Quint, sa pensée porte sur l'intention prise en elle-même, en tant qu'elle allait à une réimpression de la Bible sixtine ; il ne s'agit pas de l'exécution ou de la Bible sixto-clémentine, considérée dans toutes ses particularités. La révision grégorienne dépassa certainement les vues personnelles de Sixte-Quint. Mais l'intention manifestée par ce pape a pu devenir le point de départ ou l'occasion d'une révision plus large[160], portant à la fois sur les fautes qu'iI avait reconnues et celles dont il n'eut pas conscience.
Non seulement on dépasse, mais on fausse la pensée de
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Bellarmin, quand on suppose qu'il voulut faire passer sous le nom de Sixte-Quint la Bible clémentine prise en bloc, avec toutes ses corrections. Le jugement de 1591 nous permet encore de restituer ici la vraie pensée du vénérable serviteur de Dieu. A la fin du second point, relatif à cette question : Au nom de qui faut-il publier la Bible qui vient d'être révisée sur l'ordre de Sa Sainteté Grégoire XIV, il conclut en ces termes : «Rien de mieux à faire que de la publier au nom de Sixte V et de Grégoire XIV, nomine quidem Sixti et Gregorii XIV». Il est vrai que ce dernier pape étant mort prématurément, la nouvelle Bible parut d'abord sous le seul nom de Sixte-Quint (ce dont Bellarmin n'est pas responsable), mais un lecteur attentif et non prévenu remarquera facilement que mention est faite, dans la préface, de la révision grégorienne : «amplissimis aliquot Cardinalibus, aliisque doctissimis viris, ad hoc iterum deputatis». Ce qui est suffisamment dire que la Bible définitive n'est pas, telle quelle, l'œuvre exclusive de Sixte-Quint.
Si l'on demande enfin quel motif poussa le vénérable serviteur de Dieu à conseiller de ne point proscrire la Bible de ce pape, mais de la corriger et de la publier, en partie du moins, sous son nom, la réponse est facile. Bellarmin savait fort bien que, dans sa révision personnelle, Sixte-Quint s'était inspiré d'autres principes que le cardinal Carafa et sa congrégation ; il trouvait que ce pape avait introduit dans le texte sacré des changements regrettables ; malgré cela, la Bible sixtine n'en restait pas moins en substance celle-là même qui sous l'impulsion de Sixte, d'abord comme cardinal Montalto, puis comme Souverain Pontife, avait été longuement revue et perfectionnée au prix d'immenses labeurs. La plupart des corrections proposées par le cardinal Carafa et ses consulteurs étaient excellentes et furent jugées telles par le pape, qui les utilisa[161]. Deux alternatives se présentaient :
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proscrire l'édition sixtine, ou bien la débarrasser de ses erreurs accidentelles et publier le résultat sous le nom de Sixte-Quint (et de son successeur). De ces deux alternatives Bellarmin jugea la seconde plus équitable et plus charitable; c'est ce qu'il a voulu dire quand, par allusion à la mise à l'index de ses Controverses[162], il a écrit dans son autobiographie : «Et sic N. reddidit Sixto Pontifici bona pro malis».
Que la préface de la Bible sixto-clémentine ait été «mûrement méditée», suivant l'expression du duc de Sessa[163], c'est chose visible pour tout lecteur. Qu'il y ait eu, en cette affaire, recours à un «expédient», c'est-à-dire à un moyen de se tirer d'embarras dans une conjoncture délicate, c'est incontestable, et Bellarmin le dit assez dans son jugement de 1591. Qu'il y ait eu exagération du danger que la Bible sixtine faisait courir à l'Eglise, c'est possible, quoiqu'en réalité il nous soit difficile de bien juger du cas à distance et en dehors des circonstances où il s'est produit. Mais peut-on dire vraiment qu'il y ait eu mensonge et mystification, comme si Bellarmin et tant d'autres avec lui avaient créé de toute pièce une légende, pour implanter ou accréditer une erreur ?
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DOCUMENT IV
PRINCIPAUX CHANGEMENTS FAITS DANS LA BIBLE PAR SIXTE-QUINT.
Loca praecipua in bibliis Sixti V mutata. (Voir c. ii, § 3, p. 44.)
Gen. 5, v. 22. omissa sunt illa verba : Et ambulavit Henoch cum Deo. Gen. 17, v. 22. ascendit Deus ab Abraham, mutavit in, ad Abraham. Gen. 45, v. 20. nec dimiltatis quicquam, mutavit in, nec demittatis quicquam. Levit. 20, v. 9. Patrique rnatrique qui maledixerit, omissa sunt. Num.30, v. 11, 12, 13, 14. omittuntur illa omnia, Uxor in domo viri, etc. usque ad illud, si noverit. Num. 35, v. 19. omittitur vox, interficiet. Deuteron. 16, v. 22. atque constitues statuam, mutatum est sic : statuam, neque constitues. Deuteron. 32, v. 49. transituum, mutatum est in, transitum. Judicum 17, v. 3. Reddidit ergo eos matri suæ, quæ dixerat ei.Omittitur totum. I Reg. 4, v. 21. Translata est gloria de Israel, omittitur. I Reg. 28, v. 21 in manu mea, mutatur in illud, in manu tua. III Reg. 12, v. 10. sic loqueris ad eos, omissum est. IV Reg. 6, v. 15. additum est, portam. IV Reg. 9, v. 26. si non pro sanguine Naboth, et pro sanguine filiorum ejus,quem vidi heri, ait dominus, reddarn, sic mutatum est : si non pro sanguine Naboth, quem vidi heri, ail dominus, sanguinem filiorum ejus reddam. IV Reg. v. 17. pepigit ergo Joiada foedus inter dominum et regem, omittitur, et regem. IV Reg. 16, v. 12. de Damasco, omittitur. II Paralipo. 4, v. 16. pater ejus, omittitur. Oratio Manasse omissa est Esdrae 3us et 4us omissi sunt. Esther 15, v. 1. omittitur illud : Haud dubium quin Ester Mardochaeus. Job 30, v. 24. si corruerint, mutatum est, si corruerim. Job 31, v. ult° finita sunt verba Job, ablata sunt. Job 37, v. 9. ab interioribus egredietur tempestas, additum est, Austri. Job 38, v. ult° vagantes, mutatum est, vagientes. Tituli psalmorum fere omnes aut omissi, aut mutati[164]. Psalm. 50, v. 16. exultabit lingua mea, mutatum est, exaltabit lingua mea. Psalm. 71, [v. 20], Defecerunt laudes, etc., omittitur. Psalm. 83, v. 4. omittitur, sibi. Prov. 6, v. 30. furatur enim, omittitur. Prov. 21, v. 21. inveniet vitam, justitiam, et gloriam, omittitur, justitiam. Prov. 24, v. 23. Haec quoque sapientibus, additum est, dico. Prov. 24, v. 24. omittitur integer versus. Ecclesiastae 8, v. 14. quae sit, omittitur. Eccles. 10, v. 1. et ad tempus, additur, et. Isaiae 26, v. 18. salutes non fecimus in terra, mutatum est sic, salutis justitiam non fecimus in terra. Hierem. 15, v. 15. additur, furoris, post, patientiam. Hierern. 49, v. 14. legatus ad gentes missus est, mutatum est, Legatus ad gentes missus sum. Baruch. 6, v. 7. lingua, mutatum est, ligna. Ezechielis 3, v. 6. populos multos, omittitur, multos. 2 Mach. 12, v. 2. super hos, mutatum est, superbus. Jo. 10, v. 14. additur, oves. 2 Corinth. 12, v. 2. sive in corpore nescio, omittitur, nescio. Gal. 4, v. 11 timeo vos, omittitur, vos. Gal. 4, v. 30. non enim, omittitur, enim. Philem. v, 20. ita frater, mutatum est, ita facies. Heb. 3, v. 2. qui fecit, mutatum est, qui perficit. |
habentur in H. C. G. L.[165] contra omnes codices. sine praesidio ullius codicis. habentur in H. C. G. L. habentur in H. C. G. L. habetur in H. C. G. L. contra omnes codices. contra codices et grammaticam. habentur in H. C. G. L. habentur in H. C. G. L. contra codices H. C. et L. habentur in H. C. G. L. non habetur in H. G. C. contra codices omnes, H. C. G. L. qui legunt priore modo. habetur, et regem, in H. C. G. L. habetur in H. C. et L. habetur, pater ejus, in H. C. et L. non habetur in H. C. G., sed in latinis. habetur 3us in graeco, 4us solum in latinis. habetur in latinis omnibus. sine praesidio codicum. habentur in H. C. G. L. contra fidem codicum H. C. G. L. contra fidem codicum H. C. G. L. contra fidem omnium codicum H. C. G. L. exultabit est in H. C. G. L. contra omnes codices. Habetur in H. C. G. L. habetur tamen in omnibus codicibus H. C. G. L. habetur in hebr. et Latinis omnibus. Non habetur in graeco. sine praesidio codicum. contra codices H. C. G. L. habetur tamen in H. C. G. L. contra codices H. C. G. L. sed lectio prior consentit codici hebraeo et Hieronymo. non habetur in H. C. G. L. sed prior lectio concordatcum H. C. G. et latinis codicibus. sed prior lectio est in graeco, et in omnibus latinis. contra H.C.G.L. sed prior lectio est in graeco et latinis, forte omnibus. contra G. et Lat. habetur in graec. et latinis, ut puto, omnibus habetur in G. et latinis omnibus. habetur in G. et latinis. ita frater est in G. et lat. qui fecit, est in G. et lat. |
Jacobi 5, v. 13. sic mutatur : infirmatur quis in vobis : oret aequo animo, et psallat.
Ecclesiastici 3, v. 34. additur, ejus.
Ecclesiastici 20, v. 6. omittitur, ante.
Ecclesiastici 21, v. 31. additur cum ea.
Eccles. 23, v. 3. additur, super me, post, gaudeat.
Eccles. 27, v. 23. additur, dura, post, maledicti.
Eccles. 29, v. 10. omittitur, non, post, nequitiae.
Eccles. 40, v. 14. additur, pius, ante, laetabitur.
Eccles. 48, v. 13. mutatur, rectus, in, vectus.
Puis, une série de textes sur laquelle un trait de plume a été tiré.
Matth. 21, v. 37. additur, forte, post, verebuntur.
Marci 2, v. 23. additur, Dominus, ante, sabbathis.
Ibid. v. 26. additur, solis, ante, sacerdotibus.
Marci 3, v. 9. additur, Jesus, post, et dixit.
Marci 7, v. 4. additur, venientes, post, a sero.
Lucae 5, v. 13. additur, Jesus, ante, dices.
Jo. 4, v. 4. additur, mediam, ante, Samariam.
Act. 5, v. 8. mutatur, respondit, in, dixit.
Act. 11, v. 5[166]. additur, meae, post, mentis.
Ibid. v. 24. additur, Barnabas, post, profectus est ante.
Act. 25, v. 16. additur, quae ei objiciuntur, post, crimina.
Ezech. 5, v. 7. judicia gentium, jutlitiam mutatum.
Ezech. 16, v. 13. multicoloribus, sublatum.
Dan. 3, v. 64 et 65. omittitur, omnis.
Dan. 4, v. 10. additur, ungues.
Osee 13, v. 9. perditio tua, mutatum, perditio tu.
Nahum 2, v. 2. quia reddidit, additur, quia sicut reddidit.
I Cor. 1, v. 16. caeterum nescio, mutatum est, caeterurn autem nescio. Contra G. L.
I Cor 2, v. 9. ascendit, mutatum est, ascenderunt. Contra G. et L.
