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CAPITAL : Lettre ouverte solennelle des fidèles aux quatre évêques de la FSSPX

http://www.virgo-maria.org/articles/2006/VM-2006-10-10-A-00-Appel_aux_quatre_eveques_de_la_FSSPX.pdf


Qui et Pourquoi, depuis la mort de Mgr Lefebvre en 1991, a détourné la finalité surnaturelle de l’OPERATION-SURVIE des sacres de 1988, pour assigner à la FSSPX ce FAUX objectif prioritaire de la «ré-conciliation» avec la Rome conciliaire
(en fait la «ré-conciliarisation» de la FSSPX) ?

Qui a, depuis 2000, PROMU, et Pourquoi, le FAUX préalable de l’autorisation de la messe de Saint Pie V ?

Pourquoi n’a-t-on pas posé la VRAIE question du rétablissement du VRAI Sacerdoce de VRAIS prêtres, ordonnés par des Evêques VALIDEMENT sacrés selon le rite VALIDE des Saints Ordres ?

Qui a INVENTE, et POURQUOI, le faux préalable de la levée des «excommunications» ?

Pourquoi n’a-t-on pas posé la VRAIE question de l’abrogation de Pontificalis Romani INVALIDE de 1968 et du rétablissement du vrai rite de la consécration épiscopale VALIDE d’avant 1968?

A quoi servirait-il, en effet, de faire dire le VRAI rite de la messe par de FAUX prêtres ?

Serait-ce donc qu’après avoir obligé de VRAIS prêtres à dire une FAUSSE messe, l’on veuille désormais faire dire la messe du
VRAI rite par de FAUX prêtres ?

Serait-ce que l’on veuille «concilier» les VRAIS prêtres qui disent encore la VRAIE messe avec un clergé aussi INVALIDE que le
FAUX CLERGE ANGLICAN ?


Gaude, Maria Virgo, cunctas hæreses sola interemisti.

(Tractus Missæ Salve Sancta Parens)

Mardi 24 juin 2008

Ce message peut être téléchargé au format PDF sur notre site http://www.virgo-maria.org/.

Mgr Lefebvre à la tête de l’opposition pendant Vatican II (n° 2)

Son opposition au schéma sur la liberté religieuse

 

Le rôle historique de Mgr Lefebvre, en chef de file du Coetus, est reconnu par ses ennemis conciliaires.

La vérité historique sort au grand jour. Extrait de la monumentale « Histoire du concile Vatican II » d’Alberigo

«Si cette déclaration, en l'état, est affirmée solennellement, la vénération dont a toujours joui l'Église catholique de la part de tous les hommes et toutes les sociétés du fait de son amour indéfectible de la vérité jusqu'au martyre et de l'exemple de vertus tant individuelles que collectives, souffrira un grand dommage, et ceci au détriment de beaucoup d'âmes qui ne sont plus attirées par la vérité catholique»[1]. Mgr Lefebvre à Vatican II

Nous continuons, à la suite de notre précédent[2] message VM du 04 juin 2008, la publication de travaux universitaires qui démontrent le rôle clé que joua le futur fondateur de la FSSPX, lors de Vatican II, pour s’opposer aux textes qui furent promulgués.

Histoire du concile Vatican II (1959-1965)[3] - Sous la direction de Giuseppe Alberigo. Version française sous la direction de Étienne Fouilloux. Editions du Cerf

·        Tome 1 (576 pages) - Le catholicisme vers une nouvelle époque. L'annonce et la préparation (janvier 1959-octobre 1962). Paru en : Mai 1997

·        Tome 2 (736 pages) - La formation de la conscience conciliaire - La première session et la première intersession (Octobre 1962-septembre 1963). Paru en : Mai 1998

·        Tome 3 (610 pages) - Le concile adulte - La deuxième session et la deuxième intersession

·        (Septembre 1963-septembre 1964). Paru en : Septembre 2000

·        Tome 4 (832 pages) - L'Église en tant que communion - La troisième session et la troisième intersession (Septembre 1964 - septembre 1965). Paru : Mai 2003

·        Tome 5 (834 pages) - Concile de transition - La quatrième session et la conclusion du concile (Septembre - décembre 1965). Paru : Septembre 2005

Collaborations :  Giuseppe Alberigo  -  Joseph Famerée  -  Étienne Fouilloux  -  Reiner Kaczynski  -  Véronique Liard-Brandver  -  Alberto Melloni  -  Jacques Mignon  -  Claude Soetens  -  Evangelista Vilanova - Giuseppe - Riccardo Burigana  -  Joseph A. Komonchak  -  Giovanni Miccoli  -  Hanjo Sauer  -  Luis Antonio G. Tagle  -  Norman Tanner  -  Giovanni Turbanti - Peter Hünermann  -  Bernard Lauret  -  Gilles Routhier  -  Christoph Theobald  -  Giovanni Turbanti  -  Mauro Velati  -  Lukas Vischer

Giuseppe Alberigo est professeur émérite d'histoire de l'Église à la Faculté des sciences politique de l'Université de Bologne . Il dirige l'Istituto per le Scienze religiose de Bologne, fondé par Giuseppe Dossetti.

« Parmi les leaders du «Coetus internationalis», c'est Marcel Lefebvre qui prit la parole[4]. Il décrivit les conséquences catastrophiques de la déclaration dans le domaine religieux, moral et politico-social, pour l'évangélisation et l'apostolat de l'Église, la déclara infectée de relativisme et d'idéalisme, et conclut dramatiquement : «Si cette déclaration, en l'état, est affirmée solennellement, la vénération dont a toujours joui l'Église catholique de la part de tous les hommes et toutes les sociétés du fait de son amour indéfectible de la vérité jusqu'au martyre et de l'exemple de vertus tant individuelles que collectives, souffrira un grand dommage, et ceci au détriment de beaucoup d'âmes qui ne sont plus attirées par la vérité catholique»[5]. Ce fut une charge contre le texte, note Congar : «Il critique per fas et nefas à peu près tout, du point de vue d'un homme négatif et cherchant à être contre sans réfléchir à ce que dit le texte»[6].

On retrouve le même ton et les mêmes arguments dans les très nombreuses interventions écrites, que l'interruption du débat dans l'aula empêcha d'entendre. La déclaration fut l'objet d'accusations extrêmement graves : elle conduit au syncrétisme, à un irénisme néfaste, elle ouvre la porte au scepticisme[7], elle offre une image de l'homme inspirée par la conception naturaliste du libéralisme[8]. Le cardinal Gilroy fut radical : «Ce serait une injure pour le magistère de l'Église, divinement instituée, d'admettre que les communautés religieuses qui perpétuent l'hérésie ont le droit [...] de propager

p. 146 leurs erreurs. Un concile œcuménique peut-il oser dire que tous les hérétiques ont le droit de séduire les fidèles, en les éloignant du Christ Pasteur Suprême, pour les conduire vers des pâturages empoisonnés ?»[9] Brève et désolée fut la déclaration du cardinal De Arriba y Castro : «Moi, le plus petit de tous, je veux seulement parler des dommages qui commencent à sortir de tant de discussions. Du reste, il suffit de rappeler que seul le Christ est maître et seuls les apôtres nommés par Lui et leurs successeurs, c'est-à-dire l'Église catholique. Personne d'autre n'a le droit de prêcher l'Évangile. Le prosélytisme est un vrai fléau pour l'Église du Christ. En Espagne déjà, on en voit les fruits : la dissidence religieuse et même quelques apostasies»[10]. »

(…)

« L'idée qu'une véritable volonté de subversion animait certains leaders et certains secteurs de la majorité, qu'une subtile infiltration ennemie était en cours dans l'Église, réapparaissait de toute évidence parmi les Pères et les théologiens de la minorité, et leurs dénonciations susurrées comme des alarmes angoissées semblaient ramener à la première décennie du siècle.

«Le dessein se fait de jour en jour plus manifeste, écrivait l'abbé Berto, théologien de confiance de Marcel Lefebvre à Carli, évêque de Segni, en recevant le texte du De libertate proposé par le Secrétariat en vue de la troisième session. Il ne s'agit plus désormais de doctrine, de justice, de tradition catholique. Il s'agit d'introduire, d'imposer, sous prétexte d'aggiornamento, un changement substantiel du catholicisme, et comme celui-ci ne peut advenir "per arma lucis", on cherche à le faire par des moyens violents, aujourd'hui le vacarme, demain le silence, aujourd'hui la précipitation, demain la lenteur, aujourd'hui le secret demain l'obscurité, tout cela calculé pour le triomphe de l’erreur. Que Votre excellence prenne (parmi tant d'autres !) l'exemple du schéma De libertate religiosa. Il a été modifié, certes. Mais n'était-ce pas une violence que le premier texte, qui aurait pu être signé de J.-J. Rousseau ou de Mazzini, ait été élevé au

p. 149 rang de schéma conciliaire ? N'était-ce pas une violence, ce discours de Mgr De Smedt, qui demandait que cette énorme question, si violemment reliée au schéma De œcumenismo et présentée neuf jours avant la fin de la session, soit discutée et le schéma voté dans ce délai ? [...] Ici, l'objectif particulier (l'objectif général étant de changer substantiellement la doctrine, voire la foi catholique elle-même) est de détruire complètement les principes les plus fondamentaux du droit naturel pour les remplacer par le pseudo-droit rationaliste, avec l'avantage supplémentaire de renverser tout l'édifice des pontifes romains jusqu'à Quanta cura et au Syllabus. Pie IX s'est trompé en matière de doctrine [...]. Du oui au non, d'une proposition à la proposition contraire, y aurait-il seulement un aggiornamento? Ne serait-ce pas un changement substantiel ? A mon avis, Eccellentissimo e Reverendissimo Signore, les adversaires savent qu'il s'agit d'un changement substantiel, ils le savent et le veulent. Ils ne veulent pas discuter, ils veulent imposer...»[11]

Ce sont des jugements très durs, qui ne laissent pas d'issue aux «adversaires». Certes il ne faut pas généraliser : ce ne sont pas ceux de toute la minorité. Mais ils expriment certainement des idées et des soupçons qui y circulaient, donnant à son opposition plus d'élan et de force, et qui étaient évidemment partagés par les Pères entourant le «Coetus internationalis». » Extrait

Par la suite, Mgr Lefebvre enverra les Dubia à Ratzinger pour accuser formellement Vatican II et sur le plan de la procédure théologique.

Ratzinger n’a envoyé aucune réponse véritablement argumentée à cette mise en accusation par Mgr Lefebvre.

Aujourd’hui, Castrillon Hoyos demande un reniement de Mgr Lefebvre pour le 28 juin 2008, en lançant son ultimatum à Mgr Fellay et en exigeant que le successeur de Mgr Lefebvre et le chapitre général de la FSSPX approuve le décret sur la liberté religieuse.

Quelle trahison, 40 ans après Vatican II !

Continuons le bon combat

La Rédaction de Virgo-Maria

© 2008 virgo-maria.org

histoire du concile vatican ii

giuseppe alberrigo,

Tome IV, cerf 2003

p. 123                                                                   

CHAPITRE II

DEUX POINTS CHAUDS - LA LIBERTÉ RELIGIEUSE - LES RELATIONS AVEC LES JUIFS

GIOVANNI MICCOLI, Triestre.

Durant les dix premiers jours de la session le concile fit faire un pas en avant considérable à la thématique ecclésiologique, de sorte qu'il était possible de passer à des sujets bien différents, mais ni moins «chauds» ni moins ardus. En effet, pendant la dernière semaine de septembre les congrégations générales seront occupées à débattre de la liberté religieuse et des relations du catholicisme avec le peuple juif. Il s'agissait de problèmes à propos desquels des attitudes de méfiance, sinon d'hostilité, s'étaient durcies et généralisées, attitudes que beaucoup confondaient avec la doctrine catholique authentique, donc immuable. Les épiscopats «latins» étaient les plus réfractaires[12].

En outre, les diverses commissions et sous-commissions, ainsi que les groupes informels, avaient repris leur travail avec pour effet de rappeler à l'attention des Pères une multiplicité de sujets, outre ceux débattus dans l'aula : de la révélation à l'œcuménisme, de la formation des prêtres aux missions, des religieux aux Eglises orientales. Beaucoup commençaient à espérer conclure le concile dès 1964[13].

p. 124                                                                   

INTRODUCTION

À la réunion de la Commission de coordination du 16 avril 1964 on avait décidé, sur proposition du cardinal Confalonieri, que les chapitres IV et V du projet de De œcumenismo seraient transformés en Declarationes autonomes : le premier, Declaratio altera, serait intitulé De Judaeis et de non-Christianis, alors que l'autre, le De libertate religiosa, deviendrait la Declaratio prior[14]. Ce n'était pas la première fois que l'on proposait de modifier la situation des deux textes à l'intérieur des documents conciliaires, et, comme on le verra, ce ne sera pas la dernière, dans un contexte où la volonté d'en sauvegarder l'existence s'opposait aux tentatives récurrentes pour éliminer ces questions des travaux conciliaires, ou pour en altérer profondément la portée ou l'importance qu'ils avaient prise dans les perspectives de l'assemblée et aux yeux de l'opinion publique.

Toutefois, la décision adoptée alors restera jusqu'au bout, au milieu de péripéties mouvementées, la décision définitive. Les textes en question furent soumis à la discussion de l'assemblée à partir de la fin de la deuxième semaine : le De libertate religiosa le 23 septembre, au cours de la 86e congrégation générale, et le De Judaeis et de non-Christianis le 25 septembre lors de la 88e. On se rappelle que l'un et l'autre avaient déjà été présentés à l'assemblée au cours de la deuxième session, en tant que chapitres finaux du De œcumenismo, mais sans faire l'objet d'un débat spécifique[15]. Ils avaient donc été unis, et continuaient de l'être, par leur commune présence dans un même schéma, mais aussi par les attentes qu'ils avaient suscitées, qui les avaient accueillis et accompagnés : parce que tous deux abordaient des questions

p. 125 sur lesquelles, plus que sur d'autres, on pouvait mesurer la réalité et la profondeur effective du tournant que l'Église catholique était disposée à imprimer, au moins en principe, aux termes et aux modalités de son rapport à la société, qui avait derrière lui des siècles d'élaboration doctrinale et de pratiques consécutives[16].

DE LIBERTATE RELIGIOSA

Comme lors de la deuxième session, c'est Mgr De Smedt, évêque de Bruges, qui présenta aux Pères, le 23 septembre, la nouvelle declaratio De libertate religiosa. Il était clair désormais, depuis la phase préparatoire, que «deux conceptions diamétralement opposées»[17] se trouvaient confrontées.

D'un côté les partisans de la doctrine qui, enracinée dans l'expérience du régime de chrétienté, avait trouvé son expression et son élaboration plénières dans la pensée catholique intransigeante contre-révolutionnaire et dans le magistère pontifical du XIXè siècle, repris en substance, avec des nuances et des accents différents, dans la première moitié du XXe. Ses critères de fond partaient du principe que seule la vérité a droit à la liberté, alors que l'erreur «ad maiora mala vitanda» n'a droit qu'à une relative «tolérance». En conséquence de quoi seule l'Église catholique - par définition

p. 126 unique dépositaire de la vérité - et ses fidèles avaient le droit (ius) de réclamer une pleine liberté et d'en jouir. Selon cette vision, le modèle idéal d'organisation publique était l'État catholique, appelé à régir et à gouverner la société en s'inspirant des normes enseignées par l'Eglise, et à empêcher la diffusion de doctrines fausses qui, selon elle, pouvaient mettre en péril le salut éternel de ses citoyens. Dans la «cité catholique», donc, les autres cultes pouvaient être tout au plus «tolérés» : Si l'on ne pouvait contraindre les individus à embrasser la «vraie foi» et s'ils étaient laissés libres de suivre leurs croyances, il fallait pourtant les empêcher de nuire à autrui par la diffusion de leurs erreurs[18].

Il ne s'agissait pas de propositions abstraites ou de comportements désormais désuets et loin de nous dans le temps. Les campagnes périodiques contre la propagande protestante et sa répression publique demandée par le Saint-Siège et par l'Eglise italienne entre les années trente et le début des années cinquante[19], la condition de minorité civile imposée aux «dissidents» dans l'Espagne franquiste à la suite du concordat de 1953, attestent de la valeur opératoire durable de ces principes[20]. Si telle était la «thèse», plus ou moins ponctuellement appliquée quand les conditions

p. 127 historiques en offraient la possibilité et que la société civile se présentait, au moins officiellement, comme globalement catholique, d'autres conditions historiques pouvaient imposer des adaptations et des compromis, jusqu'à accepter, dans l'ordre politique et social, la liberté civile pour les adeptes des autres cultes. C'était là l'«hypothèse», selon la définition classique élaborée au lendemain du Syllabus et constamment rappelée depuis lors par le magistère. Distinction pratique, opérationnelle, dictée et graduée par les circonstances, qui pouvaient conseiller une sage prudence pour éviter des troubles ou des désordres sociaux et des conséquences négatives pour l'Église elle-même, mais qui n'autorisaient d'aucune manière l'oubli ou l'atténuation des principes, lesquels «s'appuient – comme le disait le chapitre IX du schéma De Ecclesia, élaboré par la commission théologique préparatoire[21] – sur les droits intangibles de Dieu, sur la constitution et la mission immuables de l'Église, et également sur la nature sociale de l'homme qui reste toujours la même au long des siècles et détermine les fins essentielles de la société civile, malgré la diversité des régimes politiques et la variété des situations historiques».

