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D. Honorius Ier


    Certains écrivains prétendent que le pape Honorius 1er (625 - 638) aurait été anathématisé par le VIe concile œcuménique (680 - 681) pour avoir suivi les hérétiques monothélites.

    Que ce pape ait été monothélite est une désinformation forgée de toutes pièces par les monothélites eux-mêmes, dans le dessein de se prévaloir de l'autorité d'un pape pour donner plus de crédit à leur hérésie. Les monothélites furent convaincus de calomnie par saint Maxime le confesseur (contemporain d'Honorius), par l'ancien secrétaire du pape défunt et par le pape Jean IV (deuxième successeur d'Honorius). Quelques décennies après, des Grecs falsifièrent les actes du VIe concile œcuménique, en ajoutant subrepticement Honorius sur la liste des hérétiques monothélites anathématisés. Mais deux siècles plus tard, le VIIIe concile œcuménique, tenu à Constantinople (!) condamna ceux qui "répandaient des bruits injurieux contre le Saint-Siège" et ordonna: "Que personne ne rédige ni ne compose des écrits et des discours contre le très saint pape de l'ancienne Rome, sous prétexte de PRÉTENDUES fautes qu'il aurait commises". De plus, tous les clercs d'Orient et d'Occident signèrent une profession de foi, d'après laquelle jamais aucun pape n'avait cessé de servir la sainte doctrine.

    L'affaire d'Honorius semblait classée; or voilà que six siècles plus tard, elle rebondit! Les centuriateurs de Magdebourg (historiens protestants) exhumèrent la vieille fable d'Honorius. Ils furent bientôt secondés par les gallicans, évidemment à l'affût de tout ce qui permettrait de battre en brèche l'infaillibilité de Rome, avec laquelle ils étaient en guerre par servilité à l'égard du roi de France. 

    Bien entendu, les apologistes catholiques ne restèrent pas sans voix, bien au contraire! Le brillant théologien et historien Pighius défendit les papes contre leurs calomniateurs dans son Hierarchiae ecc/esiasticae assertio (Cologne 1538). Lors d'un colloque entre savants allemands à Ratisbonne en 1541, Pighius fut violemment attaqué par l'un de ses confrères, qui brandit triomphalement le cas d'Honorius et intima à Pighius l'ordre de se rétracter, faute de quoi il ne pourrait pas faire son salut! Pighius ne se laissa pas démonter: il fixa un délai de trois jours. Pendant ce délai, chacun des deux adversaires devait rassembler des documents pour prouver sa thèse. Passé le délai prescrit, Pighius présenta à ses collègues un volumineux dossier bourré de documents innocentant Honorius. L'adversaire de Pighius, par contre, arriva les mains vides[1]!

    Puis le savant cardinal Baronius (dont Léon XIII admirait l"'incroyable érudition" dans son bref Saepenumero considerantes), sans oublier le docteur de l'Église saint Robert Bellarmin (dont le traité De romano pontifiee figure dans la bibliographie scientifique des Pères du Vatican susmentionnée) démontrèrent l'imposture des pseudo-scientifiques protestants.

    La controverse se transforma en véritable bataille journalistique au moment de la convocation du concile du Vatican, qui devait définir l'infaillibilité. L'Église trancha en faveur de l'innocence, en recommandant la lecture de certains historiens favorables à Honorius, et en mettant à l'Index certains livres écrits par des pseudo-historiens opposés à Honorius.

    Affaire classée? Pas du tout, hélas! Des écrivains actuels, désireux de défendre coûte que coûte la légitimité des pontificats de Roncalli, Montini, Luciani et Wojtyla, se servent constamment de la cause d'Honorius pour affirmer qu'un pape peut tomber dans l'hérésie, mais rester pape quand même. Ils véhiculent une calomnie atroce, forgée par les hérétiques anciens, puis relayée par les hérétiques modernes, contre celui que saint Maxime appelait "le divin Honorius"!

    Le cas d'Honorius a fait couler plus d'encre que tous les pontificats des autres papes réunis. Aussi lui avons-nous consacré une étude scientifique particulièrement fouillée, basée sur:

1. les sources: textes des conciles, des papes, des contemporains;

2. la littérature scientifique: trois thèses universitaires spécialisées sur Honorius, plus de nombreux ouvrages historiques sur cette cause-là (voir notre condensé en annexe A).

    Nota bene: en lisant les documents accumulés en annexe A, le lecteur aura seulement un résumé de la défense. Comme disait déjà Anastase le bibliothécaire: "Si nous voulons accumuler tout ce que nous pouvons recueillir pour la défense d'Honorius, le papier nous manquera plutôt que le discours"! Anastase le bibliothécaire (800 - 879) vécut à Rome, où il travaillait pour les papes. Il était leur archiviste et leur traducteur. Célèbre pour sa connaissance du grec, il traduisit les actes des conciles. Il compara les actes originaux des conciles conservés à Rome avec les copies faites par les Grecs à Constantinople et découvrit que les Grecs étaient des faussaires. Notre conclusion sera celle d'Anastase le bibliothécaire: Honorius a été "accusé calomnieusement" par des faussaires!

[1] Albert Pighius: Controversiarnm praecipuarum in comitiis Ratisponsensibus tractatarnm et quibus nunc potissimum exagitatur Christi fides et religio. diligens et /ucu/enta explicatio, Cologne 1542, folio 2 recto. Le dossier de Pighius est, en effet, très fouillé; faute de place, nous n'avons pas repris, en annexe A, toutes les preuves innocentant Honorius.

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