2 Cor. 9, v. 15 gratias Deo, additum est, gratias ago Deo. Contra G. L.
I Petri 3, v. 3. aut indumenti vestimentorum, mutatum est, aut indumenti vestimentorumve. Contra G. et L.
I Jo. 2, v. 27. et nos unctionern, omittitur, et nos. Contra fidem codicum G. et L.
Plurima sunt alia mutata in testamento veteri et novo, quae tamen non impediunt sensum.
Fonds Bellarmin. Ms. Scritture diverse. Cahier autographe, de 6 pages et trois lignes, en très petit format.
p. 182-186
DOCUMENT XXIII
TABLEAU DU P. DANZETTA SUR LES VARIANTES DES BIBLES SIXTINE ET CLEMENTINE.
(Voir c. IV. § 2, p. 78).
Variantes Lectiones
IN VULGATA NOSTRA Anni 1592. |
IN SIXTINA Anni 1590. |
GENESIS 1. I, 27. Creavit Deus hominem ad imaginem suam. 2. IV, 7. In foribus peccatum aderit. 3. IV, 15. Posuitque Dominus Cain signum. 4. V, 3. Et genuit ad imaginem. 5. V, 22. Genuit Mathusalam, et ambulavit Henoch cum Deo ; et vixit. 6. VII, 13. Uxor illius, et tres uxores. 7. VII, 21. Consumptaque est omnis caro quae movebatur super terram, volucrum, animantium, bestiarum omniumque reptilium quae reptant super terram. 8. X, 18. Aradium, Samaraeum et Amathaeum, et post haec disseminati sunt populi Cananaeorum. 9. XIII, 14. Leva oculos tuos et vide. 10. XIV, 15. Persecutus est eos usque Hoba, quae est ad laevam Damasci. 11. XVI, 1. Igitur Sarai uxor Abram non genuerat liberos. 12. XVIII, 4. Lavate pedes vestros. XVIII, 5. Confortate cor vestrum. 13. XVIII, 28. Delebis propter quinquaginta quinque universam urbem ? 14. XX, 7. Quia propheta est et orabit pro te, et vives. 15. XXIII, 15. Quadringentis siclis argenti valet. 16. XXIV, 24. Filia sum Bathuelis filii Malchae, quae peperit ipsi Nachor. 17. XXXIV, 15. Et circumdetur in vobis omne masculini sexus. 18. XXXVIII, 12. Mortua est filia Sue uxor Judae. 19. L, 17. Ut servis Dei Domini tui dimittas iniquitatem hanc[167]. EXODI 20. 11, 25. Et cognovit eos. 21. XII, 35. Sicut praeceperat Moyses. 22. XII, 37. Absque parvulis. 23. XIII, 16. Inter oculos tuos. 24. XVIII, 21. Provide autem de omni plebe viros potentes et tirnentes Deum. 25. XXl, 15, Qui percusserit patrem suum aut matrem, morte moriatur. Qui furatus fuerit hominem et vendiderit eum , convictus noxae morte moriatur. Qui maledixerit patri suo vel matri morte moriatur. 26. XXIV, 45. Victimas pacificas Domino vitulos. 27. XXVIII, 14. Duas catenulas ex auro purissimo. 28. XXXII, 28. Quasi viginti tria millia. LEVITICI 29. VI, 16. In loco sancto atrii tabernaculi. 30. lX, 3. Vitulum atque agnum anniculos. 32. XIX, 20. quae sit ancilla etiam nubilis[168]. 33. XX, 9. Qui maledixerit patri suo aut matri, morte moriatur ; patri matrique maledixit, sanguis ejus sit super eum. 34. XXVII, 27. Vendetur alteri quantocunque a te fuerit aestimatum. NUMERI 35. II, 2. Castremetabantur filii Israel. JUDICUM 36. III, 24. In aestivo cubiculo. XV, 14. Sicut solent ad odorem ignis lina consumi[169]. 1° REGUM 37. III, 2. Oculi ejus caligaverant, nec poterat videre. 3. Lucerna Dei antequam extingueretur, Samuel dormiebat. EX PSALMIS 38. Ps. XI, 2. Ad Deum fortem, vivum[170]. I° REGUM 35. XXV. Sit fratribus meis et tibi pax, et domui tuae pax et omnibus quaecumque habes sit pax. JOSUE 40 XI19. Nec fuit civitas quae se traderet filiis Israel, praeter Hevaeum qui habitabat in Gabaon, omnes enim bellando cepit. |
GENESIS v. 15. Creavit Deus hominem ad imaginem et similitudinem suam. 6. In foribus peccatum tuum aderit. 15. Posuitque Dominus in Cain signum. 3. et genuit filium ad imaginem, 22. Genuit Mathusalam, et vixit Henoch. 11. uxor illius, et uxores. 17. Consumptaque est omnis caro quae movebatur super terram, volucrum, bestiarum omniumque reptilium quae reptant super terram, animantiumque omnium. 14. Aradium, Samaraeum et Amathaeum, et per hos disseminati sunt populi Chananaeorum. 14. Leva oculos tuos in directum, et vide. 16. Persecutus est eos usque Hoba et Phoenicem quae est ad laevam Damasci. I. Igitur Sarai uxor Abram non genuerat sibi liberos. 3. Laventur pedes vestri. 4. Confortetur cor vestrum. 27. Delebis, quia quadraginta quinque, universam urbem ? 8. Et orabit pro te quia propheta est, et vives. 11. Quadringentos siclos argenti valet. 19. Filia sum Bathuelis, filii Nachor, quae peperit ei Melcha. 11. Et circumcidatur in vobis omnis masculini sexus. 12. Mortua est Sue uxor Judae[171]. 13. Ut servo Dei patri tuo dimittas iniquitatem hanc. EXODI 22. et liberavit eos. 33. sicut praeceperat Dominus Moysi. 35. absque parvulis et mulieribus. 15. ante oculos tuos. 16. Provide autem de omni plebe viros sapientes et timentes Deum. 16. Qui percusserit patrem suum aut matrem, morte moriatur, Qui maledixerit patri suo vel matri, morte moriatur. Qui furatus fuerit hominem et vendiderit eum , convictus noxae, morte moriatur. 5. victimas pacificas Domino vitulos duodecim. 13. duas catenulas auri purissimi. 22. quasi triginta tria millia. LEVITICI 7. In loco sanctuarii tabernaculi. 2 vitulum atque agnum anniculum. 19. Quae sit ancilla etian nobilis. 7. Qui maledixerit patri suo aut matri, morte morietur, sanguis ejus sit super eum. 17. Vendetur alteri quantuncumque fuerit ante aestimatum. NUMERI 1. Castremetabantur filiorun Israel. JUDICUM 20. In aestivo caenaculo. 15. Sicut solent ad odorem ignis ligna consumi. 1° REGUM 2. Oculi ejus caligaverant, nec poterat videre lucernam Dei antequam extingueretur[172]. EX PSALMIS 2. ad Deum fontem vivum. I° REGUM 5. et omnibus quaecumque habes sit pax. Ex multis annis salvos faciens tuos, et omnia tua. JOSUE 16. Non fuit civitas quae se non traderet filiis Israel praeter Hevaeum qui habitat in Gabaon, omnes enim bellando cepit[173]. |
Rome. Bibliot. Vatic. Lat. 8314 : Danzetta pro Bellno.
p. 203-208
TABLE DES MATIÈRES ET DES NOMS PROPRES
ÆTERNUS ILLE, bulle. Voir SIXTE-QUINT.
AGELLIUS (Ajelli), Antoine, théatin, évêque d'Acerno, 12, 43, 136.
ALBER, Ferdinand, S. J., 56, 153 ; bulle Æternus ille non promulguée, 64, 81 s., 187 s.
ALCALA, université, 129.
ALEXANDRIE, version des Septante, 105.
ALLEN, Guill., card., revision des Septante, 22, 34 ; Vulgate, 38, 43, 135 ; Index, 197.
AMAMA, Sixtinus, xii, 58 s., 76 s.
AMBROSIANA, bibliothèque. Voir MILAN.
ANDRÉA, Jean, 190.
ANTONIANO, Silvio, card., 43.
ANVERS, Bibles, xii, 4, 28, 31, 176 ; Musée Plantin, xi, 169 ; Bible sixtine, 55 s., 152.
APOCRYPHES, livres, 131, 148.
AQUAVIVA, Claude, S. J., général : Ratio, 24 ; Bible sixtine, 54 ss., 150 ss. ; infaillibilité pontificale, 56 s., 153 s. ; bulle Æternus ille, 82, 187.
AQUAVIVA, Marcel, archev. d'Otrante, nonce à Venise : Bible sixtine, 55 s., 150.
ASSEMANI, Joseph-Simon, 45.
AUGUSTIN, saint, 3, 48, 113 s., 141.
AUGUSTINS, et Bible sixtine, 36.
AZOR, Jean, S. J., bulle Æternus ille, 82 s., 87, 188.
AZOLLINI, Decio, card., xii, xv, 78 ss., 89.
BACKER, Augustin de, S. J., 21.
BADOER, Albert, ambassadeur de Venise auprès de Sixte-Quint, 35 s.
BARBARIGO, Grégoire, B., xv, 75.
BARONIUS, César, card., 164.
BATIFFOL, Mgr Pierre, XII, 9, 106.
BAUMGARTEN, Mgr, bulle Æternus illa, XII, 80, 85 s.
BELLARMIN, Robert, card., S. J., xi, xii, xiv, xv.
I. Professeur. A Louvain, question de Scriptura sacra, i s. : Bible annotée, 2 s. ; lettre au cardinal Sirlet, 5 ss., 103 s. Au Collège Romain : doctrine sur la Vulgate, 10 ss. ; Chronologia, 12 : Ratio,24 ss. ; mission en France, 35, 37, 79 ; Controverses à l'Index, 76, 101.
II. Revision grégoriano-sixtine : édition des Septante, 12 ; dissert. sur la Vulgate, 13 ss., 107 ss.
III. Bible de Sixte-Quint : critique, 37 ss., 44 s. ; 130 s., 137 ; correction, 37 s., 46, 100, 138 ; suppression des exemplaires primitifs, 54 ss., 150 ; infaillibilité pontificale, 57, 61 s., 153, 159 ; bulle Æternus ille, non promulguée. 64, 75, 77, 82, 187 ; Sixte-Quint et la réimpression, 46, 75, 138, 147.
IV. Revision grégoriano-clémentine : manière de procéder, 39, 40, 126s. ; commission de Zagarolo, 38, 43, 135 ; publication de la Bible et genre d'approbation, 39, 45 s., 49 s., 137 S. 142 ss. ; variantes et notes, 48, 50, 140.
V. Bible sixto-clémentine : préface, 53, 66 s., 76, 146 s., 166 ; texte imparfait, 68 s., 169, 174 ; autorité pratique, 71 s., 73, 178 s., 80, 186 ; revision projetée du N.-T. grec, 70 s., 176 s.
VI. Attaques : préface et autobiographie, 75, 88 s., erreurs attribuées à Sixte-Quint, 77 ss. ; bulle non promulguée, 77, 79 ss., 84, 187 projet de réimpression, 77, 88 ss.
BENOIT XIV, 23, 74 s., 77, 88.
BERTHIER, Guillaume-François, S. J., 17 ss.
BEZE, Théodore de, 5, 103 s.
BIBLE ordinaire, 51, 90, 744 ; royale, 70, 176 s. Voir ANVERS, BELLARMIN, LOUVAIN, NUREMBERG, PARIS, PLANTIN, SIXTE-QUINT, VULGATE.
BLASAEUS, Jacques, évêque de Saint-Omer, 70, 174.