Le front opposé ne pouvait rien offrir, au moins au début, d'aussi solidement argumenté et cohérent, corroboré par d'innombrables déclarations du magistère. Ses défenseurs étaient animés par l'exigence d'emprunter d'autres voies, d'élaborer pour l'Église et l'offre chrétienne une approche des problèmes et des difficultés des hommes et de la société qui ne recherche pas dans l'exercice du pouvoir ou le rapport avec lui un passage privilégié[22]. Ils étaient mus aussi par un malaise croissant devant une doctrine ressentie comme toujours plus étrangère aux orientations de la culture et de l'esprit public contemporains[23] ; et enfin par la conscience

p. 128 que, à cause de cette doctrine et du fait de la diversité de ses choix et de ses comportements concrets, l'Église pouvait être trop facilement accusée d'opportunisme et de duplicité d'être intolérante là où elle avait la majorité et d'exiger la liberté et la tolérance quand elle se trouvait en situation minoritaire[24]. D'où la proposition d'abandonner définitivement la théorie de la thèse et de l'hypothèse, car si l'on voyait jadis les choses «ex parte obiecti», aujourd'hui il fallait prêter attention également au sujet, aux droits de la personne[25].

Une autre question de fond devait prendre peu à peu une place centrale dans les discours de ceux qui estimaient devoir reconnaître dans la liberté religieuse un droit fondamental de la personne humaine : l'affirmation de l'existence, dans le parcours historique complexe de l'Église, d'un «développement» effectif de la doctrine, et donc le refus de la position de ceux qui prétendaient en fixer définitivement le contenu. On a relevé avec raison que le problème du développement de la doctrine fut le véritable champ de bataille de Vatican II[26] : un développement qui se voulait et se prétendait cohérent, mais qui n'en impliquait pas moins des révisions éventuellement profondes. La question de la liberté religieuse constitua un moment privilégié pour un tel débat, chargeant ainsi la discussion conciliaire d'une signification et d'une portée qui allaient bien au-delà de ce sujet précis. Et si les analyses historiques qui entendaient démontrer la cohérence intime de ce développement se révélèrent assez faibles et forcées, reste toutefois l'importance du critère herméneutique, et de la praxis qui en découle pour l'avenir, qui se trouvèrent ainsi affirmés[27].

p. 129 Ce n'est pas un hasard si les groupes les plus animés d'esprit œcuménique, engagés à établir une confrontation avec les autres Églises et confessions chrétiennes, furent les principaux partisans de la recherche de voies nouvelles. Il est donc naturel que le Secrétariat pour l'unité des chrétiens soit devenu le protagoniste et le siège privilégié de l'élaboration d'une doctrine nouvelle et différente[28]. La route était cependant plus que jamais tourmentée. Les profonds changements successivement subis dans l'agencement des propositions du Secrétariat en confirment toute la difficulté. Le cardinal Bea, commentant en février 1961 un premier rapport De Smedt sur la question, pouvait relever lucidement : «ce n'est pas une doctrine traditionnelle, mais la vie d'aujourd'hui n'est pas traditionnelle»[29]. Un désaveu explicite du passé, quel que soit le critère adopté pour l'opérer, restait d'ailleurs difficile, pour ne pas dire impossible. L'idée que l'Église romaine ait pu se tromper pendant des siècles était, pour la plupart, inacceptable. La minorité ne manquera pas de le réaffirmer dans les circonstances les plus diverses. En outre, parler de «développement» faisait problème : cela évoquait irrésistiblement (et du reste avec quelque raison) le fantasme du modernisme. L'immuabilité de la doctrine représentait pour «l'école romaine» un dogme non écrit indiscutable, un point d'appui auquel faire constamment référence face aux propositions et aux initiatives de la majorité[30]. A cet égard, la question de la liberté

p. 130 religieuse pour tous, catholiques et non-catholiques, chrétiens et non-chrétiens, d'une véritable liberté religieuse, reconnue comme un droit et pas seulement concédée, constituait précisément un écheveau difficile à démêler.

La prise de conscience rapide de la difficulté d'imposer au concile une simple réaffirmation de l'enseignement traditionnel avait conduit le Saint-Office et, semble-t-il, la Secrétairerie d'État, à tenter de supprimer le sujet de l'ordre du jour conciliaire[31]. Dès le lendemain de la rencontre entre Ottaviani et Bea en juin 1962, à l'occasion de la présentation à la Commission centrale des textes élaborés par la Commission théologique et par le Secrétariat sur les sujets de la tolérance et de la liberté religieuse, le père Gagnebet, qui jouissait parmi les experts de la Commission théologique d'une autorité particulière, n'avait pas manqué de relever : «sur l'opportunité même de présenter un tel texte au Concile, il peut certainement y avoir hésitation. Mais si on y parle de ce sujet, le Concile ne peut que proposer la doctrine catholique»[32]. L'exigence de maintenir ouvert le dialogue œcuménique, qui aurait été gravement lésé, pour ne pas dire interrompu, si le concile avait éludé la question, et les pressions réitérées de certains épiscopats (en particulier celui des États-Unis) permirent que le texte préparé par le Secrétariat pour le chapitre V du schéma De œcumenismo arrive finalement entre les mains des Pères le 19 novembre 1963, le jour même où Mgr De Smedt en avait longuement illustré les caractéristiques et les difficultés au cours de la 70e congrégation générale[33].

Sa péroraison avait été passionnée, et saluée par de vigoureux applaudissements. Il revendiquait pleinement la liberté religieuse pour les individus comme pour les groupes, une liberté qui ne pouvait être limitée par les pouvoirs publics qu'au nom du bien commun et de la nécessité de respecter les droits des autres. Toutefois, la question centrale, sur laquelle se concentrait l'opposition, était constituée par la

p. 131 nouveauté de cette doctrine par rapport au magistère pontifical exprimé tout au long du XIXè siècle et encore dans la première moitié du XXè. De Smedt chercha à la résoudre en affirmant que cette différence était plus apparente que substantielle. Pour lui en effet, ces condamnations de la liberté religieuse auraient été formulées en raison des fausses théories sur l'homme qui prétendaient la justifier, tout comme la séparation de l'Église et de l'État avait été condamnée en tant que fruit du présupposé rationaliste de l'omnipotence juridique de l'État[34]. Mais en combattant le rationalisme, le naturalisme et l'indifférentisme religieux, l'Eglise combattait pour la dignité de la personne humaine et sa vraie liberté, qui ont leur véritable fondement dans la reconnaissance de la dépendance de l'homme par rapport à Dieu. C'est pourquoi ces condamnations n'étaient pas en contradiction avec l'enseignement de Pacem in terris, qui reconnaissait la liberté religieuse comme un droit de la personne humaine.

En concluant son rapport, De Smedt recommanda de ne pas lire les textes pontificaux en dehors de leur contexte historique. Mais cette recommandation n'annulait pas ses coups de boutoir interprétatifs. Il cherchait ainsi à faire face aux objections qu'il savait être celles de la minorité, mais il répondait probablement aussi à une exigence profonde chez lui : tout en admettant une évolution doctrinale, il ne pouvait renoncer à y rechercher les éléments constitutifs permettant de parler d'une continuité de fond, d'une fidélité substantielle de la doctrine à elle-même. Cette position, cependant, qui ne pouvait contenter les opposants, ne manquait pas non plus de susciter perplexité et difficultés chez ceux-là mêmes

p. 132 qui jugeaient plus que jamais urgent, à un siècle du Syllabus, une large et franche reconnaissance de la liberté religieuse pour tous de la part de l'Église. Le De libertate religiosa continua de traîner avec lui un écheveau d'élans, de demandes et d'exigences contradictoires, qui rendit particulièrement rude et accidenté l'ensemble de son parcours conciliaire.

On sait que durant la deuxième session il avait manqué un débat spécifique sur ce chapitre. Le renvoi avait suscité déception et conjectures préoccupantes[35]. On savait l'hostilité tenace que les milieux curiaux et la minorité conservatrice continuaient de nourrir à l'encontre de ce texte. À la mi-janvier le Secrétariat n'avait pratiquement reçu que des animadversiones critiques, au nom de la thèse et de l'hypothèse, et l'incertitude demeurait sur l'avenir du chapitre, qui pouvait être retiré au Secrétariat, avec le risque de modifications substantielles ou d'une réduction drastique à un texte de quelques lignes[36]. Si le cardinal Cicognani, dans une conversation privée, avait admis qu'«on ne peut plus l'éviter», en revanche la conclusion du rapport par lequel, le 16 avril 1964, il présenta à la Commission de coordination le nouveau texte sur la liberté religieuse, élaboré entre-temps par le Secrétariat, offre un indice évident de son hostilité persistante à aborder le sujet : «Il peut sembler assez paradoxal que l'Église catholique, dépositaire de la Vérité et investie du mandat de propager et d'enseigner ce credo révélé, propose à présent, comme elle ne l'avait jamais fait, ces droits [à la liberté] pour les autres religions. Il est bien entendu qu'elle n'entend pas donner son approbation à l'erreur, et que si elle doit user de compréhension, la plus grande prudence est nécessaire»[37].

On ne peut d'ailleurs pas dire que la présentation de Cicognani naisse d'une analyse précise du texte préparé par le Secrétariat : il continuait de se référer au De libertate en tant que chapitre V du De œcumenismo (et au De Judaeis en tant

p. 133 que chapitre IV), alors que dans la nouvelle rédaction ce dernier était devenu un appendice et que le De libertate avait été placé en numéro 4. La décision prise alors de faire des deux textes des «déclarations» autonomes ne comporta pas de modifications du texte sur la liberté religieuse envoyé la semaine précédente au Secrétariat général, au point que ses paragraphes gardèrent la numérotation qui leur avait été assignée au cours de la réélaboration, quand il était devenu le chapitre IV du schéma. C'est ce texte qui fut envoyé aux Pères en vue de la troisième session, comme l'atteste la lettre de Felici du 11 mai 1964[38].

Le travail de révision et de réélaboration du texte par le Secrétariat avait été dirigé dans un premier temps par plusieurs de ses membres et plusieurs experts, réunis à Rome du 3 au 24 février sous la présidence de Mgr Willebrands, puis dans la réunion plénière tenue à Ariccia du 24 février au 7 mars[39]. S'orienter parmi les très nombreuses observations envoyées par les Pères – 380 qui, rassemblées, formèrent un volume de 280 pages[40] –, les trier, en retenant les unes et rejetant les autres, n'était certes pas une affaire simple, en l'absence de toute indication sur l'orientation dominante de l'assemblée : cette absence était au moins en partie le fruit des pressions des opposants, et elle pèsera jusqu'à la fin sur le parcours et la mise en place du texte. A cet égard, dans un rapport lu à la réunion du 22 février, Mgr Pavan, qui avait examiné l'ensemble des observations envoyées par les Pères, déclara de manière significative : «un certain nombre d'évêques refusent tout droit aux personnes qui veulent manifester extérieurement une conviction religieuse erronée mais tenue de bonne foi. Là, aucune discussion n'est possible»[41]. La diversité des implications et des points de vue

p. 134 présentés dans les observations de ceux qui, tout en se déclarant très favorables au texte, n'avaient pas manqué de soulever des objections et des difficultés, se traduisit par l'adoption, par le Secrétariat, de cinq critères de principe pour procéder à la correction[42] :

1. Une définition plus claire du concept de liberté religieuse dans la déclaration. Pour cela, on précisa dans le premier paragraphe que la liberté religieuse n'émancipe pas l'homme de ses obligations envers Dieu. Il s'agit de la liberté religieuse revendiquée dans les rapports interpersonnels et sociaux, pour les individus comme pour les communautés religieuses, dont le fondement doit être cherché dans la vocation divine des hommes, appelés (vocati) «à suivre la volonté du Créateur et Sauveur selon le dictamen de la conscience»[43].

2. Un exposé plus explicite du droit des communautés religieuses à jouir d'une pleine liberté «pour ce qui peut favoriser la vie spirituelle des gens».

3. Une explication plus précise des critères permettant de limiter l'exercice du droit à la liberté religieuse. Ces critères en appelaient d'une part aux fins de la société et de l'autre aux modes de propagation de la religion. Des limites à l'exercice de la liberté religieuse peuvent en effet être posées par les fins de la société, qu'il convient aux pouvoirs publics de sauvegarder, et qui «consistent dans cet ensemble de conditions sociales qui doivent permettre aux hommes de réaliser leur perfection de façon plus pleine et plus aisée»[44]. Mais des limites à cet exercice peuvent être fixées aussi quand on a recours à des moyens malhonnêtes pour diffuser sa religion.

4. Un exposé plus clair et plus explicite du caractère objectif des lois divines, pour exclure tout risque de subjectivisme et d'indifférentisme religieux.

5. Un rappel des conditions actuelles de l'humanité, qui

p. 135 rendent nécessaire et utile la proclamation de la liberté religieuse.

En des termes encore très sommaires était ainsi récupéré le point de vue exprimé par J. Courtney Murray dès le lendemain de la deuxième session : la liberté religieuse représente une question d'abord politique et constitutionnelle, plaidable par des arguments théologiques ou moraux, et elle doit être traitée comme telle ; dans le même temps on réaffirmait l'incompétence absolue de l'État à prononcer un jugement sur la plus ou moins grande vérité d'une religion[45]. Cet aspect prendra une tout autre ampleur quand Murray, qui avait déjà collaboré heureusement avec le Secrétariat, assumera en son sein un rôle décisif dans la réélaboration du texte, au lendemain du débat public de septembre 1964[46].

La semaine où la déclaration sur la liberté religieuse fut finalement soumise à la discussion des Pères était une semaine particulièrement chaude pour le concile, chargée d'attentes et de tensions. On avait en effet commencé de voter, paragraphe par paragraphe, sur le chapitre III du De Ecclesia, consacré à la sacramentalité et à la collégialité de l'épiscopat, question autour de laquelle la minorité avait suscité une féroce opposition de principe, faisant peser les plus lourds soupçons sur ses défenseurs[47].

Le rapport oral de De Smedt fut plus bref que celui qu'il avait fait à la deuxième session, plus prudent et défensif par certains aspects, rappelant à plusieurs reprises que le texte avait encore grand besoin d'améliorations, qu'il ne manquait pas de problèmes et de points à approfondir ; le rapporteur soulignait avec insistance que le Secrétariat attendait beaucoup des interventions des Pères et du débat public, le premier auquel le texte était soumis[48].

De Smedt effleura à peine la question du magistère pontifical, qui avait occupé une telle place dans son précédent rapport : les textes des papes sur ce sujet (de hac re) touchent le

p. 136 problème d'un autre point de vue et dans d'autres conditions sociales[49]. Et s'il était évident qu'on n'avait jamais débattu de la liberté religieuse dans un concile, il l'était beaucoup moins d'affirmer que le problème était «nouveau», comme si on voulait suggérer l'idée qu'au fond les papes du XIXè et du début du XXè siècle avaient parlé d'autre chose. Il ajoutait que le sujet était «perdifficilis», omettant prudemment de rappeler que les difficultés provenaient du fait que l'orientation qui avait été celle du magistère était à l'opposé de celle assumée par la déclaration.

