ANNEXE au chapitre VI. Les deux demandes faites par le Ciel : celle de la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie, et celle, bien différente, de la consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie.
La consécration du genre humain au Cœur Immaculé de Marie, faite par Pie XII le 31 octobre 1942, est l'aboutissement des demandes non de sœur Lucie, mais d'une autre portugaise, Alexandra Da Costa, connue sous le nom d' Alexandrina au Portugal, qui naquit à Balasar, village situé entre les villes de Porto et Braga, le 30 mars 1904, jour du Vendredi-Saint. A 14 ans, pour se défendre des intentions perverses de trois hommes qui s'étaient introduits dans la maison où elle se trouvait en compagnie de deux jeunes filles, elle se jeta par une fenêtre de quatre mètres de hauteur, et à la suite de cette chute, une myélite dans la colonne vertébrale l'immobilisa dans un douloureux martyre jusqu'à sa mort le 13 octobre 1955. A cette victime, Notre-Seigneur ordonna d'obtenir du Pape la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie ; la première demande est du 31 juillet 1935, et Alexandrina, qui était déjà victime volontaire de l'Eucharistie, s'offrit aussi comme “victime pour la consécration du monde à notre petite mère du Ciel”. Notre-Seigneur ayant insisté pendant plus d'un an auprès d'Alexandrina pour obtenir cette consécration, le Père Mariano Pinho, s.j., directeur spirituel d'Alexandrina, transmit, le 11 septembre 1936, cette demande de consécration du monde au Saint-Père Pie XI, par l'intermédiaire de son Secrétaire d'État, le Cardinal Pacelli. Le Saint-Siège ordonna alors à la Nonciature Apostolique de Lisbonne de procéder à une enquête sur le sujet. Le 11 juillet 1937, le Provincial des Jésuites écrivait au Nonce, en lui transmettant les conclusions de l'enquête : « Sur la base des informations collectées, on ne peut mettre en doute la sincérité et la vertu de la jeune femme. Mais comme elle ne présente aucun signe qui puisse prouver extérieurement l'origine divine de ces locutions qu'elle-même affirme entendre, il reste toujours la possibilité qu'il y ait quelque illusion. » Ce fut le Père Pinho qui fut chargé de prêcher la retraite spirituelle aux évêques portugais à Fatima en juin 1938 ; à la fin de cette retraite, ces derniers adressèrent la lettre collective suivante au Pape Pie XI : « Très Saint-Père, le Cardinal Patriarche de Lisbonne et tous les Archevêques et Évêques du Portugal, réunis au Sanctuaire de Fatima aux pieds de la Bienheureuse Vierge Marie, pour renouveler, en esprit d'action de grâces, la consécration, jadis effectuée, à son Cœur Immaculé, consécration qui a sauvé le Portugal, surtout au cours des deux dernières années, du péril du communisme, exultent de joie pour un bienfait si grand et si miraculeusement accordé par la Mère de Dieu. Humblement prosternés aux pieds de Sa Sainteté, ils lui demandent instamment que, dès que Sa Sainteté le jugera opportun, le monde entier soit aussi consacré à ce Cœur très pur, pour qu'enfin il se voit délivré une fois pour toutes de si grands périls qui le menacent de toutes parts, et que règne la paix du Christ dans le Règne du Christ, par la médiation de la Mère de Dieu. » Quelques mois après cette lettre, Notre-Seigneur envoya à Alexandrina le signe surnaturel externe qui devait authentifier, aux yeux du Saint-Siège, que cette demande venait bien de Dieu : il s'agissait de la participation, à la fois physique et spirituelle, de la jeune femme à la sainte Passion de Notre-Seigneur. Ce phénomène eut lieu chaque vendredi, à partir du 3 octobre 1938, et devint chaque fois plus douloureux pour la jeune femme : elle, qui d'ordinaire ne pouvait bouger, se levait alors en extase pour revivre la Passion de Jésus. Ce phénomène se termina seulement le 27 mars 1942, quand, sous le pontificat de Pie XII, tout était déjà prêt pour la consécration tant désirée. Le 22 mai 1942, Jésus dit à Alexandrina : « Le cœur du Pape, le cœur d'or, est résolu à consacrer le monde au Cœur de Marie ». De fait, le 31 octobre 1942, à l'occasion des fêtes du 25 ème anniversaire des apparitions de Fatima, Pie XII fit, par la radio, et en langue portugaise, la Consécration du monde au Cœur Immaculée de Marie, Consécration qu'il renouvela le 8 décembre 1942, à Rome, au cours d'une cérémonie impétratoire. Comme dans ces mêmes années, Sœur Lucie présentait des instances au Vatican pour obtenir la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, cette consécration au monde fut attribuée aux demandes de la voyante à Fatima. Cependant, les deux demandes sont distinctes et leur origine aussi :
– On doit la Consécration du monde aux demandes et aux souffrances d'Alexandrina da Costa, de Balasar,
– La demande de Consécration de la Russie fait partie du message de Fatima et provient de Sœur Lucie.
Sur la consécration du 31 octobre 1942, Sœur Lucie écrivait, dans une lettre du 28 février 1943 à l'évêque de Gurza : « Le Bon Dieu m'a déjà montré son contentement de l'ACTE bien qu'INCOMPLET selon son désir, réalisé par le Saint-Père et par plusieurs évêques. Il promet, en retour, de mettre fin bientôt à la guerre. La conversion de la Russie n'est pas pour maintenant. » Le 4 mai 1943, Sœur Lucie écrivait de même au Père Gonçalves : « Notre-Seigneur promet la fin de la guerre pour bientôt, eu égard à l'ACTE qu'a daigné faire Sa Sainteté. Mais comme il fut INCOMPLET, la conversion de la Russie sera pour plus tard. » (Cf. « Fatima, joie intime, événement mondial » du Frère François de Marie des Anges, 1993, chap. XI, p. 248).
On peut raisonnablement penser que c'est à cause du refus obstiné du pape Pie XI de faire, entre 1930 et 1937, la Consécration de la Russie au Cœur Immaculé de Marie, que Notre-Seigneur demanda à Alexandrina de s'offrir en victime pour obtenir la consécration du monde à ce même Cœur Immaculé. Cette consécration semble apparaître, dans le plan divin, comme un remède de substitution destiné non à détourner les châtiments, les souffrances et les persécutions annoncés à Sœur Lucie en 1929, mais à les ALLÉGER ou à les ABRÉGER. Dans cette perspective, l'expression “acte incomplet” de Sœur Lucie prend tout son sens.
C'est sans doute pourquoi, si la consécration du monde par le Pape Pie XII le 31 octobre 1942 permit certes la fin de la guerre, ce ne fut pas pour autant la vraie paix, puisque la Russie en sortait mieux armée pour « répandre ses erreurs dans le monde »…
Fac-similé de la lettre manuscrite authentique de sœur Lucie au Père Umberto Pasquale, en date du 13 avril 1980. (cf. son livret « La Messagère de Jésus pour la Consécration du Monde au Cœur Immaculé de Marie »). Nous présentons dans les pages qui précèdent (note 144 particulièrement) la traduction de cette lettre et les circonstances de sa rédaction.
Cf. la brochure du Père Humberto Maria Pasquale : « Messagère de Jésus (La) pour la consécration du monde au Cœur Immaculé de Marie » , publiée avec imprimatur en 1980. Traduction française, Téqui, 60 pages, 25 F à D.F.T. (+ port).