BORGHÈSE, Camille, 83. Voir PAUL V.
BORROMÉE,Frédéric, card. ; bibliothèque Ambrosienne, 21, 27 ; Bible sixtine, 53.
BOTTINI, Prosper, promoteur de la foi, 63, 76.
BRENZ (Brentius), Jean, 110.
BRÉVIAIRE, réforme : Sixte-Quint, 190, 195, 199 ; Clément VIII, 68 s., 168 s., 199.
BRUXELLES, bibliothèque et archives, 21, 173.
BUCER, Martin, 110.
BUXENTOP, Henri de, xii, 29 ss.
BULLAIRE, et bulle Æternus ille, 79, 82.
BULLINGER, Henri, 110.
BZOVIUS, Abraham, O, P., 83.
CAJETAN, Thomas, card., O. P., 110.
CALOGERA, Ange, xii, 42.
CALVIN, Jean, ii, 110.
CANO, Melchior, O. P., sur Vulgate, 14, 110.
CAPOUE, archevêché de Bellarmin, 96, 168 s., 172, 175,
CARAFA, Antoine, card. : décret Insuper, 9 ; revision de la Vulgate, 12, 28, 40, 100, 119 ss., 128 ; sa Bible, 28 ss., 48, 94, 98, 140 ; mécontentement de Sixte-Quint, 35, 80 s., 189.
CASANATE, Jérôme, card., xv, 75.
CAVALCHINI, Charles-Albert, card., 23.
CEPARI, Virgile, S. J., 44.
CERVIN, Marcel, card. de Sainte-Croix (Marcel II), 7 s., 108, 116.
CHALDÉEN, texte biblique : divergences avec Vulgate, 118 ss., 126 ss., et avec Bible sixtine, 130 ss.
CHANCELLERIE apostolique, et bulle Æternus ille, 79 s., 82, 187.
CHEMNITZ, Martin, 110.
CHRYSOSTOME, saint Jean, 124, 176.
CLÉMENT VIII, et Bellarmin, 78, 93, 169 ; revision de la Bible sixtine, 28, 34, 38, 49, 75, 89 s., 119 ss., 767, 165 ; Bible clémentine, 146 s., 149, préface, 64 ss., 166 ; retrait des Bibles sixtines, 54 ss., 150 s., index et bréviaire, 69, 168 s., 199 ; attaques des protestants, 76 s., 155 s.
CLÉMENT XI, 21, 40, 83.
COLLÈGE ROMAIN (ancien), bibliothèque, et archives, 22, 27, 33, 39, 44, 107 ss.
COLOGNE, archives, XI, I.
COLONNA, Ascagne, card., 197.
COLONNA, Marc-Antoine, card., président à Zagarolo, 38, 43, 135 s. ; préfet de l'Index, 197.
COMINELLO, Jean-Baptiste, 72, 180.
CONTROVERSES de Bellarmin, XII ; Vulgate, 10 ; infaillibilité, 60, 63, 158 ; multiplicité du sens litéral, 142 s. ; mises à l'Index, 76, 101.
CORNELY, Rodolphe, S. J., xii, 57, 86 s., 88.
COUDERC, Jean-Baptiste, S. J., xii, 2, 43, 56, 84, 96, loi, 146, 194.
CROM, Adrien, S. J., 2.
CUGNONI, C., XII, 29.
CYPRIEN, saint, 763.
DAMASE, saint, 113, 148.
DANZETTA, Fabius, S. J., variantes des Bibles sixtine et clémentine, 77 s., 182-186.
DECHERS, Jean, S. J., 44.
DELRIO, Martin, S. J., 67, 167.
DE SCHREVEL, A.-C., xii, 4, 67, 69, 169.
DOELLINGER, Joh.-Jos.-Ign., xii ; lettre de Gretser, 58, 155 ; Bellarmin exégète, 73 ; attaques, 76, 81 ; bulle Æternus ille.
DOMINICAINS, 192.
DORIA, prince, 56, 199.
DOUAI, université, 69.
DRIEDO, Jean, sur Vulgate, id, 107, 111.
DROUYN, Nicolas, 81.
DURAS, George, S. J., recteur à Anvers : rachat de Bibles sixtines, 58 s., 152.
ECCLÉSIASTIQUE, prologue, 64 s.
ÉCRITURE SAINTE : divinité, véracité, inspiration, 1 s., 10 ; souveraine autorité, 46, 50, 137, 143, 192.
ÉPIPHANE, saint, sur version des Septante, 105.
ERASME, Didier, 5, 7, 103.
ESCURIAL, bibliothèque, 194.
ESDRAS, troisième et quatrième livres, 131, 148,
ESS, L. van, XIII, 29.
ESTHER, livre sacré, 6, 10, 105 s.
EUDÉMON-JOANNÉS, André, S. J., 70 s., 82, 188.
FABRONI, Charles-Auguste, card., fondateur de la biblioth. Fabroniana. Voir PISTOIE.
FEDER, George, S. J. : Bellarmin et l'infaillibilité pontificale, 58 s., 63, 153 s.
FERRACUTI, Maschius, év. de Vieste, 193.
FLORE, champ de, à Rome, 81.
FOREIRO, François, sur Vulgate, 15, 110 S.
FRANCFORT, foire de, 55 s., 150 ; concile, 60, 158.
FRÉVIER, Charles-Joseph, S. J., xii ; sur Vulgate, 17 s.
FULIGATTI, Jacques, S. J., 18, 173.
GAÉTAN', Henri, card., légat en France, 35.
GÉNÉBRARD, Gilbert, sur Vulgate, 15, 26, 112 ; chronologie, 171.
GERMANIE, nonce : rachat des Bibles sixtines, 150.
GESUALD, Alphonse, card., 199.
GHISLERI, Michel, théatin, 12 ; sur Vulgate, 43 ; bulle Æternus ille, 81, 83 ; préface de la Bible clémentine, 89.
GIOVANNINI, Mgr Attilio, abbé de Saint-Laurent, à Florence, xii, 38 ss., 49, 53, 145.
GONZAGUE, saint Louis de, S. J., 44.
GRACE, lettre de Bellarmin à Clément VIII, 78 s., 92 s.
GRATIEN, canoniste, 115 s.
GRAVIUS, Henri, de Louvain, 129.
GREC, texte biblique : divergences avec Vulgate, 117, 119 s., 125 ss., avec Bible sixtine, 130 ss., édition Regia du N.-T., 70 s., 176 s.
GRÉGOIRE, saint, 169.
GRÉGOIRE XIII, 1, 4, 112 ; revision de la Vulgate, 12, 28, 34.
GRÉGOIRE XIV, revision de la Bible sixtine, 29, 33 s., 37 s., 39 s., 43, 45 s., 75, 79, 89 ss., 96, 99 s., 101, 136 ss., 147.
GRETSER, Jacques, S. J., XII ; bulle Æternus ille, 54, 58 ss., 79, 85, 155-158 ; préface de la Bible clémentine, 64 ss., 166 s.
GUERRA, Pompée, 81.
HALLER, Richard, S. J., recteur à Ingolstadt, 57, 153.
HARLEMIUS (Willems), Jean, S. J., xii, 4, 32, 68.
HÉBREU, texte biblique : état actuel, 6, 11, 105 s ; autorité, 114 ; divergences avec Vulgate, 118 ss., 126 s., avec Bible sixtine, 130 ss.
HENTEN, Jean, O. P., sa Bible, 3.
HILAIRE, saint, de Poitiers, 113,
HOLVOET, Jean-Baptiste, S. J., bibliothécaire à Malines, 14, 19 s.
HÖPFL, Hildebrand, O. S. B., xiii, 7.
HUBNER, Baron de, xiii, 35 s.
HUGUES DE SAINT-VICTOR, 51.
HURTER, H., S. J., xiii, 7.
IDIAQUEZ, François, 192.
INDEX : Pie IV, 8, 4g, 142 ; Paul IV, 48, 140, 143 ; Sixte-Quint, 76, 101, 190 s., 195 s. ; congrégation, 196 ss. ; Clément VIII, 199.
INFAILLIBILITÉ pontificale, à propos de la bulle Æternus Ille : protestants, 58, 77, 155 ; Gretser, 56, 58 ss. ; censeur anonyme, 61 s., 159 ss. ; Tanner, 63 s., 187 ; à Rome, 56, 82, 188 ; Bellarmin, 57, 60 s., 64, 78, 153, 159, 187.
INGOLSTADT, université ; controv. sur la bulle Æternus ille, 56 s., 63, 153 ; sur la préface de la Bible clémentine, 58, 60, 64 ss., 166 s.
INNOCENT IX, 38, 90, 147.
INSUPER, décret sur la Vulgate : opposition à Rome, 7 s. ; autorité, 65 ; portée non exclusive, 142 s., 146. Voir VULGATE.
JAMES, Thomas, xiii, 29, 58 s., 155 ss.
JÉRÔME, saint : revision de la Bible, 19, 51, 110, 113, 117 S., 144, 148, 176 ; sur variantes, 48, 113 s., 125, 132, 139 ss.
KAULEN, Fr., xiii, 99.
KILBER, Henri, S. J., 8.
LAGRANGE, M. J., O. P., XIII, 42.
LAMENTATIONS, préambule, 64 ss., 166 s.
LANDO, Laelius, év. de Nardo, 12, 136.
LA PIERRE, Corneille de, 2, 183 ss.
LATRAN, basilique, 79, 80, 157.
LAZZARI, Pierre, S. J., 22, 33, 45.
LE FÈVRE, Jacques, d'Étaples, 5, 1o3.
LÉON, saint, 164.
LESSIUS, Léonard, S. J., 34.
LETHMATHIUS (Gaudanus), Hermann, O. S. B., 7
LETI, Grégoire, 98.
LINDANUS, Guill., sur Vulgate, 14, 109.
LITURGIE, réponses de Bellarmin, 178.
LOAYSA, Garcia de, 193.
LONDRES, British Museum, Bible sixtine, 29.
LOUVAIN. Jésuites, ancienne bibliothèque, 2, 4. - Université : bibliothèque, xi, 2 ; Bibles, xii, 3, 32, 38, 47, 50, 68, 90, 122, 139 s., 143, 168 ; Bible sixtine, 193.
LUCAS, François, de Bruges, xii, xiv, 4, 67 ; à Louvain, 4, 67, 170 S. ; doyen de Saint-Orner, 67, etc. ; écrits, 31 s., 68, 70, 168 ss. ; correspond. avec Bellarmin, 34, 49, 52, 68 ss., 146, 168 s.
LUTHER, Martin, 110.
LYON, bibles, 139, 146.
MADRID, nonce et Bible sixtine, 56, 193, 199.
MAILLANE, M. de, 55.
MALINES, musée Bellarmin, 13 s., 19 s., 21, 34.
MANASSES, prière de, 131, 148.
MARDOCHÉE, sa prière, 106, 123.
MARIANA, Jean, S. J., 184 ss.
MAYENCE, université, 64, 166.
MICHEL, L., S. J., 44.
MILAN, bibliothèque Ambrosienne, xi, 21, 26 ss., 33 s., 38, 72, 129, 149, 179.
MIRANDA, Barthél., O. P., maître du Sacré Palais, 38, 43, 136, 196.
MONTALTO, card. Voir SIXTE-QUINT.
MORIN, Pierre, 12, 43, 136.
MUNICH, archives, xi, 156, 167.
MUNSTER, Sébastien, 110.
MUSÉE BELLARMIN. Voir MALINES.
NICÉE, second concile, 60, 158.
NICOLAS, card. sous Lucius II, 116.
NORES, Badino di, 179.
NOTES dans la Bible, 48, 71 s., 140, 148 s., 177 s.