En réalité, beaucoup de points de son discours furent consacrés à répondre indirectement aux critiques que l'on pouvait faire à celle-ci en se réclamant du magistère. Ainsi, après avoir répété les cinq critères, déjà largement présents dans la relatio écrite, qui avaient guidé la réélaboration du texte, il défendit le choix de l'expression «liberté religieuse» plutôt que «tolérance religieuse», car il s'agit de termes qui, dans l'usage moderne, ont pris un sens bien précis. Dans un concile pastoral, l'Église entend se prononcer sur une question que les communautés ecclésiales, les gouvernements, les institutions, les journalistes, les juristes désignent par ce vocable. «Si notre discours s'adresse à la société moderne, nous devons utiliser sa façon de parler»[50]. Il était clair aussi – conséquence directe de ce qu'il venait de dire – que dans le texte on parlait de la liberté religieuse comme d'une notion formellement juridique, qui énonce un droit fondé sur la nature de la personne humaine et est reconnu dans la loi fondamentale des États[51]. Il précisa que la nature pastorale et non spécifiquement doctrinale du document n'impliquait pourtant pas qu'il faille se limiter – dans une matière aussi délicate et qui regarde la conscience – à de simples indications pratiques : d'où l'opportunité d'un sobre exposé des raisons doctrinales sur lesquelles se fonde la liberté religieuse.

p. 137 Évoquant la structure du texte, De Smedt rappela implicitement les exigences du dialogue œcuménique qui l'avait fait naître. En effet, la déclaration, dès ses premiers paragraphes, rappelle l'enseignement traditionnel selon lequel, par la nature même de l'acte de foi, «personne n'est obligé d'embrasser» celle-ci, ce qui a des conséquences pratiques précises. Cette affirmation préliminaire que l'Eglise catholique exige de ses fidèles le respect de la liberté religieuse d'autrui fait en sorte, observe De Smedt, que «notre sincérité apparaisse plus efficace dans les déclarations ultérieures»[52].

Il nia en outre que l'intention du texte soit d'affirmer que le fondement du droit à la liberté religieuse se trouve uniquement dans la liberté de conscience : il est plutôt dans la nature de la personne humaine, telle qu'elle a été créée par Dieu, «qui est le fondement ultime dans lequel s'enracine la liberté religieuse»[53]. De Smedt montra le lien avec l'usage du terme vocatio : le droit à la liberté religieuse est inscrit dans les viscères de la nature humaine par l'acte créateur de Dieu, qui dispose chaque personne à obéir, guidée par sa conscience, «à la vocation ou volonté divine». Il ajouta pourtant que, «ceci admis, la porte reste ouverte pour y fonder les exigences d'ordre surnaturel de ceux qui ont la foi»[54].

Il entendait par là accueillir la préoccupation ou la crainte que les fidèles catholiques puissent être induits par la déclaration à méconnaître l'autorité ecclésiastique, à renverser l'ordre hiérarchique. Aussi eut-il soin de préciser que : le devoir de chacun d'examiner ce que, «dans son cas concret», la loi divine exige de lui, comporte pour le fidèle, «qui croit en l'Eglise», le devoir de «refuser d'agir comme si Dieu n'avait pas donné à [celle-ci] l'autorité doctrinale». C'est pourquoi le fidèle, «avant d'agir librement, doit se demander ce que l'Église enseigne sur ce point précis, pour pouvoir se conformer librement à l'enseignement donné par Dieu à travers l'Église»[55]. La liberté religieuse du fidèle catholique

p. 138 se traduisait en somme dans le choix, librement accompli, de reconnaître dans le magistère la voix et la volonté de Dieu, et donc de l'accepter.

La question des limites que les pouvoirs publics pouvaient fixer à la liberté religieuse, et de leurs motifs, était également très délicate et controversée. D'un côté les Espagnols et les Italiens se démenaient à l'unisson pour défendre leurs concordats respectifs et les conditions privilégiées qu'ils reconnaissaient à l'Eglise, en trouvant un large consensus et un soutien dans la Curie (le cardinal Ottaviani, on le sait, considérait, avec le cardinal Ruffini, le concordat espagnol de 1953 comme un modèle pour les relations entre l'Eglise et l'État[56]) ; d'un autre côté les évêques polonais, et ceux des «démocraties populaires», craignaient avec quelque raison qu'une telle reconnaissance puisse offrir une justification à des mesures opposées à l'Eglise[57]. Trouver une formule qui empêche tout abus est impossible, s'exclama De Smedt[58], qui prit pourtant soin de redire avec force l'incapacité et l'incompétence de l'État et de son gouvernement à juger de la vérité religieuse et à s'ingérer dans la vie religieuse de ses citoyens. Mais si son affirmation conclusive de cette partie, selon laquelle l'Etat ne pouvait subordonner les communautés religieuses à ses fins, était acceptée par tous, il n'en allait pas de même des deux affirmations qui la précédaient : l'État agnostique et la séparation de l'Église et de l'État étaient deux bêtes noires de l'enseignement traditionnel. De Smedt s'efforça de préciser : il ne s'agit pas de cela, l'État doit en effet favoriser la vie religieuse, mais on ne peut pas ne pas reconnaître le «caractère laïque» des pouvoirs publics.

p. 139 La déclaration finale péremptoire fut rassurante mais peu argumentée : «le laïcisme, qui est hostile à la religion, est rigoureusement limité par la loi naturelle elle-même et les pouvoirs publics»[59]. En orateur consommé, De Smedt conclut son discours sur un ton entraînant et ouvert : «Notre commission est un instrument aux mains du concile. Avec l'aide de toutes vos voix et guidés par l'Esprit Saint, nous nous efforcerons avec prudence et modération de perfectionner le texte de la déclaration sur la liberté religieuse afin qu'elle aussi devienne un document digne de ce concile œcuménique»[60].

La série de cardinaux qui se succédèrent le premier jour du débat (neuf interventions sur dix) donna la mesure de l'importance et des implications multiples que le sujet revêtait aux yeux de toute l'assemblée[61]. Dès les premières répliques, il fut évident que la nette opposition entre les deux tendances demeurait entière. Les aspects techniques et scolastiques qui alourdirent çà et là la marche du débat ne voilèrent pas les enjeux réels, ni l'engagement passionné que le sujet appelait. Ce fut un combat ouvert, dramatique par moments. Mais il ne masqua pas des divergences et des difficultés aussi chez ceux qui étaient convaincus de la nécessité d'une telle déclaration.

Au nom des opposants, ce fut une fois encore Ruffini qui ouvrit le feu. «Le vieux combattant [...] n'a rien perdu de son mordant», nota Congar[62]. Une déclaration fort opportune, commença le cardinal, mais permettez-moi d'indiquer les points où elle doit être complétée et perfectionnée[63]. En réalité, pour lui, presque tout, à commencer par le titre, devait changer. Et devait changer à la lumière de

p. 140 l’enseignement traditionnel réitéré à partir de ses fondements. En effet, la liberté religieuse ne peut être séparée de la vérité, sur la base du postulat selon lequel Dieu seul, vérité suprême, est parfaitement libre. La vérité étant une et indivisible, la vraie religion ne peut être qu'une et a seule le droit à la liberté («assurément, le droit propre à la vérité, qu'aucun pouvoir ne peut supprimer»). Les circonstances de la vie et la nécessité de pourvoir à l'harmonie des hommes rendent nécessaire une tolérance, «patiente et bienveillante», pour tous, comme nous l'enseigne la divine providence qui appelle tous les hommes à la sainteté et ordonne le bien, mais qui tolère et laisse advenir bien des maux, qu'elle pourrait certes empêcher et qu'elle n'approuve certainement pas. Cette distinction est absolument nécessaire. Autrement, il apparaîtra à beaucoup que le concile œcuménique, en ce qui concerne la religion, ne demande rien de plus que l'article 18 de la Déclaration universelle des droits de l'homme approuvée par l'ONU le 10 décembre 1948. Cet article en effet enregistre la liberté religieuse : mais en même temps qu'il exprime l'effort, du reste louable, pour assurer la concorde entre les peuples qui professent des religions différentes, «il sent de façon évidente son indifférentisme agnostique»[64]. Ruffini esquisse ici indirectement une accusation qui sera largement développée au cours du débat : la déclaration discutée, plus ou moins implicitement, ignore la revendication fondamentale de l'Église d'être, dans le temps de l'histoire, la seule dépositaire authentique de la vérité, de la vérité plénière, objectivement définie et définissable ; elle suggère en revanche l'idée de l'existence d'une multiplicité de voies, d'une diversité de parcours légitimes et dignes qui en permettent et en assurent plus ou moins pleinement l'obtention.

Ruffini exprima des préoccupations plus grandes encore quant à l'attitude des pouvoirs publics envers la religion. Le texte semble exclure qu'un État puisse avoir sa propre religion à favoriser et à protéger, «tout en conservant la tolérance pour les autres religions»[65]. A la lumière de ce principe, les concordats signés par le Saint-Siège avec l'État italien,

p. 141 avec le Portugal, avec l'Espagne et avec la République dominicaine ne seraient pas valables. En reconnaissant à toutes les religions les mêmes droits, les privilèges particuliers que l'Église catholique demande aux gouvernements, quand elle le peut, ne pourraient demeurer légitimes et valides. Et il faudrait commencer par rayer la déclaration solennelle qui ouvre les concordats italien et espagnol : «la religion catholique est la seule religion de l'État»[66].

Ruffini jugeait en outre hors de propos l'invitation faite aux catholiques de n'obliger personne à embrasser la foi. C'est en effet une norme traditionnelle de l'Église que «personne ne soit contraint de le faire». Il conviendrait plutôt de rappeler qu'en bien des endroits c'est le contraire qui se passe : pour ne pas être privés de leurs droits civils ou pour ne pas mourir de faim, les fidèles catholiques sont contraints d'abandonner leur religion. Au lieu d'une déclaration générale qui condamne, comme contraire à la volonté du Créateur et Sauveur et au droit de la personne et des gens, toute violence contre la religion et les communautés religieuses, Ruffini proposait enfin d'inscrire une protestation ouverte et ferme pour revendiquer la jouissance du droit commun «pour notre très sainte religion» et pour affirmer en même temps l'entière solidarité du concile avec tous les frères qui ont souffert et souffrent encore persécution «pour la justice de Dieu»[67].

En un peu moins de trois matinées, une vingtaine d'interventions s'opposèrent à la declaratio. Toutes répétèrent en substance le schéma proposé par Ruffini : d'une part, en se réclamant plus ou moins explicitement de la doctrine traditionnelle, selon laquelle seule la vérité peut jouir d'une pleine liberté, et de l'autre en mettant en lumière les conséquences néfastes, pour l'Église et pour les fidèles, que comprendrait nécessairement l'abandon de cette doctrine. Il ne manqua pas d'accusations pesantes et de répliques indigentes, qui causèrent un malaise. Les Espagnols firent bloc. Ils reflétaient des préoccupations qui leur étaient propres, des

p. 142 pressions du gouvernement, et la volonté de répondre indirectement aux notes et aux lettres de groupes de prêtres et de laïcs qui, à partir de l'Espagne, dénonçaient par des voies souterraines le caractère oppresseur du régime franquiste, les graves dangers que présentaient les liens étroits entre la hiérarchie ecclésiastique et ce régime, leurs conséquences néfastes pour la vie religieuse elle-même, trop souvent réduite à un gris conformisme routinier[68]. C'est l'épiscopat qui intervint dans le débat par le plus grand nombre de représentants (six interventions orales et quatorze écrites).

Le discours du cardinal Quiroga y Palacios, archevêque de Saint Jacques de Compostelle, fut dur et alarmiste : pour lui le texte se montre très attentif à l'union avec les frères séparés, probablement pour la favoriser, mais il ne prête pas le minimum d'attention aux très graves dangers pour la foi et la charité auxquels il expose les fidèles catholiques ; il répond à l'esprit et à la mentalité des régions que l'on appelait naguère «protestantes», mais il oublie complètement l'esprit et la mentalité des régions et des nations dont la majeure partie est catholique. Tout cela favorise la révolution

p. 143 dans l'Église. Le concept de liberté y est exposé de telle manière que, une fois admis, «on peut craindre une licence effrénée»[69]. Lôpez Ortiz, évêque de Tuy-Vigo, contesta l'affirmation que l'État est incompétent pour juger de la vérité en matière religieuse. C'est une grave affirmation aux funestes conséquences et qui entend changer radicalement la doctrine acceptée jusqu'ici et proposée par le magistère de l'Église. «Quand un État se déclare catholique [...] il ne fait que manifester solennellement son obéissance à la loi divine, sa volonté de rendre publiquement à Dieu le culte qui lui est dû, son obligation de servir l'Église par son action». C'est ce que l'Église par son magistère continu a sans cesse enseigné depuis le IVè siècle comme étant le devoir de l'État[70]. Pour Temifo Saiz, évêque d'Orense, l'intention du schéma de s'exprimer en termes adaptés à notre temps, en cherchant en même temps à conserver fidèlement la doctrine de l'Église, est louable, mais l'idée qui l'envahit tout entier, à savoir que toutes les communautés religieuses et les religions ont les mêmes droits et sont dignes de la même considération sociale, n'est compatible ni avec la doctrine du concile Vatican I ni avec la révélation elle-même[71]. Granados Garcia, auxiliaire de Tolède, combattit comme une «doctrine nouvelle dans l'Église le droit à la propagande indiscriminée de la vérité et de l'erreur religieuse reconnu dans le schéma. Dans les choses humaines on n'admet pas facilement la diffusion d'erreurs attentatoires au bien commun, par exemple la licéité du suicide : pourquoi donc devrait-on admettre aussi facilement la propagande de l'erreur religieuse ? «Peut-être ne considérons-nous pas les erreurs religieuses comme aussi pernicieuses ?»[72]

Les Italiens également, à quelques exceptions près, se branchèrent sur la même longueur d'onde, non sans certains écarts de langage qui blessèrent les invités du Secrétariat et créèrent de l'embarras dans l'assemblée. Ainsi l'auxiliaire de Rome, Canestri, reprit-il le ton et les arguments de

p. 144 la polémique antiprotestante la plus classique, niant qu'un prêtre catholique passé, «ô douleur !», au protestantisme («saisi par une tentation dérisoire - par exemple la désobéissance, l'argent ou d'autres motifs semblables, comme vous le savez bien») puisse en appeler à sa conscience pour jouir de la liberté religieuse, dont il pourra bien sûr bénéficier, mais pour d'autres raisons[73].

L'intervention du cardinal Ottaviani fut «plutôt modérée», écrit Antoine Wenger dans La Croix[74]. Mais lui aussi demanda que l'on fasse clairement mention des droits surnaturels qui reviennent à l'Église et à ses fidèles : «Nous ne sommes pas ici dans une assemblée philosophique ou simplement naturelle, nous sommes dans un concile de l'Eglise catholique et nous devons professer et défendre la vérité catholique afin que la liberté d'agir selon la doctrine catholique soit entière, spécialement en notre temps, où l'on peut dire, avec les premiers Pères et avec les premiers chrétiens, de ceux qui souffrent dans les lieux de persécution : combien de prisons vous avez sanctifiées !»[75] Parmi les curialistes, Browne fut le plus tranchant et le plus explicite, proposant le rejet en bloc de la déclaration[76]. Quelques représentants des grandes familles religieuses prirent également position contre le schéma : ainsi d'Aniceto Fernàndez, maître général des

p. 145 Dominicains et, dans une intervention écrite, de Dom Jean Prou, supérieur de la Congrégation bénédictine de France[77].

Parmi les leaders du «Coetus internationalis», c'est Marcel Lefebvre qui prit la parole[78]. Il décrivit les conséquences catastrophiques de la déclaration dans le domaine religieux, moral et politico-social, pour l'évangélisation et l'apostolat de l'Église, la déclara infectée de relativisme et d'idéalisme, et conclut dramatiquement : «Si cette déclaration, en l'état, est affirmée solennellement, la vénération dont a toujours joui l'Église catholique de la part de tous les hommes et toutes les sociétés du fait de son amour indéfectible de la vérité jusqu'au martyre et de l'exemple de vertus tant individuelles que collectives, souffrira un grand dommage, et ceci au détriment de beaucoup d'âmes qui ne sont plus attirées par la vérité catholique»[79]. Ce fut une charge contre le texte, note Congar : «Il critique per fas et nefas à peu près tout, du point de vue d'un homme négatif et cherchant à être contre sans réfléchir à ce que dit le texte»[80].

On retrouve le même ton et les mêmes arguments dans les très nombreuses interventions écrites, que l'interruption du débat dans l'aula empêcha d'entendre. La déclaration fut l'objet d'accusations extrêmement graves : elle conduit au syncrétisme, à un irénisme néfaste, elle ouvre la porte au scepticisme[81], elle offre une image de l'homme inspirée par la conception naturaliste du libéralisme[82]. Le cardinal Gilroy fut radical : «Ce serait une injure pour le magistère de l'Église, divinement instituée, d'admettre que les communautés religieuses qui perpétuent l'hérésie ont le droit [...] de propager

p. 146 leurs erreurs. Un concile œcuménique peut-il oser dire que tous les hérétiques ont le droit de séduire les fidèles, en les éloignant du Christ Pasteur Suprême, pour les conduire vers des pâturages empoisonnés ?»[83] Brève et désolée fut la déclaration du cardinal De Arriba y Castro : «Moi, le plus petit de tous, je veux seulement parler des dommages qui commencent à sortir de tant de discussions. Du reste, il suffit de rappeler que seul le Christ est maître et seuls les apôtres nommés par Lui et leurs successeurs, c'est-à-dire l'Église catholique. Personne d'autre n'a le droit de prêcher l'Évangile. Le prosélytisme est un vrai fléau pour l'Église du Christ. En Espagne déjà, on en voit les fruits : la dissidence religieuse et même quelques apostasies»[84].

