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E. Est-il permis de contester ce conciliabule ?


A-t-on le droit de contester le conciliabule de Vatican II?

    Oui, mais il faut que l’argumentation soit percutante! L’argument du « concile pastoral » ne vaut rien, car ce conciliabule a été également doctrinal (c’est même Wojtyla en personne qui l’assure, et, pour une fois, il a raison: constitution dogmatique Dei Verbum; constitution dogmatique Lumen gentium!). Et dire que Vatican II n’aurait pas engagé solennellement son infaillibilité ne rime à rien non plus: par définition, tout concile fait partie du ma­gistère solennel! Et même si l’on adoptait le point de vue (erroné) de Montini, classant Vatican II dans la catégorie du magistère ordinaire universel, l’infaillibilité serait tout de même engagée (Vatican I: Dei Filius, ch. 3).

    Affirmer que ce conciliabule est contraire à la Tradition est conforme à la vérité. Contester Vatican II en faisant valoir la contradiction flagrante avec la saine doctrine est un bon réflexe du catholique. Toutefois, ce réflexe instinctif ne suffit pas, à lui seul, à résoudre une question mystérieuse: comment est-il possible qu’un concile œcuménique, en principe assisté par le Saint-Esprit, se soit trompé?

    Le premier concile, celui de Jérusalem, choisit une formule devenue célèbre: « Il a semblé bon au Saint-Esprit et à nous » (Actes des apôtres XV, 28). Le pape Pie XII enseigne: « Le Christ, bien qu’invisible, préside aux conciles de l’Église et les guide par sa lumière » (encyclique Mystici corporis, 29 juin 1943, s’appuyant sur St. Cyrille d’Alexandrie: Ep. 55 de Synod.). Montini, agissant en tant que docteur public de l’Église universelle, a approuvé Vatican II « dans l’Esprit-Saint ». Montini et Wojtyla mettent Vatican II au même rang que les vingt conciles œcuméniques (de Nicée à Vatican I).

    Or quiconque conteste un concile œcuménique - tels les ariens contre Nicée ou les protestants contre Trente - est hérétique. Prétendre que l’on peut penser autrement qu’un concile œcuménique est une hérésie. Voici la 29e proposition de Martin Luther: « Il nous a été donné de pouvoir infirmer l’autorité des conciles, de contredire librement à leurs actes, de nous faire juge des actes qu’ils ont portés, et d’affirmer avec assurance tout ce qui nous paraît vrai; que cela soit approuvé ou réprouvé par n’importe quel concile ». Cette pro­position fut réprouvée par Léon X (bulle Exsurge Domine, 16 mai 1520). En niant l’infaillibilité d’un concile général, Luther avançait une doctrine inconnue jusque-là dans l’Église. Luther fit des « disciples » au XXe siècle: les modernistes (clercs catholiques contaminés par les erreurs modernes) se mirent à leur tour à contredire les conciles, ce qui poussa saint Pie X à reprendre la condamnation de la 29e proposition de Luther dans son encyclique Pascendi du 8 septembre 1907. Par son motu proprio Praestantia du 18 novembre 1907, il ajouta, pour ceux qui propageraient des doc­trines condamnées dans Pascendi, la peine d’excommunication ipso facto.

    Les catholiques ne sauraient invoquer ni l’Écriture ni la Tradition contre un concile œcuménique (en l’occurrence celui de Vatican II), car les protestants ont brandi la Bible contre Trente et les vieux-catholiques ont fait valoir la Tradition contre Vatican I. Et l’on ne saurait pas non plus se référer à Mgr Lefebvre, car (faut-il rappeler ce truisme) l’autorité doctrinale suprême dans l’Église, ce n’est pas un évêque émérite, mais le pontife romain. Or Montini a garanti, en tant que docteur public, la conformité de ce conciliabule avec la Tradition et Wojtyla a certifié, lui aussi en tant que docteur public, que Vatican II était conforme à la Tradition:

    « Rien de ce qui a été décrété dans ce concile, comme dans les réformes que nous avons décidées pour le mettre en œuvre, n’est opposé à ce que la Tradition bimillénaire de l’Église comporte de fondamental et d’immuable. De cela, nous sommes garant, en vertu, non pas de nos qualités personnelles, mais de la charge que le Seigneur nous a conférée comme successeur légitime de Pierre et de l’assistance spéciale qu’il nous a promise comme à Pierre: «J’ai prié pour toi afin que ta foi ne défaille pas» (Luc XXII, 32). Avec nous en est garant l’épiscopat universel » (Montini: Lettre à Mgr Lefebvre, 11 octobre 1976).