NUREMBERG, Bible annotée par Bellarmin, xi, 2, 20.
OECOLAMPADE, Jean, 111.
OECUMENIUS, 125.
OLÉASTER, Jérôme, sur Vulgate, 15, 111, 142.
OLGIATI, biblioth. de l'Ambrosienne, 21, 27.
OLIVARÈs, ambassadeur de Philippe II auprès de Sixte-Quint : Bible sixtine, 36s., 79, 85, 189 s., 193 ; bulle Æternus ille, 190 s. ; retouches après coup, 86 s., 98 s., 194 s., réunion de Zagarolo, 43, 198 ; retrait des Bibles sixtines, 84, 196 ss. ; bréviaire et index de Sixte, 190, 195 s.
ORSINI, Fulvio, chan. de Latran, 12.
PAGNIVO, Sante, O. P., 110.
PARIS, université : travaux bibliques, 47, 50, 139 s., 143, 176 ; syndic à Rome, 129.
PASSIONEI, Dominique, card., xiv, xv, 75, 97 s.
PAUL, saint, apôtre, 124.
PAUL IV, Index, 48, 140, 143.
PAUL V, 69, 71, 96 ; bulle Æternus ille, 82 s., 187.
PAYVA DEANDRADA, Diego, sur Vulgate, 15, 26, 111.
PEETERS, Barthélemy, 69.
PEGNA, François, auditeur de Rote, sur Bible sixtine, 86, 191 s. ; 196.
PÈRES, saints : Vulgate, 42, 113 s., 147, 193 ; variantes des textes sacrés, 51, 143 s. ; original, 115.
PHILIPPE II, d'Espagne, 80. Voir OLIVARÈS et SESSA.
PIE IV :Index, 8, 49, 142 ; Vulgate, 97, 147.
PIE V, saint : Vulgate, 97, 147.
PIERRE, saint, apôtre, 124, 164 ; son couteau à Venise, 72, 180 s.
PISTOIE, biblioth. Fabroniana, xi, 21, 27 ss., 34, 39 s., 107 ss., 129, 141, 165.
PLANTIN, Christophe : Bibles, xii, 4, 28, 48, 103, 140 s. ; musée Plantin, xi, 169.
PONCELET, Alfred, S. J., 174.
PRAT, Ferdinand, S. J., xiv, 36, 39, 44, 53, 94, 97 s., 131.
PRAT, J.-M., S. J., 55.
PSAUTIER, ancien, 117 S.
PTOLÉMÉE, 7.
RANCATI, Hilarion, 71, 179.
RAVESTEYN (Tiletanus), Josse, sur Vulgate, 15, 110.
RAYNAUD, Théophile, S. J., 185 s.
REGIA, édition du Nouv. Testam, grec, 70 s., 176 s.
ROCCA, Ange, augustin : Bible sixtine, 81, 86, 97, 99, 193 ss. ; révision grégoriano-clémentine, 81, 96, 136.
ROME, bibliothèques et archives : Angelica, 78 ; Archivio di Stato, xi, 24 s. ; Vatican, xi, 10, 29, 45, 77, 80, 86, 186.
SAINTE-SÉVERINE, card. de. Voir SANTORI.
SAINT-PIERRE, basilique, 79 s., 117.
SALAMANQUE, université, 129 ; couvent de Saint-Étienne, 192.
SALVANAR, André, abbé de Sainte-Praxède, 136.
SANTORI, Jules-Antoine, card. de Ste‑Séverine : Autobiographie, xiv, 20 ; Journal, 98 s., 54 ss.. 98, 150, 152.
SCHELHORN, J.-G., Bible sixtine, xiv, 29.
SCOTISTES, 192.
SEPTANTE, version des : autorité, 6 ss., 10 s., 51, 105, 144 ; divergences avec la Vulgate, 118 ss. ; édition sixtine, 12.
SERARIUS, Nicolas, S. J., xiv, 64 s., 166.
SESSA, duc de, ambassadeur de Philippe II à Rome : rachat des Bibles sixtines, 56 ; Bible clémentine, 101, 199 ; index et bréviaire de Clément VIII, 170, 199.
SILOTTI, Thomas, S. J., 22.
SIMANCAS, archives, xii, 80, 96, 190 ss.
SIRLET, Guill., card., annotations sur le N. T., xiii, 5 ; décret Insuper, 7 s. ; lettre de Bellarmin, 5 s., 123 ss.
SIRMOND, Jacques, S. J., 54.
SIXTE-QUINT. Édition des Septante et congrégation de la Vulgate, 12, 28, 33 s., 40, 80 ; révision personnelle, 98 s., 30 ss.. 35 s., 42, 98 ; Bible sixtine, 29 ss , 37, 86 s., 139, 193 ss. ; correction posthume, 42 s., 44 s., 130 ss., 137, 198 ; Bible clémentine, 46, 53, 90, 138 ss., 199 ; retrait des Bibles sixtines, 54 ss., 87, 150, 159, 196, 199. — Bulle Æternus ille, 47, 61, 80 s., 85, 190 s. ; controv. sur publication, 59, 64, 75 ss., 81 ss., 87 s., 147, 157, et sur projet de réimpression, 75 ss., 88 ss., 147 ; difficultés connexes, des protestants, 76 ss., parmi les catholiques à Rome, 56 s., 82, 153, 188, à Ingolstadt, 58 ss., 155 s., 159-166, en Espagne, 196. — Index et bréviaire, 76, 101, 190 s., 195 ss.
SIXTE DE SIENNE, O. P., livre d'Esther, 6, 105 s. ; Vulgate, 14, 109.
SOMMERVOGEL, Carlos, S. J., 2.
SOPHRONE, saint, [ ?], 164.
SORBONNE. Voir PARIS.
TAFURI, Jean-Bernardin, de Nardi, 42.
TAGHETTI, C., 81.
TALMUD, révision, 197.
TANNER, Adam, S. J., bulle Æternus ille, xiv, 64, 81 s., 187 s.
TEMPESTI, Casimir, xix, 98.
TERTULLIEN, 7.
TILETANUS. Voir RAVESTEYN.
THOMAS, saint, d'Aquin, I, 168.
THOMAS, Jacques, abbé, xiv, 9.
THOMISTES, 192.
TIRIN, Jacques, S. J., xiv, 22 s.
TOLET, François, card., S. J. : Bible sixtine, 29, 33, 36 s., 53, 86, 189 ; préface de la Bible clémentine, 89, 96.
TOLOMEI, Jean-Baptiste, card., S. J., 22.
TRENTE, concile de. Voir INSUPER (décret) et VULGATE. Canon des livres saints, 106, 148, 159. – Congrégation du concile, décret sur Vulgate, 8 s.
TRÉVOUX, Journal de, xiv, 13 ss.
TURMEL, Joseph, abbé, 76, 79, 81 s., 99.
UNGARELLI, Aloys-M., xiv, 42, 97 ; sur Bellarmin, 98.
URBAIN VII, 37, 90, 138, 147, 196 s.
VALIER, Augustin, card., 53.
VALLA, Laurent, 5, 7, 103.
VALVERDE, Barthélemy de, 12, 136.
VARIANTES des livres saints, 49 ss., 140, 143 s.
VEGA, André, sur Vulgate, 8, 14, 108, I16.
VENCE, Bible de, 14.
VENISE, 69, 174, 180 s. ; archives, xii, 180 ; rachat des Bibles sixtines, 54, 58, 150.
VERCELLONE, Charles, barnabite, xiv, 4,8 ; Variae Lectiones, 28 ss., 38, 42 s., 98, 100, 126, 135 ; sur Bellarmin, 98.
VEZZOSI, A.-F., xiv, 12, 81, 89.
VICTORIA, François de, O. P., 197 s.
VICTORINUS, Marius, 115.
VIESTE, évéque de. Voir FERRACUTI.
VITELLESCHI, Mutins, S. J., général, 68.
VULGATE. Son autorité : controverse, 4 S., 104 ; avis de Sirtet, 7 s. ; congrégation du concile, 8 s. ; Bellarmin et auteurs cités par lui, 13 ss., 107 ss. ; PP. Berthier et Frévier, 17 ss. ; Ratio, 24 s. ; attitude pratique de Bellarmin. 71 ss., 178 ss. - Revisions : hiéronymienne, 16 ; grégoriano-sixto-clémentine, 28 s., 87. - Imperfection, absolue ou relative, 11 s., 16, 29 ss., 42, 47, 52, 68, 70, 119 ss., 126 s., 139, 145, 147 s.
WIDENHOFER, François-Xavier, S. J., xv, 13, 16 s., 19 s., 27, 34, 107 ss.
WILLEMS, Jean. Voir HARLEMIUS.
WURTZBOURG, université, xv, 13.
XIMENEZ, Jacques, S. J., secrétaire, 55, 151.
ZACCARIA, François-Antoine, S. J., xv, 23, 26 s., 34, 107 ss.
ZAGAROLO, commission de, 38, 43 ss., 90 ; époque et inscription commémorative, 43 s., 135.
ZANGERUS, Melchior, sur la Vulgate, 15, 26, 110,
p. 209-210
INDEX DES CHAPITRES ET DES DOCUMENTS
AVANT-PROPOS . ix
BIBLIOGRAPHIE. xi
INTRODUCTION. — Les antécédents de Bellarmin, professeur à Louvain et à Rome 1
CHAPITRE I. — La Dissertation sur la Vulgate, v. 1586-1591.
1 Publication de l'écrit 13
2. Son contenu 14
3. Controverse sur l'authenticité 16
4. Preuves de l'authenticité 20
5. Epoque de la composition 25
6. Construction du texte 34
CHAPITRE II. — Bellarmin dans la congrégation grégoriano-clémentine, 1591-1592.
1. Documents anciens et documents nouveaux 35
2. Avis sur la manière de procéder 40
3. Critique de la Bible de Sixte-Quint 44
4. Ce qu'il faut en faire 45
5. Quelle approbation donner à la nouvelle édition 49
6. Conclusion : préface de la Bible sixto-clémentine 52
CHAPITRE III. — Après la publication de la Bible sixto-clémentine, 1592-1621.
1. Le rachat des Bibles de Sixte-Quint 54
2. Un propos attribué à Bellarmin au sujet de ces Bibles et de l'infaillibilité pontificale 56
3. La bulle Æternus ille ; difficultés du P. Gretser 58
4. Réponse de Bellarmin 60
5. La préface de la Bible sixto-clémentine ; son auteur et son autorité 64
6. Valeur de l'édition clémentine, d'après Bellarmin 67
CHAPITRE IV. — Attaques portées contre Bellarmin à l'occasion de la Bible sixto-clémentine.
1. Les trois principales attaques 74
2. Quel genre d'erreurs Bellarmin prête-t-il à Sixte-Quint ? 77
3. La bulle Æternus ille a-t-elle été promulguée ? 79
4. Sixte-Quint conçut-il le dessein de remettre sa Bible sur le métier ? 88
DOCUMENTS.