L'attaque des Espagnols se concentra surtout sur l'affirmation que les autorités publiques n'étaient pas compétentes pour se prononcer sur la vérité en matière religieuse : c'est une doctrine «penitus reicienda», elle va contre la Sainte Ecriture, contre la tradition de l'Église, contre la doctrine des souverains pontifes[85], elle ouvre la voie à l'indifférentisme et au subjectivisme religieux et finalement, comme l'histoire nous l'apprend, à l'athéisme[86]. Se réclamant de l'intervention de Ruffini l'archevêque Alonso Mufloyerro mit dramatiquement en lumière le danger auquel une telle doctrine expose les concordats. Les gouvernants catholiques, obéissant au concile, devront les dénoncer, sacrifiant ainsi l'unité catholique[87] : cette unité dont jouit l'Espagne, qui a le grand mérite d'avoir sauvé le catholicisme à l'ère moderne, d'avoir rendu catholiques l'Amérique latine et les Philippines, d'avoir obtenu en notre temps «une grande et unique victoire contre le communisme». En Espagne les protestants sont trente mille, dont quinze mille seulement sont Espagnols, «en majeure partie séduits par le prosélytisme» et d'origine modeste : «Révérends Seigneurs, je vous prie d'avoir ces choses devant les yeux pour éviter les maux

p. 147 indiqués si le Gouvernement espagnol décidait la fin du Concordat et promouvait la liberté en matière religieuse comme on la propose dans le schéma»[88].

Le reproche fait à la déclaration d'être en contradiction ouverte avec le magistère pontifical, d'en évacuer l'autorité, de suggérer l'idée que l'Église ait pu se tromper, revient dans de nombreuses interventions[89]. Mgr Hervàs y Benet, prélat de Ciudad Real, auteur d'un votum long et détaillé, s'adresse à la fin directement au pape pour lui exposer les conséquences gravissimes que la doctrine contenue dans la déclaration – qui introduit des «choses nouvelles» dans l'enseignement ecclésiastique – aura forcément pour l'autorité du magistère pontifical[90].

En réalité, avec des accents et des approches divers, le thème de fond des discours des opposants se présente de manière identique et constante : la déclaration sur la liberté religieuse, telle qu'elle est bâtie et argumentée, contredit ouvertement le magistère traditionnel de l'Église et dément l'enseignement prodigué, avec une particulière clarté, par les papes des deux derniers siècles. La constatation était fondée. Suffisamment pour que les défenseurs de l'immutabilité et de l'intangibilité de la doctrine prennent peur et ouvrent la porte aux plus noirs soupçons à l'encontre de la partie adverse. Le rappel de la mutation des conditions historiques, mis en avant par les rédacteurs et les défenseurs de la déclaration, ne pouvait justifier des changements aussi substantiels. Ni l'autorité de Jean XXIII – désormais ouvertement jugé avec suffisance[91] – ni les affirmations de Pacem in terris auxquelles se référaient très souvent les partisans de la liberté religieuse, mais qui restaient d'ailleurs d'interprétation contestée[92], ne pouvaient suffire.

p. 148 Le fantasme du néo-modernisme, déjà évoqué dans les vota de la phase préparatoire comme un danger à vaincre et à condamner, flottait du reste depuis longtemps dans l'aula conciliaire[93]. L'affrontement n'était donc plus seulement entre diverses options doctrinales et pratiques, à maintenir opportunément telles quelles ou à équilibrer en une nouvelle synthèse : il mettait en jeu bien davantage et des choses plus graves. L'idée qu'une véritable volonté de subversion animait certains leaders et certains secteurs de la majorité, qu'une subtile infiltration ennemie était en cours dans l'Eglise, réapparaissait de toute évidence parmi les Pères et les théologiens de la minorité, et leurs dénonciations susurrées comme des alarmes angoissées semblaient ramener à la première décennie du siècle.

«Le dessein se fait de jour en jour plus manifeste, écrivait l'abbé Berto, théologien de confiance de Marcel Lefebvre à Carli, évêque de Segni, en recevant le texte du De libertate proposé par le Secrétariat en vue de la troisième session. Il ne s'agit plus désormais de doctrine, de justice, de tradition catholique. Il s'agit d'introduire, d'imposer, sous prétexte d'aggiornamento, un changement substantiel du catholicisme, et comme celui-ci ne peut advenir "per arma lucis", on cherche à le faire par des moyens violents, aujourd'hui le vacarme, demain le silence, aujourd'hui la précipitation, demain la lenteur, aujourd'hui le secret demain l'obscurité, tout cela calculé pour le triomphe de l’erreur. Que Votre excellence prenne (parmi tant d'autres !) l'exemple du schéma De libertate religiosa. Il a été modifié, certes. Mais n'était-ce pas une violence que le premier texte, qui aurait pu être signé de J.-J. Rousseau ou de Mazzini, ait été élevé au

p. 149 rang de schéma conciliaire ? N'était-ce pas une violence, ce discours de Mgr De Smedt, qui demandait que cette énorme question, si violemment reliée au schéma De œcumenismo et présentée neuf jours avant la fin de la session, soit discutée et le schéma voté dans ce délai ? [...] Ici, l'objectif particulier (l'objectif général étant de changer substantiellement la doctrine, voire la foi catholique elle-même) est de détruire complètement les principes les plus fondamentaux du droit naturel pour les remplacer par le pseudo-droit rationaliste, avec l'avantage supplémentaire de renverser tout l'édifice des pontifes romains jusqu'à Quanta cura et au Syllabus. Pie IX s'est trompé en matière de doctrine [...]. Du oui au non, d'une proposition à la proposition contraire, y aurait-il seulement un aggiornamento? Ne serait-ce pas un changement substantiel ? A mon avis, Eccellentissimo e Reverendissimo Signore, les adversaires savent qu'il s'agit d'un changement substantiel, ils le savent et le veulent. Ils ne veulent pas discuter, ils veulent imposer...»[94]

Ce sont des jugements très durs, qui ne laissent pas d'issue aux «adversaires». Certes il ne faut pas généraliser : ce ne sont pas ceux de toute la minorité. Mais ils expriment certainement des idées et des soupçons qui y circulaient, donnant à son opposition plus d'élan et de force, et qui étaient évidemment partagés par les Pères entourant le «Coetus internationalis».

Le seul point sur lequel les opposants apparaissaient hésitants et incertains semble concerner la voie à suivre pour obtenir la suppression, ou du moins une modification radicale du schéma. Diverses sont en effet les propositions avancées dans l'aula ou dans les coulisses : certains l'éliminent purement et simplement ; d'autres en demandent une refonte complète, éventuellement par une commission mixte ; d'autres encore acceptent que l'on parle de la liberté religieuse, mais ailleurs, par exemple dans le schéma sur l'Église et le monde d'aujourd'hui (schéma XIII), dont les incertitudes sur la durée du concile rendaient l'approbation peu probable ; d'autres enfin suggèrent de réduire la

p. 150 declaratio à quelques propositions affirmatives et de caractère pratique, privées de toute justification doctrinale.

Le débat sur un éventuel déplacement du texte n'est pas étranger à certains Pères favorables à la proclamation de la liberté religieuse, évidemment dans l'intention première d'émousser l'opposition, de faciliter un accord plus large. Mais y entraient aussi des perplexités persistantes, diversement motivées et orientées, sur le texte lui-même[95]. Au cours de l'intersession, le débat théologique et doctrinal avait été intense, manifestant une vaste gamme de positions et de nuances, qui trouvèrent à s'exprimer au moins en partie dans la discussion conciliaire[96]. Les interventions dans l'aula favorables à la déclaration apparaissent en effet beaucoup plus diversifiées que celles des opposants (au-delà de l'appel, relativement fréquent - neuf fois - à Pacem in terris de Jean XXIII, qui reste à peu près la seule référence magistérielle pour les partisans de la liberté religieuse[97]). Cela va en effet d'une approbation du texte en l'état, qui ne tient pas compte des critiques, à des propositions de modifications et d'améliorations qui entendent en élargir encore la portée, allant donc de façon plus décidée dans une direction nouvelle (significative en ce sens, encore que relativement isolée, l'intervention de Léger pose clairement le problème des

p. 151 athées, auxquels on ne peut refuser la liberté[98]), ou à la constatation qu'équilibrer et harmoniser le nouvel enseignement avec le magistère du passé est un vrai problème[99], sauf à se diviser à nouveau sur le choix des termes à utiliser. Mais une autre opposition, déjà esquissée au sein du Secrétariat et durant l'intersession, prend de plus en plus de consistance, entre ceux qui désirent accentuer les fondements évangéliques et théologiques de la liberté religieuse et ceux qui privilégient en revanche l'approche institutionnelle, laquelle assume et fait sienne la conscience nouvelle et croissante des droits de l'homme tels qu'ils ont mûri au cours de l'histoire[100].

Les incertitudes dans le camp de la majorité semblent se refléter aussi dans la qualité des interventions. Si en effet tous, ou presque tous, les ténors de l'aile conservatrice prirent publiquement position contre le schéma, on ne peut pas en dire autant du groupe de ses partisans connus ou présumés : les cardinaux allemands se taisent, les Français aussi, tout comme Suenens, Alfrink et Lercaro. Seul l'épiscopat des Etats-Unis, quasi unanime dans l'approbation, intervint avec tous ses cardinaux et un bon nombre d'évêques. Il ne s'était pas signalé jusqu'alors par un engagement réformateur particulier. Il trouva dans la liberté religieuse, comme l'écrivit avec une pointe d'ironie The Tablet, une cause qui lui permettait de s'aligner sur les progressistes sans troubler la foi ni la pratique de ses fidèles, et en même temps une occasion miraculeuse d'effacer l'ombre qui obscurcissait encore les relations des catholiques américains avec leurs

p. 152 compatriotes, comme l'avait prouvé la campagne de 1960 pour l'élection du président Kennedy[101]. Ce n'était pas par hasard que le père Murray, dans son article d'America du 30 novembre 1963, avait parlé de «la question de la liberté religieuse» comme du «problème américain au concile»[102].

Murray, en effet, outre qu'il joua un rôle décisif dans la réélaboration de la declaratio au lendemain du débat de septembre, fut incontestablement l'inspirateur principal des positions et observations que les évêques des États-Unis présentèrent dans leurs interventions pour soutenir la liberté religieuse[103]. Dans une longue étude du printemps 1964, qui présupposait une lecture attentive des nombreuses observations transmises par les Pères au Secrétariat, il avait exposé son orientation sur le sujet[104]. Il l'avait ensuite envoyée à tous

p. 153 les évêques américains et à une vingtaine d'autres Pères[105]. De plus, à l'assemblée des évêques américains réunis à Rome le 19 septembre, il avait présenté une série de commentaires critiques du texte de la declaratio qui devait être soumis au débat conciliaire quelques jours plus tard. Il prépara ensuite pour les évêques de nombreux schémas d'interventions coordonnées selon une stratégie globale visant à mettre en lumière les points forts de la question[106].

L'axe central de son argumentation  est l'affirmation que le problème de la liberté religieuse, tout en étant d'abord un problème politique et institutionnel désormais posé par la conscience civique, ne contredit pourtant pas la tradition chrétienne la plus authentique. Dans les interventions des évêques américains, on insiste donc sur le fait que le droit à la liberté religieuse et au libre exercice de la religion est une composante essentielle des droits inhérents à la personne humaine, non de façon abstraite et individualiste, mais en tant qu'appartenant à un corps social (Primeau)[107] ; c'est donc un concept juridique, qui concerne les relations concrètes entre les hommes, élément essentiel de la concorde civile (Shehan)[108]. Mais on rappelle aussi qu'on n'entend pas affirmer ainsi la faculté «de faire n'importe quoi en utilisant le nom de la religion», mais bien l'immunité «en matière religieuse, loin de toute obligation ou coercition»[109].

Il s'agit ici d'un point central de la position de Murray, pour lequel cette immunité dépendait en premier lieu de l'incompétence totale de l'État (appelé à intervenir dans les

p. 154 questions temporelles et terrestres, comme le magistère ecclésiastique l'avait plusieurs fois réaffirmé) à prononcer des jugements dans le domaine des vérités religieuses. De là découlait sa critique de la généralité périlleuse avec laquelle on évoquait dans la déclaration le droit des pouvoirs publics à poser des limites à l'exercice de la liberté religieuse. Il fallait donc fixer un critère qui réponde indirectement aux opposants au schéma, pour lesquels le pouvoir d'empêcher la diffusion des erreurs religieuses était reconnu comme un droit à «l'État catholique». Étant posé que l'Etat était incompétent à se prononcer sur la vérité ou l'erreur d'une religion, de même qu'il ne pouvait juger de la bonne ou de la mauvaise foi d'une conscience, et étant écarté en même temps le critère du «bien commun», réalité sociale englobante qui va au-delà de la sphère des pouvoirs publics ; le seul critère que l'on pouvait reconnaître à l'État pour intervenir dans ce domaine était celui de «l'ordre public»[110].

La proposition de Murray, reprise par la quasi-totalité de l'épiscopat américain[111], partait d'une perception des nécessités du présent et des occasions offertes à l'Église, de l'urgence de répondre aux totalitarismes contemporains, oppresseurs de la dignité de l'homme, de la volonté de donner une base solide au dialogue œcuménique. Toute la première partie de l'intervention du cardinal Meyer est bâtie sur ces arguments[112]. Par rapport aux critiques des opposants, cet agencement du discours déplaçait l'axe de la discussion. Il suivait une autre logique, qui s'inspirait empiriquement des expériences et des leçons de l'histoire ; mais il éludait ainsi

p. 155 une bonne partie des difficultés et des objections des adversaires, qui prétendaient se référer non à des conditions contingentes mais à des principes et à des idéaux pérennes, partie intégrante de l'identité même sous laquelle l'Eglise s'était pensée et présentée depuis des siècles. C'est pourquoi il ne réussissait pas à tenir tête à leur logique nécessairement déductive, fondée sur les droits de la vérité, ou de l'Église, selon ce que le magistère pontifical avait sans cesse affirmé depuis un siècle et demi. En outre, la thèse rassurante de la première relatio de Mgr De Smedt, réitérée dans les notes du texte et dans la ratio schematis[113], selon laquelle le magistère avait voulu condamner non la liberté religieuse mais les faux principes qui prétendaient la justifier, restait d'une démonstration douteuse[114]. Il en découlait une nette simplification et par certains aspects aussi une clarification du discours global, qui lui conféraient des limites bien précises. Cushing, de Boston, qui intervint dès le premier jour au nom de presque tous les évêques américains, le dit ouvertement avec sa voix tonnante et dans un latin que, malgré sa cadence solennelle, sa prononciation américaine rendait presque incompréhensible[115] : «D'une part, toute cette question de la liberté religieuse est compliquée d'une certaine manière. De l'autre cependant, il me semble que la question est assez simple». Il n'est pas douteux que toute la sympathie du cardinal allait à cette deuxième façon de voir les choses, loin des élucubrations et des subtilités scolastiques des théologiens européens. Il l'énonça ainsi : «Toute la matière peut être réduite en deux propositions : 1. Au long de toute son histoire, l'Église catholique a revendiqué pour elle la liberté dans la société civile et

p. 156 dans ses rapports avec les pouvoirs publics. Elle a lutté naturellement en faveur de la liberté des souverains pontifes et des évêques [...]. Elle a lutté aussi pour la liberté du peuple de Dieu [...]. La première proposition est donc contenue dans la formule traditionnelle : "Libertas Ecclesiae". 2. La seconde proposition est la suivante : cette même liberté dans la société civile que l'Église a toujours revendiquée pour elle et pour ses membres, elle la revendique aussi à notre époque pour les autres Eglises et pour leurs membres ou mieux pour toute personne humaine»[116].

Cushing trouvait le fondement de cette deuxième proposition dans Pacem in terris de Jean XXIII, pour lequel «toute société bien organisée se fonde sur la vérité, sur la justice, sur l'amour, sur la liberté»[117].

Dans le contexte des interventions de l'épiscopat américain, celle de Ritter, de Saint Louis, fit un peu bande à part. Tout en reconnaissant dans la liberté religieuse une «loi innée [...] fondée sur la nature humaine» et en se déclarant donc tout à fait favorable à sa reconnaissance par le concile, il proposa que la déclaration se limite simplement à la proclamer et si nécessaire à l'ordonner, en évitant toutefois de l'argumenter et de la motiver. En effet, les raisons adoptées dans le schéma lui apparaissaient faibles, incertaines, ouvertes à trop de débats et de controverses : «Il est à craindre qu'on discute plus amplement des points particuliers que de la substance ; que les Pères, refusant l'argumentaire, ne rejettent en fin de compte la déclaration elle-même»[118].