    « L’amplitude et la profondeur des enseignements du concile de Vatican II requièrent un engagement renouvelé pour approfondissement qui permettra de mettre en lumière la continuité du concile avec la Tradition, spécialement sur des points de doctrine qui, peut-être à cause même de leur nouveauté, n’ont pas encore été bien compris dans certains secteurs de l’Église » (Wojtyla: motu proprio Ecclesia Dei, 2 juillet 1988).

    Les catholiques devraient aller jusqu’au bout des exi­gences de la Vérité et respecter toute la Tradition, y compris la sen­tence de Léon X condamnant la 29e proposition de Luther. S’il est interdit de contester un concile œcuménique légitime, il ne reste que deux solutions canoniquement correctes: soit accepter religieuse­ment Vatican II, don du Saint-Esprit à l’Église; soit vérifier si ce concile était réellement œcuménique ou non. Mais on ne saurait mé­nager la chèvre et le chou, accepter que ce conciliabule figure offi­ciellement parmi les conciles œcuméniques et en même temps en faire fi (attitude luthérienne).

    CHACUN des conciles œcuméniques EST inattaqua­ble. TOUT concile œcuménique est assisté par le Saint-Esprit. Tel est l’enseignement EX CATHEDRA de Pie XII dans Mystici cor­poris (car le pape a écrit cette encyclique « en tant que docteur de l’Église universelle » pour enseigner à « tout le peuple de Dieu » les « mystères révélés par Dieu »)!

    Ajoutons encore LE spécialiste par excellence de l’infaillibilité: le pape Pie IX: « S’ils croyaient fermement avec les autres catholiques que le concile œcuménique est gouverné par le Saint-Esprit, que c’est uniquement par le souffle de cet Esprit divin qu’il définit et propose ce qui doit être cru, il ne leur serait jamais venu en pensée que des choses, ou non révélées, ou nuisibles à l’Église, pourraient y être définies et imposées à la foi, et ils ne s’imagineraient pas que des manœuvres humaines pourront arrêter la puissance du Saint-Esprit et empêcher la définition de choses révé­lées et utiles à l’Église » (bref Dolendum profecto, 12 mars 1870).

    Que l’on mesure bien ceci: si Vatican II fait partie des conciles œcuméniques, il EST inspiré par le Paraclet et donc théo­logiquement et canoniquement inattaquable! Par contre, s’il n’est PAS œcuménique (parce qu’il lui manquait le garde-fou: le pape), il n’est pas assuré de l’assistance du Saint-Esprit, même si de nom­breux évêques y étaient présents (comme au conciliabule de Rimini, par exemple).

    Que ceux qui s’obstineraient à vouloir tenir Montini pour pape nous démontrent de façon plausible comment le Christ, contrairement à ses quatre promesses (Luc XX, 32; Mat­thieu XVI, 18 et XXVIII, 19 - 20; Jean XIV, 15 - 17), pourrait abandonner son Vicaire en plein concile œcuménique???

    De même, qu’ils expliquent de façon cohérente pourquoi la formule « II a paru bon au Saint-Esprit et à nous » (concile des apôtres à Jérusalem) aurait fonctionné, tandis que la formule « Nous les approuvons dans l’Esprit Saint » (Vatican II) n’aurait pas fonctionné???

    En somme, prétendre que l’on peut refuser un concile œcuménique approuvé par un pape (Montini) revient à donner rai­son à Luther contre Léon X et saint Pie X.
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