I. Bellarmin au cardinal Sirlet, sur la Vulgate 104
lI. Dissertation, De editione Latina vulgata 107
III. Avis, De ratione servanda in bibliis corrigendis 126
IV. Liste des principaux changements faits dans la Bible par Sixte-Quint 130
V. Inscription de Zagarolo, ubi Biblia Xysti correcta 135
VI. Jugement sur l'opportunité de publier la Bible révisée et sur le genre d'approbation qu'il convient de lui donner 137
VII. Avis sur l'inopportunité d'une publication avec mesure prohibitive ou restrictive à l'égard des autres éditions 146
VIII. Préface de la Bible sixto-clémentine (Fragment) 147
IX. Journal du cardinal Santori sur le rachat des Bibles sixtines 150
X. Aquaviva au P. Duras sur le même sujet 152
XI. Lettres relatives au propos attribué à Bellarmin sur la Bible de Sixte-Quint et l'infaillibilité pontificale 153
XII. Gretser sur la bulle Æternus ille 155
XIII. Censure anonyme sur les difficultés de Gretser et les réponses données 159
XIV. Gretser sur l'autorité de la préface de la Bible sixto‑clémentine 166
XV. Bellarmin à François Lucas, sur l'absence de notes dans la Bible sixto-clémentine 168
XVI. Dédicace, par François Lucas, de Notarum... libellus duplex 170
XVII. François Lucas à Bellarmin, sur le même sujet 172
XVIII. Bellarmin à François Lucas, sur les imperfections de la Bible sixto-clémentine 173
XIX. Dédicace, par François Lucas, de Libellus alter 174
XX. Emendatio textus graeci bibliorum Regiorum, novi Testamenti 176
XXI. Réponses à plusieurs questions concernant la Vulgate 178
XXII. Bellarmin à D. Jean Baptiste Cominello 180
XXIII. Variantes des Bibles sixtine et clémentine, d'après le P. Danzetta 182
XXIV. Témoignages sur la bulle Æternus ille, rapportés par le P. Tanner 187
XXV. Texte original des lettres d'Olivarès et du duc de Sessa 189
TABLE DES TEXTES BIBLIQUES 201
TABLE DES MATIÈRES ET DES NOMS PROPRES 203
INDEX DES CHAPITRES ET DOCUMENTS 209
Paris-Lille. Imp. A. Taffin-Lefort. 11. 1903.
ANNEXE 2 – Articles de Jean Madiran dans Présent le 17 août 2007
"Présent" du 17 août 2007 - Jean Madiran[174]
Les prêtres à qui sera rendue à partir du 14 septembre la libre célébration de la messe traditionnelle seront-ils obligés, en échange, de ne plus refuser ni contester la messe de Paul VI ? Depuis trente-huit ans l’argument se présente comme sans réplique, comme décisif, comme contraignant. Il consiste à prétendre que critiquer ou rejeter la messe de Paul VI comme dangereuse pour la foi serait récuser l’indiscutable magistère de l’Eglise en un tel domaine. Cet argument a fait cette année une réapparition insistante.
Il faut le (re)dire aujourd’hui comme avant-hier, cet argument est en réalité tout à fait inconsistant. Pour montrer son inconsistance, rappelons qu’un précédent fameux existe dans l’histoire de l’Eglise.
Voici. Le concile de Trente avait ordonné une révision de la Vulgate, pour la rendre plus conforme à la traduction établie par saint Jérôme. Le pape Sixte- Quint publia donc en 1590 une version révisée, à laquelle il avait personnellement travaillé, et qu’il imposa comme version officielle de la Bible. Plusieurs cardinaux et théologiens la refusèrent comme un danger pour la foi. Robert Bellarmin (qui fut canonisé) déclare : « Je ne sais si l’Eglise a jamais connu un tel péril. »
A la mort de Sixte-Quint, qui survint la même année, son édition de la Bible fut retirée du commerce, tous les exemplaires détruits. L’Eglise entreprit ce que nous appelons aujourd’hui une « réforme de la réforme ». En 1592 le pape Clément VIII fit paraître une édition corrigée, que l’on nomme « sixto-clémentine » ; mais comme Sixte-Quint avait reconnu avant de mourir qu’il avait promulgué un travail raté, dangereux pour la foi, son nom seul figure sur la page de titre, ce qui était la manière la meilleure, et la plus radicale, de réparer et supprimer la mauvaise édition.
Comme quoi, même en une matière touchant directement à la foi et aux moeurs, tous les actes d’un souverain pontife ne sont pas forcément infaillibles.
Nul ne sait encore si la contestation et le refus, licites et légitimes, de la messe de Paul VI, – qui déjà, n’étant plus obligatoire à l’exclusion de toute autre, est donc devenue facultative, – aboutira à une solution analogue à la Bible « sixto-clémentine », c’est-à-dire à une messe « paulobénédictine ». Il est évident que le Pape a le pouvoir de promulguer une messe « nouvelle », à la double condition qu’elle soit explicitement catholique en tous points, et qu’elle ne soit pas employée comme un moyen, une occasion (une arme par destination) pour supprimer les rites traditionnels.
On peut rêver à ce sujet ; considérer que l’obscurantisme spirituel du monde moderne se situe à un niveau mental, philosophique et religieux fort inférieur à celui des citoyens romains dans l’empire du premier et du second siècle ; et se demander en conséquence si l’on n’aurait pas réellement besoin qu’à côté de la messe traditionnelle existe aussi, pour certains sauvages modernes, une messe simplifiée, peut-être une messedigest pour une Eglise yankee, fille plus ou moins émancipée de l’Eglise latine ? C’est sans doute ce qu’a voulu faire Paul VI. Mais il l’a raté.
D’ailleurs, si l’on réclame un précédent plus récent que celui de Sixte-Quint, il y a celui de l’article 7 dans l’Institutio generalis de la messe de Paul VI. Il fut aussitôt publiquement contesté au nom de la foi. Dans cette contestation Paul VI vit si peu une récusation du magistère de l’Eglise qu’il s’empressa de la justifier en corrigeant l’article.
Cela se passait en 1969. C’était, dès le début de la messe nouvelle, une très claire indication.
JEAN MADIRAN
Article extrait du n° 6401 de Présent, du vendredi 17 août 2007
http://www.present.fr/
ANNEXE 3 - Article de Jean Madiran le 8 septembre 2007
Réponse à quelques doutes et questions
Les précisions, les voici
L’exemple de la Bible «sixto-clémentine» montre qu’il n’est pas interdit de critiquer la messe de Paul VI. Invoqué ici le 17 août d’une manière peut-être un peu trop cursive, cet exemple a rencontré parfois quelque défiance, à laquelle répond le présent article.
Le concile de Trente (1545-1563) avait demandé que l’on mette de l’ordre dans les diverses versions de la Vulgate de saint Jérôme, plus ou moins fautives, qui étaient alors en usage. Les travaux n’avaient guère avancé quand Sixte V fut élu (1585). Pape entreprenant et réformateur, il réorganisa la curie romaine et l’administration des Etats pontificaux, limita à 70 le nombre des cardinaux, fonda l’imprimerie vaticane (etc.). Concernant la révision de la Vulgate, exaspéré par les lenteurs de la commission qui en était chargée, il décide le 18 novembre 1588 de s’en occuper lui-même. Et, le 2 mai 1590, il publie sa propre version, précédée de la bulle Æternus ille qui la rend obligatoire à l’exclusion de toute autre.
Il est allé trop vite, trop «perso», d’une manière trop autoritaire. Il a rétabli des passages fautifs que la commission avait à bon droit rectifiés ou supprimés. Il a intégré au texte des notes marginales ajoutées par des copistes. C’est un scandale public. Le cardinal Carefa, qui proteste avec énergie, est menacé d‘être traduit devant l’Inquisition. Mais le cardinal Colonna, au nom justement de l’Inquisition, fait lui aussi de très graves critiques. Et d’autres, comme Bellarmin. Rien n’y fait, la nouvelle Bible est imposée et diffusée pendant trois mois, jusqu‘à la mort de Sixte-Quint qui survient le 27 août de la même année.
Aussitôt sa Bible obligatoire est interdite, les exemplaires déjà vendus sont recherchés, rachetés, détruits. Et la révision (en somme une révision de la révision) est à nouveau mise en chantier.
Un point peut-être reste douteux. Sixte-Quint aurait-il lui-même désavoué sa Bible avant de mourir et ordonné sa révision ? Le très classique Dictionnaire de la théologie catholique (DTC) l’affirme (effrontément ?) en son tome XIV, colonne 2233. Mais il dément cette pia fraus dès son tome XV, colonne 3480, précisant que la révision menée à bien est finalement promulguée en 1592 sous le seul nom de Sixte-Quint «comme si (oui : «comme si»), ayant reconnu lui-même l’imperfection du texte qu’il avait édité, il avait pris l’initiative de faire faire une nouvelle révision».
Tout cela est vérifiable même sans avoir recours aux histoires de l’Eglise les plus savantes, comme celle de Fliche et Martin ; on le trouve raconté dans de plus courantes, accessibles au grand public, par exemple celle de Daniel Rops chez Fayard, ou celle des Editions du Seuil par Aubert et consorts. Il a été fort heureux, en définitive, que l’ouvrage raté de Sixte-Quint ait été publiquement critiqué.
Quelquefois il faut beaucoup plus longtemps pour que les dégâts soient réparés. L’abbé Claude Barthe m‘écrit en effet : «Le décret Haec sancta du concile de Constance [1414-1418] accepté, de manière ambiguë disent certains, mais accepté quand même par Martin V, affirmait que le concile est supérieur au pape. Il a fallu attendre Pastor aeternus de Vatican I, qui ne l’a d’ailleurs pas visé directement, pour être certain que c‘était un décret hérétique. Mais entre-temps [il y eut] le gallicanisme, les IV Articles, etc.»
Où en est aujourd’hui la légitime critique de la messe de Paul VI ? Qu’a-t-il été répondu d‘éventuellement décisif, en trente-sept années, aux argumentations du cardinal Ottaviani, de l’abbé de Nantes, du P. Calmel, de Louis Salleron, de Mgr Lefebvre, d’Henri Charlier (et du cardinal Ratzinger) ? Quel est l’actuel état de la question ? Ce n’est certes pas le moment de se taire à ce sujet.
JEAN MADIRAN
Article extrait du n° 6417 de Présent, du Samedi 8 septembre 2007
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[1] Rappelons que Jean Arfel, dit Madiran, a cherché par tous les moyens à dissuader Mgr Lefebvre de procéder aux sacres des quatre évêques de la Fraternité, dont celui de Mgr Fellay, le 29 juin 988 à Ecône. N’ayant point réussi à fléchir la détermination de Mgr Lefebvre, il a aussitôt encensé la dissidence et le ralliement de Dom Gérard et du Barroux à l’évêque apostat Wojtyla-JPII qui suivit immédiatement ces sacres, son journal Présent invitant alors les prêtres et les fidèles à quitter la Fraternité devant l’« acte schismatique » de Mgr Lefebvre.
Et c’est maintenant les écrits de cet homme qui, au moment crucial, s’est alors demasqué comme un véritable adversaire acharné de l’œuvre de préservation du Sacerdoce et du Sacrifice catholiques sacramentellement valides fondée par Mgr Lefebvre, que l’on trouve aujourd’hui sur le site internet de La Porte Latine, le site officiel du District de France de la FSSPX, dépendant de l’abbé de Cacqueray, mais en réalité dirigé par qon Mentor et collaborateur, l’abbé Celier, ces écrits étant également pris pour référence par les Dominicains d’Avrillé pour présenter leur sophisme insupportabkle des deux Eglise contradictoires régies par une seule et même hiérarchie légitime !
[2] Il s’agit en fait des rescapés du clan Aulagnier décapité en 2003 et 2004 par Mgr Fellay
[3] Epp. Gen., Germ. Sup., 1610-1515, f. 273v.
[4] M. l'abbé Turmel, parle deus fois, t. XLI, p. 435 ; t. XLIX, p. 405, d'insertion de la pièce au bullaire. Et la preuve ?
[5] Angelo Rocca (Document XXV, n. 4).
[6] Le P. Cornely souligne ainsi, dans une note, le mot semper : «Vox "semper" (vel potius abbreviatio : sep) in foliolo agglutinato legitur... Eandem correctionem agglutinatam exhibet exemplar in Archiv. Vatic. conservatum».