La proposition apparut étrange à beaucoup d'observateurs : elle semblait aller au-devant des opposants et ce n'est pas un hasard si elle fut promptement recueillie et adoptée

p. 157 par Browne[119], par Parente, et moins explicitement par Lefebvre. Mais ce fut aussi un signe de faiblesse, peut-être un indice de l'incertitude, chez les défenseurs de la liberté religieuse, quant au résultat d'un combat bloc contre bloc. Dans les couloirs du concile, on avança d'autres hypothèses : celle d'un Ritter mal conseillé[120], celle d'un expert qui lui aurait donné à lire au dernier moment un texte qui ne correspondait pas à sa pensée[121]. Congar nota : «Ritter est fort mécontent. Mais pourquoi a-t-il lu cela ?»[122]

Ce sont des opinions et des commentaires qui donnent aussi la mesure de l'incessante activité de coulisses, des contacts, tentatives, médiations, soupçons et manœuvres, bref, de la dynamique souterraine du concile, qu'on ne peut atteindre que très partiellement. Derrière toute intervention épiscopale en effet il y a presque toujours un expert, le conseil donné directement ou indirectement par un théologien, des échanges d'idées collectifs ou privés, sur lesquels les informations disponibles sont encore trop rares et hasardeuses. Siri écrivit à ce propos durant la troisième session : «L'histoire de ce concile est en bonne partie celle des experts parce qu'on a constaté une grande anémie du savoir théologique, aussi bien dans l'épiscopat que dans le Sacré Collège. Des Pères remarquables sont à la merci de quelque expert, de quelque professorello derrière lequel ils se réfugient»[123].

La remarque est hautaine et polémique et prend le ton de la dénonciation, mais elle n'est pas sans fondement. Elle a trouvé une large confirmation dans les sources et dans l'historiographie. Le débat sur la liberté religieuse se ressent lui aussi de cet enchevêtrement de relations, d'influences et d'échanges qui orientent et conditionnent la discussion. On en repère souvent les échos dans le caractère scolastique de

p. 158 beaucoup d'interventions, pas seulement de l'opposition mais aussi de la majorité, dans les subtilités agaçantes de textes qui présentent des passages typiques d'une dissertation académique abstraite de faculté de théologie des années quarante et cinquante, où les problèmes réels que l'on veut affronter apparaissent enveloppés et comme masqués par des médiations intellectuelles infinies.

Ce sont toutefois des Pères favorables à la liberté religieuse qui mirent en lumière l'aspect abstrait, livresque, des arguments et de la logique de leurs adversaires. Mgr Lemay, vicaire apostolique des îles Salomon septentrionales, l'écrivit avec simplicité et vivacité, dans une intervention que la clôture du débat l'empêcha de prononcer. La doctrine selon laquelle seule la vérité a droit à la pleine liberté et seule l'Église catholique doit donc pouvoir en jouir, «par sa superbe construction scolastico-théologique, captive facilement notre esprit. Soyons attentifs toutefois à ce qu'elle ne l'enchaîne pas ! Brisons plutôt ces chaînes et jetons-les aux pieds de la déesse Logique. Une telle manière de parler se trouve dans les livres qui dorment dans nos bibliothèques». Une déclaration formulée avec de tels critères «non seulement n'ouvre pas les fenêtres de l'Eglise, mais en referme pour des siècles portes et fenêtres». Ne devons-nous pas, vénérables Pères, parler au monde ? N'est-ce pas là l'objet de notre déclaration, que le pape lui-même nous a indiqué ? S'il en est ainsi, renvoyons cette manière de parler aux bibliothèques poussiéreuses et moisies du passé, «n'exposons pas notre Eglise aux récriminations de tout le monde non catholique. Pour ne pas salir notre Eglise et celle du Christ aux yeux du monde, abandonnons la manière de parler scolastico-théologique ; autrement, taisons-nous face au monde, ou bien n'introduisons pas dans le schéma une manière de parler incompréhensible»[124].

Sans négliger l'argumentation technique, pour chercher à réfuter de l'intérieur les critiques des opposants[125], les discours

p. 159 en faveur de la liberté religieuse se situèrent donc sur un autre plan, en recourant à des motivations concrètes, qui touchaient à la vie et aux besoins des hommes et à la réalité complexe du présent[126]. Viennent ainsi en premier lieu les exigences du dialogue œcuménique et l'affirmation que la dignité de là personne humaine et ses droits sont une valeur en soi, dont d'ailleurs les hommes prennent une conscience croissante. Et l'on observe que parler de droits de la vérité (ou de l'erreur) est une façon impropre et abstraite de procéder : seules les personnes sont détentrices de droits (et de devoirs[127]).

De Provenchères, archevêque d'Aix-en-Provence, dans une intervention qui ne fut pas lue dans l'aula à cause de la clôture du débat, insista de façon toute particulière sur l'importance de la déclaration pour la mission de l'Église dans le monde contemporain[128]. Il revendiqua dans ce contexte la nécessité que l'Église, à l'exemple du Christ et des apôtres, proclame explicitement sa renonciation à se servir des «moyens séculiers» pour la diffusion de l'Évangile, pour se confier à la seule «puissance de la parole de Dieu» : «Proclamant que cette vérité est la norme de son action, l'Église libérera certainement nombre d'hommes de bonne volonté qui, considérant de multiples abus historiques, retiennent que l'Eglise est une puissance séculière, infestée

p. 160 par l'impérialisme spirituel et inspirée par l'appétit de pouvoir»[129].

Emerge également la dénonciation des dangers et des difficultés que l'accusation persistante faite aux catholiques de se comporter différemment selon les circonstances, réclamant la liberté là où ils sont en minorité, pour la refuser aux autres quand ils deviennent majoritaires, peut créer à l'Église et à la vie publique des fidèles[130] : «La justice et l'équité interdisent d'introduire dans la vie sociale et civile une double mesure [...] et en ce qui concerne la liberté religieuse qu'il y ait une mesure pour les citoyens catholiques et une autre mesure pour les citoyens non catholiques»[131]. Mgr Ndungu, au nom de nombreux évêques d'Afrique, prit nettement position sur ce point : «Si l'on pense que, dans les États chrétiens, il faille défendre la religion chrétienne en limitant la liberté de profession des autres religions, on devra admettre que dans les États non chrétiens soit limitée à bon droit la liberté de la religion chrétienne ! Et ceci serait tout à fait dommageable pour l'Église, surtout en Asie et en Afrique»[132]. Les évêques d'Europe orientale, appuyés par le cardinal König, soulignèrent l'urgence d'une franche proclamation de la liberté religieuse «en faveur des pays soumis à un régime marxiste athée», qui pour être efficace ne peut qu'être entière et valide pour tous[133].

Une intervention obtint un grand succès : celle de Mgr Heenan, archevêque de Westminster. Il rappela les persécutions réciproques entre protestants et catholiques, qui ensanglantèrent, religionis causa, l'Angleterre au XVIè siècle. Mais depuis le siècle dernier, bien que l'Eglise anglicane soit Eglise d'État, les catholiques jouissent d'une totale liberté, les écoles catholiques bénéficient des mêmes droits et privilèges que les anglicanes : «En Angleterre donc, catholiques et non-catholiques sont convaincus que ce régime d'équité et de liberté est le seul qui puisse garantir la paix entre les

p. 161 citoyens»[134]. La liberté, incontestablement, peut présenter des risques. Pourtant qui pourrait lui imposer des restrictions ? Seul l'État dispose des moyens matériels nécessaires. Mais l'expérience démontre que l'ingérence de l'État dans les affaires religieuses a été souvent funeste : «De ce fait, nous sommes persuadés que toutes les religions doivent être juridiquement égales et exemptes de toute restriction, sauf celles absolument nécessaires au maintien de l'ordre public». Dans une déclaration comme celle-ci, et d'une telle portée, on ne peut se limiter, comme certains l'ont proposé, à énoncer les principes : parce qu'elle est de caractère pastoral, il est nécessaire de donner quelques indications des raisons pour lesquelles on en est arrivé à ces conclusions. «Pas de doute là-dessus. Beaucoup, en dehors de l'Église, croient que les catholiques ne défendent pas sincèrement la liberté religieuse. Déclarons une fois pour toutes au monde que nous prêchons du fond du cœur la pleine liberté pour tous les fils de Dieu»[135].

Reste pourtant que l'on perçoit le malaise causé par un texte qui présente des motivations pas toutes satisfaisantes[136] : malaise devant une histoire et un magistère d'antan vis-à-vis desquels il n'est pas facile de prendre clairement ses distances, histoire et magistère qui font partie eux aussi d'une tradition et d'une élaboration théologique longue et complexe. A cet égard, les considérations que Congar (qui avait rédigé l'été précédent pour le compte du secrétariat conciliaire de l'épiscopat français un commentaire de la déclaration à envoyer aux évêques) confiait à son Journal le 24 septembre : «Je passe l'après-midi [...] à étudier le De libertate religiosa et les réactions qu'il a suscitées. Je garde un malaise. Ce texte, finalement, est prématuré. Il nettoie entièrement la place de ce qui l'occupait, à savoir de la façon dont on a jusqu'ici parlé en cette matière, et remplace tout cela par

p. 162 Zone de Texte: !Iautre chose. On peut peut-être faire cela, mais il ne faut le faire qu'après mûre réflexion. Or on n'a pas eu le temps de suffisamment réfléchir. Il y a du vrai dans les objections faites au texte, dans les critiques du P. de Broglie. Il faut ajouter, augere vetera novis, non purement et simplement substituer. Mais, d'autre part, dans l'ancienne position, il y a une part de "traité théologique-politique" liée au temps, à la Chrétienté et à ses séquelles, qu'il faut aussi critiquer et dont il faut se dégager. Je vais voir Mgr Garrone pour lui suggérer de dire quelque chose en ce sens demain (il doit parler) et pour demander un temps de réflexion, peut-être une révision du texte en commission mixte avec la commission théologique. Mais il faudra que le texte garde un ton accessible aux hommes et ouvert à l'esprit kérygmatique et missionnaire. Ce que ne fait pas le P. de Broglie»[137].

Durant la dernière matinée, deux interventions, celle de Mgr Garrone et surtout celle de Carlo Colombo, théologien de confiance du cardinal Montini durant la première session, vont tenter d'offrir une plate-forme qui permette de surmonter au moins en partie les difficultés si nombreuses invoquées contre la déclaration. Dans les notes de son journal, l'évêque de Volterra, Marino Bergonzini, qui s'est montré perplexe tout au long du débat («A entendre les interventions on a l'impression que la question n'a pas été suffisamment approfondie, avec calme et sérénité, par les intervenants qui - en particulier les opposants – trahissent une mentalité séculaire et difficile à faire disparaître»[138]) en signale avec lucidité toute la portée : «Magistrales [...] les interventions de Mgr Garrone, Français, et de Mgr Carlo Colombo, Italien :

p. 163 elles suffisent à elles seules à éclairer la question et à la faire comprendre dans sa véritable signification»[139].

Garrone commença en reconnaissant l'opportunité de renforcer et de préciser dans la première partie les fondements doctrinaux de la déclaration, que pour le reste il acceptait. En particulier, il était nécessaire d'éclairer l'évolution historique qui avait conduit à cette doctrine. Ceux qui observent en effet le modum loquendi de l'Église dans les siècles passés pourraient l'accuser d'insincérité, et voir dans la déclaration une sorte de conversion factice, dictée par des motifs utilitaires. Et cette accusation, insinuation ou soupçon, serait d'autant plus à craindre que l'on donnerait l'impression de ne pas vouloir admettre cette apparente contradiction, même à titre d'hypothèse, au point de la passer sous silence. C'est pourquoi il entendait proposer un texte d'où il résulterait que «nous ne nions pas l'apparence de la contradiction, mais nous en repoussons légitimement la réalité», en accord avec ce qui a été dit, fuse et optime dans le premier rapport[140].

Le renvoi à l'argumentation justificative proposée par De Smedt dans son intervention au cours de la deuxième session est explicite. Celle de Garrone se présente en termes quelque peu différents. On trouve chez l'un et chez l'autre la reconnaissance d'une contradiction entre les deux doctrines, mais accompagnée de l'affirmation qu'il s'agit d'une pure apparence. Le pensaient-ils vraiment ? Congar ne le pensait certainement pas, ses notes du 24 septembre sur la déclaration suffisent à le démontrer, alors qu'il trouve pourtant le discours de Garrone sur l'évolution historique «tout à fait dans le sens de ce que j'ai demandé pour le schéma XIII»[141]. Une observation peut être, selon moi, considérée comme légitimement fondée : face à l'accusation des «Romains»[142] de vouloir démolir l'autorité pontificale, on estimait ne pas pouvoir dire en public quelque chose de plus ni de plus convaincant.

L'argumentation de Garrone se fonde sur une prémisse logique : il n'y a contradiction que lorsqu'on parle de la

p. 164 même chose et du même point de vue («Contradictio [...] est de eodem et sub eodem respectu»). Mais dans le cas en question, il ne s'agit ni de la même chose ni du même point de vue. Le sujet – autrement dit les conditions de la vie humaine en société – a profondément changé. La notion d'État est également bien différente de celle du Moyen Age et du siècle dernier. La liberté de la personne en restreint le pouvoir. Le bien commun lui-même est considéré en référence au monde entier et non plus au cadre limité du contexte national. De plus, la société est devenue pluraliste au point qu'y trouvent place, non seulement des confessions différentes, mais même ceux qui professent ouvertement l'athéisme. Et enfin, voici ce qui importe le plus : «avec le progrès de la connaissance de l'Évangile, les concepts qu'il renferme sur la justice et la dignité de la personne humaine se sont clarifiés et précisés»[143].

La façon de considérer le sujet a profondément changé aussi. Le Syllabus, par exemple, envisageait les choses quasi exclusivement sous un aspect global et objectif, il condamnait un principe général, expressément affirmé par beaucoup, à savoir que les convictions et les idées, vraies ou fausses, avaient la même valeur. Le problème de la liberté, tel qu'il se pose aujourd'hui, est tout autre : il s'agit en effet d'établir comment on doit agir vis-à-vis des personnes, qu'elles soient ou non dans l'Église, qu'elles professent ou non une religion. Les principes ne changent pas, ceux-là mêmes qu'on trouve dans le Syllabus, sur la valeur et le droit exclusif de la vérité, sur le fait que l'erreur ne peut pas ne pas causer des dommages à l'homme qui erre, sur l'obligation de rechercher la vérité et sur le droit au respect de tous dans cette recherche, sur le devoir et donc le droit de l'Église d'annoncer à tous les hommes la voie du salut. Ce sont des principes qu'il serait opportun de traiter dans l'exposé doctrinal. Mais le changement des situations a mis en relief le rôle de la conscience. C'est à la lumière de ces deux aspects que l'Église forme son jugement. L'apparence de la contradiction disparaît ainsi. On observe que dans le passé l'Église s'est comportée autrement que ce que dit la déclaration. Mais le jugement sur le passé

p. 165 est formulé en tenant compte du contexte historique, et le passé ne peut être jugé à la lumière du présent. On ne peut pas ne pas tenir compte de façons de penser, jadis quasi universellement acceptées, comme par exemple le fameux principe du «cuius regio, illius religio», jadis clé de voûte de l'ordre civil[144].

Garrone ne s'en tient cependant pas là : il introduit dans son discours un autre élément, qui se ressent du climat et des attitudes nouvelles apportées par Jean XXIII, mais encore timidement reçues dans les habitudes du monde ecclésiastique : à savoir la reconnaissance explicite que l'Église en ce domaine avait erréEt surtout l'Église, étant composée d'hommes jusqu'à son sommet, reconnaît s'être trompée quelquefois par fragilité humaine et n'hésite pas à en faire pénitence»[145]). La contradiction, niée sur le plan de la doctrine, est reconnue sur le plan des comportements, c'est-à-dire de l'application concrète qui a été faite de ces principes. Cela est explicite dans la conclusion du texte bref, rappel de ce qu'il avait dit, que Garrone proposa d'insérer dans la déclaration : «L'Église ne nie même pas que dans le passé sa façon de faire n'ait pas toujours été en accord avec cette doctrine ! Elle demande toutefois qu'on tienne compte du contexte social de chaque époque afin que soit formulé un jugement équitable, et aussi du nécessaire progrès qui réclame du temps dans la perception des notions morales. Mais si quelques-uns de ses gestes ont été impardonnables, l'Eglise n'hésite pas à s'en repentir humblement»[146].

L'intervention de C. Colombo, devenu Père conciliaire depuis peu, clôt le débat[147]. Elle fut suivie avec une attention particulière et fit impression, «car chacun sait dans l'aula que ce point de vue est très proche de celui du pape», nota

p. 166 Henri Fesquet[148]. Siri, qui écrit deux jours plus tard, considérait comme «évidente la position prééminente dans le domaine doctrinal de Mgr Carlo Colombo auprès du pape»[149]. En forçant toutefois la réalité, il le dépeignait comme «entièrement avec les Transalpins», exprimant ainsi son désappointement de l'absence d'unité de l'épiscopat italien[150]. Colombo n'avait pas soumis à l'avance son discours à Paul VI : il le lui envoya en effet seulement le 27 septembre[151]. Mais il connaissait très bien ses préoccupations[152]. L'attention avec laquelle il fut suivi, dit-on alors, ne tenait pas à l'idée qu'il disait des choses que le pape aurait voulu dire, mais à la conviction que Colombo n'aurait pu dire ce qu'il disait si le pape avait été d'un avis opposé[153]. Les choses, toutefois, ne sont pas toujours aussi simples : parce que, on le verra, les perplexités et les préoccupations de Paul VI à propos du texte du De libertate sembleront plus fortes que ce que l'intervention de Colombo avait pu donner à penser.

Il parla en un sens «substantiellement favorable» à la déclaration, mais aussi pour «inviter à une révision assez profonde du texte, en préparant psychologiquement le terrain pour celle-ci»[154]. Selon le témoignage autorisé du père Hamer il s'agit de la «contribution la plus positive pour l'avenir du schéma»[155]. Aussi lui accorderons-nous une assez large place.

En ouverture, Colombo rappela l'importance de la déclaration : beaucoup d'hommes cultivés, y compris en Italie, l'attendent comme le «punctum saliens» du dialogue possible ou du fossé infranchissable entre la doctrine catholique et la sensibilité des hommes de notre temps. La doctrine

p. 167 catholique sur la question doit donc être exposée avec grand soin en des termes intelligibles à tous les hommes de bonne volonté. Tous les principes doctrinaux qui régulent les relations de la personne humaine avec la vérité religieuse et morale doivent être énoncés de manière plus complète que ne le fait la déclaration, pour éviter que l'on puisse penser que la doctrine proposée est le fruit de quelque compromis, et non d'une application nouvelle de principes immuables[156].

Colombo énonça trois principes, deux naturels et un révélé, sur lesquels fonder la doctrine catholique de la liberté religieuse. Le premier principe est le droit naturel de tout homme à rechercher la vérité, spécialement dans le domaine religieux et moral, et de la suivre selon la manière dont elle se sera manifestée dans la conscience de chacun. A cet égard, significativement, il cita comme la première parmi les autorités de l'Église à avoir affirmé ce principe au concile le cardinal Montini qui, dans son intervention du 5 décembre 1962, avait soutenu la nécessité de reconnaître ouvertement le droit naturel et premier - qui est même de droit divin - des hommes à accéder à la vérité, spécialement à ces vérités fondamentales de la vie que sont les vérités religieuses ; un droit qui ne peut être entravé par la force sinon de manière injuste. Tout le monde sait que Jean XXIII proclama solennellement ce même droit dans Pacem in terris. Ce droit a pour conséquence, d'une part, la liberté de recherche, qui ne peut être entravée par aucune violence physique ou morale, car l'esprit humain se plie à la raison, non à la coercition, et de l'autre, la libre communication sociale de la vérité que l'on a trouvée ou cru avoir trouvée. Étant donné sa nature sociale, en effet, la personne humaine ne peut mûrir et grandir dans la vérité qu'en dialogue avec les autres hommes. Il est donc clair que la libre communication de ses propres idées, y compris dans le domaine religieux, appartient à ces droits fondamentaux de la personne que le pouvoir civil ne peut interdire.

Le deuxième principe provient de l'obligation - qui devient donc un droit inviolable de tout homme - de suivre le dictamen de sa conscience, évidemment aussi en matière religieuse, obligation intimement liée à sa vocation

p. 168 fondamentale. Colombo reconnaissait que le texte de la déclaration parle clairement de cette obligation et de ses conséquences ou limites.

Le troisième principe, révélé, repose sur la liberté et le caractère surnaturel de la foi chrétienne catholique. De ce principe, deux conséquences découlent : la foi est d'autant plus authentique qu'est plus libre et personnelle l'adhésion à Dieu et à l'Église ; les rapports du simple citoyen, d'un peuple ou d'un État quelconque, avec la vérité chrétienne et catholique, sont complètement soustraits au jugement des pouvoirs publics, qui ne peuvent savoir quand les individus en question reçoivent de Dieu le don surnaturel de la foi, alors qu'ils sont tenus de protéger les droits naturels de tous leurs citoyens.

De ces principes, il découle que l'ordre social correct doit tendre à accorder à tous la plus grande liberté en matière religieuse, de façon que chacun, selon le dictamen pratique de sa conscience, recherche et communique la vérité, la suive et en fasse une règle de vie, en privé comme en public, aussi bien individuellement que dans une communauté religieuse. Cette liberté, toutefois, doit toujours s'exercer dans le respect de la loi naturelle, dont les pouvoirs publics sont tenus d'assurer l'observance. Ces principes, liés à la nature même de l'homme et à la révélation, sont immuables et valent en tout temps et pour tous les hommes - donc pas seulement là où les catholiques sont en minorité, mais aussi là où ils sont majoritaires.

A ces énoncés, qui impliquaient non seulement un complément, mais aussi une autre structure du schéma, Colombo ajouta, en conclusion, quelques recommandations supplémentaires, qui entendaient manifestement tenir compte de certaines préoccupations des opposants, sans toucher le moins du monde aux droits à la liberté énoncés précédemment. Après avoir exposé avec clarté les principes catholiques de la liberté religieuse, la déclaration, pour ne pas donner lieu à quelque subjectivisme ou relativisme, devrait pour cela déclarer avec autant de vigueur deux autres choses : a) l'obligation de tout homme de rechercher la vérité, spécialement en matière religieuse, et par des moyens adaptés, parmi lesquels, dans l'ordre actuel de la Providence, on compte la

p. 169 juste estime de l'autorité doctrinale du magistère de l'Église ; et b) la valeur de la vérité révélée comme élément essentiel du bien commun dans toute société humaine[157]. Mais à cet égard, il faut se rappeler que la vérité révélée ne peut être communiquée par des moyens de nature politique : seulement par sa libre communication et par le témoignage de ceux qui croient en elle. Aussi les pouvoirs publics ne doivent-ils pas s'ingérer dans les questions religieuses, mais seulement faire en sorte que tous les citoyens aient le champ libre pour exposer la vérité à laquelle ils croient, et qu'en particulier l'Église soit libre d'annoncer sa doctrine de salut. Et il ne faut pas craindre que la vérité succombe à l'erreur : à sa force intrinsèque s'ajoute en effet la grâce divine[158].

Colombo concluait donc par des mots de confiance et d'espoir, qui pouvaient cependant difficilement convaincre les opposants, rivés à une autre logique et à un autre ordre de considérations. Le bloc de leurs interventions apparaissait en effet massivement orienté. Semmelroth, dans son Journal, ne cache pas une impression «dans une certaine mesure» négative : «Les opposants avaient évidemment bien organise leur stratégie»[159]. En effet, environ la moitié des interventions s'était exprimée en termes résolument opposés au schéma. Une proportion, comme l'écrivit Henri Fesquet, «à première vue déroutante»[160]. On pouvait toutefois penser qu'au moment du vote, comme cela était déjà arrivé, les choses se présenteraient autrement[161]. Commentant non sans un certain optimisme naïf l'ensemble du débat, Fesquet croyait pouvoir conclure que «Vatican II a fait éclater ce préjugé si courant chez les catholiques que la doctrine de l'Église est immuable»[162]. En réalité, on était bien loin de pouvoir affirmer quelque chose de ce genre : on le voit dans la difficulté des discussions ; et le parcours conciliaire tourmenté du De libertate le confirmera.

À la clôture du débat dans l'aula le Secrétariat pour l'unité

p. 170 se mit immédiatement à l'œuvre pour réélaborer le schéma à la lumière des interventions publiques et des observations écrites envoyées par les Pères[163]. C'est à ce moment que la participation de Murray aux travaux de la Commission devint officielle[164] ; il y prendra progressivement un rôle décisif pour orienter le schéma dans une direction plus attentive aux aspects politico-institutionnels, dans la ligne de ce qu'il avait soutenu depuis l'automne précédent[165]. Cela permettait de redonner quelque crédit aux préoccupations des Espagnols, en refusant toutefois la prétention de présenter leur système comme la réalisation de «l'idéal catholique»[166]. L'étude préparée par Murray au printemps 1964 avait déjà affirmé la nécessité d'abandonner complètement la théorie de la thèse et de l'hypothèse, bâtie sur des fondements faibles, trop tributaire de conditions historiques précises[167].

À la fin de septembre et au début d'octobre, deux points de vue, comme on l'a plusieurs fois relevé dans les observations de Murray, se confrontèrent à l'intérieur du Secrétariat : l'un, que l'on définira «français», selon lequel le droit à la liberté religieuse représente en premier lieu une question théologique et morale, de laquelle découlent des conséquences juridiques et politiques ; l'autre, «anglo-italien», car il aura pour protagonistes Mgr Pavan et le Père Murray, qui privilégiait une approche de type politique et juridique, laquelle peut trouver appui sur des raisons théologiques et morales[168]. Dans la première décade d'octobre, la sous-commission chargée de réélaborer la déclaration avait

p. 171 désormais opté résolument pour cette dernière position[169] quand un grave incident vint en troubler les travaux.

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[1] AS III/2, p. 492.

[2] http://www.virgo-maria.org/articles/2008/VM-2008-06-04-A-00-Mgr_Lefebvre_a_Vatican_II.pdf

[3] http://www.editionsducerf.fr/html/fiche/ficheauteur.asp?n_aut=65

[4] Ibid., p. 490-492. Les raisons de son opposition sont amplement argumentées dans les notes préparatoires de son théologien de confiance ; voir V.-A. BERTO, Pour la Sainte Église romaine. Textes et documents, Paris, 1976, p. 370-407. Parmi les membres actifs du «Coetus» intervint aussi dans l'aula l'évêque de Campos, Antonio de Castro Mayer (AS III/2, p. 485 s.), et durant l'intersession, Mgr de Proença Sigaud avait envoyé un long votum écrit (AS III/3, p. 648-657). Sur le «Coetus», voir L. PERRIN, «Il "Coetus internationalis patrum" e la minoranza conciliare», dans Evento, p. 173-187 et H/V III, p. 190-195.

[5] AS III/2, p. 492.

[6] Journal, 24 septembre.

[7] Voir AS III/2, p. 639 (Carinci), p. 658-666 (Del Campo y de la Barcena), p. 678 (Flores Martin).

[8] Ibid., p. 683-686 (Garcia de Sierra y Méndez).

[9] AS I1112 (Carinci), p. 611.

[10] Ibid.

[11] Fonds Carli, 15.35, lettre du 5 août 1964. On trouvait déjà les mêmes insinuations et soupçons dans une longue lettre de Berto à Carli le 13 mars (ibid., 17.1).

[12] Congar observe dans son Journal le 23 septembre : «Comme le note avec quelque pointe de critique le P. de Lubac qui est près de moi, la toute petite minorité arrivera, en partie au moins, à ses fins. On finira par céder à ses cris comme des parents, pour avoir la paix, finissent par céder à des enfants récalcitrants...».

[13] Congar semble même partager «le sentiment général : on est en avance sur le planning». Et il ajoute : «On pourrait bien finir le concile cette année, et même, après une interruption brève, rappeler les évêques pour voter les textes. Ainsi ceux des régions lointaines n'auraient pas à revenir». (Journal, 25 septembre).

[14] AS V/2, p. 293.

[15] Voir H/V III, p. 307 s., en particulier 314-318.

[16] Ibid., p. 303-304 ; H. FESQUET, Le journal du Concile, 1966, p. 334 s. et 342 s. Le cardinal Bea, dans une interview publiée le 18 avril 1964 dans CivCat 115 (1964), vol. II, p. 109, notait «l'importance» des deux textes «pour la vie de l'Eglise d'aujourd'hui et pour sa position dans le monde moderne», et de même Congar, dans son Bloc-notes, relevait «combien ces deux déclarations ont leur place au cœur des démarches par lesquelles les rapports entre l'Eglise et le monde doivent se développer dans un nouveau climat» (ICI 227, 1" novembre 1964, p. 23).

[17] Felici, dans sa note du 14 octobre destinée au pape (AS V/2, p. 795). Voir pour l'émergence de cette opposition depuis la phase préparatoire A. INDELICATO, Difendere la dottrina o annunciare l'evangelo. Il dibattito nella commissione centrale preparatoria del Vaticano II, Gênes, 1992, p. 298 s. ; M. VELATI, «La proposta ecumenica del segretariato per l'unità dei cristiani», dans Verso il concilio, p. 326 s.; S. SCATENA, «Lo schema sulla libertà religiosa : momenti e passaggi dalla preparazione del Concilio alla seconda intersessione», dans Experience, p. 347-417. Voir aussi le tableau de la longue Nota informativa sur la liberté religieuse adressée par Mgr Pavan à Paul VI le 30 mars 1964 (dans AS VI/3, p. 113-122).

[18] On trouve un exposé développé de cette conception dans l'ouvrage de A. OTTAVIANI, Istitutiones Juris Publici ecclesiastici, II, jus Publicum externum (Ecclesia et Status), Rome, 1948, en particulier p. 46-62 (Status et religio) et 62-77 (De tolerantia falsorum cultuum). Voir aussi du même auteur Doveri dello Stato Cattolico verso la Religione, Rome, 1953, et Il baluardo, Rome, 1961. Pour les origines et les développements de cette doctrine, voir D. MENOZZI, La Chiesa cattolica e la secolarizzazione, Turin, 1993.

[19] Voir à ce sujet, pour la période fasciste, P. SCOPPOLA, «Il fascismo e le minoranze evangeliche», dans II fascismo e le autonomie locali, sous la dir. de S. Fontana, Bologne, 1973, p. 331-394 et G. ROCHAT, Regime fascista e Chiese evangeliche, Turin 1990, p. 29 s. En vue de la visite de Churchill au Vatican le 31 juillet 1944, la Secrétairerie d'État prépara une série de «notes» dans lesquelles, entre autres, en se référant au concordat, on relevait l'inopportunité et les risques d'une croissance de la propagande protestante en Italie (voir G. MlCCOLI, «La Chiesa di Pio XII nella società italiana del dopoguerra», dans Storia dell'Italia repubblicana, vol. I, Turin, 1994, p. 552 s.). Pour les années ultérieures, voir La libertà religiosa in Italia, «Quademi del Ponte», Florence, 1956; et CONSIGLIO FEDERALE DELLE CHIESE EVANGELICHE D'ITALIA, Intolleranza religiosa in Italia nell'ultimo quinquennio, Rome, 1953.

[20] On trouvera une ample bibliographie du débat sur la condition des protestants en Espagne dans CAPRICE, III, p. 449, n. 7. Pour un tableau général des rapports des catholiques avec le régime franquiste, voir G. HERMET, Les Catholiques dans l'Espagne franquiste, 2 vol., Paris, 1981 et G. VERUCCI, La Chiesa nelle società contemporanea, Bari, 1988, p. 140 s.

[21] AD II/2, 4, p. 657-672 (le passage cité est à la p. 661). Ce texte est analysé dans R. ROUQUETTE, La Fin d'une chrétienté. Chroniques, II, Paris, 1968, p. 529-531. Voir aussi J. KOMONCHAK dans H/V I, p. 331-336.

[22] On peut considérer comme un manifeste de cette tendance, bien qu'alors sans retombées immédiates, le texte du père CHENU, «La fin de l’ère constantinienne» dans Un concile pour notre temps, «Rencontres», 62, Paris, 1961, p. 59-87.

[23] Voir à ce sujet les observations de J. COURTNEY MURRAY, «Religious Freedom», dans The Documents of Vatican II, W. M. Abbott éd., New York, 1966, p. 673.

[24] Voir Fonds De Smedt A/l : «Personne ne doit s'étonner que notre Secrétariat s'occupe du problème de la liberté religieuse. En effet, les non-catholiques s'occupent plus que jamais de cette question, et l'Église est régulièrement accusée d'intolérance, là où elle se trouve en situation majoritaire, et d'exiger en revanche la tolérance et la liberté religieuse, là où elle est en situation minoritaire».