[7] Positio de 1712.. Responsiones Facti et Juris, p. 120, n. 237 : «Nam si more solito fuisset publicata, ut maxima erat in tota Ecclesia sixtinae editionis expectatio, statim innumera illius Bullae exemplaria coempta fuissent, atque dispersa per totam Europam, ut fieri solet de aliis Pontificiis Bullis, praesertim alicujus momenti, et quae spectant ad omnes fideles. Et nihilominus nullum prorsus hujus Bullae separatum exemplar uspiam locorum reperitur, nullum producitur... »
[8] Introd. gen., p. 465 : «Maxima vero cum probabilitate asseri potest, Sixtum ultimum suum diem obiisse, antequam editio omni ex parte erat terminata».
[9] Fabius Danzetta (1692-1766) procureur général de la Compagnie de Jésus en 1750. Le travail dont il s'agit, se trouve à la bibliothèque du Vatican, Ms. lat. 8314, f. 1-63 : Danzetta pro Bellno ; Responsio pro V. C. Bellno.
[10] Les manuscrits sont donnés ici d'une façon générale ; les pièces utilisées seront indiquées au cours de l'étude.
[11] Sur le Fonds Bellarmin, voir Bellarmin avant son Cardinalat. Bibliographie, p. xiii.
[12] J'omets ici les ouvrages qui n'apparaissent dans cette étude que d'une façon purement accidentelle.
[13] Bellarmin était arrivé à Louvain à la fin de mai 1569, âgé de vingt-six ans et six mois, mais ce fut seulement au mois d'octobre de l'année suivante, qu'il devint professeur de théologie au scolasticat des jésuites.
[14] Une copie conservée à Cologne, Historisches Archiv, porte que Bellarmin commença le traité de l'Ecriture sainte le 31 octobre, pridie omnium Sanctorum.
[15] Armoire II, rayon sup., i.
[16] biblia sacra utriusque testamenti, juxta veterem translationem, qua huacusque Latina utitur Ecclesia, ex antiquissimis ac recentioribus exemplaribus diligentissime collatis, et sicubi dissentiebat consultis fontibus, hoc est, hebraeis et graecis voluminibus adhibitis, fidelissime restituta. Norembergae, per Jo. Petreium, anno M. D. XXIX. Le P. Sommervogel a donné du volume une description technique qu'on trouvera dans le P. J. B. Couderc, Le Vénér. Cardinal Bellarmin, t. II, p. 141.
[17] Adrien Crom, né vers 1590, entra dans la Compagnie de Jésus en 1609 ; il succéda en 1616 au P. Cornelius a Lapide dans la chaire d'Ecriture sainte à Louvain et mourut à Bruxelles le 11 mai 1651.
[18] biblia sacra. Quid in hac editione à Theologis Lovaniensibus praestitum sit, paulo post indicatur. Antuerpiae, Ex officina Christophori Plantini, M. D.LXXIIII. Voir A.-C. De Schrevel, Documents pour servir à la biographie de François Lucas, p. 170 SS.
[19] Plantin rappelait ceci dans une lettre adressée au pape Grégoire XIII, le 9 octobre 1574, et publiée d'abord par le P. Vercellone : «Siquidem ex praelatorum ecclesiasticorum, abbatum et rectorum, quibus meum studium et consilium aperui, benigna permissione tantum promovi, ut paucis mensibus manuscripta exemplaria ex iis quae potissima habentur, numero sexaginta Lovanium comportanda curaverim, et eruditissimis theologicae disciplinae viris ultra triginta legenda et conferenda commendaverim». Analecta juris pontificii, IIIè série, t. IIa, Rome, 1858, col. 1024.
[20] Dans la préface de la Biblia sacra, publiée à Anvers en 1574, François Lucas dit en parlant des services que lui avait rendus le P. Harlemius : «Librorum, quibuscumque opus habuimus, copiam, ex instructissima Societatis Jesu Lovaniensi Bibliotheca, subministravit».
[21] Né vers 1537, le P. Jean Willems, de Haarlem, était entré au noviciat de la Compagnie de Jésus en 1564. Après avoir enseigné l'Ecriture sainte et l'hébreu, il devint en 1574 recteur du scolasticat de Louvain, puis en 1576 vice-provincial de Belgique. Il mourut prématurément à Louvain en 1578.
[22] Ce travail fait partie de la Biblia Sacra Polyglotta de Plantin, Anvers, 1569.1572.
[23] Kardinal Wilhelm Sirlets Annotationen zum Neuen Testament. Eine Vertheidigung der Vulgata gegen Valla und Erasmus. Nach ungedruckten Quellen bearbeitet von P. Hildebrand Höpfl, O. S. B., dans Biblische Studien, t. XIII, 2è fasc.. Fribourg-en-Brisgau, 1908.
[24] Appelé aussi Gaudanus. Hurler, Nomenclator literarius. Ed. 3a, t. Il, p. 1452.
[25] Texte italien, d'après Vat. lat., 6177, f. 33, dans Vercellone, Dissertazioni accademiche, p. 81 ; cf. Analecta juris pontificii, loc. cit., col. 1019.
[26] Il faut avouer que les théologiens et les exégètes n'avaient pas toujours tort de se défier de la forme sous laquelle le décret leur était présenté. Voir, par exemple, le P. Kilber, Theologia Wirceburgensis, t. I, n. 31, lnst. 2° : immutatur est devenu asseverari. Déjà, dans ses Decisiones et Declarationes Ill. Cardd. S. C. Trident. interpretum, Douai, 1615, p. 13, Pierre de Marsylla, O. S. B., avait donné au décret un sens ambigu, en le rapportant ainsi : «cum omnibus suis partibus. Etiam quod sola periodus, sola clausula, vel sola dictio aut syllabas otave unum, non repugnet vulgatae linguae latinae editioni : quoad oppositiones antem contextus Graeci aut Hebraici cum Latina vulgata editione, Cong. remisit ad tertiam regulam Indicis sub Pio Quarto editam».
[27] La Vaticane, p. 73, d'après Vat. lat., 6326.
[28] Mélanges d'histoire et de littérature religieuse... Paris, 1899, p. 313.
[29] Il s'agit du texte imprimé. Dans un manuscrit de la Bibliothèque vaticane, Lat. 6613, qui contient l'enseignement oral primitif, l'étude est divisée en six questions : 1. An verbum Dei sit interna revelatio, an externa Dei locutio, scilicet Scriptura (5 pages). 2. Qui sint libri qui contineant verbum Dei (58 pp.) 3. An aliqua certa editio Scripturae necessario sit sequenda (64 pp.) 4. An Scriptura Dei sit ita facilis et aperta, ut sine alia expositione possimus ex ea terminare controversias fidei (8 pp.) 5. An Scripturarum interpretatio ex proprio et particulari spiritu revelante, vel ex communi per os Ecclesiae loquente sit venanda (29 pp.). 6. An verbum Dei contineatur solum in sacra Scriptura vel etiam in traditionibus viva voce traditis (36 pp.).
[30] Le théatin Michel Ghisleri énumère ainsi les membres de la commission : «Antonius Carafa Card. Praefectus ; D. Laelius ejusdem Card. theologus, postea episcopus Nardiensis [Neritonensis] ; D. Fulvius Ursinus canonicus ecclesiae lateranensis ; D. Antonius Agellius episcopus deinde acernensis ; p. Robertus Bellarminus ; Petrus Morin ; Doctor Valverde hispanus ; D. Gulielmus Alanus anglus». Vezzosi, I scrittori de'chierici regolari detti Teatini, t. I, p. 10.
[31] Je laisse de côté, comme n'ayant aucun rapport avec la Vulgate, un opuscule inédit de Bellarmin sur les antilogies que les livres de l'Ancien Testament présentent du point de vue chronologique : Chronologia et Quaestiones de temporibus sacrae Scripturae.
[32] Le reste du titre indique que la dissertation fut jointe à des thèses de théologie soutenues à l'Université de Wurtzbourg le 22 décembre 1749. Voir Sommervogel, Bibliothèque, t. I, col. 1249, n. 46.
[33] Juillet 1750. Art. LXXXV, p. 1607.
[34] Le P. Widenhofer dit lui-même, à la fin de sa publication, «que l'autographe se conserve à Malines dans la très célèbre bibliothèque du collège de la Compagnie de Jésus, dite Bellarminienne, à cause des manuscrits rares du Vén Bellarmin qu'elle renferme, a raris V. Bellarrnini Manuscriptis BELLARMINIANA dicta».
[35] Paris, 1758. La dissertation fut d'abord insérée dans le dernier volume.
[36] Par exemple, 5è édit., Paris, 1827, t. I, p. 155 : seconde dissertation sur la Vulgate.
[37] De ces onze auteurs, cinq seulement sont cités dans les Controverses, De verbo Dei, I. II, c. X : Driedo, Lindanus, Tiletanus, Cano et Sixte de Sienne.
[38] Juillet 1750, p. 1606. L'auteur de l'article paraît être le P. Berthier. Sommervogel, Bibliothèque, t. III, col. 970.
[39] La première Partie comprend les pages 21-161 ; la seconde, les pages 162-224.
[40] Septembre 1753. Art. XCIV, p. 2017-2084 ; C, p. 2186-2275 ; CV, p. 2351-2400.
[41] Je n'ai même, je l'avoue, qu'une médiocre confiance dans les affirmations du P. Widenhofer et du Journaliste de Trévoux, quand ils rattachent le titre de Bibliothèque Bellarminienne (Musaeum Bellarminianum, cf. De Backer, Biblioth. des écrivains de la Comp. de Jésus, Liège-Paris, 186g, au mot Clé, t. 1, col. 1296 s.) aux manuscrits rares du Vén. Bellarmin qu'on y conservait. Cette interprétation n'est guère confirmée par ce qui reste de cette collection, soit aux Archives de l'archevêché de Malines, soit à la Bibliothèque royale et aux Archives d'Etat de Bruxelles.
[42] Francois-Antoine Zaccaria (1714-1795), savant remarquable par la variété de ses connaissances, devint en 1794 conservateur de la bibliothèque ducale de Modène, en remplacement de Muratori. Sommervogel, Bibliothèque, t. VIII, col. 1381.
[43] Saggio critico della correcte Letteratura straniera, t. I, P. I, art. VII, § 2, p. 86. Modène, 1757.
[44] Jean-Baptiste Tolomei (1653-1716), professeur au Collège Romain de 1697 à 1706, créé cardinal en 1712. Il s'intéressa particulièrement aux écrits de Bellarmin, et composa mène un Supplément aux Controverses, resté inédit. Sommervogel, t. VIII, col. 86.
[45] R. P. Jacobi Tirini S. J. Antuerpiani in universam Sacram Scripturam Cornmentarius... Editio omnibus locupletior, et emendatior, cui... accedunt Prolegomena uberiora ac selecta... Venetiis, 1774. C'est l'édition que j'ai eue entre les mains ; mais la Dissertation sur la Vulgate se trouve déjà dans l'édition de Venise, 1760.
[46] Pierre Lazzari ou Lazzeri (1710-1789) fut pendant trente ans professeur d'histoire ecclésiastique et préfet de la bibliothèque au Collège Romain. Sommervogel, t. IV, col. 1609.
[47] J'ai publié la pièce dans Bellarmin avant son Cardinalat. Append. XIII.
[48] Vacant-Mangenot, Dictionnaire de théologie catholique, art. BELLARMIN, t. I, col. 584. Comparer, dans le second tirage, la nouvelle rédaction.
[49] Saggio critico, loc. cit., p. 91.