[25] Ainsi, par exemple, De Smedt, durant la séance plénière du Secrétariat pour l'unité des chrétiens, tenue à Rocca di Papa, au cours du débat de la IVè sous-commission du 27 août 1961 (Fonds De Smedt, 13, 8/1, f. 5).

[26] Voir J. COURTNEY MURRAY, «Vers une intelligence du développement de la doctrine de l'Église sur la liberté religieuse», dans La Liberté religieuse. Declaratio «Dignitatis humanae personae», «Unam Sanctam», 60, Paris, 1967, p. 147.

[27] Voir aussi J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration conciliaire sur la liberté religieuse Dignitatis humanae», dans Paolo VI e il rapports Chiesa-mondo al concilio, Pubblicazioni dell'Istituto Paolo VI », 11, Brescia, 1991, p. 119 s.

[28] Sur les circonstances qui amenèrent le Secrétariat à s'occuper de la question, voir H/V I, p. 331-336 et H/V III, p. 307-311 ; voir en outre J. HAMER, «Histoire du texte de la Déclaration...», dans La Liberté religieuse..., p. 53 s.

[29] Lors de la séance du Secrétariat de février 1961 (IV' sous-commission), dans Fonds De Smedt, 12.4/1, f. 1. J. HAMER, «Histoire du texte...», p. 53 s., s'arrête longuement sur les changements subis dans l'agencement du schéma.

[30] Voir J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration conciliaire...», p. 120. On trouve des exemples significatifs de cette attitude dans les lettres du cardinal Ruffini écrites pendant le concile : voir F. M. STABILE, «Il cardinale Ruffini e il Vaticano II. Le lettere di un "intransigente"», dans CrSt XI (1990), p. 137 et 146. Typique, à cet égard, la note manuscrite qui résume une intervention de Mgr Michele Maccarrone au bas de certaines observations dactylographiées du père Boyer : «L'histoire de l’Église ne peut se tromper. Les principes de l'Église sont toujours les mêmes, mais les hommes et les États changent, de sorte qu'on a dû appliquer les principes de diverses manières» (Fonds De Smedt, 12. 5/4, f. 4n.n.).

[31] Voir V. CARBONE, «Il ruolo di Paolo VI nell'evoluzione e nella redazione della dichiarazione Dignitatis humanae», dans Paolo VI e il rapporto Chiesa-mondo..., p. 129. Voir aussi S. SCATENA, «Lo schema sulla libertà religiosa...», p. 361-366.

[32] Cité dans S. SCATENA, p. 364, n. 66.

[33] H/V III, p. 311-315.

[34] Ce critère de lecture est amplement exposé dans la Ratio schematis rédigée en vue de la présentation de la Declaratio : due au père Murray, auquel étaient déjà dues en grande partie les notes explicatives du texte de cette Declaratio (voir HIV III, p. 309 s. et 316 s.), elle reprenait des idées qu'il avait déjà exposées (voir «On religious liberty», dans America 109 [1963], p. 704-706) et qu'il reprendra largement dans «Vers une intelligence du développement...», p. 111-147. Mais il est significatif que le même type de lecture des documents pontificaux du XIX° siècle soit proposé, comme me le signale Achille Erba, par Jacques Leclercq, ancien professeur suspect de l'Université de Louvain, que De Smedt connaissait certainement ; voir J. LECLERCQ, La Liberté d'opinion et les catholiques, «Rencontres», 65, Paris, 1963, p. 178 s. (Voir à son propos Catholicisme, VII, col. 154 s.)

[35] Voir H/V III, p. 319-321. Voir aussi CAPRILE, III, p. 563 ; H. FESQUET, Le journal du Concile, p. 382 s. ; A. WENGER, II, p. 186 s.

[36] Journal Congar, 6 février.

[37] AS V13, p. 288.

[38] Ibid., p. 500.

[39] H/V III, p. 418-420. Voir aussi AS V/2, p. 165-169. On trouve une longue analyse dactylographiée du travail accompli à cette occasion, datée du 9 mars 1964, rédigée par le père Hamer, dans le Fonds De Smedt 17.7/6 (au L 14 il relève : «la part de Mgr Pavan a été décisive»). Voir aussi S. SCATENA, p. 397 s.

[40] Voir J. HAMER, «Histoire du texte... », p. 73.

[41] Dans Fonds De Smedt 17.7/6, f. 1 (il s'agit du rapport du père Hamer dont il est question ci-dessus, n. 2). Voir aussi S. SCATENA, «Lo schema...», p. 403. La longue note informative envoyée à Paul VI par Mgr Pavan le 30 mars 1964 tend plutôt à mettre en lumière que «quant au fond du problème, les Pères conviennent - on peut dire à l'unanimité - que la liberté religieuse, aujourd'hui, doit être reconnue à tous», tout en relevant la différence profonde, doctrinale et pastorale, entre les deux groupes opposés (AS VI/3, 119 s.)

[42] Voir Relatio super declarationem de libertate religiosa, dans AS III/2, p. 345-346.

[43] Le concept de «vocation divine» comme fondement du droit à la liberté religieuse était dû au père Fuchs (voir le rapport Hamer du 9 mars 1964 : Fonds De Smedt, 17.7/6, f. 11-13). Pour son abandon ultérieur, voir J. HAMER, «Histoire du texte...», p. 74 s.

[44] Voir à ce sujet les observations pertinentes de J. HAMER, p. 76.

[45] Voir ibid., p. 71 s. ; D. GONNET, s. j., La Liberté religieuse à Vatican II. La contribution de John Courtney Murray, s. j., Paris, 1994, p. 122 s.

[46] Voir plus loin p. 485 s.

[47] Voir le chapitre I de ce volume, mais aussi, pour les précédents, H/V III, p. 76-122.

[48] Texte dans AS III/2, p. 348-353.

[49] AS III/2, p. 348.

[50] Ibid., p. 349. Pour soutenir cette affirmation, il cita un passage d'un discours de Paul VI qui avait parlé explicitement de «liberté religieuse» en s'adressant aux participants d'un séminaire européen de l'ONU sur la liberté d'information : PAUL VI, Encicliche e discorsi, janvier-avril 1964, vol. II, Rome, 1964, p. 510.

[51] AS III/2, p. 350.

[52] Ibid., p. 351.

[53] Ibid.

[54] Ibid.

[55] Ibid., p. 352.

[56] Voir A. RICCARDI, «Chiesa di Pio XII o Chiese italiane ?», dans Le Chiese di Pio XII, Bari, 1986, p. 40 et 51, n. 93. Pour cette conception des rapports Église-État, voir ici p. 126, n. 1. Il est significatif d'autre part qu'ait circulé au concile le bruit, repris par Daniélou, selon lequel la déclaration sur la liberté religieuse était dirigée contre l'Espagne et l'Italie (Journal Dupont, 12 octobre).

[57] Ces préoccupations apparurent dans les interventions de l'évêque de Lodz, Klepacz, qui parla au nom des évêques polonais (AS III/2, p. 503 s.), de l'archevêque de Cracovie, Wojtyla (ibid., en particulier p. 531 s.), et avec un rare tranchant dans celle de Mgr Cekada, évêque de Skoplje (ibid., p. 378 s.).

[58] AS III/2, p. 352 : «Il n'est pas possible de trouver une formule qui puisse entraver la puissance publique si elle est de mauvaise volonté», affirmation que dans son intervention orale De Smedt reprit ainsi : «Cela est impossible» (ibid., p. 353, n. 3).

[59] Ibid., p. 353.

[60] Ibid.

[61] Intervinrent dans l'ordre Ruffini, Quiroga y Palacios, Léger, Cushing, Bueno y Monreal, Meyer, Ritter, Silva Henriquez, Ottaviani. La matinée fut close par Mgr Cekada, évêque de Skoplje. W. A. Quanbeck, dans son rapport au COE sur les premières semaines de la troisième session, la décrivit comme une journée «exceptionnellement dramatique, avec d'excellents discours» (ACO, 5.51, f. 4) ; le texte du rapport porte la date du 24 septembre, mais en réalité il fait allusion à des événements qui eurent lieu à la fin du mois.

[62] Journal, 23 septembre.

[63] AS II/2, p. 354-356.

[64] AS II/2, p. 355.

[65] Ibid.

[66] Ibid., p. 356. Voir A. MERCATI, Raccolta di concordats su materie ecclesiastiche tra la S. Sede e le Autorità civili, vol. II, 1915-1954, Tipografia Poliglotta Vaticana, 1954, p. 84 et 272.

[67] AS III/2, p. 356.

[68] Voir à ce sujet J. IRIBARREN, Papeles y Memorias. Medio siglo de relaciones Iglesia-Estado en Espaga (1936-1986), Madrid, 1992, en particulier p. 235 s. Un appel ronéotypé de prêtres espagnols adressé aux Pères conciliaires le 29 septembre 1964 pour dénoncer l'oppression du régime et les compromissions de l'épiscopat dans Fonds Lercaro XXXI, 1090. Pour de précédents appels analogues, voir S. SCATENA, «Lo schema sulla libertà religiosa...», p.,382, n. 155. On trouve des observations intéressantes sur l'attitude du catholicisme espagnol par rapport à la tolérance et la liberté religieuse dans le Rapport confidentiel sur la situation actuelle des protestants en Espagne, envoyé le 2 juillet 1961 à De Smedt par H. Carlier, prêtre belge engagé dans des activités œcuméniques (Fonds De Smedt 13.9/2 ; voir à se sujet S. SCATENA, p. 367, n. 82). On verra la mesure des tensions existantes au sein du catholicisme espagnol dans la lettre que l'abbé de Montserrat, Escarre, adressa le 7 décembre 1964 (de France, pour échapper à la censure gouvernementale) à De Smedt pour le remercier, au nom «de plusieurs personnalités catalanes, d'intellectuels et de jeunes», de son engagement en faveur de la liberté religieuse, et pour lui demander «de poursuivre, avec le même courage, cette mission de défendre la vérité et la liberté la plus fondamentale». «Malgré la publicité [...] qu'on a faite de la démocratie et des grandes qualités des structures officielles existantes dans notre pays [...] au fond nous devons vivre soumis à la pression d'une tyrannie idéologique et d'une vigilance policière. Cette situation, aggravée par l'isolement traditionnel du catholicisme espagnol, nous conduit à vivre dans les ténèbres d'une ignorance et d'une superbe édifiées sur de faux fondements. Le problème de l'Eglise espagnole, on doit le résoudre en tenant compte qu'elle ne peut pas se considérer pratiquement comme une Église nationale, mais à l'échelle de l'Eglise universelle. Seulement ainsi nous pourrons retrouver une normalité et une perfection de vie spirituelle  et politique que l'Espagne n'a pas connue depuis des siècles» (Fonds De Smedt 18.2/4).

[69] AS II/2, p. 357 s.

[70] Ibid., p. 483 s.

[71] Ibid., p. 499.

[72] Ibid., p. 509.

[73] AS II/2, p. 486. H. FESQUET, Le journal du Concile.., p. 477 s., s'appuyant sur les informations fournies par le «service de presse» français, attribua à cette intervention un ton et des arguments encore plus arrogants ; voir la mise au point de A. WENGER, III, p. 323, n. 6, qui reconnaît cependant que «l'exemple choisi était très peu œcuménique».

[74] A. WENGER, III, p. 320.

[75] AS III/2, p. 375.

[76] Ibid., p. 470. Il vaut la peine de rappeler le portrait, plein d'affectueuse ironie, que traça de lui Congar en une autre occasion (Journal, 29 octobre) : «Moeller me faisait remarquer, au cours de la séance de cet après-midi, combien le cardinal Browne, tout bon et honnête qu'il est, a une structure d'esprit proprement effroyable. Il est demeuré, sans avoir bougé d'un pouce, tel que je l'ai connu comme "Maître du Sacré Palais" et Général. Le ressourcement ne l'a pas entamé d'un micron. Pour lui, aujourd'hui comme il y a vingt ans, le Pape est "episcopus universalis" : c'est toute son ecclésiologie ; "les encycliques ont corrigé S. Paul", tout ce qui affirme la soumission est bien, tout ce qui parle pour la liberté est à restreindre et si possible, à exclure. Il ne rate pas une occasion de parler dans le sens de ces "principes" misérables. Avec Moeller on le voit venir, on se dit d'avance quelle va être la réaction Browne que les mots suffisent à déclencher : et cela ne rate jamais. On est sûr que s'il y a les mots "amour", "expérience", il aura une difficulté. Et que s'il est affirmé pour la 39è fois que tout se passe "sub Petro" et qu'il faut "reverenter oboedire", ce sera très bien».

[77] Voir respectivement AS III/2, p. 539-542 (ajout écrit, p. 542-552) et 734-737.

[78] Ibid., p. 490-492. Les raisons de son opposition sont amplement argumentées dans les notes préparatoires de son théologien de confiance ; voir V.-A. BERTO, Pour la Sainte Église romaine. Textes et documents, Paris, 1976, p. 370-407. Parmi les membres actifs du «Coetus» intervint aussi dans l'aula l'évêque de Campos, Antonio de Castro Mayer (AS III/2, p. 485 s.), et durant l'intersession, Mgr de Proença Sigaud avait envoyé un long votum écrit (AS III/3, p. 648-657). Sur le «Coetus», voir L. PERRIN, «Il "Coetus internationalis patrum" e la minoranza conciliare», dans Evento, p. 173-187 et H/V III, p. 190-195.

[79] AS III/2, p. 492.

[80] Journal, 24 septembre.

[81] Voir AS III/2, p. 639 (Carinci), p. 658-666 (Del Campo y de la Barcena), p. 678 (Flores Martin).

[82] Ibid., p. 683-686 (Garcia de Sierra y Méndez).

[83] AS I1112 (Carinci), p. 611.

[84] Ibid.

[85] Ibid., p. 642 (Castân Lacoma).

[86] Ibid., p. 663 (Del Campo y de la Barcena).

[87] Même remarque dans l'intervention de Garcia y Goldaraz, archevêque de Valladolid (ibid., p. 689).

[88] Ibid., p. 614. Au cours de l'intersession Muňoyerro avait déjà envoyé un long votum écrit fortement critique du schéma (dans AS III/3, p. 629-632).

[89] AS III/2, p. 642 (Castàn Lacoma), p. 730 (Piňa Torres), p. 740 (Santin).

[90] Ibid., p. 708. Le votum que le même prélat avait envoyé par écrit pendant l'intersession était tout aussi négatif (AS III/3, p. 685-697).

[91] Voir, par exemple, Journal Tucci, 18 novembre 1962 (Siri aurait dit que l'idée de convoquer un concile avait été «un quart d'heure de folie de Jean XXIII»).

[92] Voir J. HAMER, «Histoire du texte...», p. 69-71. Le maître général des Frères prêcheurs, A. Fernàndez, contesta dans son intervention l'interprétation que donnent de Pacem in terris les partisans des «nouvelles doctrines» (AS III/2, p. 540 s.), et de même le cardinal Browne, plus brièvement (ibid., p. 470 s.). Des remarques analogues avaient déjà été proposées par de Proença Sigaud, l'un des principaux dirigeants du Coetus, dans ses animadversions écrites envoyées au Secrétariat au cours de la deuxième intersession (AS II1/3, p. 651 s.).

[93] Voir H/V II, p. 409-410 ; H/V III, p. 41, n. 2, et p. 61. Se référant à une intervention de Ruffini sur le De divina revelatione, Bergonzini écrira : «Le cardinal Ruffini (comme d'habitude) semble voir dans le schéma, latente - "sicut anguis in herba" - l'hérésie protestante et l'hérésie moderniste» (M. BERGONZINI, Diario del Concilio, introduction et notes de Don Antonio Leonelli, Modène, 1993, p. 129). Pour la présence, parmi les erreurs à condamner, du «modernisme» et du «néomodernisme» dans les vota des évêques, voir H/V I, p. 127-134.

[94] Fonds Carli, 15.35, lettre du 5 août 1964. On trouvait déjà les mêmes insinuations et soupçons dans une longue lettre de Berto à Carli le 13 mars (ibid., 17.1).

[95] Outre qu'elles se manifestent, comme on le verra, dans les interventions dans l'aula, ces perplexités apparaissent aussi clairement dans les correspondances privées : ainsi J. C. Murray juge-t-il le texte «pas particulièrement bon» (voir H/V III, p. 310), et Congar exprime à plusieurs reprises son insatisfaction dans son journal (voir ici, p. 214, n. 5). La longue note de G. DOSSETTI, Valutazione complessiva sulla libertà religiosa, rédigée au cours de la troisième intersession est largement argumentée en un sens critique (Fonds Dossetti, VII, 588 – la version ms. du même texte, ibid., VII, 578). Tout en affirmant «théoriquement possible et juste, historiquement nécessaire et urgente une prise de position de l'Église, sincèrement convaincue, formellement explicite, concrètement engagée en faveur de la liberté religieuse de tout individu et de toute communauté (y compris non catholique et non chrétienne) dans tout type de société politique», il jugeait la doctrine proposée dans le schéma immature et improvisée, «incurablement» marquée par « la vision empiriste et individualiste [...] d'origine anglo-saxonne» comme ses rédacteurs, incapables de répondre en profondeur aux objections des opposants.