[50] Détail significatif : tous les passages incriminés dans la Dissertation de Bellarmin se rencontrent dans la Bible d'Anvers de 1583.
[51] Vercellone, Variae Lectiones, p. LXXIX.
[52] Jules-Antoine Santon, cardinal de Sainte-Séverine, raconte ainsi la chose dans le Journal de ses audiences, Archiv. Vatic., Brevi LII, t. XIX : «Giovedi 17 di nov. 1588, dopo la Congne. S. Sta da se, ragiono dell emendatione dell editione volgata della Bibbia, e cura data al Sr Card. Carafa, e mata satisfattne che n'haveva, et che dubitava che fusse contristato, etc., ch' io da sua parte lo volessi consolare, et risolvere che S. Sta da se stessa voleva vedere ogni cosa, etc., che glie la mandasse intera o li rendesse la Bibbia, etc., che Io voleva egli, etc. — Cosi se contenti». Cf. Autobiographie di Monsignor G. Antonio Santori Cardinale di S. Severina, publiée par C. Cugnoni, dans Archivio della R. Società Romana di Storia Patria, t. XIII (Rome, 1890), p. 183.
[53] Rome, Biblioth. Vaticane, Lat. 9513-9515 ; Londres, British Museum, 2. e. 5.
[54] En dehors des exemplaires de la Bible de Sixte-Quint qui les contiennent ces corrections ont été reproduites dans divers ouvrages : Th. James, Bellum Papale ; Henri de Bukentop, Lux de Luce, p. 319 ; J. G. Schelhorn, Amoenitates literariae, Francfort 1725, t. IV, p. 446 ; vau Ess, Geschichte der Vulgata, p. 331, etc.
[55] Vat. Lat., 6879 et 9509.
[56] Vercellone. Variae Lectiones, t. I, p. 60.
[57] Ibid., p. 85.
[58] Ibid., p. 181.
[59] Ibid., p. 251.
[60] Bible d'Anvers de 1583, en marge. Cf. Notationes in Sacra Biblia, de François Lucas, p. 137-138.
[61] Ibid., en marge.
[62] Ibid., exempl. Caraf. : gentibus d'abord biffé.
[63] Ibid., p. 238.
[64] Ibid. p. 85.
[65] Ibid., p. 114. Texte actuel : Galaad, id est, tumulus testis. Intuealur et judicet Dominus...
[66] Vercellone. Variae Lectiones, t. I, p. 137.
[67] Ibid., p. 470.
[68] Vercellone, Variae Lectiones, p. 30.
[69] Ibid., p. 474.
[70] Bible de Sixte-Quint : ancienne version d'abord rétablie, puis immortalis remplacé par immortalitas. Cf. Bukentop, p. 224.
[71] Vercellone, Variae Lectiones, p. 85.
[72] Annotations de Tolet. Vat. Lat., 6879, p. 140 ; 9509, p. 589 : « Graeci ms, et multi impress. et editio latina LXX Interp. Romana et Congregatio».
[73] Sixte-Quint, Paris, 1870, t. Il, p. 29. Le texte italien, d'après Arch. Ven. Disp. Roma, filz. 23, se trouve parmi les pièces justificatives, t. III, p. 301 : Alberto Badoer au doge. Rome, 3 juin 1589.
[74] Sixte-Quint, Paris, 1870, t. II, p. 29, note 2.
[75] Voir document XXV, n. 1. J'emprunte la traduction de cette lettre au R. P. Ferd. Prat, La Bible de Sixte-Quint, S. V. (Etudes, t. LI, p. 55).
[76] Giornale Arcadico, juillet-aoùt 1865. Nouv. série, t. LI, p. 25 s.
[77] Etudes, t. LI, p. 211.
[78] Calogera, Raccolta d'opusculi, t. XXXI, p. 161-167.
[79] Variae Lectiones, p. XLIX-LI. Vercellone, après Ungarelli, attribue ce fragment au secrétaire même de la congrégation, Ange Rocca.
[80] «C'est l'éternel problème», suivant le mot du R. P. Lagrange, art. La Revision de la Vulgate, p. 106.
[81] Même fragment : «Die 18 martii coepit legi liber Exodi».
[82] Ibid. : «Verumtamen cum non tantum ipsum difficile imprimis negotium esset, sed eam in expediendo celeritatem requireret, ut non tam multorum linguas ac voces quam paucorurn prudens doctumque judicium postulare videretur ; communi consilio statutum est, ut ad paucos et maxime idoneos deferretur. Electi sunt igitur Cardinales duo, etc.».
[83] Lettre 31, à Silvio Antoniano, citée par Vercellone, p. LXX1V : «Ecce pontificatu Gregorii XIV tu ipse : Morine, ad biblicos labores ; et miratus sum. Sed tamen ab Illmo Marco Antonio Columna accersiti sumus, Bellarminus, Agellius et ego. Cumque res traheretur, ab eo ducti Zagarolam una cum Illmo Alano Cli ac Rmo Miranda Magistro Sacri Palatii, ac ibi novemdecim totos dies commentati una sumus».
[84] Voir Vercellone et ses réflexions, p. LX.
[85] J.-B. Couderc, op. cit., t. I, p. 204. Pour le texte espagnol, voir Document XXV, n. 10.
[86] Cepari, Vie de saint Louis de Gonzague. Nouv. trad... par le P. L. Michel, S J., c. XXVIII, XXX, XXXI, p. 222, 227 S., 234. — D'autres documents pourraient aider, en témoignant de la présence à Rome de Bellarmin à telle ou telle date. Ainsi, le 10 juin et le 30 juillet, il écrit de cette ville au P. Dockers ; le 9 août, il signe une pièce avec plusieurs autres professeurs du Collège Romain. Voir Bellarmin avant son cardinalat, Lettre 162, p. 291 ; 164, p. 199 ; App. xviii, p. 526. Il me semble impossible d'admettre l'assertion courante, d'après laquelle les membres de la Commission ne seraient rentrés à Rome qu'au mois d'octobre. Cf. Prat, La Bible de Sixte-Quint, n. V (Etudes, t. LI, p. 207).
[87] Dans une note sur les écrits de Bellarmin conservés à la bibliothèque du Vatican, Assemani énumère, mais sans donner aucune indication de manuscrits, six écrits originaux, dont le premier a pour titre : Annotationes in Biblia sacra Sixtina. N'ayant pas retrouvé cette pièce, je me demande si elle diffère des Loca praecipua in bibliis Sixti V mutata.
[88] Ici Bellarmin vise manifestement la bulle Æternus ille de Sixte-Quint, où se trouvait, par rapport à la Bible de ce pape, un décret de ce genre, particulièrement approbatif et exclusif.
[89] C'est aussi l'opinion de Mgor Giovannini, art. cité, p. 35.
[90] Le texte porte : Vel forte alia quavis post Quintam et alias editiones. Cf. Hugues de Saint-Victor, De scripturis et scriptoribus sacris, c. ix, P. L., t. CLXXV, coL. 17 ; Cornely, Introduct. generalis, p. 339.
[91] Art. cité, p. 36 : «poichè tanto è il legame di questi due scritti, che il voto ci sembra proprio esser stato corne la cosa dell' essersi affidata a costui l'incarico di scrivere secondo le sue giuste osservazioni la prefazione alla medesima Biblia Volgata».
[92] Cf. Prat, art, cité, n. V, VI, VIE (Etudes, t. LI, p. 208, 213, 220).
[93] J.-M. Prat, Recherches historiques et critiques sur la Compagnie de Jésus en France du temps du P. Coton. Lyon, 1878, t. V, p. 10-11.
[94] Voir Document XXV, n. ii. Cf. Couderc, t. I, p. 205
[95] Gretser (1562-1625) était alors professeur de théologie à l'Université.
[96] Controversiarum Roberti Bellarmini... Defensio, tom. II. De Christo Christique Vicario, Pontifice Romano. Ingolstadii, 1609. (Opera omnia, t. IX. Ratisbonne, 1736).
[97] Voir Document XV, n. 1. Le Bellum Papale avait paru à Londres, en l'an 1600.
[98] Geschichte der Moralstreitigkeiten.... t. II, p. 251
[99] «Conveniunt omnes catholici et haeretici in duobus : primo posse Pontificem etiam uti Pontificem et cum suo coetu consiliariorum vel cum generali Concilio errare in controversiis facti particularis».
[100] «Si dicas, ergo saltem concilium Francofordiense, quod frequentissimum fuit et legitimum, errare potuit : respondeo, potuit errare et erravit, non in juris, sed in facti quaestione».
[101] Dans les Responsiones Facti et Juris ad Animadversiones R. P. D. Fidei Promotoris (Prosper Bottini), les avocats de la cause de béatification insistèrent, n. 226 ss., sur cette considération, en concluant, p. 117 : «Loquitur ergo Sixtus de sua intentione et conatu ad habendam perfectissimam emendationem, non vero asserit se illam assecutum fuisse».
[102] J'indique brièvement ce principe de solution ; il n'entre point dans le cadre de mon étude de discuter à fond la question du caractère, dogmatique ou disciplinaire, soit du décret Insuper, soit de la bulle Æternus ille.
[103] Controversiarum... Defensio, t. I, De Verbo Dei, L. 1. c. XIV (Opera, t. VIII, p. 141s.) Ingolstadt, 1608. La dédicace est datée du 1er août 1607.
[104] R. P. Nicolai Serarii e Societate Jesu, Prolegomena biblica, et Commentarii in omnes epistolas canonicas... Mayence, 1612.
[105] Le P. Serarius, né le 5 décembre 1555, était mort à Mayence le 29 ou 30 mai 1609.
[106] Le P. Martin Delrio (1551-1608) partageait l'opinion du P. Gretser et l’avait exposée au début de son Commentarius literalis in Threnos Jeremiae, Ingolstadt 1608.
[107] Controv. De Verbo Dei, 1. 1, c. XX : «Apocrypha quoque esse videtur praefatiuncula, quae praefigitur Threnis Hieremiae».
[108] Voir Biographie nationale de Belgique, t. XII, col. 550-563, art. Lucas (François), par M. le chanoine A. C. De Schrevel.
[109] L'auteur y dit, en énumérant les multiples bienfaits, dont il se reconnaît redevable au P. Harlemius : «Per illum ceteris illius Collegii Patribus, nominatim Illmo Cardinali Bellarmino, (qui jam tum excellentissimus Theologus, sacras illic litteras profitebatur) aliisque claris viris innotui».
[110] Romanae correctionis in latinis Bibliis editionis vulgatae, jussu Sisti V. Pont. Max. recognitis, loca insigniora… Anvers, 1603.
[111] Voir Document VI, dernière partie.
[112] Notationes in sacra Biblia, quibus variantia discrepantibus exernplaribus loca, summo studio discutiuntur... Anvers, 1580.
[113] De Schrevel, Documents... Lettre 49 (non datée), p. 71.
[114] Romanae Correctionis... Loca insigniora... Accessit libellus alter, continens alias lectionum varietates in eisdem Bibliis latinis ex vetustis manuscriplis exemplaribus collectas : quibus possit perfectior reddi, feliciter coepta correctio, si accedat Summi Pontificis auctoritas... Anvers, 1618. - François Lucas mourut l'année suivante.
[115] Positio de 1712... Summarium, p. 108 : «Per non so che difficoltà, che si traverso, di non gran importanza, Sua Santità non volse si desse alla stampa».
[116] «Et ecce unus... exemit gladium suum... Converte gladium tuum in locum suum ; omnes enim, qui acceperint gladium, gladio peribunt».
[117] Die Selbstbiographie..., p. 180-181.
[118] Positio de 1712... Responsiones Facti et Juris. Animadversio XIV, XV, XVI, p. 111 ss.
[119] J'ai touché ce point dans le Dictionnaire de théologie catholique, art. BELLARMIN, t. II, col. 575-576.
[120] Voti degli infrascritti Eminentissimi Signori Cardinali, B. Gregorio Barbarigo, Gieronirno Casanate, Decio Azzolini, Domenico Passionei, nella causa della beatificazione del Venerabile Servo di Dio Cardinale Bellarmino. Seconda edizione.... Ferrara, 1762.
[121] Die Selbstbiographie, p. 118 ss.
[122] Revue du Clergé français, 1er décembre 1904 ; t. XLI, p. 87.
[123] Ou celui qui rédigea son vote. Voir Recherches de Science religieuse, janvier-février 1910, p. 74, note 1.
[124] Positio de 1712... Responsiones Facti et Juris, p. 112, 117.
[125] Antibarbarus biblicus... Amsterdam, 1628, p. 111, 112, 113, 114, 116.
[126] Fabius Danzetta (1692-1766) procureur général de la Compagnie de Jésus en 1750. Le travail dont il s'agit, se trouve à la bibliothèque du Vatican, Ms. lat. 8314, f. 1-63 : Danzetta pro Bellno ; Responsio pro V. C. Bellno.
[127] Le texte original est en italien : «La Santità vostra sa ancora il pericolo net quale messe se stesso e tutta la chiesa la santa memoria di Sisto V in voler correggere la Biblia secondo il suo proprio parere, ed io certo non so se si è corso mai pericolo maggiore». Rome. Bibliot. Angelica, Fondo antico, Ms. 895, f. 203 ss, avec cette finale : Concordat cum autographo...
[128] Revue du Clergé français, 15 janvier 1907 ; t. XLIX, p. 405.
[129] Simancas. Estdo. Roma. Leg. 358 (ant. 956). Cf. Couderc, t. I. p. 201, 202.
[130] Archiv. Vat., fonds Château-Saint-Ange. Armarium Vlll, capsula VI, c. 17 (d'après Mgr Baumgarten).
[131] I scrittori de' chierici regolari detti Teatini, t. I, p. 17.
[132] Epp. Gen., Germ. Sup., 1610-1515, f. 273v.
[133] M. l'abbé Turmel, parle deus fois, t. XLI, p. 435 ; t. XLIX, p. 405, d'insertion de la pièce au bullaire. Et la preuve ?
[134] Bzovius, Paulus Quintus Burghesius, p. 4. Rome, 1626.
[135] Positio de 1712... Responsiones Facti et Juris, Animadversio XIV, n. 736 ; sur toute la question, p. 117-122.
[136] Lettre du 8 septembre 1590 (Document XXV, n. 6. Cf. Couderc, t. 1, p.203). Le renseignement donné ici par Olivares nous apprend la décision prise après la mort de Sixte-Quint, mais il ne nous dit rien de positif sur ce qui était fait auparavant, sauf l'allusion générale aux Bibles «qui sont déjà arrivées en Espagne».
[137] «Der Text geht von fol. Iv bis fol. 16r. Auf. fol. 16v befindet sich die sehr abgeriebene und verblasste Publikationsmitteilung des Magister cursorum». Mgr Baumgarten, loc. cit., p. 338.
[138] Angelo Rocca (Document XXV, n. 4).
[139] Le P. Cornely souligne ainsi, dans une note, le mot semper : «Vox "semper" (vel potius abbreviatio : sep) in foliolo agglutinato legitur... Eandem correctionem agglutinatam exhibet exemplar in Archiv. Vatic. conservatum».
[140] Positio de 1712.. Responsiones Facti et Juris, p. 120, n. 237 : «Nam si more solito fuisset publicata, ut maxima erat in tota Ecclesia sixtinae editionis expectatio, statim innumera illius Bullae exemplaria coempta fuissent, atque dispersa per totam Europam, ut fieri solet de aliis Pontificiis Bullis, praesertim alicujus momenti, et quae spectant ad omnes fideles. Et nihilominus nullum prorsus hujus Bullae separatum exemplar uspiam locorum reperitur, nullum producitur... »
[141] Introd. gen., p. 465 : «Maxima vero cum probabilitate asseri potest, Sixtum ultimum suum diem obiisse, antequam editio omni ex parte erat terminata».
[142] J'ai déjà publié le passage qui suit dans Recherches de science religieuse, janvier 1910, note sur Ce que Bellarmin dit de la Bible de Sixte-Quint en 1591, p. 75.
[143] Vezzosi, op. cit.. t.I, p. 17.
[144] Positio de 1749. Part. III, c. iii, § 8, p. 29 ss.
[145] M. l'abbé Turmel, (oc. cit., t. XLI, p. 433, raisonne comme si Bellarmin donnait à entendre «que la Bible sixtine a été imprimée, mais non éditée». Cette formule ne rend pas complètement la pensée de Bellarmin ; en elle-même elle reste équivoque, car le mot : éditée, peut s'entendre dans le sens d'une publication purement matérielle, ou dans celui d'une publication juridique ou promulgation proprement dite.
[146] Responsiones Facti et Juris, p. 108, n. 216. Le même avocat réclame vivement, quelques pages auparavant, n. 211 ss., contre le procédé qui consiste à confondre la simple réticence et la négation, même implicite : «An qui ex duobus alicujus negotii causis unam solum pro loco ac tempore exprimendam censuit, alteram idcirco negasse dicendus est ?» Qu'aurait-il pensé de l'argument que M. l'abbé Turmel, voulant prouver que la préface est démentie par l'autobiographie, a prétendu tirer, loc. cit., t. XLI, p. 434, de ces paroles de Bellarmin dans sa lettre à Clément VIII, en 1602 : «Et je ne sais vraiment pas si jamais l'Eglise a couru un plus grand danger ?» A la réflexion qui suit : «Tout lecteur impartial avouera que la préface ne laisse soupçonner à aucun degré le danger couru alors par l'Eglise», le défenseur de Bellarmin aurait répondu : D'accord ; mais je ne vois pas comment il s'ensuit que la préface est démentie par l'autobiographie.
[147] F. Prat, La Bible de Sixte-Quint, S. V. (Etudes, t. LI, p. 50).
[148] Positio de 1712. Responsiones Facti et Juris, p. 109, n. 217 : «Numquid ullo verbo significavit id falsum esse ? Imo vero id pro certo, et explorato haberi voluit, dum praefationem illam, qua talis assertio continebatur, a se concinnatam fuisse eo ipso loco indicavit».
[149] Voir Bellarmin avant son Cardinalat. Append. II, note préliminaire.
[150] L'exil de Capoue est connu. Ce n'est pas le seul cas où Bellarmin eut à porter les conséquences de sa franchise ; sur la fin du règne de Paul V, on écrivit de Rome au roi d'Espagne : «Sa Sainteté lui montra beaucoup d'amitié au commencement de son pontificat... Mais plus tard, ce cardinal, ayant voulu présenter au pape quelques observations, est tombé peu à peu en défaveur». Simancas. Estdo. Roma. Leg. 737 (ant. 1870), f. 270. Cf. Couderc, t. II, p. 301. Si la chose n'était pas un hors-d'œuvre, j'expliquerais l'allusion.
[151] Opera (Rome, 1719) t. II, p. 10.
[152] F. Prat, art. cité, §. V. (Études, t. LI, p. 54) ; Vercellone, Variae Lectiones, p. XXXVIII. Dans l'ignorance où ils étaient de son auteur, Ungaretti et Vercellone ont traité lestement cette note anonyme.
[153] Voir Bellarmin avant son Cardinalat. Append. II.
[154] Voto, n. 29 : «Presentemente non si forma il processo di beatificazione ne al Papa, ne ai Cardinali accusati rei di cooperazione... A che serve rendere complici della falsità il Papa, e i Cardinali ?» - Comme si l'invraisemblance d'une pareille complicité ne pouvait pas devenir, dans le cas dont il s'agit, un élément d'appréciation !
[155] Variae Lectiones, p. XXXVIII.
[156] F. Prat, art, cité, n. V. (Etudes, t. LI, p. 58).
[157] Storia della vita e delle gesta di Sisto Quinto (nouv. éd. Rome, 1866) t. Il, l. IV, n. 18, p. 100. Je me demande toutefois s'il s'agit bien de la Bible du cardinal Carafa, car Tempesti ne donne aucune date, et le passage du cardinal de Sainte-Séverine, auquel il fait allusion (voir ci-dessus, c. I, § 5, p. 28, note 3) ne parle nullement de cette cinquantaine d'exemplaires. Si par hasard le détail se rapportait à la Bible même de Sixte-Quint, quelle lumière se projetterait sur la question !
[158] «Le Pape me dit [hier] que désormais il ne devait plus y avoir d'autre Bible». Dépêche du 28 mai 1590 (Document XXV, n. 4).
[159] Olivarès écrivait, le 30 juin, à Philippe II : «Bien qu'on doive imprimer l'errata pour le mettre en tête, j'envoie cependant à Votre Majesté la liste des fautes corrigées». Liste partielle, ne portant que sur quatre livres. Voir ci-dessus p. 86.
[160] Kaulen, Geschichle der Vulgata, p. 481, note 3. Cet auteur ajoute que, fautes de renseignements complets, il reste au fond de cette affaire quelque chose d'énigmatique.
[161] Vercellone, Variae Lectiones, p. XLIX : «Neque si Sixtus correctionum apparatum codicis carafiani sus deque fecit, arbitrandum est ilium lectiones singulas reprobasse ; sunt pleraque ab illa Congregatione recte diligenterque notata, quae ipse Pontifex probavit et amplexus est».
[162] Etudes, n° avril 1907, t. CXI, p. 227 ss., art. Bellarmin à l'index.
[163] Dépêche du 22 décembre 1592 : «On vient d'achever l'impression de la Bible corrigée ; on lui a donné pour titre celui de "Bible de Sixte-Quint", en y ajoutant une Préface dont j'envoie une copie à Votre Majesté, et qui, assure-t-on, a été mûrement méditée pour éviter le scandale qu'aurait pu causer l'ordre donné de faire rentrer les exemplaires imprimés du temps de Sixte. Aussi l'on tâche de le faire avec le moins de bruit possible». Voir Document XXV, n. 11. Cf. Couderc, t. 1, p. 205.
[164] «En réalité, aucun titre n'est supprimé, du moins en entier, mais le plus grand nombre sont modifiés». F. Prat, La Bible de Sixte-Quint, n. VI (Études, t. LI, p. 211).
[165] Abréviations pour : in Hebraeis, Chaldaeis, Graecis, Latinis codicibus.
[166] Texte biffé dans le manuscrit.
[167] Vide Cornelium à Lapide hic et Marianam.
[168] Vide hic Cornelium a Lapide.
[169] Vide Marianam hic et Raynaudum, tome XI. Minutalia Sacra, P. II. pag. 7a.
[170] Vide Bellarm. hic, Marianam et Raynaudum, to. XI. Minutalia sacra, pag. 8a.
[171] Note accompagnant le texte, comme toutes celles qui suivront : Enormis immutatio : Sue enim fuit pater uxoris Judae : vide in nostra vulgata ver. 2° et Cornelium a Lapide ad hoc cap. 38, v. 2.
[172] Ubi enormis immutatio et in textu, et interpretatione et sensu. Vide Marianam hic et Mendozam in expositione litterae, vers. 2°.
[173] Variatio contradictoria, et praeter contextum sententiae sequentis versus. Vide Marianum hic.
[174] http://radiocourtoisie.leforum.eu/t2367-Motu-Proprio-Reaction-de-Jean-Madiran.htm