[96] Voir H/V III, p. 510-512 et passim ; S. SCATENA, «Lo schema sulla libertà religiosa...», p. 389-397.

[97] Voir AS III/2, p. 362 (Cushing), 366 (Meyer), 494 (Buckley), 504 (Klepacz), 555 (Carlo Colombo), 653 (Clyde Young), 693 (Hannan), 720 (O'Boyle), 722 (Ocampo Berrio).

[98] Ibid., p. 359 s.

[99] Dans l'effort pour dépasser les ambiguïtés et les incertitudes apparues lors du débat, il faut noter en particulier Mgr Ancel, auxiliaire de Lyon, qui suggéra la rédaction d'un nouveau préambule qui réaffirmerait, selon ce qui avait été relevé par Ottaviani et Parente, le «droit suprême dont jouit la vérité», donc dans la ligne de «la doctrine immuable de l'Église», en rappelant toutefois l'impossibilité de se limiter à cet ordre objectif et donc le besoin de reconnaître le droit de tout homme à rechercher la vérité, «recherche qui ne peut être faite sans risque d'erreur» (ibid., p. 616). Rappelons que cette proposition trouva place dans la rédaction finale de la déclaration.

[100] La critique de l'argumentation trop philosophique et juridique de la déclaration vient en particulier de Dubois, archevêque de Besançon, qui rappela la nécessité de lui donner un fondement plus explicitement religieux, en recourant à l'autorité de la Bible et des Pères (ibid., p. 505-507 – mais voir aussi ses observations envoyées durant l'intersession, ibid., p. 884-886). Dans le texte cité (p. 150, n. 1), Dossetti réagit aussi contre une rédaction qui donne «la priorité logique aux énoncés et aux justifications ex ratione desumptae sur celles sub luce Revelationis».

[101] The Tablet, 28 novembre 1964, cité dans ICI, 15 janvier 1965, p. 22 s. Déjà au cours de la deuxième session l'intervention de l'épiscopat des États-Unis avait donné l'impulsion décisive pour que le texte sur la liberté religieuse soit inséré dans le programme des travaux, en prenant pour base le texte préparé par le Secrétariat (H/V III, p. 311 s.).

[102] Voir J. C. MURRAY, On religious Liberty... », p. 704 (une traduction française parut le 4 février 1964 dans le n° 2 de EtDoc). J. HAMER, «Histoire du texte...», p. 71-73 analyse cet article, en relevant son caractère programmatique qui trouvera son application dans la refonte de la déclaration lors de la troisième session conciliaire. Sur le père Murray, voir D. E. PELOTTE, John Courtney Murray. Theologian in conflict, New York, 1975 ; R. SEBOTT, «Religionsfreiheit und Verhàltnis von Kirche und Staat. Der Beitrag John Courtney Murrays zu einer modemen Frage», Analecta Gregoriana 206, Rome, 1977; D. GONNET, La Liberté religieuse... et «L'apport de John Courtney Murray au schéma sur là liberté religieuse», dans Commissions, p. 205-215. Pour sa collaboration avec le Secrétariat durant la deuxième session conciliaire voir aussi H/V III, p. 310-317, et S. SCATENA, «Lo schema sulla libertà religiosa...», p. 390-392. Sur le caractère central du problème de la «liberté religieuse» pour le catholicisme américain, en particulier dans ses rapports avec les protestants, voir aussi l'insistance de T. F. Stransky au printemps 1964, «La situazione ecumenica degli U.S.A.», dans DO-C (Documentation hollandaise du concile), n° 105, p. 1-11.

[103] Voir D. GONNET, La Liberté religieuse..., p. 137 («Tout porte à penser que les évêques américains ont adopté les idées de Murray dans leur grande majorité»). En effet, dans leurs interventions orales ou écrites, Shehan (Baltimore), Primeau (Manchester), Carberry (Lafayette) et O'Boyle (Washington), s'appuient sur les notes fournies par Murray, comme on le déduit de la confrontation entre les lettres de Murray et les textes épiscopaux (voir D. E. PELOTTE, John Courtney Murray..., p. 92 s., et D. GONNET, p. 136 s.). Meyer et Spellman, mais aussi Silva Henriquez, Veuillot et Méndez Arceo se servirent d'interventions préparées par lui (voir D. E. PELOTTE, p. 110, n. 47).

[104] Voir D. E. PELOTTE, p. 88 s., et H/V III, p. 477 s. L'étude, publiée dans Theological Studies 25 (1964), p. 507-575, eut une large diffusion parmi les Pères du concile grâce à sa publication dans DO-C et fut réimprimée sous le titre «Le problème de la liberté religieuse au concile», dans le volume La Liberté religieuse, exigence spirituelle et problème politique, Paris, 1965, p. 10-112. On trouve une analyse attentive de cette longue contribution dans D. GONNET, p. 126-135.

[105] D. E. PELOTTE, p. 90.

[106] D. GONNET, p. 135 et voir ici page suivante, n. 2.

[107] AS III/2, p. 496.

[108] Ibid., p. 742. Shehan, qui présenta une animadversio écrite après la clôture du débat, entendait parler au nom de presque tous les évêques des États-Unis ; au texte préparé, il ajouta ensuite une partie sur le fondement théologique et biblique de la liberté religieuse (ibid., p. 743 s.).

[109] Ibid., p. 742 (Shehan). Voir aussi p. 497 (Primeau), 537 (Alter) et 638 (Carberry). C'est dans la reconnaissance de cet aspect comme élément fondateur de la définition de la «liberté religieuse» que J. Hamer, dans une réflexion rétrospective sur le parcours tourmenté du schéma, repérera le moment décisif de l'élimination des ambiguïtés et malentendus nés des formulations précédentes (voir J. HAMER, «Un témoignage sur la rédaction de la déclaration conciliaire Dignitatis humanae, dans Paolo VI e il rapporto Chiesa-mondo..., p. 179-182.

[110] AS III/2, p. 718-720 (O'Boyle).

[111] En août 1962 encore, Murray était convaincu que l'épiscopat américain était aligné sur des positions proches de celles de la Curie, et qu'il considérait la situation constitutionnelle des États-Unis comme une réalisation de «l'hypothèse» (voir D. E. PELOTTE, John Courtney Murray..., p. 80 ; D. GONNET, La Liberté religieuse..., p. 107 s.). Murray avait en J. C. Fenton un adversaire acharné, «le principal allié du cardinal Ottaviani aux Etats-Unis» (H/V II, p. 116-118) et l'évêque d'Allentown J. McShea se situait sur des positions analogues (voir sa dénonciation indigne à Cicognani d'un article du père Stransky, AS VI/3, p. 282). On trouve une attaque vigoureuse du «progressisme catholique», avec mention explicite de Murray et de la position proposée par lui sur le problème de la liberté religieuse, dans un article de H. M. KELLNER, «The role of progressivism in the catastrophic decline of catholicism», de juillet 1964, distribué à tous les évêques de langue anglaise (Fonds De Smedt 16.3/2,3,4).

[112] AS III/2, p. 366 s.

[113] AS II/5, p. 491 s. (pour le rapport De Smedt) ; ibid., p. 437 s. et III/2, p. 322 s. (pour les notes du texte) ; Fonds De Smedt 17.4/1 (pour la ratio schematis). Voir aussi D. GONNET, p. 109 s.

[114] L'argumentation est contestée, avec une analyse précise des textes pontificaux, dans l'animadversio envoyée au lendemain de la deuxième session, par Granados Garcia, auxiliaire de Tolède : Quanta Cura condamne le naturalisme politique et social, «entre autres, parce qu'il favorise le principe de la liberté religieuse sans frein». Il s'agit en effet d'une «opinion erronée» qui préexiste au naturalisme ; «La soi-disant "liberté de conscience" n'est pas condamnée par Pie IX parce qu'elle tend au naturalisme ; au contraire, le naturalisme est condamné, entre autres motifs, parce qu'il favorise la soi-disant liberté de conscience – fausse en soi et "deliramentum"» (AS III/3, p. 665 s.).

[115] WENGER, III, p. 317.

[116] AS III/2, p. 361 s. Ces phrases reprennent presque à la lettre certaines considérations finales de l'article de Murray du 30 novembre 1963, «On religious liberty».

[117] AS III/2, p. 362.

[118] Ibid., p. 369. Il s'était exprimé tout autrement le 19 novembre 1963, quand il avait affirmé que le texte était à bon droit fondé sur des arguments théologiques, que devaient être incorporées des considérations sur la liberté absolue de l'acte de foi, sur la dignité de la personne humaine et sur l'inviolabilité de la conscience, ainsi que sur l'incompétence totale d'un gouvernement civil à exprimer un jugement sur l'Évangile du Christ et sur son interprétation (voir AS II/5, p. 536 ; voir aussi D. GONNET, p. 121 s.).

[119] AS .I1112, respectivement p. 471, 472, 490.

[120] A. WENGER, III, p. 318.

[121] Journal, 23 septembre.

[122] Ibid.

[123] Journal Siri, 12 octobre, dans B. LAI, Il Papa non eletto..., p. 389 s. Ce jugement est repris et argumenté en termes encore plus durs dans une conférence de 1969 : «L'après-concile : du point de vue historique, du point de vue de la Providence», dans G. SIRI, La giovinezza della Chiesa. Testimonianze, documenti e studi sul Concilio Vaticano II, Pise, 1983, p. 181 s.

[124] ASIII/2,p.714s.

[125] Voir par exemple, ibid., p. 515 s., l'intervention de l'archevêque de Durban, Hurley, qui vise à réfuter l'argument classique en faveur de l'union de l'Église et de l'État.

[126] Voir dans le même sens l'intervention du cardinal de Santiago Silva Henriquez (d'ailleurs débiteur lui aussi de l'apport de Murray, voir ici p. 152, n. 3), qui parla au nom d'un groupe important d'évêques latino-américains (ibid., p. 369 s.).

[127] Ibid., p. 372 s. (Silva Henriquez). Longuement argumentée dans J. LECLERCQ, La Liberté d'opinion..., p. 246 s., cette considération est envisagée dès les premières discussions au sein du Secrétariat ; voir, par exemple, Fonds De Smedt 13.8/1, procès-verbal de la séance du 27 août 1961, p. 5 : «Dire que l'erreur n'a pas de droits est une manière abstraite de parler. Seules les personnes sont porteuses de "droits"» (Osterreicher). Mais les opposants continuent de s'exprimer ainsi dans l'aula, et de même le cardinal Cicognani quand il présente le schéma sur la liberté religieuse à la Commission de coordination (séance des 26-27 avril 1964) : «Cette liberté consiste à pouvoir professer, private et publice, sa propre foi sans en être empêché par aucune force coercitive, s'il s'agit d'une conscience sincère, fût-elle erronée. On ne veut pas affirmer par là qu'il faille reconnaître à l'erreur les mêmes droits qu'à la liberté [...], car cela pourrait laisser penser que l'erreur rencontre une certaine approbation» (AS V/2, p. 287).

[128] AS III/2, p. 666-668.

[129] AS III/2, p. 667.

[130] Ibid., p. 538 (Alter), 668 (de Provenchères), 710 (Jelmini).

[131] Ibid., p. 653 (Clyde Young).

[132] Ibid., p. 572.

[133] Ibid., p. 745 s. (Spülbeck). Voir aussi l'intervention de l'évêque de Lodz, Klepacz (ibid., p. 503-505). Pour l'intervention de König, ibid., p. 468-470.

[134] Ibid., p. 570.

[135] Ibid., p. 571.

[136] Ainsi, par exemple, tout en se déclarant pleinement favorable à la proclamation d'une entière liberté religieuse («Quoi que nous en pensions, nous autres prêtres, le monde ne croit pas vraiment que l'Eglise catholique soit un défenseur de la liberté»), Joseph Buckley, général des Maristes, affirma que la déclaration avait besoin de beaucoup de modifications et critiqua en particulier l'usage du concept de vocatio pour fonder le droit à la liberté (ibid., p. 493-495).

[137] Journal, 24 septembre. Le père de Broglie, en plus de fournir une série de notes critiques sur le De libertate à l'épiscopat nord-africain (voir S. SCATENA, p. 408, n. 271), avait, durant les mois précédents, publié un petit livre, Le Droit naturel à la liberté religieuse, Paris, 1964. Il y critiquait le choix des rédacteurs du schéma de fonder ce droit à la liberté religieuse sur l'intangibilité de la conscience, même erronée, et proposait de recourir au concept de «liberté d'action», qui constitue pour l'homme un droit naturel primaire ; il y repoussait aussi l'affirmation de la totale incompétence de l'État en matière religieuse, en se réclamant de l'histoire de l'Église qui contredit largement cette assertion. Une longue recension critique du père Liégé parut dans le numéro d'octobre de Parole et mission (voir Fonds De Smedt 18.4/1).

[138] Voir M. BERGONZINI, Diario..., p. 124.

[139] Ibid., p. 125.

[140] AS III/2, p. 533.

[141] Journal, 25 septembre.

[142] Ainsi Berto définit-il ceux qui s'opposent aux «novateurs» dans un post-scriptum du 13 août 1964 à sa lettre à Carli du 5 août (Fonds Carli, 15.35).

[143] AS III/2, p. 533.

[144] Ibid., p. 534.

[145] Ibid.

[146] Ibid., p. 534 s.

[147] Voir J. RAMER, «Histoire du texte...», p. 80 (et AS III/2, p. 558). C'était le vendredi 25 septembre. En réalité, aux termes du règlement, des interventions supplémentaires étaient admises si elles étaient faites au nom d'au moins soixante-dix Pères. Ainsi le lundi suivant, 28 septembre, parlèrent encore sur la liberté religieuse Heenan, Ndungu, évêque de Masaka (Ouganda), Wright, évêque de Pittsburgh, et Zoa, évêque de Yaoundé.

[148] Le journal du Concile..., p. 488. Les notes de J. Dupont manifestent la même conviction, évidemment répandue dans l'aula : «L'intervention de Mgr Carlo Colombo, ce matin, a impressionné. On savait qu'il avait été reçu hier par le Pape, et il a cité dans son discours le card. Montini. On est en droit de supposer que son point de vue correspond à celui du Pape» (Journal Dupont, ajout au 25 septembre).

[149] Journal Siri, 27 septembre, p. 385.

[150] Ibid., p. 384: «L'Episcopat italien n'est pas uni comme l'an passé : quelques-uns sont entrés dans les vues des Transalpins et n'en font pas mystère.

[151] Comme on le voit dans la lettre d'accompagnement (Fonds Paul VI, B 1/19). Voir aussi J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration conciliaire... », p. 90.

[152] Ibid., p. 90.

[153] Ibid.

[154] Colombo dans sa lettre à Paul VI évoquée ci-dessus, n. 4.

[155] J. HAMER, «Histoire du texte...», p. 79.

[156] AS III/2, p. 554 s.

[157] AS III/2, p. 556.

[158] Ibid., p. 557.

[159] ST, 25 septembre.

[160] Le journal du Concile, p. 473.

[161] ST, 25 septembre.

[162] Le journal du Concile, p. 493.

[163] Détails dans «Petite histoire d'un grand texte racontée par Mgr McGrath (Panama)», ICI 232, 15 janvier 1965, p. 25 s. (mais voir les précisions du même, ibid., 234, 15 février 1965, p. 2) ; J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration...», p. 94 s. ; D. GONNET, La Liberté religieuse..., p. 145 s.

[164] Voir D. E. PELOTTE, John Courtney Murray..., p. 94 ; J. GROOTAERS, « Paul VI et la déclaration »..., p. 94.

[165] J. HAMER, «Histoire du texte...», p. 71 s. ; J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration...», p. 91 s. ; D. GONNET, La Liberté religieuse..., p. 122 s.

[166] J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration...», p. 93.

[167] Voir J. C. MURRAY, Le Problème de la vie religieuse..., p. 18-25 et 95-106 (mais en particulier 100-101) ; D. E. PELOTTE, John Courtney Murray..., p. 91 ; J. GROOTAERS, « Paul VI et la déclaration », p. 93.

[168] Voir «Petite histoire...», p. 26 ; J. GROOTAERS, «Paul VI et la déclaration...», p. 93.

[169] Journal Congar, 14 octobre ; «Petite histoire...», p. 26.